Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 30

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : B. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Daniel McRoberts

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 8 mars 2023
(GE-22-2995)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Par écrit
Date de la décision : Le 9 janvier 2024
Numéro de dossier : AD-23-339

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Même si la division générale a mal interprété un document, cela n’a pas changé le résultat.

Aperçu

[2] L’appelante, B. F. (la prestataire), fait appel de la décision de la division générale. La division générale a conclu que l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Autrement dit, elle a fait ou omis de faire quelque chose qui lui a fait perdre son emploi. La division générale a conclu que la prestataire n’a pas respecté la politique de vaccination de son employeur. Par conséquent, la prestataire a été exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[3] La prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de compétence, de procédure, de droit et de fait. Plus précisément, elle soutient qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable et que la division générale a commis une erreur de fait importante en décidant si elle s’était conformée à la politique de vaccination de son employeur.

[4] Au titre de la politique, la prestataire devait divulguer son statut vaccinal. La prestataire affirme l’avoir divulgué et s’être donc conformée à la politique de vaccination de son employeur. Puisqu’elle a respecté la politique de vaccination de son employeur, elle nie avoir commis une inconduite.

[5] La prestataire demande à la division d’appel de conclure qu’elle n’a commis aucune inconduite et qu’elle est admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[6] La Commission convient que la division générale a commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu que la prestataire n’avait pas déclaré son statut vaccinal. Toutefois, elle soutient que l’erreur de la division générale ne change pas le résultat puisqu’elle affirme qu’elle a quand même commis une inconduite. La Commission demande à la division d’appel de rejeter l’appel.

Questions en litige

[7] Voici les questions en litige dans le présent appel :

  1. a) La prestataire a-t-elle eu droit à une audience équitable?
  2. b) La division générale a-t-elle omis d’appliquer les principes du Guide de la détermination de l’admissibilité?
  3. c) La division générale a-t-elle omis de décider si la prestataire avait été congédiée à tort?
  4. d) La division générale a-t-elle bien soupesé la preuve?
  5. e) La division générale a-t-elle ignoré certains éléments de preuve concernant l’état de santé de la prestataire?
  6. f) La division générale a-t-elle commis une erreur de fait au sujet de la raison pour laquelle l’employeur a congédié la prestataire?
  7. g) La division générale a-t-elle mal interprété la preuve?
  8. h) Si la réponse à l’une ou l’autre des questions ci-dessus est « oui », cela change-t-il le résultat?

Analyse

[8] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale si celle-ci a commis une erreur de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 1.

[9] Pour ce type d’erreurs de fait, la division générale doit avoir fondé sa décision sur cette erreur et elle doit avoir commis l’erreur de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissanceNote de bas de page 2.

La division générale a fourni une audience équitable à la prestataire

[10] La division générale a tenu une audience équitable. Même si elle a accepté des documents de la Commission après l’audience, la membre a donné à la prestataire une occasion équitable de répondre. La prestataire a pu déposer une réponse. En fin de compte, le membre n’a pas accepté la réponse de la prestataire, concluant que le document n’était pas pertinent et donc irrecevable. Toutefois, cela ne signifie pas que le processus était inéquitable puisque la division générale avait le droit d’évaluer le document et d’établir son admissibilité.

[11] La prestataire soutient que la division générale ne lui a pas fourni une audience équitable parce qu’elle a accepté des éléments de preuve et des observations de la Commission après l’audience du 25 janvier 2023, tout en rejetant sa réponse à ce document.

[12] Le 25 janvier 2023, le Tribunal de la sécurité sociale a reçu des observations supplémentaires de la Commission (page GD10 du dossier d’appel). La Commission répondait aux documents que la prestataire avait déposés le (dimanche) 22 janvier 2023 (page GD8 du dossier d’appel). (Le Tribunal n’a pas réussi à faire circuler le document tardif de la prestataire à la Commission avant la veille de l’audience.)

[13] Dans ses observations supplémentaires présentées après l’audience (page GD10 du dossier d’appel), la Commission a fait valoir que les nouveaux documents de la prestataire (page GD8 du dossier d’appel) étaient en grande partie non pertinents, à l’exception d’un échange de courriels que la prestataire a eu avec son gestionnaire de cas. La Commission a soutenu que les courriels montraient que, malgré son congé de maladie, la prestataire savait qu’elle devait respecter la politique de vaccination de son employeur. Autrement, elle risquait d’être congédiéeNote de bas de page 3.

