Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : KS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1767

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de prolongation
de délai et de permission de faire appel

Partie demanderesse : K. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 7 juin 2023
(GE-23-418)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 8 décembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-968

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Décision

[1] J’accorde au prestataire une prolongation de délai pour présenter une demande à la division d’appel. Cependant, je lui refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira donc pas de l’avant.

Aperçu

[2] K. S. est le demandeur dans cet appel. Il a demandé la prestation d’assurance‑emploi d’urgence : je l’appellerai donc le prestataire. Dans le cadre du programme de la prestation d’assurance-emploi d’urgence, les parties prestataires avaient droit à des prestations à un taux hebdomadaire de 500 $ si elles remplissaient les conditions requises. La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, versait aussi immédiatement une avance de 2 000 $ aux parties prestataires pour qu’elles obtiennent des prestations rapidement. Elle prévoyait récupérer cette avance de 2 000 $ en retenant les prestations des parties prestataires pour certaines semaines ultérieures de leur période de prestations.

[3] Le prestataire a reçu cette avance de 2 000 $. Cependant, il est retourné au travail et a cessé de demander la prestation d’assurance-emploi d’urgence avant que la Commission n’ait eu la chance de recouvrer l’avance en entier. La Commission lui a envoyé un avis de dette pour recouvrer l’avance.

[4] Le prestataire a reçu deux autres avis de dette pour d’autres trop-payés. Selon les dossiers de la Commission, le prestataire a également été payé deux fois par erreur pour les deux semaines du 12 au 25 juillet 2020. Par conséquent, il a reçu un trop-payé de 1 000 $. Le prestataire a aussi reçu cinq semaines de prestations auxquelles il n’avait pas droit. Il s’agissait de semaines au cours desquelles il avait travaillé et touché une rémunération. Cela a donné lieu à un autre trop-payé de 2 500 $.

[5] Le prestataire a déclaré dans sa demande de révision qu’il n’était pas d’accord avec le trop-payé de 2 000 $. Il s’agit du trop-payé qui découle de l’avis de dette du 9 juillet 2022. Le prestataire a discuté de sa demande de révision avec la Commission. Le remboursement de cette avance de 2 000 $ semble avoir été la seule question en litigeNote de bas de page 1. La Commission a maintenu sa décision du 9 juillet 2022 concernant le « versement anticipé ».

[6] Le prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, qui a examiné uniquement l’avance de prestations d’assurance-emploi d’urgence. La division générale a conclu que la Commission ne pouvait pas recouvrer la totalité de l’avance parce qu’elle en avait déjà recouvré deux semaines en retenant les prestations du 7 juin au 20 juin 2020. La division générale a jugé que le prestataire ne devait plus que 1 000 $ de l’avance.

[7] Le prestataire a demandé la permission de faire appel à la division d’appel lorsqu’il a découvert qu’il devait encore rembourser 4 500 $. Il a présenté sa demande en retard.

[8] J’accorde au prestataire une prolongation de délai pour présenter une demande à la division d’appel parce qu’il a une explication raisonnable pour son appel en retard. Par conséquent, j’ai examiné sa demande de permission de faire appel.

[9] Je refuse au prestataire la permission de faire appel parce que son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il n’a pas démontré qu’il est possible de soutenir que le processus de la division générale était inéquitable ou qu’elle avait commis une autre erreur que je peux prendre en considération.

Questions en litige

[10] Les questions en litige dans cet appel sont les suivantes :

  1. a) La demande a-t-elle été présentée en retard à la division d’appel?
  2. b) Si oui, dois-je prolonger le délai pour présenter la demande?
  3. c) Peut-on soutenir que la division générale a agi de façon inéquitable en n’envoyant pas sa décision au prestataire en temps opportun?

Analyse

La demande a été présentée en retard

[11] Dans son avis d’appel à la division générale, le prestataire a autorisé le Tribunal à communiquer avec lui par courriel. La division générale a rendu sa décision le 7 juin 2023 et l’a envoyée par courriel au prestataire le lendemain.

[12] Quand le Tribunal envoie un document à une partie par courriel, ses Règles de procédure précisent que le document est considéré comme étant reçu le jour ouvrable suivantNote de bas de page 2. Les Règles de procédure prévoient également qu’une partie peut démontrer que cette disposition ne devrait pas s’appliquer à elleNote de bas de page 3.

[13] Le prestataire a reconnu qu’il avait déjà reçu la décision lorsqu’il a appelé le Tribunal le 13 juin 2023. À part cela, il n’y a aucun élément de preuve quant à la date à laquelle il a effectivement reçu la décision. Je conclus qu’il a reçu la décision le 9 juin 2023, soit le jour ouvrable suivant la date à laquelle elle a été envoyée par courriel. Le prestataire n’a pas démontré qu’il a reçu la décision à une date ultérieure.

