Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1272

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (574494) datée du 16 mars 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Elizabeth Usprich
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 1er août 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 4 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-1098

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant a présenté sa demande de révision en retard, et la Commission de l’assurance-emploi du Canada a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de prolonger le délai pour que l’appelant demande la révision de sa décision.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations parentales en octobre 2020. À ce moment-là, il a demandé 18 semaines de prestations. Par la suite, il a demandé 15 semaines supplémentaires de prestations parentales pour un total de 33 semaines.

[4] L’appelant affirme qu’on lui a dit que les prestations seraient versées jusqu’au 29 mai 2021. Il n’y a aucune trace de cela.

[5] La Commission affirme que les 33 semaines ont pris fin le 22 mai 2021.

[6] L’appelant a téléphoné à la Commission à ce sujet. Le 16 septembre 2021, il s’est entretenu avec un représentant qui lui a dit qu’il ne lui restait plus de prestations et qu’il pouvait demander une révision s’il n’était pas d’accord.

[7] L’appelant a seulement présenté une demande de révision le 14 février 2023.

[8] Le 17 mars 2023, la Commission a décidé qu’elle n’examinerait pas la demande de l’appelant parce qu’elle avait été présentée après la période de révision de 30 jours et qu’elle ne satisfaisait pas au critère de prolongation du délai.

[9] Je dois décider si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon équitable.

Question en litige

[10] La demande de révision de l’appelant a-t-elle été présentée en retard?

[11] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en rejetant la demande de l’appelant de prolonger le délai de 30 jours pour présenter une demande de révision?

Analyse

[12] Lorsque la Commission rend une décision au sujet des prestations d’assurance-emploi d’une personne, la loi permet à la partie prestataire de demander la révision de cette décision. Cependant, la demande à la Commission doit être présentée dans les 30 jours suivant la date où cette décision a été communiquéeNote de bas de page 1.

[13] Si la personne attend plus de 30 jours pour demander une révision de sa décision, sa demande est en retard. La Commission a le pouvoir discrétionnaire d’accorder plus de temps à une partie prestataire pour présenter une demande de révisionNote de bas de page 2. Il y a cependant des exigences auxquelles une partie appelante doit satisfaire pour obtenir plus de tempsNote de bas de page 3.

[14] Pour les demandes de révision tardives, la Commission examine deux questions. Premièrement, la partie prestataire a-t-elle une explication raisonnable pour son retard? Deuxièmement, la prestataire a-t-elle démontré qu’elle a toujours eu l’intention de demander une révision, même si elle était en retardNote de bas de page 4?

[15] Si une partie prestataire attend plus de 365 jours pour demander la révision d’une décision, la Commission doit alors examiner deux autres questions. Dans de tels cas, la Commission doit aussi vérifier si la demande de révision a une chance raisonnable de succès et si l’autorisation du délai supplémentaire causerait un préjudice.

[16] Lorsque la Commission a le pouvoir discrétionnaire de faire quelque chose, comme c’est le cas dans la présente affaire, le Tribunal ne peut le modifier que si la Commission n’a pas exercé son pouvoir de façon judiciaireNote de bas de page 5.

[17] Un pouvoir discrétionnaire n’est pas exercé de façon judiciaire s’il peut être démontré que le décideur a agi de mauvaise foi, a agi dans un but ou pour un motif irrégulier, a considéré un facteur non pertinent ou a ignoré un facteur pertinent, ou a agi de façon discriminatoireNote de bas de page 6.

[18] Si la Commission n’a pas exercé correctement son pouvoir discrétionnaire, je peux rendre la décision que la Commission aurait dû rendre en me fondant sur les exigences énoncées dans le Règlement sur les demandes de révision.

Question en litige no 1 : La demande de révision a-t-elle été présentée en retard?

À quel moment la décision a-t-elle été communiquée?

[19] Pour décider si la demande de révision de l’appelant a été présentée en retard, je dois d’abord examiner à quel moment la Commission lui a communiqué sa décision.

[20] Une partie prestataire peut demander à la Commission de réviser une décision qu’elle a rendue dans les 30 jours suivant la date à laquelle la décision lui a été communiquéeNote de bas de page 7.