[14] La prestataire semble laisser entendre que la division générale aurait dû rejeter le document produit après l’audience par la Commission (page GD10 du dossier d’appel) parce que l’audience était déjà terminée. Toutefois, la Commission répondait aux documents (page GD8 du dossier d’appel) que la prestataire avait déposés près de la date de l’audience.

[15] Le Tribunal a envoyé un courriel à la prestataire le 2 février 2023Note de bas de page 4. Il lui a dit qu’il avait reçu des documents (page GD10 du dossier d’appel) de la Commission après l’audience. La membre a accepté le document. Le Tribunal a écrit : [traduction] « si vous avez d’autres arguments en réponse au document, nous devons les recevoir au plus tard le 10 février 2023 ».

[16] Ce délai était raisonnable. Les faits et les questions en litige étaient assez simples.

[17] La prestataire a communiqué avec le Tribunal le 17 février 2023. La prestataire a indiqué qu’elle n’avait pas reçu la lettre du Tribunal l’invitant à fournir une réponse au document produit après l’audience par la Commission au plus tard le 10 février 2023. Même si la date limite était passée, le Tribunal l’a quand même invitée à présenter une réponse. Par la suite, la prestataire a envoyé un courriel au Tribunal avec ses arguments.

[18] La prestataire a remis en question l’innocuité des vaccins contre la COVID-19. Elle avait fait une capture d’écran de la liste des effets indésirables possibles des vaccins de la Food and Drug Administration des États-Unis.

[19] La division générale n’a pas accepté le courriel de la prestataire. Le membre a expliqué que les observations de la prestataire n’étaient pertinentes à aucune des questions de droitNote de bas de page 5. La division générale a déterminé qu’elle [traduction] « ne peut pas remettre en question l’innocuité et l’efficacité des vaccins contre la COVID-19 ni le caractère raisonnable de la politique de vaccination contre la COVID-19 d’un employeur »Note de bas de page 6.

[20] La prestataire affirme que c’était injuste, mais la division générale avait le droit de décider si les documents de la prestataire devaient être acceptés ou rejetés en fonction de leur pertinence. (Si la division générale avait accepté la réponse de la prestataire après l’audience, comme la prestataire dit qu’elle aurait dû le faire, la question de l’importance à accorder à la réponse aurait alors été réglée. Cependant, cela n’aurait pas non plus satisfait la prestataire. Il ne fait aucun doute que la division générale n’aurait accordé aucune importance à sa preuve après l’audience.)

[21] La division générale a fourni à la prestataire une copie du document produit par la Commission après l’audience et elle lui a aussi donné une chance raisonnable de répondre. La prestataire a déposé une réponse. Elle ne peut donc pas dire qu’elle n’a pas eu droit à une audience équitable. La division générale avait le droit de juger de la pertinence et de l’admissibilité de la réponse de la prestataire.

La division générale n’a pas commis d’erreur de droit en n’appliquant pas les principes du Guide de la détermination de l’admissibilité

[22] La division générale n’a pas commis d’erreur de droit en omettant d’appliquer les principes du Guide de la détermination de l’admissibilitéNote de bas de page 7. Les allégations de la prestataire visent la Commission plutôt que la division générale.

[23] La prestataire soutient que la division générale n’a pas appliqué le chapitre 7 du Guide de la détermination de l’admissibilité. Elle affirme que ce chapitre exige que la Commission évalue objectivement les faits tels qu’ils sont présentés par une partie prestataire et son employeur, puis qu’elle se prononce en faveur de la version des faits qui semble la plus crédible. Il ne dit rien sur ce que l’on peut attendre de la division générale.

[24] Le Guide peut servir de guide à la division générale pour interpréter la Loi sur l’assurance-emploi et le Règlement sur l’assurance-emploi. Cependant, la jurisprudence dit que le Guide n’a pas un caractère obligatoire et ne remplace pas la loi elle-même.

[25] Dans une affaire appelée Greey, la Cour d’appel fédérale a décrit le Guide comme [traduction] « un manuel d’interprétation qui ne lie pas la Cour »Note de bas de page 8. Toutefois, on dit aussi « qu’il faut en tenir compte et qu’il peut constituer un facteur important dans l’interprétation des lois »Note de bas de page 9.

