Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 614

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (555700) datée du
12 décembre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Katherine Parker
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 25 avril 2023
Personne présente à l’audience : L’appelant ne s’est pas présenté à l’audience
Date de la décision : Le 19 mai 2023
Numéro de dossier : GE-23-278

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi sans justification. Cependant, je conclus que l’appelant a bel et bien perdu son emploi en raison d’une inconduite. Par conséquent, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.

Aperçu

[3] L’appelant a cessé de travailler pour son employeur après avoir été incarcéré pour conduite en état d’ébriété et parce qu’il ne s’est pas présenté au travail à compter du 1er mai 2022. La Commission a décidé que l’appelant avait quitté son emploi sans justification. Par conséquent, elle l’a exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi. L’appelant n’est pas d’accord avec l’opinion de la Commission sur la façon dont son emploi a pris fin. Il affirme que l’employeur l’a injustement congédié et qu’il lui a fait savoir qu’il était incarcéré.

[4] L’appelant a été incarcéré jusqu’au 17 septembre 2022. Il a communiqué avec son employeur le 19 septembre 2022 et lui a demandé de reprendre son emploi. L’employeur l’a informé qu’il avait dû le congédier parce qu’il ne savait pas où il se trouvait. L’employeur a dit que l’appelant avait abandonné son emploi.

[5] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons du départ de l’appelant. Elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il avait choisi de quitter son emploi) sans justification. Par conséquent, elle ne pouvait pas lui verser de prestations.

[6] Je dois décider si les gestes de l’appelant l’excluent du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[7] La Commission affirme que l’appelant aurait pu demander un congé autorisé à son employeur ou communiquer avec celui-ci pour lui donner une date de retour au travail. Il ne l’a pas fait.

[8] L’appelant n’est pas d’accord et affirme qu’il avait demandé à son avocat et à son fils de dire à l’employeur qu’il était incarcéré et qu’il ne serait pas disponible pour travailler avant sa libération.

Question que je dois examiner en premier

[9] L’appelant ne s’est pas présenté à son audience et n’a pas téléphoné. Il a envoyé un message après l’audience pour dire qu’il avait un nouvel emploi et qu’il ne pouvait pas prendre congé. Il a dit qu’il n’avait pas accès à un téléphone cellulaire pendant les heures de travailNote de bas de page 1.

[10] Je lui ai envoyé une lettre pour lui demander s’il voulait déplacer l’audience après les heures de travail et je n’ai reçu aucune réponseNote de bas de page 2.

[11] J’ai ensuite envoyé une deuxième lettre disant que je rendrais une décision à moins qu’il me donne des instructions pour reporter l’audience. Je lui ai demandé de m’envoyer tout document ou renseignement qu’il pourrait vouloir ajouter à son dossier au plus tard le 12 mai 2022. Il n’a pas réponduNote de bas de page 3.

[12] J’ai décidé d’aller de l’avant et de rendre cette décision en me fondant sur les documents qui se trouvent au dossier d’appel. Une audience peut avoir lieu en l’absence de la partie appelante si celle-ci a été avisée de la tenue de l’audienceNote de bas de page 4. L’appelant a eu plusieurs occasions de participer à l’audience ou de la reporter; je vais donc aller de l’avant sans lui.

Question en litige

[13] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations?

[14] Pour trancher cette question, je vais d’abord décider si l’appelant a quitté volontairement son emploi ou s’il a été congédié. Si je décide qu’il a quitté volontairement son emploi, je vais vérifier s’il était fondé à le faire. Cependant, si je décide qu’il a été congédié, je vais examiner si la raison du congédiement est une inconduite selon la loi.

Analyse

[15] Il y a dans la Loi sur l’assurance-emploi une disposition qui énonce deux raisons pour lesquelles une personne peut être exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi : (1) quitter volontairement un emploi sans justification et (2) perdre un emploi en raison d’une inconduite.

[16] Il est parfois difficile de dire si une personne a démissionné ou si elle a quitté volontairement son emploi. La loi dit que, dans ces situations, je ne suis pas liée par la façon dont la Commission a tranché la question.

[17] L’exclusion peut être fondée sur l’un ou l’autre des deux motifs, pourvu qu’elle soit étayée par la preuveNote de bas de page 5. Le départ volontaire est le choix de la personne employée; il peut être fondé ou non. La perte d’un emploi en raison d’une inconduite est causée par les gestes ou la conduite de la personne employée. La partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations dans les deux cas.