[21] La Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il incombe au décideur de prouver que sa décision a été communiquée à la partie appelanteNote de bas de page 8. Dans la présente affaire, cela signifie que la Commission doit démontrer que sa décision a bel et bien été communiquée à l’appelant.

[22] Dans la présente affaire, la décision porte sur la date à laquelle les prestations de l’appelant ont pris fin. Il n’est pas contesté que l’appelant a demandé des prestations parentales en octobre 2020. Dans sa demande de prestations, l’appelant a demandé 18 semaines de prestations.

[23] En janvier 2021, l’appelant voulait modifier la durée de son congé parentalNote de bas de page 9. La Commission a pris note du fait que le 10 mars 2021, l’appelant a demandé 15 semaines supplémentaires de prestations parentales pour un total de 33 semaines de prestations parentalesNote de bas de page 10. L’appelant ne conteste pas cela.

[24] L’appelant affirme avoir parlé à un agent en mai 2021 et avoir été informé qu’il recevrait des prestations jusqu’au 29 mai 2021Note de bas de page 11. L’appelant a déclaré qu’il a reçu un versement seulement pour la période se terminant le 22 mai 2021.

[25] L’appelant a téléphoné à la Commission en juillet 2021 et de nouveau en septembre 2021 pour discuter de la semaine de prestations contestéeNote de bas de page 12.

[26] Le 16 septembre 2021, un agent a dit à l’appelant qu’il n’avait plus droit à d’autres prestations parentales. Il a dit à l’appelant que s’il n’était pas d’accord avec les semaines d’admissibilité, il devrait présenter une demande de révisionNote de bas de page 13. L’appelant convient que l’agent lui a dit cela.

[27] L’appelant dit avoir compris qu’il devait aller en ligne pour trouver le formulaire de demande de révision. Il a déclaré qu’il avait demandé que le formulaire lui soit envoyé par la poste, mais qu’on lui avait répondu qu’il devait aller en ligne pour l’obtenir. L’appelant a affirmé qu’il avait essayé de trouver le formulaire, mais qu’il a l’impression qu’il a eu de la difficulté parce qu’il ne s’y connaît pas trop en informatique. Il a dit qu’il savait qu’il devait soumettre ce formulaire, mais il n’a pas compris qu’il devait le soumettre dans les 30 jours.

[28] La Cour fédérale a décidé que la communication d’une décision exige que la partie appelante connaisse le fond de la décision et son incidenceNote de bas de page 14.

[29] Je considère que l’appelant connaissait le fond et l’incidence de la décision de la Commission. Il ne conteste pas avoir compris que la Commission lui refusait plus de semaines de prestations parentales. L’appelant a convenu qu’il savait qu’il n’avait pas reçu de prestations d’assurance-emploi pour la semaine du 23 mai 2021 au 29 mai 2021.

[30] L’appelant a dit que le problème était que l’agent qui lui avait dit en mai 2021 que ses prestations prendraient fin le 29 mai 2021. L’appelant estime que même s’il s’agissait d’une erreur, la Commission devrait quand même reconnaître son erreur et lui accorder cette semaine de prestations.

[31] Je conclus que la Commission a clairement exposé sa position le 16 septembre 2021. Elle a informé l’appelant qu’elle n’allait pas prolonger sa période de prestations. La Commission a dit à l’appelant qu’il pouvait demander une révision s’il n’était pas satisfait. Cela signifie qu’il était au courant de l’incidence de la décision de la Commission.

[32] Je considère que l’appelant connaissait le fond et l’incidence de la décision de la Commission et que cette dernière lui a été communiquée le 16 septembre 2021.

La demande de révision de l’appelant était-elle en retard?

[33] Le 14 février 2023, l’appelant a demandé la révision de la décision rendue le 16 septembre 2021. Il a présenté sa demande plus de 30 jours après la communication de la décision. Par conséquent, la demande de révision était en retard.

Question en litige no 2 : La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire?

[34] Comme je l’ai mentionné plus haut, je dois respecter le pouvoir discrétionnaire de la Commission si elle a agi de façon judiciaire. Un pouvoir discrétionnaire n’est pas exercé de façon judiciaire s’il peut être démontré que le décideur a agi de mauvaise foi, a agi dans un but ou pour un motif irrégulier, a considéré un facteur non pertinent ou a ignoré un facteur pertinent, ou a agi de façon discriminatoire.

