Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1746

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (541067) de la Commission de l’assurance-emploi du Canada datée du 26 octobre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Ambrosia Varaschin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 3 mai 2023
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 10 mai 2023
Numéro de dossier : GE-22-3766

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant ses études. Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que l’appelant était inadmissible aux prestations régulières d’assurance-emploi du 5 mai au 25 juillet 2022 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Une partie prestataire doit être disponible pour travailler pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. La disponibilité est une exigence continue. Par conséquent, une partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[4] L’appelant a suivi un programme d’opérateur en cybersécurité à temps plein du 6 avril 2021 au 25 avril 2022. Il s’agissait d’un programme de formation recommandé et approuvé, ce qui signifie qu’il n’avait pas à prouver sa disponibilité pour travailler pendant ses étudesNote de bas de page 1.

[5] L’appelant a décidé de poursuivre ses cours pour atteindre un autre niveau de certification et devenir analyste en cybersécurité. Toutefois, il n’était pas admissible à un autre programme de formation recommandé. L’appelant doit donc prouver qu’il était disponible pour travailler pendant ce deuxième programme, qui se donnait du 5 mai au 25 juillet 2022.

[6] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler. L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’il était disponible pour travailler.

[7] La Commission affirme que l’appelant n’était pas disponible parce qu’il était aux études à temps plein.

[8] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme qu’il était disponible et à la recherche d’un emploi. Cependant, tous les postes en cybersécurité et en technologies de l’information (TI) qu’il a trouvés étaient pour des personnes expérimentées et non nouvellement diplômées.

Question en litige

[9] L’appelant était-il disponible pour travailler pendant ses études?

Analyse

[10] Deux articles de loi différents exigent que les prestataires démontrent leur disponibilité pour le travail. La Commission a décidé que l’appelant était inadmissible selon ces deux articles. Il doit donc respecter les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[11] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 2. Le Règlement sur l’assurance-emploi énonce des critères qui expliquent le sens de « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 3 ». Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[12] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une personne doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 4. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 5. Je vais examiner ces éléments ci-dessous.

[13] La Commission a décidé que l’appelant était inadmissible aux prestations parce qu’il n’était pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[14] De plus, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les prestataires qui sont aux études à temps plein sont présumés ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 6. C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Autrement dit, on peut supposer que les personnes qui étudient ne sont pas disponibles pour travailler lorsque la preuve montre qu’elles sont aux études à temps plein.

[15] Je vais d’abord voir si je peux présumer que l’appelant n’était pas disponible pour travailler. Ensuite, je vérifierai s’il était disponible selon les deux articles de loi sur la disponibilité.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[16] La présomption selon laquelle les personnes qui étudient ne sont pas disponibles pour travailler s’applique seulement aux personnes qui étudient à temps plein.

L’appelant ne conteste pas qu’il est étudiant à temps plein

[17] L’appelant convient qu’il est étudiant à temps plein et je ne vois aucune preuve du contraire. J’admets donc ce fait.

[18] Par conséquent, la présomption s’applique à l’appelant.

[19] La présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler peut être réfutée. Si la présomption était réfutée, elle ne s’appliquerait pas à l’appelant.

[20] L’appelant peut réfuter la présomption de deux façons. Il peut démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas de page 7. Il peut aussi démontrer qu’il y a des circonstances exceptionnelles dans son casNote de bas de page 8.

[21] L’appelant affirme qu’il a déjà travaillé pendant ses études. Il a travaillé pour le ministère des Pêches et des Océans pendant trois mois, alors qu’il suivait ses cours. Il a témoigné qu’avant la pandémie, il avait une carrière d’agent de voyage dans l’organisation de vols et d’hébergement pour le gouvernement fédéral et les grandes entreprises. Cela fait donc des décennies qu’il n’est plus aux études, et il ne peut pas fournir d’autres exemples.

[22] La Commission affirme que ce n’est pas suffisant pour démontrer des antécédents de travail pendant les études. Elle affirme que l’appelant a eu la chance de trouver un emploi qui lui permettait d’écouter ses cours tout en travaillant, mais que d’autres employeurs n’étaient probablement pas aussi souples.