[14] Puisque la disposition concernant la date de réception d’un document envoyé électroniquement s’applique, la date limite à laquelle le prestataire pouvait faire appel était le 9 juillet 2023, soit 30 jours à compter du 9 juin 2023.

[15] Le délai pour faire appel d’une décision de la division générale à la division d’appel est de 30 jours suivant la date où la personne reçoit communication par écrit de la décisionNote de bas de page 4. Dans cette affaire, la date limite était le 9 juillet 2023.

[16] Le Tribunal a reçu la demande du prestataire le 19 octobre 2023. Elle était en retard de plus de trois mois.

Je prolonge le délai pour présenter la demande

[17] Pour décider s’il y a lieu de prolonger le délai, je dois vérifier si le prestataire a une explication raisonnable pour son retardNote de bas de page 5.

[18] Le prestataire n’a pas expliqué pourquoi il était en retard dans son formulaire de demande. Il a seulement dit qu’il pense que le délai devrait commencer à partir de sa dernière conversation avec le Tribunal en août 2023, lorsqu’on lui a envoyé le formulaire de demande. Selon les dossiers du Tribunal, le prestataire a appelé le 30 août 2023 pour discuter de la poursuite du processus d’appel. Le Tribunal lui a alors confirmé qu’on lui envoyait la demande de permission de faire appel.

[19] Le prestataire a également appelé le Tribunal le 13 juin 2023 pour demander quelles étaient les prochaines étapes. En se basant sur son interprétation de l’incidence de la décision, il croyait être d’accord avec le résultat de la décision. Par conséquent, on lui a dit d’attendre pour voir si une autre partie faisait appel. Il n’a pas été informé de son droit de faire appel ni du délai dont il disposait pour faire appel. Le prestataire a téléphoné de nouveau au Tribunal en juillet et à trois reprises en août. Il s’est dit préoccupé parce qu’on lui demandait de rembourser plus que ce qu’il devait d’après ce qu’il comprenait de la décision de la division générale. En octobre 2023, le prestataire a appelé le Tribunal pour dire qu’il avait envoyé sa demande en septembre.

[20] J’estime que le fait que le prestataire ait mal compris le sens de la décision de la division générale, conjugué à ses appels répétés au Tribunal, lui donne une explication raisonnable justifiant le retard de sa demande. Je lui accorde une prolongation de délai pour présenter une demande de permission de faire appel.

Je refuse au prestataire la permission de faire appel

Principes généraux

[21] Pour que la demande de permission de faire appel du prestataire soit accueillie, ses motifs d’appel doivent relever des « moyens d’appel ». Les moyens d’appel sont les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[22] Je peux examiner seulement les erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 6.

[23] Pour accueillir la demande de permission de faire appel et permettre au processus d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Les tribunaux ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendableNote de bas de page 7 ».

Équité procédurale

[24] Le seul moyen d’appel que le prestataire a sélectionné en remplissant sa demande à la division d’appel était celui concernant l’équité procédurale.

[25] Il n’a toutefois pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale avait agi de façon inéquitable.

[26] Il semble que le prestataire soit surtout préoccupé par le fait que le résultat de la décision était inéquitable. Si je le comprends bien, il croyait que la division générale avait réduit sa dette à 1 000 $. Il a été surpris de constater qu’il devait encore rembourser 4 500 $.

[27] En fait, la seule question dont la division générale était saisie était de savoir si le prestataire devait rembourser l’avance de 2 000 $ de prestations d’assurance-emploi d’urgence. La division générale a conclu qu’il ne devait que 1 000 $ sur cette avance de 2 000 $. Elle n’avait pas compétence pour examiner la dette supplémentaire de 1 000 $ qui découlait d’un versement effectué deux fois par erreur, ou la dette de 2 500 $ découlant de la demande de prestations du prestataire pour les semaines au cours desquelles il avait travaillé et gagné un revenu.

[28] Quoi qu’il en soit, l’équité procédurale n’a rien à voir avec la question de savoir si une partie estime que le résultat de la décision est équitable. L’équité procédurale concerne l’équité du processus.

[29] Les parties devant la division générale ont droit à certaines protections procédurales, comme le droit d’être entendues, le droit de connaître les arguments avancés contre elles et le droit d’obtenir une décision rendue par une personne impartiale.

[30] Le prestataire n’a pas soutenu que la division générale ne lui avait pas donné une chance équitable de se préparer à l’audience ou qu’il ne savait pas ce qui se passait lors de celle-ci. Il n’a pas suggéré qu’il n’avait pas eu une chance équitable de présenter ses arguments à l’audience ni de répondre aux arguments de la Commission. Il ne s’est pas plaint que le membre de la division générale était partial ou qu’il avait préjugé l’affaire avant de l’entendre.

[31] Après avoir lu la décision et examiné le dossier d’appel, je ne vois rien que la division générale ait fait ou omis de faire qui puisse me faire douter de l’équité du processus.

[32] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[33] J’accorde au prestataire une prolongation de délai, mais je lui refuse la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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