Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 825

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. K.
Représentante : T. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (582976) rendue le 3 mai 2023 par la
Commission de l’assurance-emploi du Canada
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Suzanne Graves
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 6 juillet 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 11 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-1540

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Décision

[1] L’appel est rejeté. La demande de prestations parentales de l’assurance-emploi montre que l’appelant a choisi l’option standard et qu’il a déjà commencé à recevoir des prestations.

[2] La loi ne m’autorise pas à modifier le choix de l’appelant, c’est‑à-dire de remplacer les prestations parentales standards par les prestations parentales prolongées. Elle ne me permet pas non plus de prolonger la période d’admissibilité aux prestations parentales au‑delà de 52 semaines à compter de la date de naissance de son bébé.

[3] L’appelant affirme avoir reçu un diagnostic de maladie grave durant la période allant du 12 août 2022 au 5 décembre 2022. Il se pourrait qu’il ait droit aux prestations de maladie pendant toute cette période ou une partie de cette période. Je ne rends aucune décision sur cette question, car elle n’a pas été soumise au Tribunal.

Aperçu

[4] Lorsqu’on demande des prestations parentales de l’assurance-emploi, il faut choisir entre deux options : l’option standard et l’option prolongéeNote de bas de page 1. L’option standard permet de recevoir des prestations au taux normal pendant un maximum de 35 semaines. L’option prolongée permet de recevoir à peu près la même somme totale de prestations, mais à un taux moins élevé pendant un maximum de 61 semaines. Dès que l’on commence à recevoir des prestations parentales, il devient impossible de changer d’option.

[5] Dans son formulaire de demande, l’appelant a choisi les prestations parentales standardsNote de bas de page 2. Il dit avoir consulté le site Web de Service Canada et suivi les instructions du formulaire de demande, y compris celle disant de fournir la date de naissance de son enfant. La Commission a tout simplement accepté sa demande. Il affirme qu’il n’avait aucune raison de croire que choisir les prestations standards l’empêcherait de recevoir des prestations parentales pendant 35 semaines. Il soutient que le formulaire de demande et les renseignements sur le site Web de Service Canada ne sont pas clairs et qu’il aurait choisi l’option prolongée s’il avait su qu’il pouvait toucher des prestations pendant seulement 8 semaines.

[6] La Commission de l’assurance-emploi du Canada soutient que le formulaire de demande explique les deux options de prestations parentales et le fait que la période d’admissibilité se limite à 52 semaines. Elle affirme que l’appelant a choisi les prestations standards et qu’il est maintenant trop tard pour les modifier parce qu’il a déjà commencé à recevoir des prestations.

Question en litige

[7] Quel type de prestations parentales l’appelant a‑t‑il sélectionné lorsqu’il a fait son choix dans le formulaire de demande?

[8] Si l’appelant a choisi de recevoir les prestations parentales standards, peut‑il recevoir des prestations plus de 52 semaines après la naissance de son enfant?

Analyse

[9] Quand on demande des prestations parentales de l’assurance-emploi, il faut choisir entre l’option standard et l’option prolongéeNote de bas de page 3. La loi précise qu’à partir du moment où la Commission commence à verser des prestations parentales, on ne peut plus changer d’optionNote de bas de page 4.

[10] Pour savoir quel type de prestations parentales l’appelant voulait obtenir quand il a rempli le formulaire, je dois examiner les éléments de preuve entourant son choix. Autrement dit, l’option que l’appelant a sélectionnée dans sa demande est importante, mais ce n’est pas la seule chose dont il faut tenir compte. Par exemple, on peut aussi regarder le nombre de semaines pendant lesquelles il voulait recevoir des prestations ou la durée du congé qu’il prévoyait prendre.

[11] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit que les prestations parentales sont habituellement payables pour chaque semaine de chômage comprise dans la période qui commence la semaine de la naissance de l’enfant ou la semaine au cours de laquelle l’enfant est placé chez le parent en vue de son adoption et qui se termine 52 semaines plus tardNote de bas de page 5.

[12] La période de 52 semaines suivant le placement ou la naissance du bébé s’appelle la « période d’admissibilité aux prestations parentales ». Elle peut être prolongée dans certaines circonstances. Par exemple, elle peut compter 26 semaines de plus pour permettre aux prestataires de recevoir les prestations parentales prolongées. Elle peut aussi être prolongée lorsque le bébé est hospitalisé.

