Assurance-emploi (AE)

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Citation : JN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1973

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. N.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (588897) datée du 24 août 2023 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Guillaume Brien
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 8 décembre 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 20 décembre 2023
Numéro de dossier : GE-23-2617

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi quand il l’a fait. L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelant a quitté son emploi de bibliothécaire le 31 décembre 2022 et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a examiné les raisons de l’appelant pour quitter son emploi. Elle a conclu que ce dernier a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme qu’au lieu de quitter son emploi quand il l’a fait, l’appelant aurait pu accepter de travailler cinq jours par semaine, au moins jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur son grief. L’appelant aurait également pu continuer à travailler jusqu’à ce qu’il se trouve un autre emploi.

[6] L’appelant n’est pas d’accord et affirme que son départ n’était pas volontaire. Il dit qu’il n’a pas quitté pour prendre sa retraite. En audience, il affirme avoir quitté à cause de l’intimidation et des menaces vécues au travail.

Question que je dois examiner en premier

L’appelant a soumis un document volumineux juste avant l’audience

[7] L’audience en personne s’est tenue le 8 décembre 2023 à 10h30.

[8] Le matin de l’audience, le greffe du Tribunal m’a avisé de la réception d’un document de vingt pagesNote de bas de page 1.

[9] Après discussion avec l’appelant, ce dernier a accepté de faire l’audience comme prévu, avec l’entente que je lierai le document soumit tardivement plus tard après l’audience. C’est donc ce que j’ai fait.

Question en litige

[10] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[11] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite décider s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant a quitté volontairement son emploi

[12] En audience, l’appelant conteste le fait qu’il a quitté volontairement son emploi.

[13] La demande de prestations initiale de l’appelant, en date du 10 janvier 2023, indique que :

  • l’appelant a inscrit avoir été « congédié ou suspendu » de son emploiNote de bas de page 2.
  • comme motif de congédiement ou suspension, l’appelant a choisi l’option « Mon employeur ne m’a pas dit pourquoi j’ai été congédié ou suspendu. »Note de bas de page 3

[14] Or, dans une conversation téléphonique avec la Commission le 16 janvier 2023, l’appelant a expliqué les circonstances qui auraient provoqué son congédiement alléguéNote de bas de page 4 :

Il y a 2 ans, le syndicat a été en grief, mais on a pas obtenu ce qu’on voulait, on devait passé par le tribunal d’arbitrage, 2 jours avant que je passe devant le juge, j’étais contacté par l’employeur qui m’a informé que même si on gagne le procès, je ne vais pas bénéficier des avantages, j’étais pris entre 2 avocats celui du syndicat et celui de l’employeur. Alors on s’est mis d’accord que d’ici le 2022-12-31, mon contrat va prendre fin (entente mutuelle). Concernant la retraite obligatoire j’avais pas le choix de la prendre puisque j’ai eu 71 ans le 2022-11-23.

[15] Je note de cet entretien que l’appelant a confirmé avoir signé une entente mutuelle mettant fin à son contrat de travail. Il allègue aussi ne pas avoir eu le choix de prendre sa retraite puisqu’il a eu 71 ans le 23 novembre 2022. Finalement, je note la réticence de l’appelant à communiquer à la Commission l’entente signée entre lui et l’employeurNote de bas de page 5 :

Le prestataire mentionne qu’il ne souhaite pas qu’on parle avec l’employeur de l’entente parce que selon lui, il a signé des clauses qui disent qu’il doit garder le silence concernant l’entente, et qu’il n’a pas le droit de communiquer l’entente à personne, il a peur d’avoir des problèmes avec les avocats de l’université. Il a mentionné également qu’il ne peut pas nous fournir une copie de l’entente parce que c’est confidentiel.

[16] Le 22 mars 2023, la Commission a discuté avec l’employeur, qui a témoigné, entre autres, queNote de bas de page 6 :

  • Le client a demandé à prendre sa retraite.
  • Il n’y a jamais eu de congédiement dans son cas.
  • L’employeur affirme qu’il y a des employés de 88 ans, et que l’âge des retraites dépend des ententes et des pensions de tout un chacun.