[26] Outre le fait que la division générale n’était pas tenue de suivre le Guide, les allégations de la prestataire sont dirigées contre la Commission.

[27] La prestataire affirme que la Commission n’a pas suivi le Guide parce qu’elle ne lui a pas remis de copies de ses notes ni donné l’occasion de répondre aux déclarations que son employeur aurait faites à la Commission. Son employeur aurait déclaré que le service de santé des employés l’avait autorisée à retourner au travail en décembre 2021. La prestataire nie que son médecin l’ait autorisée à retourner au travail à ce moment.

[28] Il se peut que la prestataire n’ait pas reçu de copies des déclarations de son employeur ou qu’elle n’ait pas eu pleinement l’occasion de répondre aux déclarations avant que la Commission ne rende sa décision ou ne révise sa décision. Cependant, ces lacunes sont celles de la Commission, et non de la division générale. Elles ne constituent pas le fondement d’un moyen d’appel contre la division générale.

[29] Même s’il y a peut-être eu des lacunes procédurales dans le traitement de la demande par la Commission, la division générale y a remédié. Le Tribunal a fourni aux deux parties une copie de tous les documents. La division générale a également donné à la prestataire l’occasion de répondre pleinement à tout. Elle a été autorisée à déposer des éléments de preuve et elle a également eu l’occasion de présenter des éléments de preuve de vive voix à la division générale. Autrement dit, si la Commission a causé des lacunes procédurales en ce qui a trait à la divulgation et à l’obtention d’une chance de répondre, la division générale les a corrigées.

La division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a refusé de décider si la prestataire avait été congédiée à tort

[30] La division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a refusé de décider si la prestataire avait été congédiée à tort.

[31] La prestataire soutient que son employeur l’a congédiée à tort, car elle était en congé de maladie. La prestataire a pris un congé de maladie le 29 septembre 2021Note de bas de page 10. Son employeur s’attendait à ce qu’elle retourne au travailNote de bas de page 11, mais elle affirme qu’elle n’avait pas encore reçu l’autorisation médicale pour le faire. Elle fait remarquer qu’elle a eu un suivi avec son médecin le 11 janvier 2022.

[32] Comme la division générale l’a souligné, elle n’avait pas le pouvoir de décider si son employeur l’avait congédiée à tort. La décision de la division générale sur ce point était conforme à la jurisprudenceNote de bas de page 12. Elle n’a pas commis d’erreur de droit sur cette question.

[33] Il y a d’autres voies que la prestataire peut emprunter en cas de congédiement injustifié. Comme la division générale l’a souligné, la prestataire a déposé des griefs contre son employeur.

La division d’appel n’a pas le pouvoir d’examiner si la division générale a bien soupesé la preuve

[34] La division d’appel n’a pas le pouvoir d’examiner si la division générale a bien soupesé la preuve.

[35] La prestataire soutient que la division générale n’a pas soupesé correctement la preuve. Toutefois, cette affaire ne fait pas partie des moyens d’appel prévus par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

[36] L’attribution du poids est une question qui relève de la compétence du juge des faits, car il est le mieux placé pour évaluer la preuve et déterminer le poids qu’il convient d’attribuer. Je ne peux pas conclure que la division générale aurait dû accorder plus d’importance ou d’attention à tout élément de preuve qui était en faveur de la prestataire.

La prestataire soutient que la division générale a ignoré certains éléments de preuve concernant son état de santé

[37] La prestataire soutient que la division générale a ignoré la preuve. Elle nie avoir commis une inconduite parce qu’elle dit qu’elle ne travaillait pas et que son médecin n’avait pas autorisé son retour au travail pour des raisons médicales. Elle affirme que la division générale a ignoré cette considération importante.

[38] La division générale était consciente de cette question et des arguments de la prestataire. Elle a souligné que la prestataire et l’employeur ont contesté la capacité de la prestataire à retourner au travail après un congé de maladie. Elle a aussi affirmé que l’employeur avait établi que la prestataire était en bonne condition physique et qu’il avait mis fin à ses paiements de remplacement du revenu d’invalidité. Pour sa part, la prestataire a nié qu’elle allait assez bien pour retourner au travailNote de bas de page 13.

