Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1730

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de l’assurance-
emploi du Canada (586353) datée du 16 mai 2023
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 29 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 31 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-1645

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Décision

[1] B. S. est l’appelante. Je rejette son appel.

[2] L’appelante a rempli les conditions requises pour établir une période de prestations de maladie de l’assurance-emploi à compter du 20 novembre 2022. Elle a reçu le nombre maximal de 15 semaines de prestations de maladie au cours de cette période de prestations.

[3] L’appelante ne peut pas annuler sa période de prestations du 20 novembre 2022 pour tirer parti des modifications législatives qui sont entrées en vigueur le 18 décembre 2022.

Aperçu

[4] L’appelante a cessé de travailler le 22 août 2022 en raison d’une maladie. Elle a présenté une demande de prestations de maladie de l’assurance-emploi le 23 novembre 2022.

[5] La période de prestations de l’appelante a été établie et a commencé le 20 novembre 2022. L’appelante affirme qu’elle remplissait les conditions requises pour établir une période de prestations à compter du 18 décembre 2022. Ainsi, elle devrait être admissible à 26 semaines de prestations de maladie en vertu des nouvelles dispositions législatives.

[6] Après révision, la Commission de l’assurance-emploi a maintenu que l’appelante remplissait les conditions requises pour établir sa période de prestations à compter du 20 novembre 2022. Elle avait donc seulement droit à 15 semaines de prestations de maladie. L’appelante n’est pas d’accord et fait appel au Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[7] Quelle est la date à laquelle l’appelante a rempli les conditions requises pour établir sa période de prestations?

[8] Quel est le nombre maximal de semaines de prestations de maladie en date du 20 novembre 2022?

[9] L’appelante peut-elle annuler sa période de prestations du 20 novembre 2022 pour commencer une période de prestations ultérieure, de sorte qu’elle remplisse les conditions requises pour recevoir 26 semaines de prestations de maladie?

Analyse

Période de prestations

[10] Je conclus que l’appelante était admissible aux prestations de maladie et a établi une période de prestations à compter du 20 novembre 2022. Voici ce dont j’ai tenu compte.

[11] La Commission soutient que l’appelante a établi une période de prestations à compter du 20 novembre 2022, conformément à la loi qui était en vigueur à cette date.

[12] L’appelante affirme que lors d’une conversation téléphonique le 12 décembre 2022, le personnel de la Commission lui a assuré qu’elle remplirait les conditions requises pour recevoir 26 semaines de prestations de maladie en vertu des nouvelles dispositions législatives.

[13] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, une personne doit présenter une demande (demande initiale). Si elle remplit les conditions requises pour recevoir des prestations, une période de prestations est établie et des prestations lui sont duesNote de bas de page 1.

Conditions requises pour recevoir des prestations

[14] La loi prévoit qu’une partie prestataire remplit les conditions requises pour recevoir des prestations si, à la fois :

  1. a) il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;
  2. b) elle a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requisNote de bas de page 2.

[15] Dans la présente affaire, il n’est pas contesté que l’appelante remplit les conditions requises pour des prestations de maladie, comme l’exigeait sa demande de prestations (demande initiale) du 23 novembre 2022. Premièrement, elle a subi un arrêt de rémunérationNote de bas de page 3. Sa demande de prestations et son relevé d’emploi indiquent que son dernier jour de travail rémunéré était le 22 août 2022Note de bas de page 4. Elle a déclaré qu’elle n’est jamais retournée travailler et qu’elle demeure en arrêt de travail en raison de sa maladie. Je conclus donc qu’elle a subi un arrêt de rémunération au cours de la semaine du 21 août 2022.

[16] Deuxièmement, elle a accumulé le nombre requis d’heures d’emploi assurable durant sa période de référenceNote de bas de page 5. La loi précise qu’elle doit avoir accumulé au moins 600 heures d’emploi assurable afin de remplir les conditions requises pour des prestations de maladieNote de bas de page 6. Son relevé d’emploi indique qu’elle a accumulé 2 160 heures d’emploi assurable en date du 22 août 2022. Elle remplit donc les conditions requises pour recevoir des prestations.

Période de prestations

[17] La loi indique qu’une période de prestations est établie, selon le cas :

  1. a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  2. b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine est postérieure à celle de l’arrêt de rémunérationNote de bas de page 7.

[18] Dans la présente affaire, l’appelante a subi un arrêt de rémunération durant la semaine du 21 août 2022. Elle a présenté sa demande initiale le mercredi 23 novembre 2022. Le dimanche de la semaine qui est postérieure entre les deux est donc le 20 novembre 2022. Par conséquent, je conclus que l’appelante a subi un arrêt de rémunération et qu’elle a accumulé le nombre requis d’heures d’emploi assurable afin de remplir les conditions requises pour des prestations de maladie. De plus, sa période de prestations a été établie correctement à compter du 20 novembre 2022.

