Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

En août 2021, l’appelant a quitté son emploi pour se concentrer sur son entreprise de rénovation et de réparation résidentielle. Le 10 janvier 2022, son enfant est né prématurément. L’appelant s’est donc absenté de son travail pour s’occuper du bébé et de son enfant plus âgé pendant que son épouse se rétablissait. Il a demandé des prestations parentales de l’assurance-emploi, en pensant qu’il y était admissible grâce aux heures d’emploi assurable accumulées à son emploi précédent. Sa demande a été soumise le 4 mars 2022, et une période de prestations a été établie à compter du 27 février 2022. Selon les renseignements que l’appelant a fournis sur le travail qu’il faisait à son propre compte, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il n’était pas en chômage. Elle a déclaré que l’appelant contribuait de façon importante à l’exploitation d’une entreprise. Une inadmissibilité indéfinie a été imposée à compter du 28 février 2022. La Commission a décidé que l’appelant n’avait pas de motif valable qui justifiait sa demande de prestations tardive. Elle a alors rejeté sa demande d’antidatation.

L’appelant a fait appel de la décision de la Commission à la division générale. Dans son avis d’appel, il a expliqué qu’il ne voulait pas que sa demande commence le 21 août 2021. Il visait plutôt le 10 janvier 2022, soit la date de la naissance de son enfant. La division générale a rejeté l’appel. L’appelant a alors porté la décision de la division générale en appel à la division d’appel. La Commission a convenu que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle avait examiné le travail indépendant de l’appelant pendant la mauvaise période.

La division d’appel a établi que la division générale avait commis des erreurs de droit dans sa décision. La division d’appel était d’accord avec la Commission : la division générale avait fait erreur en n’évaluant pas le travail indépendant de l’appelant pendant la période qui commençait le 28 février 2022. La division d’appel a aussi convenu avec la Commission que la division générale avait analysé la participation de l’appelant au sein de son entreprise pendant la mauvaise période, soit du 10 janvier au 5 mars 2022. C’était une erreur de droit. La division d’appel a convenu avec les parties que la division générale avait commis une erreur de droit en évaluant incorrectement la situation, et en se concentrant trop sur la question de savoir si l’appelant avait l’intention de trouver un autre emploi.

La division d’appel a accueilli l’appel et a renvoyé l’affaire à la division générale. Ainsi, l’appelant aura l’occasion d’expliquer sa contribution à l’exploitation de son entreprise pendant la période débutant le 28 février 2022.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : TB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1736

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : T. B.
Représentante : S. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentant : Daniel McRoberts

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 29 mars 2023 (GE-22-3372)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 novembre 2023

Personnes présentes à l’audience :

Représentante de l’appelant
Représentant de l’intimée

Date de la décision : Le 30 novembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-396

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’affaire sera renvoyée à la division générale pour réexamen.

Aperçu

[2] L’appelant, T. B. (prestataire), a quitté son emploi en août 2021 pour se consacrer à son entreprise de rénovation et de réparation domiciliaires. Il a demandé des prestations parentales de l’assurance-emploi le 4 mars 2022.

[3] La partie intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations parce qu’il effectuait des semaines entières de travail autonome et qu’il n’était pas considéré comme étant en chômage.

[4] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel. Elle a conclu qu’on doit présumer que le prestataire effectuait des semaines entières de travail et qu’il n’avait donc pas démontré que son niveau d’engagement dans son entreprise était limité. Cela signifie qu’il n’était pas en chômage.

[5] Le prestataire fait maintenant appel de la décision de la division générale. Il soutient que la division générale a fondé sa décision sur des erreurs de fait importantes et a commis des erreurs de droit en se concentrant sur ses démarches pour trouver un emploi. La Commission soutient également que la division générale a commis une erreur de droit en examinant le travail autonome du prestataire au cours de la mauvaise période.

[6] J’accueille l’appel. La division générale a commis des erreurs de droit dans sa décision. Je renvoie l’affaire à la division générale. Elle tiendra une nouvelle audience.