[17] À la lumière de cette information contradictoire provenant de l’employeur, la Commission a alors recontacté l’appelant afin d’avoir des explications. Dans une conversation téléphonique en date du 22 mars 2023, l’appelant a fourni les informations additionnelles suivantes à la CommissionNote de bas de page 7 :

  • L’appelant affirme qu’il y a eu une entente entre lui et son employeur il y a deux ans disant qu’il pouvait partir à la retraite à n’importe quel moment mais pas après le 31 décembre 2022 à cause de ses 71 ans.
  • Il dit que c’était une entente de départ volontaire acceptée par son employeur et par lui-même.
  • Il dit qu’il y avait un litige au niveau de ses conditions de travail.
  • Il dit que sa cessation d’emploi est une fin de contrat et non pas un départ à la retraite.
  • Il dit qu’il était obligé de prendre sa pension à partir du 31 décembre 2022.
  • Il dit qu’il n’a pas quitté son emploi pour prendre sa retraite, mais en fonction de ses conditions de travail. Il dit qu’il n’a pas démissionné et il n’a pas été congédié. Il dit qu’il était contraint de partir à partir du 31/12/2022 selon une entente qu’il a lui-même acceptée il y a deux ans.
  • Demandé par la Commission s’il avait une preuve de fin de contrat de travail ou une preuve de contrainte à prendre sa retraite, l’appelant répond que l’entente entre lui et l’employeur est confidentielle et qu’elle ne doit pas être divulguée. Il ne peut donc fournir aucune preuve soutenant ses allégations.

[18] Le 24 mars 2023, la Commission rappelle l’employeur afin de valider certaines informationsNote de bas de page 8 :

  • Il y avait un grief entre l’appelant et l’employeur qui s’est soldé par une entente avec le syndicat.
  • Le client a accepté l’entente et a signé les documents y référent.
  • Selon l’entente découlant de la prise de retraite, le client pouvait prendre sa retraite dès le 01 juillet 2022 et au plus tard le 31/12/2022.
  • Personne ne l’a forcé à prendre sa retraite, ils ne peuvent pas forcer un employé à prendre sa retraite. Ils ont des employés de 80 ans encore en poste. C’était une décision personnelle.
  • Le client perçoit sa pension de retraite complète.
  • Si le client parle de fin de contrat de travail, ce serait une fin de contrat dû à l’entente de départ volontaire qu’il a accepté et signé il y a quelques années.
  • L’employeur confirme qu’il n’y a aucun doute sur le départ volontaire à la retraite de l’appelant.

[19] Suivant ces échanges téléphoniques, la Commission a donc rendu une décision négative, puisque la preuve prépondérante démontre que l’appelant a volontairement quitté son emploi sans motif valable au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 9.

[20] Le ou vers le 26 mai 2023, dans le cadre de la demande de révision de l’appelant, la Commission a une fois de plus contacté l’employeur, qui a témoigné queNote de bas de page 10 :

  • Le client a bel et bien quitté son emploi.
  • Ce n’est pas vrai que le client était obligé d’arrêter son emploi à 71 ans. Il y a des personnes de plus de 80 ans qui travaillent encore pour l’employeur.
  • Le client a pris la décision d’arrêter de travailler en date du 31/12/2022 suite à une lettre d’entente qui a été signée de plein gré, sans préjudice, acceptée librement et sans possibilité de contestation.

[21] La Commission a finalement réussi à obtenir la copie de l’entente en question, puisque la Loi oblige l’employeur à collaborer avec la Commission en fournissant les documents pour évaluer les motifs de la fin d’emploi d’un prestataireNote de bas de page 11.

[22] Cette Lettre d’entente, entre le syndicat, l’appelant et l’employeur (les Parties), mentionne, entre autres, que :

  • Le 3 septembre 2020, l’employeur a refusé la proposition d’horaire de travail soumise par l’appelant.
  • Le 17 septembre 2020, l’appelant a soumis un grief contestant le refus de l’employeur.
  • Des pourparlers sont alors intervenus entre les Parties afin de régler ce litige à l’amiable.
  • L’article 2 de la Lettre d’entente se lit comme suit : « Le Professionnel prend l’engagement de quitter son emploi auprès de (l’employeur) et ce, au plus tard le 31 décembre 2022; »
  • L’article 3 mentionne que l’employeur : « consent à ce que, d’ici son départ prévu au paragraphe précédent, le Professionnel continue de bénéficier, pour les sessions d’automne et d’hiver, d’un horaire de travail de 35 heures étalé sur quatre (4) jours, soit du lundi au jeudi inclusivement; »
  • L’article 4 mentionne que : « Le Syndicat et le Professionnel déclarent le Grief réglé à toutes fins que de droit; »
  • Les articles 5 et 6 donnent « quittance complète, finale et libératoire » à l’employeur et au Syndicat.
  • L’article 10 se lit comme suit : « Les Parties se déclarent d’accord avec les termes de la présente, reconnaissent que le contenu de la présente reflète fidèlement l’entente intervenue entre elles et déclarent avoir signé la présente librement et après juste considération; »
  • L’article 13 décrète que : « La présente constitue une transaction-quittance au sens des articles 2631 et suivants du Code Civil du Québec; ».