Admissibilité aux prestations

[19] L’appelante a fait valoir que lorsqu’elle a parlé au personnel de la Commission le 12 décembre 2022, elle n’avait toujours pas rempli les conditions requises pour des prestations, donc elle ne pouvait pas avoir établi une période de prestations. Elle affirme qu’elle n’avait pas rempli les conditions requises pour établir une période de prestations parce que la Commission n’avait pas finalisé sa demande et qu’elle n’avait pas encore présenté ses déclarations bimensuelles ni son certificat médical. Je ne suis pas d’accord.

[20] Comme il est indiqué ci-dessus, les déclarations bimensuelles ou les certificats médicaux ne font pas partie des conditions requises pour recevoir des prestations ou pour établir une période de prestations. Ceux-ci sont plutôt requis pour prouver son admissibilité à des prestations de maladie.

[21] La loi indique que pour être admissible à des prestations de maladie, une partie prestataire doit présenter un certificat établi par une ou un médecin ou autre spécialiste de la santé qui atteste son incapacité de travailler et qui indique la durée probable de la maladie, de la blessure ou de la mise en quarantaineNote de bas de page 8.

[22] La Loi sur l’assurance-emploi précise également qu’une partie prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations avant d’avoir rempli ses déclarations (présenté une demande) pour chaque semaine demandée et démontré qu’elle remplit les conditions requises pour les recevoirNote de bas de page 9.

[23] Dans ce cas-ci, lorsque l’appelante a présenté son certificat médical et rempli ses déclarations bimensuelles (demandes), elle est devenue admissible aux prestations de maladie. Elle confirme avoir reçu des versements pour 15 semaines de prestations de maladie. Par conséquent, être admissible à des prestations n’est pas la même chose que remplir les conditions requises pour établir une période de prestations.

Nombre maximal de semaines de prestations de maladie

[24] La loi qui était en vigueur le 20 novembre 2022 indique que 15 est le nombre maximal de semaines pendant lesquelles une partie prestataire peut recevoir des prestations de maladie au cours d’une période de prestationsNote de bas de page 10.

[25] Je suis d’accord avec la Commission quand elle affirme que l’appelante a seulement droit à 15 semaines de prestations de maladie. En effet, elle a rempli les conditions requises pour établir une période de prestations à compter du 20 novembre 2022. Une fois qu’elle a présenté son certificat médical et rempli ses déclarations bimensuelles, elle est devenue admissible au nombre maximal de 15 semaines de prestations de maladie, comme le prévoit la Loi sur l’assurance-emploi qui était en vigueur à ce moment-là.

[26] La Loi sur l’assurance-emploi n’accorde aucun pouvoir discrétionnaire quant à la durée des prestations de maladie. La Loi sur l’assurance-emploi qui était en vigueur le 20 novembre 2022 indique clairement qu’une personne peut recevoir un nombre maximal de 15 semaines de prestations de maladie au cours d’une période de prestationsNote de bas de page 11.

[27] Le Tribunal n’a pas la compétence d’ignorer ou de modifier la loi telle qu’elle est clairement écrite, peu importe les circonstancesNote de bas de page 12.

[28] L’appelante a raison de dire que le gouvernement du Canada a modifié la Loi sur l’assurance-emploi. Plus précisément, ces modifications ont été incluses dans la Loi no 1 d’exécution du budget de 2021, qui prévoyait l’augmentation du nombre maximal de semaines de prestations de maladie à 26 semainesNote de bas de page 13. Toutefois, ces modifications ne s’appliquent qu’aux prestataires qui remplissent les conditions requises pour établir une période de prestations à compter du 18 décembre 2022Note de bas de page 14. Par conséquent, l’appelante n’est pas admissible à 26 semaines de prestations de maladie au cours de sa période de prestations du 20 novembre 2022.

L’appelante peut-elle annuler sa période de prestations du 20 novembre 2022?

[29] La loi ne contient aucune disposition qui me permettrait d’annuler la période de prestations du 20 novembre 2022 pour que l’appelante puisse la reporter afin de tirer profit des modifications législatives qui sont entrées en vigueur le 18 décembre 2022Note de bas de page 15.

