Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1650

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelant : C. C.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance emploi du Canada (570799) datée du
21 février 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 18 juillet 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 24 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-917

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal est en désaccord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi de le faire) au moment où il l’a fait. L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il avait d’autres solutions raisonnables que son départ. C’est donc dire qu’il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

Aperçu

[3] L’appelant a quitté son emploi de charpentier le 8 mars 2022 et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a examiné les raisons du départ de l’appelant. Elle a décidé qu’il avait volontairement quitté son emploi (ou avait choisi de démissionner) sans justification, de sorte qu’elle n’était pas en mesure de lui verser des prestations.

[4] Je dois décider si l’appelant a démontré que son départ constituait la seule solution raisonnable.

[5] La Commission affirme que l’appelant aurait pu retourner au travail après avoir été malade et chercher un autre emploi qui n’était pas aussi exigeant physiquement. Elle mentionne également qu’il aurait pu accepter l’autre emploi que son employeur lui a offert.

[6] L’appelant n’est pas d’accord et affirme qu’il n’a pas quitté son emploi. Il dit que son employeur l’a congédié parce qu’il avait l’impression que sa blessure l’empêcherait de travailler.

Question que je dois examiner en premier

L’appelant n’a pas envoyé la décision de révision rendue par la Commission

[7] L’appelant doit envoyer au Tribunal une copie de la décision de la Commission avec son avis d’appelNote de bas de page 1. II ne l’a pas fait. J’ai une copie du dossier de la Commission dans lequel se trouve cette décision. Je n’ai donc pas besoin que l’appelant l’envoieNote de bas de page 2.

Question en litige

[8] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification?

[9] Pour répondre à cette question, je dois d’abord examiner la question du départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite décider si l’appelant était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties ne conviennent pas que l’appelant a quitté volontairement son emploi

[10] Pour décider si l’appelant a quitté volontairement son emploi, je dois me demander s’il avait le choix de rester en poste ou de quitter l’emploiNote de bas de page 3.

[11] L’employeur de l’appelant l’a mis à pied. Il est retourné au travail le 2 février 2022.

[12] L’employeur de l’appelant a établi un relevé d’emploi le 10 août 2022. La démission de l’appelant est la raison invoquée pour établir le relevé. La Commission a demandé à l’appelant la raison pour laquelle il a quitté son emploi. L’appelant a déclaré qu’il avait été mis à pied et qu’il n’avait pas d’autres quarts de travail prévus après le 9 mars 2022. Il a confirmé à l’audience que c’est ce qu’il a dit à la Commission.

[13] Dans son avis d’appel, l’appelant a déclaré que son employeur avait mis fin à son emploi. Il a dit que l’employeur avait l’impression qu’une blessure l’empêcherait de travailler.

[14] Le médecin de l’appelant a rédigé une note. Il y est mentionné que l’appelant était inapte au travail pendant un mois à compter du 12 mars 2022. L’appelant a remis cette note à son employeur. Il a déclaré qu’il avait des douleurs à la hanche, de sorte que son médecin voulait qu’il soit en arrêt de travail.

[15] J’ai demandé à l’appelant pourquoi il n’était pas retourné au travail après le mois mentionné dans la note du médecin. Il a témoigné qu’à la mi-avril, son employeur lui a offert de travailler dans son entrepôt. L’appelant affirme qu’il s’agissait cependant d’un logement illégal et qu’il ne voulait pas s’en mêler. Il n’a donc pas repris le travail.

[16] L’employeur a informé la Commission de la note médicale présentée par l’appelant. L’employeur a dit s’attendre à ce que l’appelant reprenne le travail après avoir été en congé de maladie. L’employeur a affirmé qu’il avait offert à l’appelant du travail d’atelier, mais que cet emploi ne l’intéressait pas. L’employeur a établi le relevé d’emploi lorsqu’il a appris que l’appelant travaillait pour un autre employeur.

[17] L’appelant affirme qu’il ignorait que son employeur avait mis fin à son emploi jusqu’à ce qu’il découvre le relevé d’emploi que l’employeur a établi en août. Il a dit que cette situation lui paraissait étrange. Il a ajouté que si l’employeur l’avait congédié ou qu’il avait démissionné, l’employeur aurait dû établir le relevé d’emploi en avril.

[18] Je conclus que l’appelant a quitté volontairement son emploi. Bien que l’appelant affirme que son employeur a mis fin à son emploi, il était d’accord avec la preuve de la Commission selon laquelle son employeur lui avait offert du travail, qu’il a refusé. À mon avis, il importe peu que l’employeur ait établi le relevé d’emploi après avoir appris que l’appelant travaillait pour un autre employeur.

[19] Pour établir si l’appelant a quitté volontairement son emploi, je dois décider s’il avait le choix de reprendre son emploi. Je conclus qu’il avait ce choix. Je conclus que l’appelant aurait pu retourner au travail après avoir été en congé pour cause de maladie. Et je confirme que son employeur lui a offert du travail, mais qu’il l’a refusé.

[20] Comme il n’a pas repris son emploi, je conclus que c’est l’appelant qui a mis fin à son emploi. Je conclus donc que l’appelant a quitté volontairement son emploi.