[23] Après avoir reçu copie de l’entente, la Commission a contacté l’employeur afin d’obtenir plus d’informations au sujet des motifs du grief déposé par l’appelantNote de bas de page 12 :

  • Le client avait un poste de 35 heures par semaine sur 5 jours.
  • Un directeur lui avait accordé de faire 35 heures sur 4 jours au lieu de 5 jours.
  • Cependant, les besoins ont évolué et aussi, par souci d’équité envers les autres employés, tous étant régis par la même convention collective, il fut demandé au client de recommencer à travailler ses 35 heures sur 5 jours semaine, ce qu’il a refusé, ne voulant travailler que 4 jours par semaine.
  • Le client a donc déposé un grief le 17 septembre 2020.
  • Le 28 mai 2021, les parties se sont entendu sur le fait que, comme le client ne voulait pas travailler 5 jours par semaine, le client prenait l’engagement de quitter son emploi au plus tard le 31/12/2022 et que d’ici là, il continuerait de bénéficier de l’horaire de 4 jours semaines.

[24] Finalement, en date du 24 août 2023, la Commission a recontacté l’appelant afin d’avoir des explications supplémentairesNote de bas de page 13 :

  • L’appelant affirme qu’il a été forcé de démissionner car il a voulu faire respecter la convention collective.
  • Questionné sur pourquoi il avait signé la Lettre d’entente s’il n’était pas d’accord avec celle-ci, l’appelant répète avoir été forcé de signer et ajoute que le syndicat de l’a pas défendu.
  • Questionné sur pourquoi il ne voulait pas travailler 5 jours pas semaine, l’appelant répond que l’employeur lui a fait de l’intimidation, qu’il lui a tordu le bras pour qu’il accepte l’entente et remette sa démission.

[25] Après avoir étudié l’ensemble du dossier, je détermine que l’appelant a quitté volontairement son emploi, étant donné que la preuve prépondérante au dossier démontre que :

  • La case #16 du Relevé d’emploi mentionne clairement : « Départ volontaire »Note de bas de page 14.
  • L’employeur a affirmé, tout au long du dossier, que l’appelant avait quitté volontairement son emploi afin de prendre sa retraite. Le témoignage de l’employeur, qui est une grande université québécoise, publique et reconnue, est crédible, stable, continu et désintéressé.
  • La Lettre d’Entente au dossier est extrêmement claire. C’est l’appelant qui prend l’engagement de quitter son emploi auprès de l’employeur au plus tard le 31 décembre 2022. Cette Lettre d’Entente est une transaction-quittance au sens du Code Civil du Québec et n’a jamais été contestée devant la justice. Le présent Tribunal n’est certainement pas l’instance appropriée pour contester cet écrit. De plus, il n’y a absolument aucune preuve au dossier que l’appelant fut contraint à signer cette entente.
  • Le dossier démontre clairement que l’appelant ne voulait pas travailler 5 jours par semaine et a déposé un grief à cette fin. Afin de régler le grief, les parties ont signé la Lettre d’Entente qui prévoyait le départ volontaire de l’appelant au plus tard le 31 décembre 2022.

[26] Compte tenu de la preuve au dossier, je détermine que l’appelant a quitté volontairement son emploi.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi

[27] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[28] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 15. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[29] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 16.

[30] L’appelant est responsable de prouver que son départ était fondé. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnableNote de bas de page 17.

[31] Pour trancher la question, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand l’appelant a quitté son emploi. La loi énonce des circonstances que je dois prendre en considérationNote de bas de page 18.

[32] Une fois que j’aurai déterminé les circonstances qui s’appliquent à l’appelant, celui-ci devra démontrer qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi à ce moment-làNote de bas de page 19.