Questions en litige

[7] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La division générale a-t-elle commis des erreurs de droit en ce qui concerne son analyse du niveau d’engagement du prestataire dans son entreprise?
  2. b) Si la division générale a commis une erreur, comment devrait-elle être rectifiée?

Analyse

[8] Je peux intervenir dans la présente affaire seulement si la division générale a commis une erreur pertinente. Je dois donc vérifier si la division générale a fait au moins l’une des choses suivantesNote de bas de page 1 :

  • elle n’a pas offert une procédure équitable;
  • elle n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  • elle a mal interprété ou mal appliqué la loi;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits de l’affaire.

Contexte

[9] Le prestataire a quitté son emploi en août 2021 pour se consacrer à son entreprise de rénovation et de réparation domiciliaires. Son enfant est né prématurément le 10 janvier 2022. Note de bas de page 2 Alors que son épouse se rétablissait, le prestataire a suspendu temporairement toute activité liée à son entreprise pour s’occuper de son nouveau-né et de son enfant aîné.Note de bas de page 3

[10] Le prestataire a demandé des prestations parentales. Il croyait remplir les conditions requises étant donné les heures assurables qu’il avait accumulées dans le cadre de son emploi précédent. Il a présenté sa demande le 4 mars 2002 [sic] et sa période de prestations a été établie à partir du 27 février 2022.Note de bas de page 4

[11] À la lumière des renseignements que le prestataire a fournis au sujet de son travail autonome dans le formulaire de demande, la Commission a décidé qu’il n’était pas en chômage. La Commission a déclaré que le prestataire exploitait une entreprise et que son niveau d’engagement n’était pas limité. Une inadmissibilité d’une durée indéterminée a été imposée à compter du 28 février 2022.Note de bas de page 5

[12] Le prestataire avait demandé que sa demande débute le 21 août 2021. La Commission a décidé que le prestataire n’avait pas de motif valable justifiant le retard à présenter sa demande de prestations et a rejeté sa demande d’antidatation.Note de bas de page 6

[13] Dans son avis d’appel à la division générale, le prestataire a expliqué qu’il n’avait pas l’intention de demander que la période de prestations commence le 21 août 2021. Il a dit qu’il voulait qu’elle commence le 10 janvier 2022, date de la naissance de son enfant.Note de bas de page 7

La division générale a commis une erreur de droit

[14] Dans sa décision, la division générale a souligné qu’il n’y avait pas de décision de révision sur la question de l’antidatation de la demande. Elle a conclu qu’elle ne pouvait pas examiner cette question ni décider si la demande devait commencer le 10 janvier 2022, comme l’avait demandé le prestataire. La division générale a indiqué qu’elle examinerait seulement la question du travail autonome du prestataire.Note de bas de page 8

[15] Malgré l’absence de décision de révision sur la question de l’antidatation de la demande, la division générale a analysé le niveau d’engagement du prestataire dans son entreprise pendant la période du 10 janvier au 5 mars 2022.Note de bas de page 9

[16] La division générale a conclu qu’on pouvait présumer que le prestataire effectuait des semaines entières de travail parce qu’il était travailleur indépendant.Note de bas de page 10 Elle a examiné les six facteurs énoncés dans la jurisprudence qui permettent de décider si une exception s’applique en raison d’un niveau d’engagement limité dans le cadre du travail indépendant.Note de bas de page 11

[17] La division générale a appliqué les facteurs et a conclu que cinq des six facteurs appuient le fait que le niveau d’engagement du prestataire dans son entreprise n’était pas limité.Note de bas de page 12 Elle a souligné que la jurisprudence indique que deux des facteurs sont particulièrement importants : le temps consacré au travail indépendant et la question de savoir si la partie prestataire avait l’intention de trouver un autre emploi rapidement.Note de bas de page 13

[18] La division générale a reconnu que le prestataire a soutenu qu’il ne devrait pas avoir à prouver qu’il avait l’intention de trouver un autre emploi parce qu’il demandait des prestations parentales.Note de bas de page 14 Il prévoyait reprendre son travail autonome après son congé.

