Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1407

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Jessica Grant

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (489332) datée
du 29 juin 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Angela Ryan Bourgeois
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 4 novembre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentante de l’appelante
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 20 mars 2023
Numéro de dossier : GE-22-2496

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Décision

[1] Je rejette l’appel, mais je modifie le montant du trop-payé.

[2] L’appelante (prestataire) a reçu un trop-payé de 8 713 $ (et non de 9 713 $) en prestations d’assurance-emploi d’urgence. Elle doit rembourser le trop-payé.

Aperçu

[3] L’appel porte sur la question de savoir si la prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence en trop et, le cas échéant, si elle doit les rembourser.

[4] La prestataire a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi le 30 mars 2020.

[5] La Commission de l’assurance-emploi du Canada lui a versé des prestations d’assurance-emploi d’urgence parce que les prestations de maladie de l’assurance‑emploi n’étaient pas offertes à ce moment-là. Cela était attribuable aux modifications temporaires que le gouvernement avait apportées à la Loi sur l’assurance-emploi.

[6] La Commission a versé 9 713 $ à la prestataire en prestations d’assurance‑emploi d’urgence. La Commission affirme maintenant que la prestataire n’était pas admissible aux prestations. Elle veut qu’elle rembourse toutes les prestations d’assurance‑emploi d’urgence qu’elle lui a verséesNote de bas de page 1.

[7] La prestataire affirme qu’elle a été forcée de dire à la maison [sic]. Elle a demandé des prestations d’assurance-emploi d’urgence. Une fois de retour au travail, elle a téléphoné à Service Canada pour annuler ses prestations. On lui a dit qu’elle pouvait continuer à recevoir les prestations tant qu’elle continuait de déclarer sa rémunération. Elle ne savait pas qu’elle devait déclarer sa prime horaire, le paiement de ses heures supplémentaires et son indemnité de vacances. Elle dit qu’elle n’a pas gagné d’argent parce qu’elle a payé des impôts sur ces montants. Elle affirme que la Commission n’aurait pas dû continuer à lui verser des prestations si elle n’y était pas admissible.

Question en litige

[8] La prestataire a-t-elle reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence en trop? Si oui, doit-elle rembourser le trop-payé?

Analyse

[9] En 2020, en réponse à la pandémie de la COVID-19, le gouvernement du Canada a apporté les modifications suivantes à la Loi sur l’assurance-emploi :

  • les prestations régulières et les prestations de maladie de l’assurance-emploi n’étaient pas offertes du 15 mars 2020 au 27 septembre 2020Note de bas de page 2;
  • la Commission a traité les demandes de prestations de maladie de l’assurance-emploi comme des demandes de prestations d’assurance-emploi d’urgence;
  • tout le monde a reçu le même taux de prestations hebdomadaires de 500 $Note de bas de page 3;
  • la Commission a été autorisée à verser des prestations à l’avanceNote de bas de page 4.

[10] Ainsi, lorsqu’une personne demandait des prestations de maladie de l’assurance-emploi, comme l’a fait la prestataire, elle recevait plutôt des prestations d’assurance‑emploi d’urgence au taux hebdomadaire de 500 $.

[11] Pendant une certaine période, lorsqu’une partie prestataire demandait des prestations d’assurance‑emploi d’urgence, la Commission lui versait immédiatement des prestations quatre semaines à l’avance (4 x 500 $ = 2 000 $)Note de bas de page 5.

La prestataire était-elle admissible aux prestations d’assurance‑emploi d’urgence?

Conditions d’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi d’urgence

[12] Selon la loi, une personne est admissible aux prestations d’assurance-emploi d’urgence si elle remplit toutes les conditions suivantes :

  1. (i) elle vit au Canada;
  2. (ii) elle a au moins 15 ans;
  3. (iii) elle a une rémunération assurable d’au moins 5 000 $ en 2019 ou au cours des 52 semaines précédentes;
  4. (iv) elle cesse de travailler pendant au moins sept jours consécutifs compris dans la période de deux semaines pour laquelle elle demande les prestations;
  5. (v) elle n’a aucun revenu provenant d’un emploi qu’elle exerce ou d’un travail qu’elle exécute pour son compte pour les jours consécutifs pendant lesquels elle cesse de travaillerNote de bas de page 6.