[35] La Commission affirme que l’appelant a pris plus de 365 jours pour demander une révision. Cela n’a pas été contesté. Par conséquent, la Commission peut accorder un délai plus long pour demander une révision seulement si les quatre éléments du Règlement sur les demandes de révision sont respectésNote de bas de page 15.

[36] J’ai demandé à l’appelant son opinion sur la question de savoir si la Commission avait agi judiciairement.

[37] L’appelant a déclaré qu’il ne pense pas que la Commission essayait de l’induire en erreur ou le tromper. Il croit plutôt qu’elle a agi de mauvaise foi. Il a déclaré que l’agent aurait dû lui dire qu’il avait 30 jours pour présenter sa demande de révision. L’appelant a déclaré que la demande de révision n’était pas une priorité absolue pour lui parce qu’il travaillait à temps plein et qu’il avait des obligations familiales.

[38] La Commission a parlé à l’appelant après avoir reçu sa demande de révisionNote de bas de page 16. La Commission a souligné qu’il y avait plusieurs raisons pour lesquelles l’appelant avait tardé à présenter sa demande de révision.

[39] La Commission n’est pas obligée d’informer les parties prestataires de leurs droits d’appel pour remplir son obligation de communiquer le fond et l’incidence de sa décisionNote de bas de page 17.

[40] J’estime que cela signifie que l’appelant n’a pas démontré que la Commission a agi de mauvaise foi en exerçant son pouvoir discrétionnaire.

[41] J’ai demandé à l’appelant s’il croyait que la Commission avait agi dans un but ou pour un motif irrégulier. Il a dit qu’il ne pensait pas que la Commission avait agi de façon inappropriée. L’appelant a déclaré qu’il croit que si un parent devait tenir compte de ce qui se passait dans sa vie, il comprendrait pourquoi il a mis plus de temps à remplir le formulaire.

[42] Je comprends la position de l’appelant. Je sais que l’appelant était beaucoup sollicité vu qu’il était parent et qu’il travaillait à temps plein. Pourtant, j’estime que 519 jours est un délai excessif. L’appelant aurait pu, à tout moment, s’informer de ses droits et obligations (y compris des délais) au titre de la Loi sur l’assurance-emploi. Toutefois, il ne l’a pas fait. Il a déclaré que soumettre le formulaire figurait sur sa liste de choses à faire, mais que ce n’était tout simplement pas sa priorité absolue. Je juge que la Commission n’a pas agi dans un but ou pour un motif irrégulier.

[43] J’ai demandé à l’appelant s’il croyait que la Commission avait ignoré un facteur pertinent ou considéré un facteur non pertinent. Il a répondu qu’il comprend maintenant qu’il n’avait que 30 jours pour présenter sa demande de révision, mais qu’il estime que la Commission aurait dû le lui dire. Il juge que la Commission devrait reconnaître qu’un de ses agents lui a donné des renseignements inexacts concernant la date de fin de ses prestations.

[44] Je ne trouve pas que cela équivaut à ignorer un facteur pertinent ou à considérer un facteur non pertinent.

[45] L’appelant n’avait pas l’impression que la Commission avait fait preuve de discrimination à son égard. J’accepte son témoignage sur ce point, car je ne vois aucune preuve du contraire.

[46] La Commission a examiné tous les renseignements que l’appelant a fournis sur les raisons de son retard. Elle a décidé que l’appelant n’avait pas d’explication raisonnable pour son retard et qu’il n’avait pas démontré qu’il avait toujours eu l’intention de demander une révision. La Commission n’a pas accepté la demande tardive de révision de l’appelant.

[47] Selon mes conclusions précédentes, je juge que la Commission a agi de façon judiciaire en exerçant son pouvoir discrétionnaire. La Commission a rendu sa décision de façon équitable parce qu’elle a examiné tous les renseignements que l’appelant a fournis au sujet des raisons pour lesquelles sa demande de révision était en retard. La Commission n’a pas agi de mauvaise foi, à des fins inappropriées ou de façon discriminatoire. Par conséquent, je n’ai pas le pouvoir de décider si la Commission a bien évalué les quatre exigences du Règlement sur les demandes de révision.

Conclusion

[48] L’appel est rejeté.

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