[19] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit en se concentrant sur ses démarches pour trouver un autre emploi. Il affirme que cela ne devrait pas être exigé lorsqu’il est question d’un congé parental, car on ne l’exigerait pas s’il n’était pas un travailleur indépendant. Il dit qu’il s’est consacré à son entreprise jusqu’à la naissance de son enfant, mais qu’après il s’occupait à temps plein de ses enfants.Note de bas de page 15

[20] Dans ses observations écrites, la Commission a déclaré que la division générale avait commis une erreur de droit en examinant la période du 10 janvier au 5 mars 2022.Note de bas de page 16 Elle fait valoir que la division générale était tenue d’examiner la mesure dans laquelle le prestataire exerçait son emploi à titre de travailleur indépendant au cours des semaines de sa période de prestations.Note de bas de page 17 Si le travail indépendant est d’une mesure limitée pour une semaine donnée, le prestataire n’est pas considéré comme travaillant une semaine entière pendant cette semaine.

[21] Je suis d’accord avec la Commission pour dire que la division générale a commis une erreur en omettant d’évaluer le travail indépendant du prestataire pour la période commençant le 28 février 2022.

[22] À l’audience, le représentant de la Commission a fait valoir que la division générale avait également commis une erreur en accordant trop d’importance à la question de savoir si le prestataire essayait de se trouver un autre emploi. La Commission affirme qu’il ne faut pas s’attendre à ce que les prestataires qui demandent des prestations spéciales soient à la recherche d’un autre emploi.

[23] La Commission soutient que la division générale a commis une erreur dans son interprétation de ce facteur lorsqu’elle a évalué le niveau d’engagement du prestataire dans son entreprise et que cela aurait dû être abordé plus clairement dans la décision écrite. La Commission ajoute qu’il y avait également un manque de clarté quant au montant de temps que le prestataire a consacré à son entreprise et que ce facteur n’a pas été évalué correctement ni suffisamment.

[24] Je suis d’accord avec la Commission pour dire qu’en se concentrant sur la période du 10 janvier au 5 mars 2022, la division générale a analysé le niveau d’engagement du prestataire au cours de la mauvaise période. Il s’agit d’une erreur de droit. Je suis également d’accord avec les parties pour dire que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de soupeser correctement les facteurs et en mettant indûment l’accent sur la question de savoir si le prestataire avait l’intention de trouver un autre emploi.

Réparation

[25] Pour rectifier l’erreur de la division générale, je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre ou je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.

[26] Les parties conviennent que la division générale a commis des erreurs dans sa décision, mais elles ne s’entendent pas sur la réparation appropriée. La Commission affirme que l’affaire devrait être renvoyée à la division générale pour que le prestataire puisse fournir des renseignements sur la période commençant le 28 février 2022.

[27] Le prestataire soutient que le dossier est complet et qu’il a eu l’occasion de présenter ses arguments. Il est d’avis que je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, à savoir qu’il était admissible aux prestations du 10 janvier au 5 mars 2022.

[28] Je comprends que le prestataire aimerait que je rende une décision pour qu’il ne soit pas obligé de se présenter à une autre audience devant la division générale. Cependant, je suis d’accord avec la Commission pour dire que le prestataire n’a pas été interrogé sur son niveau d’engagement dans son entreprise pendant la bonne période.

[29] Je retiens que le prestataire croit avoir demandé que la période de prestations commence le 11 janvier 2022 dans son avis d’appel. La réparation qu’il aimerait obtenir ne relève pas de ma compétence.

[30] Comme il n’y a pas eu de décision de révision sur la question de l’antidatation, je ne peux pas rendre une décision sur l’admissibilité du prestataire aux prestations avant le 27 février 2022. La représentante du prestataire n’était pas certaine si une demande de révision sur la question de l’antidatation avait été présentée. Cette étape devra être franchie si le prestataire veut que sa période de prestations commence plus tôt.

[31] Je renvoie l’affaire à la division générale pour que le prestataire ait l’occasion d’aborder son niveau d’engagement dans son entreprise pour la période commençant le 28 février 2022.

Conclusion

[32] L’appel est accueilli. L’affaire sera renvoyée à la division générale pour réexamen.

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