[23] Je conclus que l’appelant n’a pas démontré des antécédents de travail pendant qu’il suivait des cours à temps plein. Trois mois ne sont pas une période importante. Les tribunaux ont établi que les prestataires devraient pouvoir démontrer l’existence d’un régime de travail-études d’au moins un an pour réfuter la présomption de non-disponibilitéNote de bas de page 9.

La présomption n’est pas réfutée

[24] L’appelant n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[25] Le premier article de loi que je vais examiner dit que les prestataires doivent prouver que leurs démarches de recherche d’emploi étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 10.

[26] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de l’appelant étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 11. Je dois vérifier si ses démarches étaient soutenues et si elles visaient à trouver un emploi convenable. Autrement dit, l’appelant doit avoir continué à chercher un emploi convenable.

[27] Je dois aussi tenir compte des démarches de l’appelant pour se trouver un emploi. Le Règlement sur l’assurance-emploi dresse la liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. En voici quelques exemplesNote de bas de page 12 :

  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, des banques d’emploi ou des agences de placement en ligne;
  • communiquer avec des employeurs qui embauchent peut-être;
  • postuler à des emplois.

[28] La Commission affirme que l’appelant n’a pas fait assez de démarches pour se trouver un emploi.

[29] L’appelant n’est pas d’accord. Il postulait à des postes en TI et en administration, mais tous les postes exigeaient de l’expérience. L’appelant a fourni des éléments de preuve montrant qu’il a postulé à un emploi à la fin du mois de mai et à cinq emplois à la fin du mois de juinNote de bas de page 13. Selon l’appelant, c’est la preuve que ses démarches étaient suffisantes pour démontrer qu’il était disponible pour travailler.

[30] Le Règlement sur l’assurance-emploi précise que les démarches des prestataires doivent être soutenuesNote de bas de page 14. Mais la preuve présentée par l’appelant démontre qu’il a postulé à la plupart de ces emplois sur une période de 30 heuresNote de bas de page 15. De plus, il n’a postulé à aucun emploi pendant les trois premières semaines de son programme ou au cours du dernier mois.

[31] Je conclus donc que l’appelant n’a pas démontré qu’il a fait des démarches habituelles et raisonnables pour se trouver un emploi pendant ses études.

[32] L’appelant n’a pas prouvé que ses démarches pour trouver un emploi étaient habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[33] Je dois aussi vérifier si l’appelant était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 16. La jurisprudence établit trois éléments dont je dois tenir compte pour rendre ma décision. L’appelant doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 17 :

  1. a) Il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Il n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment (c’est-à-dire trop) ses chances de retourner travailler.

[34] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois tenir compte de l’attitude et de la conduite de l’appelantNote de bas de page 18.

Vouloir retourner travailler

[35] L’appelant n’a pas démontré qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

[36] L’appelant a été inconstant dans ses réponses lorsqu’on lui a demandé s’il pensait quitter son cours s’il obtenait un emploi. Il a dit à plusieurs reprises à la Commission qu’il n’était pas prêt à quitter son programme pour un emploi s’il y avait un conflit d’horairesNote de bas de page 19. Il a aussi dit à la Commission qu’il quitterait son programme pour un emploi à temps pleinNote de bas de page 20.

[37] L’appelant n’a pas précisé clairement s’il quitterait ou non son programme pour un emploi pendant l’audience. Il a déclaré qu’il cherchait des emplois qui cadraient avec son horaire de cours, dans son domaine d’étude.

[38] Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant n’aurait pas quitté son programme pour un emploi.

[39] En général, pour remplir la condition de vouloir retourner travailler aussitôt que cela est raisonnablement possible, une personne aux études doit, selon la loi, être prête à quitter son cours si on lui offre un emploi convenableNote de bas de page 21. Elle peut prendre une excellente décision sur le plan personnel en choisissant de terminer son programme plutôt que d’accepter un emploi, mais cela n’élimine pas les obligations que la Loi sur l’assurance-emploi lui impose, notamment celle de prouver sa disponibilitéNote de bas de page 22.