Les circonstances présentes quand l’appelant a quitté son emploi

[33] L’appelant affirme que des circonstances énoncées dans la Loi s’appliquent à son cas.

[34] Plus précisément, en audience, l’appelant m’a expliqué avoir quitté son emploi puisqu’il subissait de l’intimidation et des menaces au travail.

[35] Au soutien de cette allégation, l’appelant me réfère à deux documents. J’analyserai maintenant ces documents afin de décider si ces documents prouvent que l’employeur aurait intimidé et menacé l’appelant afin qu’il quitte son emploi en signant l’entente de départ volontaire se trouvant au dossier.

Document #1 : lettre d’un ancien collègue, un bibliothécaire retraité auprès du même employeur universitaire

[36] Cette lettre se retrouve au document GD5-10 soumis par l’appelant peu avant l’audience.

[37] Après avoir lu cette lettre, je détermine que celle-ci a peu de poids dans le présent dossier, puisque :

  • L’ancien collègue ne raconte aucun événement particulier d’intimidation ou de menaces qu’aurait subi l’appelant. La lettre contient plutôt des déclarations vagues, imprécises et très larges. Aucun événement spécifique n’y est mentionné.
  • De plus, l’ancien collègue déclare que le départ volontaire constituait la seule solution raisonnable dans le cas de l’appelant, et que l’appelant était fondé à quitter son emploi. Cet ancien collègue n’est pas Membre de ce Tribunal. De plus, son opinion personnelle n’est supportée par aucun fait précis. Ce n’est tout simplement pas à cette personne de déterminer le dossier de l’appelant.
  • Après analyse, je détermine que ce document ne saurait établir en aucun cas, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant fut victime de harcèlement et d’intimidation au travail qui l’aurait contraint à signer l’entente de départ volontaire se trouvant au dossier, et ce, pour les raisons énumérées ci-dessus.

Document #2 : affiche qui ridiculiserait l’appelant

[38] Outre la lettre précitée, l’appelant me dit que la page GD5-17 démontrerait qu’on l’a ridiculisé au travail. Il m’explique que cette affiche comporte la photo de son ancien collègue, mais que sa photo à lui aurait été omise dans le but de le ridiculiser.

[39] Or, durant l’audience, l’appelant m’a expliqué durant de nombreuses minutes et à plusieurs reprises que son employeur tentait d’obtenir sa photo, mais que l’appelant n’a jamais consenti à la lui donner. Il m’a cité son droit à l’image prévu au Code Civil du Québec. Il est donc tout à fait normal, étant donné que l’appelant refusait de donner sa photo à l’employeur, que sa photo n’apparaisse pas sur l’affiche en GD5-17.

[40] De plus, le fait que l’employeur ait préparé une affiche sans la photo de l’appelant ne saurait objectivement être considéré comme de l’intimidation et des menaces.

L’appelant n’a pas su prouver avoir été intimidé ou menacé au travail

[41] Dans son dossier d’appel et durant son audience, l’appelant a tenté de faire le procès de ses 30 ans de services auprès de son employeur.

[42] J’ai demandé à l’appelant s’il avait soumis un grief concernant les soi-disant menaces et intimidations dont il déclare aujourd’hui avoir été victime. Celui-ci m’a répondu que non, qu’il avait tenté mais que son syndicat n’avait jamais accepté d’aller de l’avant.

[43] Si l’appelant avait vraiment subi de l’intimidation et des menaces qui l’auraient éventuellement contraint à signer l’entente de départ volontaire se trouvant au dossier, il aurait dû recourir à son syndicat. Le fait que son syndicat n’a pas accepté de déposer un grief sur ce point démontre le peu de sérieux des allégations de l’appelant à ce sujet.

[44] De plus, si l’appelant n’était pas content de la décision de son syndicat de ne pas soumettre un grief à propos de l’intimidation et des menaces prétendues, il aurait très bien pu contacter la Commission des Normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) afin d’obtenir de l’aide sur la suite des choses.

[45] Comme l’appelant a témoigné en audience avoir été représentant syndical durant quelque temps, il était très bien au fait de ses droits syndicaux et des droits découlant de la convention collective.

[46] Je détermine donc que l’appelant n’a pas su prouver, selon la prépondérance des probabilités, avoir subi des menaces ou de l’intimidation durant son emploi. Il n’y a aucune preuve à cet effet.