[30] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit deux scénarios où une période de prestations peut être annulée :

  1. a) la période de prestations est terminée et aucune prestation n’a été payée ou ne devait l’être pendant cette périodeNote de bas de page 16;
  2. b) peu importe si la période de prestations est terminée, si une personne le demande, la partie de cette période qui précède la première semaine à l’égard de laquelle des prestations ont été payées ou devaient l’être peut être annulée, si la personne remplit les conditions requises pour établir une nouvelle période de prestations à compter de la première semaine où des prestations ont été payées ou devaient l’être. Elle doit aussi démontrer qu’elle avait un motif valable justifiant son retard à demander l’annulationNote de bas de page 17.

[31] Dans la présente affaire, des prestations ont été versées au cours de la période de prestations du 20 novembre 2022. De plus, cette période n’est pas terminée. Par conséquent, elle ne peut pas être annulée selon la première option.

[32] Je reconnais que l’appelante pourrait offrir de rembourser les prestations qu’elle a reçues au cours de la période de prestations du 20 novembre 2022, afin de créer une situation dans laquelle les prestations n’ont pas été payées. Cependant, la loi ne prévoit pas cette possibilité.

[33] De plus, le remboursement des prestations reçues n’aiderait pas l’appelante. En effet, une période de prestations ne peut pas être annulée si des prestations ont été payées ou payables. Dans le cas présent, même si ces semaines de prestations de maladie n’avaient pas été payées, les prestations étaient quand même payables parce que l’appelante a présenté une demande initiale et remplissait les conditions requises pour les recevoir. Elle ne pourrait donc toujours pas annuler sa période de prestations de cette façon. Elle ne serait donc toujours pas en mesure d’annuler sa période de prestations.

[34] L’appelante a déclaré qu’elle n’a pas travaillé depuis le 22 août 2022. Ses heures d’emploi assurable lui ont servi à remplir les conditions requises pour établir sa période de prestations du 20 novembre 2022. Par conséquent, elle n’a pas d’heures d’emploi assurable lui permettant de remplir les conditions requises pour établir une nouvelle période de prestations à compter du 18 décembre 2022.

[35] L’appelante a reçu le nombre maximal de 15 semaines de prestations de maladie au cours de sa période de prestations du 20 novembre 2022. Elle ne peut donc pas annuler cette période de prestations pour en établir une autre le 18 décembre 2022 et tirer profit des nouvelles dispositions législatives.

Autres arguments

[36] L’appelante a fait valoir que la jurisprudence à laquelle la Commission fait référence ne s’applique pas dans son cas, car il est unique. Plus précisément, elle a dit ce qui suit : elle a présenté une demande de prestations plusieurs mois après avoir cessé de travailler, elle a accumulé suffisamment d’heures pour remplir les conditions requises pour des prestations le 18 décembre 2022, sa demande a été approuvée ou finalisée par la Commission seulement après le 18 décembre 2022, elle n’avait pas présenté ses déclarations ou son certificat médical avant que la loi ne change le 18 décembre 2022, et le personnel de la Commission lui avait dit que sa demande serait établie pour qu’elle reçoive 26 semaines de prestations de maladie.

[37] Je conviens que les décisions (la jurisprudence) sur lesquelles la Commission s’est fondée ne présentent peut-être pas exactement les mêmes faits que ceux de la situation de l’appelante. Cependant, la jurisprudence, qui découle de décisions judiciaires, énonce souvent des principes juridiques ou des précédents qui lient les tribunaux administratifs, même si la question en litige ou les faits principaux diffèrent. C’est le cas ici.

[38] J’éprouve beaucoup de compassion envers l’appelante. Cependant, ma décision n’est pas fondée sur l’équité ou les difficultés financières. Même si le personnel de la Commission avait dit quelque chose de différent à l’appelante au sujet de sa situation, je dois rendre ma décision en fonction des faits portés à ma connaissance et de l’application de la loi entourant l’assurance-emploiNote de bas de page 18. Il n’y a aucune exception et aucune marge de manœuvre.

[39] La Cour d’appel fédérale a déclaré que des règles rigides sont toujours susceptibles de donner lieu à des résultats sévères qui paraissent en contradiction avec les objectifs du régime législatif. Toutefois, aussi tentant que cela puisse être dans certains cas (comme celui-ci), il n’est pas permis aux arbitres, comme moi, de réécrire la loi ou de l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaireNote de bas de page 19.

[40] Si l’appelante souhaite déposer une plainte concernant les renseignements erronés qu’elle a reçus de Service Canada, elle peut communiquer avec le Bureau de la satisfaction des clients (BSC) à l’adresse suivante : https://www.canada.ca/fr/emploi-developpement-social/ministere/service-canada/bureau-satisfaction.html. Ce site Web indique que le BSC est un organisme neutre qui reçoit les commentaires et les plaintes des clients à propos de la prestation des services de Service Canada, en prend connaissance et y donne suite.

Conclusion

[41] L’appel est rejeté.

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