[13] Personne ne conteste le fait que la prestataire remplit les trois premières conditions pour toutes les semaines où elle a demandé des prestations d’assurance‑emploi d’urgence.

[14] La question est de savoir si elle remplit les deux dernières conditions.

[15] Cependant, même si elle ne remplit pas les deux dernières conditions, la prestataire sera tout de même admissible aux prestations d’assurance-emploi d’urgence, tant que sa rémunération ne dépasse pas 1 000 $ sur une période de quatre semaines. J’aborderai cette exception ci-après, mais je vais d’abord examiner son revenu.

Le revenu de la prestataire

[16] Il est difficile de déterminer le revenu de la prestataire pour chaque semaine parce que ses périodes de paie ne coïncident pas avec les semaines de prestations d’assurance-emploi. Même si on sait quand elle travaillait, son taux de rémunération varie, alors il ne s’agit pas simplement de multiplier les heures travaillées par un taux horaire fixe.

[17] J’ai accepté le revenu de la prestataire affiché dans le tableau qu’elle a remis à la CommissionNote de bas de page 7. Il y a quelques semaines où ses talons de paie semblent avoir des écartsNote de bas de page 8. Par exemple, pour les semaines du 30 mars au 12 avril et du 25 mai au 7 juin, les montants sur ses talons de paie étaient plus élevés que ceux affichés dans son tableau. Cependant, j’estime que ces écarts sont dus au fait que ses semaines de paie ne coïncident pas avec les semaines de prestations d’assurance‑emploi. En effet, la prestataire a travaillé le dernier jour de ses deux périodes de paie, mais celles-ci ne figurent pas dans la semaine de prestations d’assurance-emploi.

[18] Voici mes conclusions au sujet du revenu de la prestataire :

Semaine Revenu
Le 29 marsNote de bas de page 9 696 $
Le 5 avril 630 $
Le 12 avril 1 544 $
Le 19 avril 1 433 $
Le 26 avril 147 $ Admissibilité aux prestations d’assurance-emploi d’urgence
Le 3 mai 0 $ Admissibilité aux prestations d’assurance-emploi d’urgence
Le 10 mai 457 $
Le 17 mai 507 $
Le 24 mai 61 $
Le 31 mai 586 $
Le 7 juin 1 888 $
Le 14 juin 1 023 $
Le 21 juin 1 535 $
Le 28 juin 702 $
Le 5 juillet 1 276 $
Le 12 juillet 1 151 $
Le 19 juillet 1 449 $
Le 26 juillet 724 $
Le 2 août 819 $
Le 9 août 1 690 $
Le 16 août 1 576 $
Le 23 août 1 055 $
Le 30 août 638 $
Le 6 septembre 1 531 $
Le 13 septembre 1 581 $
Le 20 septembre 1 780 $
Le 27 septembre 1 370 $

Admissibilité de la prestataire aux prestations d’assurance-emploi d’urgence

[19] La prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi d’urgence pour la période commençant le 29 mars et se terminant le 25 avril parce qu’il n’y a pas de période pendant laquelle elle n’a pas travaillé pendant sept jours consécutifs et pour laquelle elle n’a aucun revenu d’emploi. Elle a reçu un revenu d’emploi pour chacune de ces semaines. L’exception ne s’applique pas parce que pendant cette période de quatre semaines, son revenu est supérieur à 1 000 $.

[20] La prestataire est admissible aux prestations d’assurance-emploi d’urgence pour la période de deux semaines du 26 avril au 9 mai. En effet, pendant cette période de deux semaines, elle a sept jours consécutifs sans travail ni revenu. La prestataire n’a pas à se fier à l’exception pour déterminer son admissibilitéNote de bas de page 10. Elle est donc admissible à deux semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence (2 semaines x 500 $ = 1 000 $).

[21] Pour la période du 10 mai 2020 au 3 octobre 2020, la prestataire n’a pas de semaines sans revenu d’emploi. Par conséquent, elle peut seulement être admissible aux prestations d’assurance-emploi d’urgence si elle fait partie de l’exception. Toutefois, ce n’est pas le cas, parce qu’il n’y a pas de période de quatre semaines pendant laquelle son revenu d’emploi est de 1 000 $ ou moins.