[39] La division générale a accepté la preuve de la prestataire au sujet du litige. La division générale a souligné qu’elle avait déposé des éléments de preuve concernant ses griefs syndicaux contre son employeur relativement à son congé de maladie et à sa prestation de remplacement du revenuNote de bas de page 14.

[40] Mais il est également clair que la division générale n’a pas décidé si la prestataire était médicalement apte à retourner au travail. Elle n’avait pas le pouvoir d’examiner si la prestataire était médicalement apte à retourner au travail et d’évaluer si son employeur avait eu raison de la congédier. La division générale a établi la portée de ses pouvoirs de façon appropriée.

[41] La division générale devait tout de même déterminer s’il y avait eu inconduite, malgré le différend entre la prestataire et son employeur. Elle devait se concentrer sur la question de savoir si la prestataire avait intentionnellement commis un acte (ou omis de commettre un acte) contraire à ses obligations professionnellesNote de bas de page 15.

[42] De toute évidence, la division générale a admis que l’emploi de la prestataire l’obligeait à se faire vacciner et à déclarer son statut vaccinal, même s’il y avait un différend au sujet de son aptitude médicale à retourner au travail. La division générale a correctement appliqué le critère relatif à l’inconduite et a conclu qu’il y avait des éléments de preuve qui permettaient de conclure qu’il y avait inconduite.

[43] La question de l’aptitude médicale de la prestataire à retourner au travail, probablement liée à la question de savoir si elle a été congédiée à tort pendant un congé de maladie, peut être abordée dans une autre tribune.

La division générale n’a pas commis d’erreur de fait concernant la raison pour laquelle l’employeur a congédié la prestataire

[44] La division générale n’a pas commis d’erreur de fait concernant la raison pour laquelle l’employeur a congédié la prestataire. Contrairement à ce que la prestataire affirme, la division générale a déclaré que la prestataire a été congédiée parce qu’elle n’a pas été entièrement vaccinée, pas seulement parce qu’elle n’a pas déclaré son statut vaccinal. Cela concorde avec la preuve. La division générale a tiré cette conclusion beaucoup plus tard dans sa décision.

[45] La prestataire soutient que la division générale a tiré une conclusion de fait non étayée selon laquelle elle a été congédiée pour avoir refusé de divulguer son statut vaccinal.

[46] La division générale a conclu qu’elle devait décider pourquoi la prestataire avait perdu son emploi et si la Loi sur l’assurance-emploi considérait ce motif comme une inconduiteNote de bas de page 16.

[47] La prestataire affirme que la division générale a conclu qu’elle avait perdu son emploi parce qu’elle n’avait pas déclaré son statut vaccinal. Cependant, elle affirme que la preuve montre qu’elle l’avait bel et bien déclaré. Par conséquent, il est impossible qu’elle ait commis une inconduite.

[48] La division générale a discuté des raisons pour lesquelles la prestataire a perdu son emploiNote de bas de page 17. Elle l’a fait dans la section intitulée « La raison pour laquelle l’appelante a perdu son emploi ». La division générale a conclu que l’employeur de la prestataire l’avait congédiée parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination. Plus précisément, elle a conclu qu’elle n’avait pas déclaré son statut de vaccination contre la COVID-19, ce qu’elle était tenue de faire au titre de la politique de vaccination de son employeur.

[49] Si la division générale avait conclu que l’omission de faire une déclaration était la seule raison du congédiement de la prestataire, j’aurais jugé qu’elle avait commis une erreur de fait.

[50] La preuve montre que l’employeur s’attendait non seulement à ce que la prestataire déclare son statut, mais aussi à ce qu’elle se fasse vacciner et à ce qu’elle déclare qu’elle l’étaitNote de bas de page 18. Autrement, elle ne respecterait pas la politique de vaccination de l’employeur. Cependant, la division générale n’a pas expliqué cette exigence de vaccination dans la section « La raison pour laquelle l’appelante a perdu son emploi ». Il aurait été utile qu’elle fournisse cette explication.

[51] La division générale a plutôt décrit l’étendue des obligations d’emploi de la prestataire beaucoup plus loin dans sa décision, dans la section « La Commission a prouvé qu’il y avait eu inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi ».

