Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : FF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1376

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale - Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (598669) datée du 31 juin [sic] 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Kristen Thompson
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 4 octobre 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 5 octobre 2023
Numéro de dossier : GE-23-2251

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] L’appelante n’a pas démontré que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder à l’appelante une prolongation du délai pour lui demander de réviser sa décision initiale.

Aperçu

[3] Dans sa décision initiale du 16 septembre 2021, la Commission a décidé de modifier le taux hebdomadaire des prestations d’assurance-emploi de l’appelante pour le faire passer de 573 $ à 508 $, en se fondant sur les renseignements supplémentaires fournis par l’employeur. L’appelante a demandé à la Commission de réviser sa décision, dans sa demande datée du 3 juin 2023 et reçue par la Commission le 12 juin 2023.

[4] L’appelante a présenté sa demande de révision en retard. Elle devait donc demander une prolongation du délai à la Commission. La Commission a refusé de lui accorder une prolongation.

[5] La Commission affirme avoir exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder une prolongation du délai à l’appelante.

[6] L’appelante n’est pas d’accord et affirme que la Commission a ignoré des facteurs pertinents. Elle affirme que sa rémunération assurable a diminué parce qu’elle a été affectée à des tâches légères après un accident de voiture, et qu’on aurait dû utiliser sa rémunération d’avant l’accident pour calculer son taux de prestations hebdomadaires. Elle affirme également avoir communiqué avec la Commission à plusieurs reprises, mais ne pas avoir été avisée de demander une révision.

[7] Je dois décider si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder une prolongation du délai. Si c’est le cas, je ne peux pas modifier la décision de la Commission. Cependant, si ce n’est pas le cas, je dois rendre la décision qu’elle aurait dû rendre.

Questions en litige

[8] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé de donner plus de temps à l’appelante pour demander la révision de sa décision initiale, datée du 16 septembre 2021, modifiant son taux hebdomadaire de prestations pour le faire passer de 573 $ à 508 $?

[9] Si ce n’est pas le cas, l’appelante devrait-elle avoir plus de temps pour demander à la Commission de réviser sa décision initiale?

Analyse

Que doit démontrer l’appelante?

[10] Une partie prestataire a 30 jours pour demander à la Commission de réviser une décisionNote de bas de page 1. La Commission peut lui accorder une prolongation de délai si sa demande de révision est en retardNote de bas de page 2.

[11] Pour obtenir une prolongation, une partie prestataire doit démontrer qu’elle :

  • a une explication raisonnable pour avoir demandé plus de temps;
  • a toujours eu l’intention de demander à la Commission de réviser sa décisionNote de bas de page 3.

[12] Parfois, la personne doit aussi démontrer que :

  • sa demande a une chance raisonnable de succès;
  • le fait que la Commission ou une autre partie accorde un délai plus long ne causerait aucun préjudiceNote de bas de page 4.

[13] Une partie prestataire doit remplir les quatre critères lorsque certaines conditions s’appliquent, y compris lorsqu’elle demande une révision plus de 365 jours après que la Commission l’a informée de sa décisionNote de bas de page 5.

[14] La Commission affirme que la demande de révision est en retard de plus de 365 jours et que les quatre facteurs s’appliquent donc. Je ne vois aucune preuve du contraire. Je conclus donc que les quatre éléments s’appliquent.

La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire?

[15] Je juge que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a rejeté la demande de prolongation du délai.

[16] La décision de la Commission d’accorder ou non plus de temps à l’appelante est discrétionnaireNote de bas de page 6. Par conséquent, il appartient à la Commission de décider si l’appelante a rempli les conditions requises pour obtenir une prolongation.

[17] La loi dit que je peux rendre une décision sur la prolongation du délai seulement si je conclus d’abord que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon non judiciaire ou a agi de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 7.

[18] Le pouvoir discrétionnaire est exercé de façon non judiciaire si la Commission a fait l’une des choses suivantesNote de bas de page 8 :

  • elle a agi de mauvaise foi;
  • elle a agi de façon discriminatoire;
  • elle a agi dans un but ou pour un motif irrégulier;
  • elle a tenu compte d’un facteur qui n’était pas pertinent;
  • elle n’a pas tenu compte d’un facteur pertinent.

[19] L’appelante doit prouver que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que la Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

[20] L’appelante affirme que la Commission a ignoré des facteurs pertinents. Elle dit que sa rémunération assurable a diminué parce qu’elle a été affectée à des tâches légères après un accident de voiture, et que sa rémunération avant l’accident devrait être utilisée pour calculer son taux de prestations hebdomadaires. Elle affirme également avoir communiqué avec la Commission à plusieurs reprises, mais ne pas avoir été avisée de demander une révision.

[21] La Commission affirme avoir exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder une prolongation du délai à l’appelante.