[47] De plus, l’appelant n’a pas su prouver qu’il aurait été forcé de signer la Lettre d’Entente de départ volontaire à cause de menaces et d’intimidation. L’appelant était libre de signer la Lettre d’entente concernant son départ volontaire comme en fait foi le texte même du document.

[48] Le fait que l’appelant puisse avoir des regrets aujourd’hui d’avoir signé ce document, de son plein gré, ne change rien à la situation.

[49] Finalement, l’appelant mentionne à plusieurs endroits que, selon lui, l’employeur violait la convention collective. Le Tribunal n’est pas l’endroit où de telles allégations doivent être tranchées. Le dossier de l’appelant démontre plutôt que, 2 jours avant d’aller devant le juge pour faire trancher son grief devant l’instance appropriée, l’appelant a plutôt décidé librement et en toute connaissance de cause de signer la Lettre d’entente concernant son départ volontaire, une entente qui constitue une transaction-quittance selon le Code Civil du Québec.

L’appelant avait d’autres solutions raisonnables

[50] Je dois maintenant examiner si le départ volontaire de l’appelant était la seule solution raisonnable à ce moment-là.

Solution raisonnable #1 : l’appelant aurait pu accepter de travailler cinq jours par semaine, au moins jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur son grief

[51] En audience, j’ai demandé à l’appelant pourquoi il n’aurait pas pu accepter de travailler 5 jours par semaine afin de conserver son emploi, au moins jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur son grief.

[52] Celui-ci m’a répondu :

  • Avoir fait enlever le mot ‘irrévocable’ et la notion de ‘départ à la retraite’ à l’ébauche de la Lettre d’entente afin que ces termes ne se retrouvent pas à la version finale de la Lettre d’entente.
  • N’avoir entrepris aucune démarche légale afin de résilier la Lettre d’entente se trouvant au dossier.
  • Que la Lettre d’entente ne doit pas être vue comme une démission mais plutôt comme une fin de contrat.

[53] Je n’accepte pas les explications de l’appelant à ce sujet.

[54] En effet, les explications de l’appelant à ma question n’expliquent rien. De plus, celui-ci a témoigné n’avoir aucune preuve d’empêchement médical à travailler 5 jours par semaine. Il m’a expliqué que, comme sa maison était à X, et comme son emploi était à X, il préférait ne travailler que 4 jours par semaine à cause du trajet. Il s’agit clairement d’un choix personnel de l’appelant.

[55] De plus, le fait que l’appelant ait décidé volontairement de signer la Lettre d’entente au dossier, 2 jours seulement avant que le Tribunal compétent tranche son grief, était clairement un choix personnel et volontaire de sa part.

[56] Je détermine donc qu’il aurait été raisonnable pour l’appelant d’accepter de travailler 5 jours par semaine afin de conserver son emploi.

Solution raisonnable #2 : l’appelant aurait pu continuer à travailler jusqu’à ce qu’il se trouve un autre emploi

[57] En audience, j’ai demandé à l’appelant pourquoi il n’aurait pas pu continuer à travailler jusqu’à ce qu’il se trouve un autre emploi.

[58] Celui-ci m’a répondu que :

  • Il aurait été obligé de prendre sa retraite au 1er décembre 2022 à cause de sa pension.
  • Il ne pouvait pas continuer à travailler à cause de l’intimidation et du harcèlement.

[59] Encore une fois, je n’accepte pas les explications de l’appelant.

[60] Premièrement, comme il a été déterminé plus haut, l’employeur n’avait pas d’âge obligatoire de la retraite. Il est donc faux pour l’appelant de prétendre qu’il devait prendre sa retraite à cause de son âge ou de sa pension.

[61] Deuxièmement, tel que déterminé ci-dessus, l’appelant n’a pas su prouver avoir été victime d’intimidation ni de harcèlement de la part de son employeur.

[62] L’appelant n’a donc réussi à démontrer pourquoi il n’aurait pas été raisonnable pour lui de ne pas signer la lettre d’entente et de rester à l’emploi de son employeur jusqu’à ce qu’il puisse se trouver un autre travail.

[63] Compte tenu des circonstances qui existaient quand l’appelant a quitté son emploi, l’appelant avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi, pour les raisons mentionnées précédemment.

[64] Par conséquent, l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi.

Conclusion

[65] Je conclus que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.

[66] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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