[52] L’employeur a congédié la prestataire parce qu’elle ne s’était pas entièrement conformée à sa politique mise à jour. Selon celle-ci, la prestataire devait être entièrement vaccinée, puis déclarer qu’elle s’était fait vacciner. La division générale a conclu que la Commission avait prouvé qu’il y avait eu inconduite, car la preuve montrait que la prestataire savait ou aurait dû savoir qu’au titre de la politique de vaccination de son employeur, elle devait se faire entièrement vacciner et déclarer son statut vaccinal (mis à jour), mais qu’elle avait choisi de ne pas le faire.

[53] Autrement dit, il est clair que la division générale a établi que la prestataire ne s’était pas conformée à la politique de vaccination de son employeur parce qu’elle ne s’est pas fait vacciner et qu’elle a ensuite déclaré qu’elle était vaccinée, et que c’est ce qui a motivé son congédiement. Cela concorde avec la preuve.

[54] La prestataire nie qu’elle n’était pas prête à se faire vacciner, mais elle dit qu’elle voulait prendre une décision éclairée. Toutefois, cela ne signifie pas qu’elle se conformait à la politique de son employeur. De plus, comme la division générale l’a établi, la preuve laissait entendre que la prestataire n’avait pas l’intention de se faire vacciner, compte tenu de ses préoccupations au sujet des vaccins contre la COVID-19.

[55] Il y a un autre point à aborder à ce sujet. La preuve n’inclut pas l’avis de congédiement, qui permettrait de confirmer le motif du congédiement de la prestataire.

[56] Apparemment, il semble que l’employeur ait déclaré à la Commission qu’il avait congédié la prestataire pour ne pas avoir divulgué son statut vaccinal. Cependant, il semble également, d’après ses communications avec la prestataire et ses employés, qu’il envisageait que la divulgation signifiait nécessairement la vaccination. Autrement dit, l’employeur a congédié la prestataire parce qu’elle n’avait pas déclaré qu’elle était entièrement vaccinée.

[57] La prestataire a fourni des éléments de preuve contradictoires sur ce qu’elle a compris être la raison de son congédiement.

[58] Certains éléments de preuve montrent qu’elle croyait que son employeur l’avait congédiée parce qu’il croyait à tort qu’elle n’avait jamais déclaré son statut. Cependant, des éléments de preuve montrent également que la prestataire a déclaré qu’elle avait compris que son employeur l’avait congédiée parce qu’elle n’avait pas été vaccinée et qu’elle n’avait pas déclaré qu’elle l’avait été :

  • Dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, la prestataire a déclaré que la politique de vaccination de l’employeur exigeait que tous les membres du personnel déclarent leur statut et reçoivent le vaccin contre la COVID-19 au plus tard à une date préciseNote de bas de page 19.
  • Lorsque la prestataire a parlé à la Commission, elle a dit que son employeur l’avait congédiée parce qu’elle n’avait pas fourni de preuve de vaccinationNote de bas de page 20.

[59] La prestataire a fait des efforts pour persuader son employeur qu’elle devrait être exemptée de la vaccination en raison de ses préoccupations concernant l’innocuité et l’efficacité des vaccins. Elle a envoyé un avis de responsabilité potentielle et un avis de communication. Cela donne à penser qu’elle savait que le fait de déclarer son statut, à lui seul, était insuffisant pour se conformer aux exigences de son employeur et pour conserver son emploi. Il est peu probable qu’elle se serait comportée ainsi si elle croyait que le fait de rendre compte de son statut était suffisant pour se conformer aux obligations de son employeur.

[60] Enfin, la lettre d’avertissement de l’employeur, datée du 29 décembre 2021, disait clairement que la prestataire devait se faire vacciner, sinon elle ferait l’objet d’autres mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiementNote de bas de page 21.

[61] La division générale avait le droit de préférer la preuve de la prestataire démontrant qu’elle comprenait que son employeur l’avait congédiée pour ne pas avoir fourni de preuve de vaccination. Ces éléments de preuve concordaient avec les actions générales de la prestataire expliquant pourquoi elle n’avait pas été vaccinée.