L’exception

[22] La Commission a fourni des arguments détaillés sur la façon dont je devrais décider de l’admissibilité de la prestataire aux prestations d’assurance-emploi d’urgence et dont je devrais calculer les périodes de quatre semaines pour l’exception.

[23] L’article 153.9(4) de la Loi sur l’assurance-emploi précise ceci :

Dans le cas où le total des revenus provenant d’un emploi que [la partie] prestataire exerce ou d’un travail qu’[elle] exécute pour son compte est de mille dollars ou moins pour une période de quatre semaines qui se succèdent dans l’ordre chronologique sans nécessairement être consécutives et à l’égard desquelles la prestation d’assurance-emploi d’urgence est versée, [la partie] prestataire est réputé[e] satisfaire aux exigences des sous‑alinéas (1)a)(iv) et (v), de l’alinéa (1)b) ou du sous‑alinéa (1)c)(iv), selon le cas.

[24] L’exception est claire : le revenu total d’une partie prestataire ne peut pas dépasser 1 000 $ sur une « période » de quatre semaines.

[25] La Commission affirme que la période de quatre semaines peut s’étendre sur plus de quatre semaines. En effet, elle saute les semaines où les prestations d’assurance-emploi d’urgence ne sont pas verséesNote de bas de page 11.

[26] Je sais que d’autres membres du Tribunal de la sécurité sociale sont peut-être d’accord avec la Commission. Toutefois, je ne le suis pas.

[27] J’estime que l’article 153.9(4) signifie qu’une partie prestataire remplit les conditions (iv) et (v) si elle respecte les suivantes :

  1. a) la partie prestataire reçoit un revenu provenant d’un emploi qu’elle exerce ou d’un travail qu’elle exécute pour son compte;
  2. b) le revenu est de 1 000 $ ou moins sur une période de quatre semaines;
  3. c) les quatre semaines de la période se succèdent dans l’ordre chronologique;
  4. d) il n’est pas nécessaire que le revenu versé pour la période de quatre semaines soit dans des semaines consécutives;
  5. e) les prestations d’assurance-emploi d’urgence doivent avoir été versées pendant cette période de quatre semaines.

[28] J’estime que la période de quatre semaines est un bloc de quatre semaines. Une « période » est un espace de temps qui a un début et une fin. Il n’y a pas d’interruption. Si c’était le cas, il ne s’agirait pas d’une seule période, mais de plusieurs périodes. Je ne peux pas accepter l’interprétation de la Commission parce que je ne peux pas conclure qu’une période de quatre semaines peut être plus longue que quatre semaines.

Montant des prestations d’assurance-emploi d’urgence de la prestataire

[29] La preuve montre que la prestataire a reçu 9 713 $ en prestations d’assurance‑emploi d’urgence. Il s’agit du montant indiqué sur son feuillet T4E ainsi que sur l’état détaillé des prestations verséesNote de bas de page 12.

La prestataire a reçu un trop-payé de 8 713 $

[30] La prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi d’urgence en trop. Elle est admissible à 1 000 $ (2 semaines x 500 $), mais elle a reçu 9 713 $. Cela signifie qu’elle a reçu un trop-payé de 8 713 $ en prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[31] Elle doit rembourser le trop-payé. La loi est claire : les prestations versées en trop doivent être rembourséesNote de bas de page 13. La raison du trop-payé n’a pas d’importanceNote de bas de page 14.

[32] La prestataire doit donc rembourser 8 713 $.

Trop-payé

[33] Le Tribunal n’a pas le pouvoir d’annuler le trop-payé de la prestataireNote de bas de page 15.

[34] D’autres options s’offrent à la prestataire.

[35] Elle pourrait demander à la Commission d’annuler la totalité ou une partie de son trop-payé en raison de difficultés financièresNote de bas de page 16.

[36] Elle pourrait aussi communiquer avec l’Agence du revenu du Canada (1‑866‑864‑5823) concernant des options de remboursementNote de bas de page 17.

Conclusion

[37] La prestataire est admissible à 1 000 $ de prestations d’assurance-emploi d’urgence. Elle doit rembourser le trop-payé de 8 713 $ auquel elle n’est pas admissible.

[38] L’appel est rejeté avec cette modification du montant du trop-payé.

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