L’option que l’appelant voulait choisir dans le formulaire de demande

[13] L’option que l’appelant avait l’intention de choisir au moment de remplir le formulaire de demande est importante. À ce moment‑là, avait‑il l’intention de choisir l’option standard ou prolongée?

Les arguments des parties

[14] Selon la Commission, ce que l’appelant a sélectionné dans le formulaire de demande nous dit quelle option il voulait choisir. Elle fait valoir que le formulaire de demande explique que le choix est définitif et que la période d’admissibilité aux prestations parentales standards se termine 52 semaines après l’adoption ou la naissance d’un bébé. Elle soutient qu’il est maintenant trop tard pour remplacer les prestations standards par les prestations prolongées.

[15] L’appelant reconnaît avoir coché la case des prestations parentales standards lorsqu’il a demandé des prestations. Mais il dit que le fait qu’il pouvait recevoir des prestations standards seulement dans les 52 semaines suivant la naissance de son bébé n’était pas clair. La Commission a accepté sa demande sans l’informer de cette limite assez à l’avance pour qu’il puisse modifier son choix.

[16] Après avoir lu les renseignements sur le site Web de Service Canada, l’appelant affirme avoir raisonnablement compris que sa période de prestations pouvait commencer dans les 52 semaines suivant la naissance de son bébé. Il soutient que ni le formulaire de demande ni les renseignements sur le site Web n’expliquent adéquatement la limite de 52 semaines.

[17] L’appelant me demande de suivre une décision rendue par la division d’appel du présent Tribunal : ML c Commission de l’assurance-emploi du CanadaNote de bas de page 6. Dans cette affaire, le prestataire a demandé des prestations parentales standards lorsque son enfant avait 11 mois. Par conséquent, il a reçu seulement 3 semaines de prestations. Le Tribunal a alors conclu que le formulaire de demande n’expliquait pas que la période d’admissibilité aux prestations parentales durait 52 semaines.

[18] La division d’appel a décidé que le prestataire avait été mal informé par la Commission et que le choix de M. L., c’est‑à-dire les prestations parentales standards, était invalide dès le départ.

[19] L’appelant avance que le Tribunal devrait rendre une décision semblable dans la présente affaire et conclure que son choix n’était pas valide parce qu’il reposait sur les renseignements incomplets et trompeurs fournis par la Commission.

Quelle option l’appelant voulait‑il choisir quand il a présenté sa demande?

[20] Je conclus que l’appelant a choisi l’option standard lorsqu’il a demandé des prestations parentales. Durant son témoignage, il a affirmé qu’il avait l’intention de demander les prestations standards pendant 35 semaines.

[21] La Commission a commencé à verser des prestations parentales standards à l’appelant le 14 juin 2022. Les parties conviennent qu’il a reçu des prestations pendant un total de 8 semaines.

[22] Malheureusement, sur ce point, la loi est très stricte. Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il avait l’intention de choisir les prestations parentales prolongées lorsqu’il a présenté sa demande.

[23] Je reconnais la décision ML rendue par le présent Tribunal. Toutefois, depuis sa parution, la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont toutes deux confirmé que, dès que les versements commencent, le choix des prestataires (celui fait dans le formulaire de demande) ne peut plus être modifié. Le Tribunal est obligé de suivre ces décisions judiciairesNote de bas de page 7.

[24] Dans la décision Canada (Procureur général) c Hull, la Cour d’appel fédérale a examiné une situation où l’appelante, qui croyait avoir choisi les prestations standards dans sa demande, avait plutôt choisi les prestations parentales prolongées. La prestataire a fait valoir que les renseignements figurant dans le formulaire l’avaient mêlée. La Cour a écrit ceci :

« […] conformément au paragraphe 23(1.2) de la Loi sur l’[assurance-emploi], […] aussitôt qu’une prestataire a indiqué dans son formulaire de demande le type de prestations parentales et le nombre de semaines pendant lesquelles elle souhaite recevoir ces prestations et que les prestations commencent à être versées, il est impossible pour la prestataire, la Commission, la division générale ou la division d’appel de révoquer, de modifier ou de changer ce choixNote de bas de page 8. »

[25] Les faits de la présente affaire montrent que le formulaire de demande de l’appelant contient un passage précis sur la période d’admissibilité aux prestations parentales. Le voiciNote de bas de page 9 :

[traduction]

Type de prestations parentales

Standards : Vous avez choisi de recevoir chaque semaine des prestations au taux de 55 % de votre rémunération hebdomadaire assurable (jusqu’à concurrence d’un montant maximal) pendant 35 semaines.