La division générale a mal interprété la preuve

[62] La division générale a mal interprété la preuve. Elle a conclu qu’une phrase particulière de la lettre d’avertissement de préavis de congédiement de l’employeur du 29 décembre 2021 imposait à la prestataire l’obligation continue de déclarer son statut vaccinal.

[63] D’autres éléments de preuve exigeaient que la prestataire mette à jour son statut vaccinal après avoir reçu une première et une deuxième dose du vaccin. Toutefois, la phrase de la lettre du 29 décembre 2021 n’imposait aucune obligation de déclaration semblable.

[64] Voici la phrase de la lettre :

[traduction]
Afin de donner suite à la lettre qui vous a été envoyée le 23 décembre 2021, la présente lettre a pour but de vous aviser que si vous ne déclarez pas votre statut de vaccination contre la COVID-19 au plus tard demain, le 30 décembre 2021 à 12 h, vous serez congédiée de votre emploi pour cause à compter du 31 décembre 2021Note de bas de page 22.

[65] La prestataire affirme qu’elle a compris qu’elle devait déclarer son statut vaccinal au plus tard le 30 décembre 2021. Elle avait déclaré son statut avant le 16 septembre 2021. Elle a alors déclaré qu’elle n’avait pas été vaccinée. Du point de vue de la prestataire, elle avait déjà satisfait aux exigences de son employeur en matière de déclaration en septembre 2021.

[66] La division générale a pris note de l’argument de la prestataire selon lequel elle s’est acquittée de son obligation de déclarer son statut vaccinal à son employeur. Elle a conclu que la prestataire considérait cela comme une obligation ponctuelle. Toutefois, la division générale a conclu, en se fondant sur la phrase ci-dessus, que la prestataire avait « l’obligation continue de déclarer son statut vaccinal »Note de bas de page 23 et que l’avis « indique clairement qu’elle devait déclarer son statut vaccinal à ce moment-là »Note de bas de page 24.

[67] La Commission affirme que la division générale a mal évalué la preuve sur ce point. La phrase disait clairement que la prestataire devait déclarer son statut vaccinal au plus tard le 30 décembre 2021, mais elle n’imposait pas une obligation continue ni ne précisait qu’elle devait déclarer de nouveau son statut vaccinal si elle l’avait déjà déclaré.

Même si la division générale a mal interprété une phrase, cela n’a rien changé au résultat

[68] La division générale a mal interprété une phrase. La déclaration de la division générale était techniquement correcte, à savoir que la prestataire avait des obligations de déclaration continues, mais elle s’est appuyée sur la mauvaise phrase. Même si elle s’est appuyée sur la mauvaise phrase, le reste de la preuve appuyait ses conclusions selon lesquelles la prestataire avait une obligation continue de déclarer (qu’elle était vaccinée).

[69] La lettre d’avertissement indiquait également que l’employeur avait informé la prestataire que le défaut de déclarer son statut vaccinal et de fournir sa preuve de vaccination entraînerait des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. La division générale aurait correctement énoncé les exigences de déclaration de la prestataire si elle avait fourni ce contexte supplémentaire et si elle ne s’était pas fondée uniquement sur la seule phrase de la lettre.

[70] D’autres communications de l’employeur ont également confirmé les obligations de la prestataire de se faire vacciner et de déclarer son statut vaccinal. En août 2021, l’employeur a écrit à la prestataire pour lui dire : [traduction] « Veuillez noter que les membres du personnel qui ne sont pas vaccinés doivent aussi le déclarer. Je sais que bon nombre d’entre nous avons déjà déclaré notre statut vaccinal au cours des dernières semaines, mais nous devons le faire une fois de plus et cette fois-ci, il faut aussi fournir une preuve de vaccination »Note de bas de page 25.

[71] Au début, l’employeur a créé une certaine confusion au sujet de ses exigences, mais une fois qu’il a mis à jour sa politique en septembre 2021, il aurait dû être clair à ce moment-là que la déclaration était liée à la vaccination obligatoire. La déclaration à elle seule était insuffisante pour répondre aux exigences de l’employeur. Les membres du personnel devaient se faire vaccinerNote de bas de page 26.

L’employeur a mis à jour ses exigences de vaccination et de déclaration

[72] L’employeur avait mis à jour sa politique de vaccination ainsi que ses exigences de déclaration. Il a déclaré qu’il avait largement communiqué ses exigences mises à jour le 7 octobre 2021, puis directement à la prestataire le 14 octobre 2021Note de bas de page 27.