[18] Bien que la Commission ait décidé que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification, je suis en mesure d’examiner la preuve et de décider s’il s’agit effectivement d’une affaire d’inconduite.

[19] Même si la question de l’exclusion de l’appelant est la même, celles de savoir ce que chaque personne doit prouver sont différentes, selon qu’il s’agit d’un départ volontaire sans justification ou d’une inconduite. Je vais donc d’abord décider du type d’affaire dont je suis saisie.

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi ou a-t-il été congédié?

[20] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 6. Si l’appelant avait le choix de rester ou de quitter son emploi, il l’a quitté volontairementNote de bas de page 7. L’appelant et la Commission ne s’entendent pas sur la question de savoir si l’appelant avait le choix.

[21] L’appelant affirme avoir perdu son emploi parce qu’il a été arrêté. Il dit qu’il n’avait pas le choix de rester ou de quitter son emploi à ce moment-là parce qu’il était incarcéré. Il n’avait pas d’autre choixNote de bas de page 8.

[22] La Commission affirme que l’appelant a quitté volontairement son emploi, mais qu’il a été arrêté et condamné pour un crime. Elle a dit que l’appelant n’avait ni demandé un congé autorisé ni envisagé d’autres options avec l’employeur. Elle a dit que même si l’appelant avait fait cela, il n’aurait pas été raisonnable pour un employeur de conserver son emploi alors qu’il était incarcéré.

[23] Je suis d’avis que l’appelant n’avait pas le choix de rester ou de quitter son emploi. Il était incarcéré et ne pouvait ni se présenter au travail ni parler à son employeur. Je conclus qu’il a été congédié pour les raisons suivantes :

  • L’appelant a été arrêté le 1er mai 2022 pour conduite avec facultés affaiblies.
  • Il a été condamné à une peine de six mois et demi de prison et en a purgé quatre.
  • Il a communiqué avec son employeur après sa libération pour récupérer son emploi, mais l’employeur avait mis fin au lien d’emploi à ce moment-là.

L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[24] La loi prévoit qu’une personne sera exclue du bénéfice des prestations pour inconduite.

[25] Pour être considérée comme une inconduite selon la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 9. L’inconduite comprend également une conduite si insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas de page 10. L’appelant n’a pas à avoir eu une intention coupable pour que son comportement soit considéré comme une inconduite selon la loiNote de bas de page 11.

[26] Il y a inconduite si l’appelant savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de travailler pour son employeur et que le congédiement était une réelle possibilitéNote de bas de page 12.

[27] La Commission affirme que l’appelant a été arrêté, accusé et condamné à une peine d’emprisonnement du 1er mai 2022 au 17 septembre 2022 pour conduite avec facultés affaiblies. En raison de son incarcération, il ne pouvait pas remplir les conditions de base, mais essentielles d’un lien entre employé et employeur, à savoir se présenter au travailNote de bas de page 13. La perte de son emploi était attribuable à ses gestes délibérés.

[28] L’appelant indique avoir tenté de retourner chez son employeur après sa libération de prison, mais que son poste était comblé.

[29] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite. Personne ne conteste le fait que l’appelant a été arrêté, accusé et condamné à une peine d’emprisonnement du 1er mai 2022 au 17 septembre 2022 pour conduite avec facultés affaiblies. Par conséquent, il n’a pas pu se présenter au travail, ce qui a entraîné son congédiement.

[30] Lorsqu’il y a preuve d’acte criminel, il n’est pas nécessaire qu’il y ait intention coupable pour qu’un comportement constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Il suffit que l’acte répréhensible ou l’omission reprochée soit « volontaire », c’est-à-dire « conscient, voulu ou intentionnel ». Dans la présente affaire, l’acte criminel a mené à l’incarcération et à la perte de l’emploi de l’appelant. Il s’agit d’une inconduiteNote de bas de page 14.

[31] L’employeur n’avait d’autre choix que de mettre fin au lien d’emploi. Selon la jurisprudence, une personne employée ne peut faire assumer par d’autres le risque de son chômageNote de bas de page 15.

[32] Je conclus que les gestes posés par l’appelant sont considérés comme une inconduite selon la loi.

Conclusion

[33] Je suis d’accord avec la Commission; je suis d’avis que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.

[34] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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