[40] L’appelant ne voulait donc pas retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[41] Les démarches de l’appelant pour trouver un emploi convenable n’étaient pas suffisantes.

[42] J’ai tenu compte de la liste d’activités de recherche d’emploi donnée ci-dessus pour décider du deuxième élément. Pour le présent élément, la liste sert à titre indicatif seulementNote de bas de page 23.

[43] Durant ses démarches, l’appelant a notamment postulé à des emplois dans des sites et des banques d’emplois en ligne. J’ai expliqué ces motifs ci-dessus lorsque j’ai examiné si l’appelant avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi.

[44] Ces démarches n’étaient pas suffisantes pour répondre aux exigences du deuxième élément parce que l’appelant limitait sa recherche à des industries et qu’il n’a pas postulé à beaucoup d’emploisNote de bas de page 24. L’appelant postulait seulement à des emplois en informatique et en administration, ce qui n’était pas raisonnable parce qu’il avait un horaire strict. Le travail dans ces industries se déroule habituellement du lundi au vendredi, de 9 h à 17 h, et l’appelant n’était pas disponible alors en raison de son programme. Il aurait dû explorer des secteurs qui s’adaptent souvent aux horaires d’étude, comme le commerce de détail, les services et la sécurité. Il aurait dû chercher un emploi qui avait un horaire flexible ou atypique, de soir, de nuit ou de fin de semaine.

[45] Ainsi, l’appelant n’a pas adéquatement cherché un emploi convenable pendant ses études.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[46] L’appelant a établi des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de trouver un emploi.

[47] L’appelant affirme que ses cours virtuels obligatoires se déroulaient tous les matins de la semaine, de 8 h à 12 h, et qu’il faisait ses devoirs l’après-midi pendant 2 à 3 heures. Il dit que ses études prenaient de 30 à 40 heures par semaine.

[48] L’appelant fait valoir que les cours étaient enregistrés, alors il pouvait s’absenter pendant les quatre heures. Il ajoute qu’il pouvait faire ses devoirs à tout moment. Il dit qu’il aurait pu adapter son horaire de cours à un horaire de travail.

[49] La Commission fait valoir que l’appelant a admis qu’il était incapable de se trouver du travail en raison de son horaire de coursNote de bas de page 25. Elle dit qu’il limitait sa disponibilité pour travailler à des heures en dehors des cours. Selon la Commission, le programme de l’appelant limitait donc sa disponibilité pour le travail. Ainsi, l’appelant ne respectait pas le critère juridique de disponibilité.

[50] J’estime que l’horaire de cours de l’appelant limitait sa disponibilité pour travailler. Il a admis que son horaire limitait ses possibilités d’emploi et qu’il n’arrêterait pas son programme pour travailler. La disponibilité pour travailler ne peut pas se limiter aux heures atypiques en dehors d’un programme de formation qui limite considérablement l’horaire d’un prestataireNote de bas de page 26.

[51] Par conséquent, l’horaire de cours de l’appelant était une condition personnelle qui limitait indûment ses chances de trouver un emploi.

Ainsi, l’appelant était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[52] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je suis d’avis que l’appelant n’a pas démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[53] Les personnes qui étudient doivent démontrer leur disponibilité de façon convaincante, ce qui comprend une recherche d’emploi sérieuse et la volonté d’accepter tout emploi convenable qui leur est offertNote de bas de page 27.

[54] L’appelant n’était pas disponible pour travailler parce qu’il a décidé de terminer son deuxième programme à temps plein, sans que la Commission le lui ait recommandé. Le fait de ne pas avoir reçu d’approbation pour suivre un cours et de ne pas avoir prouvé sa disponibilité pour travailler signifie qu’il ne répondait pas aux exigences de la Loi sur l’assurance-emploi pour recevoir des prestationsNote de bas de page 28.

Conclusion

[55] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. C’est pourquoi je conclus que l’appelant ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[56] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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