[22] L’appelante a déclaré qu’elle a eu un accident de voiture en 2018. Elle explique qu’à son retour au travail, elle a effectué des tâches légères pour son employeur.

[23] L’appelante affirme avoir reçu la décision initiale de la Commission. Elle dit s’être rendue au bureau de Service Canada à plusieurs reprises en septembre et en octobre 2021, mais personne ne lui a dit de remplir le formulaire de demande de révision.

[24] Dans un courriel daté du 15 octobre 2021, l’appelante a communiqué avec le service des ressources humaines de son employeur. Elle a dit à son employeur qu’elle effectuait des tâches légères. Elle lui a dit que la Commission lui avait imposé un trop-payé. Elle lui a demandé de modifier le relevé d’emploi en y ajoutant sa rémunération d’heures à temps pleinNote de bas de page 9.

[25] L’employeur a répondu à l’appelante dans un courriel daté du 20 octobre 2021. Il a précisé que la rémunération et les heures réelles de l’appelante étaient déclarées dans son relevé d’emploi. Il a aussi affirmé qu’elle travaillait habituellement de 65 à 68 heures toutes les deux semaines, et qu’il ne pouvait pas modifier son relevé d’emploiNote de bas de page 10.

[26] L’appelante affirme qu’elle n’est pas en désaccord avec le relevé d’emploi que la Commission a utilisé pour recalculer son taux de prestations hebdomadaires. Cependant, elle affirme que sa rémunération assurable a diminué parce qu’elle a été affectée à des tâches légères après son accident de voiture, et que la Commission devrait utiliser sa rémunération avant l’accident pour calculer son taux de prestations hebdomadaires.

[27] L’appelante affirme que chaque fois qu’elle recevait une lettre de la Commission ou de l’Agence du revenu du Canada, elle téléphonait pour dire qu’elle n’était pas d’accord. Elle dit que la Commission aurait dû tenir compte du fait que cela ne l’aidait pas.

[28] L’appelante affirme avoir entendu parler de la possibilité de faire une demande de révision pour la première fois en juin 2023, lorsque son amie lui a dit qu’elle pouvait aller chercher le formulaire en ligne. Elle dit avoir rempli le formulaire et l’avoir présenté le jour même.

[29] L’appelante affirme avoir quitté son pays d’origine pour venir au Canada pour des raisons liées aux droits de la personne, mais la décision de lui imposer un trop-payé la blesse vraiment. Elle dit ne pas connaître les règles et les lois. Elle a eu recours à l’aide d’un interprète à l’audience.

[30] La Commission affirme avoir tenu compte des facteurs suivants lorsqu’elle a décidé de rejeter la demande de révision tardive de l’appelante, notammentNote de bas de page 11 :

  • elle connaissait la décision initiale;
  • elle n’a pas démontré que quelque chose l’avait empêchée de présenter sa demande de révision dans les 30 jours;
  • au total, 15 avis de dette ou relevés de compte lui ont été émis du 18 septembre 2021 au 17 mai 2023, et 4 compensations ont été appliquées d’octobre 2021 à mars 2023;
  • l’employeur a fourni un relevé d’emploi modifié, ce qui a entraîné un nouveau calcul de sa demande;
  • sa déclaration selon laquelle les agents du Centre Service Canada ne l’ont pas aidée n’est pas crédible, compte tenu de la durée du retard.

[31] Je conclus que la Commission a utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder une prolongation du délai. Je m’appuie sur les notes de la Commission pour rendre cette décision. Il appartenait à la Commission de décider que la déclaration de l’appelante selon laquelle les agents du Centre Service Canada ne l’avaient pas aidée n’était pas crédible, étant donné la durée du retard. Je juge que cette décision n’a pas été rendue de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[1] Je ne suis pas d’accord avec l’appelante pour dire que la Commission aurait dû tenir compte du fait que sa rémunération assurable avait diminué parce qu’elle a été affectée à des tâches légères après son accident de voiture. Ce n’est pas un facteur pertinent. En effet, la Loi sur l’assurance-emploi établit la façon dont le taux de prestations hebdomadaires est calculé en fonction de la rémunération hebdomadaire assurable réelleNote de bas de page 12. De plus, la Cour a déclaré que les décideurs ne sont pas autorisés à réécrire la loi et qu’ils ne peuvent pas l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaireNote de bas de page 13.

[32] Je juge qu’il n’y a aucune preuve que la Commission a agi de mauvaise foi ou de façon discriminatoire, qu’elle a agi dans un but ou pour un motif irrégulier ou qu’elle a tenu compte d’un facteur non pertinent.

Conclusion

[33] L’appelante n’a pas démontré que la Commission a omis d’exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle ne lui a pas accordé une prolongation du délai pour demander une révision de sa décision initiale.

[34] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.