La période durant laquelle les prestations parentales standards peuvent être versées commence la semaine de la naissance de l’enfant ou de son placement chez vous en vue d’une adoption et elle se termine 52 semaines plus tard.

[…]

Rappel : Vous ne pouvez plus modifier votre choix (option standard ou prolongée) une fois que vous commencez à recevoir des prestations parentales.

[26] Dans la décision Canada (Procureur général) c VariolaNote de bas de page 11, la Cour fédérale s’est penchée sur une situation très semblable aux faits du présent appel. Dans cette affaire, le prestataire a choisi de recevoir les prestations parentales standards, mais il en a reçu seulement pendant 3 semaines avant que sa période d’admissibilité aux prestations parentales prenne fin.

[27] La Cour fédérale a jugé que les renseignements publiés sur le site Web de Service Canada au sujet de la période de prestations parentales n’étaient « ni obscurs ni trompeurs », même si elle ne doutait pas de la sincérité du prestataire dans ses efforts pour clarifier sa position avant sa demande de prestations ni de sa confusion quant aux renseignements sur le site WebNote de bas de page 12.

[28] Je reconnais que l’appelant n’a rien reçu de la part de la Commission pour l’aviser que les prestations standards pouvaient lui être versées pendant seulement 8 semaines, et ce, même s’il a inscrit la date de naissance de son enfant sur le formulaire de demande. Si le système avait tout de suite alerté l’appelant de cette erreur, la loi lui aurait permis de modifier son choix et de recevoir les prestations parentales prolongées.

[29] Cependant, les prestataires qui se trompent et fondent leur choix sur une mauvaise compréhension de leurs droits n’ont malheureusement aucun recours. Le choix des prestataires est l’option sélectionnée dans leur formulaire de demandeNote de bas de page 13. Cela demeure vrai même si la Commission a fait des erreursNote de bas de page 14.

L’appelant peut‑il recevoir des prestations parentales standards plus de 52 semaines après la naissance de son enfant?

[30] Je juge que la Commission avait raison de décider que l’appelant peut toucher des prestations parentales standards pendant seulement 8 semaines parce que le délai prévu par la Loi sur l’assurance-emploi pour recevoir des prestations parentales standards prend généralement fin 52 semaines après la naissance de l’enfant.

[31] Le bébé de l’appelant est né le X août 2021, alors la période d’admissibilité aux prestations parentales a pris fin 52 semaines plus tard. Rien dans le présent dossier ne démontre qu’il serait possible de prolonger la période d’admissibilité.

[32] Je regarde la situation de l’appelant avec beaucoup de sympathie. J’admets qu’il ignorait que les règles lui interdiraient de recevoir des prestations parentales standards après la période d’admissibilité de 52 semaines.

[33] Mais je n’ai d’autre choix que de suivre les règles énoncées dans la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne peux pas faire d’exception pour les cas spéciaux, pas même pour un motif de compassionNote de bas de page 15.

L’appelant pourrait avoir droit à d’autres prestations spéciales du 12 août 2022 au 5 décembre 2022, soit pour toute cette période ou une partie de la période

[34] L’appelant a déclaré qu’un problème de santé très grave, nécessitant une intervention chirurgicale, avait été diagnostiqué chez lui. Le problème a duré plusieurs semaines, du 12 août 2022 au 5 décembre 2022, date où il est retourné travailler.

[35] Je suggère à l’appelant de communiquer avec la Commission pour savoir s’il a droit à des prestations de maladie pendant toute cette période ou une partie de cette période.

[36] Je ne tranche pas la question de savoir si l’appelant pouvait demander des prestations de maladie, car cette question n’a pas été soumise au Tribunal.

Conclusion

[37] L’appelant a choisi les prestations parentales standards. Il ne peut pas modifier son choix dans le but de toucher des prestations parentales prolongées parce qu’il a déjà commencé à recevoir des prestations. Il ne peut pas non plus recevoir les prestations parentales standards plus de 52 semaines après la naissance de son bébé.

[38] La loi m’oblige à rejeter l’appel.

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