Les parties ne conviennent pas que l’appelant avait une justification

[21] Les parties ne conviennent pas que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi lorsqu’il l’a fait.

[22] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle a quitté volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 4. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que la personne était fondée à poser ce geste.

[23] La loi explique ce qu’elle entend par « est fondée à » (justification). Elle prévoit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas. Elle prescrit qu’il faut tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 5.

[24] Il appartient à l’appelant de prouver qu’il avait une justificationNote de bas de page 6. Il doit faire cette preuve selon la prépondérance des probabilités. C’est donc dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable que le contraire que son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas. Pour décider si l’appelant était fondé à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances qui existaient lorsqu’il a démissionné.

[25] Un prestataire est fondé à quitter volontairement un emploi s’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que son départNote de bas de page 7. Sa justification peut comprendre des conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécuritéNote de bas de page 8. Elle comprend également les pratiques d’un employeur qui sont contraires au droitNote de bas de page 9.

[26] Un prestataire devrait discuter des conditions de travail avec un employeur afin d’établir s’il peut modifier les conditions en réponse aux préoccupations du prestataireNote de bas de page 10.

[27] L’appelant affirme qu’il n’a pas repris son emploi parce que son employeur lui a offert du travail dans un logement illégal. Il affirme qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de partir à ce moment-là parce qu’il se protégeait en refusant ce travail.

[28] La Commission affirme que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il avait des solutions de rechange raisonnables. Plus précisément, la Commission affirme que l’appelant aurait pu retourner au travail après avoir été malade et chercher un autre emploi qui n’était pas aussi exigeant physiquement. Elle mentionne également qu’il aurait pu accepter l’autre emploi que son employeur lui a offert.

[29] Je conclus que l’appelant aurait pu reprendre son emploi après avoir été malade. Je ne suis pas convaincue que sa déclaration selon laquelle son employeur construisait un logement illégal suffise à démontrer qu’il était fondé à quitter son emploi.

[30] Dans sa demande de révision, l’appelant a déclaré que son employeur lui avait offert un autre travail. Il a dit qu’il s’agissait de rénover un entrepôt pour en faire un logement illégal. Il a déclaré qu’il ne se sentait pas à l’aise de travailler sans permis. Il a donc refusé l’offre.

[31] L’épouse de l’appelant a témoigné à l’audience. Elle a parlé des problèmes de hanche de l’appelant. Elle a également témoigné au sujet de l’offre de l’employeur à l’appelant. Elle a déclaré que l’employeur avait offert à l’appelant de construire des armoires pour l’entrepôt, car il est spécialisé dans les armoires. Le témoin a confirmé que l’appelant avait dit non à l’employeur.

[32] Le témoignage du témoin diffère quelque peu de celui de l’appelant. L’appelant a mentionné qu’il a refusé le travail suivant : [traduction] « aider à creuser une fosse septique, à installer de la plomberie et à [faire] de l’électricité » sans permis. Et l’employeur semble le confirmer. Il a dit qu’il n’y avait pas de logement illégal où l’appelant s’est fait demander de creuser une fosse septique et d’installer de la plomberie.

[33] Puisque c’est l’appelant qui a refusé l’offre de travail de l’employeur, j’accorde plus de poids à ses propos au sujet du travail offert par l’employeur. Je conclus que son employeur lui a offert du travail qui comprenait le creusage d’une fosse septique et l’installation de plomberie.

[34] La Commission a laissé entendre à l’appelant qu’il aurait pu signaler l’employeur s’il estimait qu’il y avait des activités illégales. Dans ses observations, elle a déclaré que l’appelant n’avait rien fourni à l’appui de sa déclaration selon laquelle l’employeur se consacrait à un logement illégal. J’ai posé des questions à l’appelant à ce sujet. Il a déclaré qu’il ne devrait pas lui incomber de soumettre la question à la GRC.

[35] J’admets comme fait le témoignage de l’appelant selon lequel il craignait que le travail que l’employeur voulait lui confier fût illégal. Je conclus toutefois que l’appelant aurait pu parler à son employeur de ses préoccupations particulières avant de démissionner. Ainsi, l’appelant aurait pu apprendre qu’en fait, le travail n’était pas illégal.

[36] L’appelant n’a pas fourni de preuve étayant que son employeur n’avait pas de permis pour le travail dans l’entrepôt. Toutefois, s’il avait raison, il aurait aussi pu tenter de convaincre l’employeur d’obtenir les permis appropriés pour effectuer les travaux d’une manière sécuritaire et légale. Il aurait pu également s’adresser à une autorité compétente ou déposer une plainte auprès de celle-ci pour contribuer à résoudre la situation avant de démissionner.

[37] L’appelant a déclaré que son expérience depuis qu’il a présenté une demande de prestations et qu’il a essuyé un refus a causé des difficultés financières à sa famille et lui, au point où ils ont failli perdre leur maison. Je compatis avec l’appelant dans les circonstances. Toutefois, je conclus qu’il avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait, comme il a été mentionné précédemment.

[38] Je conclus que le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait.

Conclusion

[39] Je conclus que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.

[40] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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