[73] De plus, le 29 octobre 2021, l’employeur a communiqué avec la prestataire par courriel et par la posteNote de bas de page 28. Il lui a dit qu’elle avait jusqu’au 30 novembre 2021 pour démontrer qu’elle était entièrement vaccinée. L’employeur a déclaré qu’elle devait démontrer qu’elle avait reçu les deux doses requises du vaccin contre la COVID-19. Cela l’a obligée à mettre à jour son statut : une fois après avoir reçu une première dose et une autre fois, après avoir reçu une deuxième dose.

[74] La division générale a souligné à juste titre que la prestataire avait l’obligation continue de déclarer son statut vaccinal, mais que cela était lié à l’obtention des première et deuxième doses.

[75] Ce contexte, selon lequel l’employeur exigeait que les membres du personnel déclarent leur statut vaccinal après une première dose et de nouveau après une deuxième dose, était important pour expliquer la décision de la division générale selon laquelle la prestataire avait l’obligation continue de déclarer son statut vaccinal. La division générale n’a pas fourni ce contexte et a seulement fait référence à la seule phrase de la lettre d’avis de congédiement.

[76] L’employeur a également dit à la prestataire que si elle ne fournissait pas de preuve de vaccination au plus tard le 30 novembre 2021, elle serait réputée ne pas être entièrement vaccinée et ne pas être conforme à l’exigence de la politique mise à jour.

[77] Enfin, l’employeur a également déclaré que les personnes qui ne respectaient pas sa politique de vaccination obligatoire feraient l’objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiementNote de bas de page 29.

[78] Dans un échange de courriels avec la prestataire le 21 décembre 2021, l’employeur a également confirmé qu’avant de pouvoir revenir d’un congé de maladie, elle devait [traduction] « présenter [son] statut vaccinal et une preuve de vaccination immédiatement »Note de bas de page 30 [c’est moi qui souligne].

[79] L’employeur a de nouveau écrit à la prestataire plus tard le même jour. Il l’a informée qu’il s’attendait à ce qu’elle se conforme à sa politique et à ce qu’elle présente son statut vaccinal et une preuve de vaccination avant de revenir au travail le 24 décembre 2021Note de bas de page 31.

La prestataire ne s’est pas entièrement conformée aux exigences mises à jour de son employeur

[80] Par conséquent, même si la prestataire avait déclaré son statut vaccinal dès le départ, cela était insuffisant pour conserver son emploi. La lettre du 29 octobre 2021, les courriels du 21 décembre 2021 et la lettre d’avertissement du 29 décembre 2021 soulignaient qu’elle devait déclarer son statut vaccinal et se faire vacciner.

[81] La lettre d’avertissement disait aussi ce qui suit :

[traduction] Comme il a été communiqué le 7 octobre 2021, à compter du 30 novembre 2021 [l’employeur] exige que tous les membres du personnel et tous les médecins soient entièrement vaccinés contre la COVID-19, sous réserve seulement d’exemptions limitées. Nonobstant ce qui précède, si [la prestataire] déclare [son] statut au plus tard le 30 décembre à 12 h, et si [elle] ne se conforme pas à l’article 4.3 de la politique sur la gestion de la vaccination contre la COVID-19 qui exige la vaccination obligatoire, [elle] fera également l’objet d’autres mesures disciplinaires, pouvant aller jusqu’au congédiementNote de bas de page 32.

[82] Il ne suffisait pas que la prestataire déclare simplement son statut vaccinal. Elle devait aussi démontrer qu’elle était entièrement vaccinée pour éviter toute mesure disciplinaire, y compris le congédiement.

[83] Il est possible de soutenir que la division générale a mal interprété la preuve en concluant que la phrase de la lettre d’avertissement voulait dire que la prestataire devait déclarer de nouveau son statut vaccinal au plus tard le 30 décembre 2021. Cependant, cela n’a pas changé le résultat, car la prestataire devait aussi démontrer qu’elle était entièrement vaccinée. La prestataire a omis sciemment de répondre à cette exigence de la politique de son employeur, tout en étant au courant des conséquences, ce qui signifiait qu’elle avait commis une inconduite.

Conclusion

[84] L’appel est rejeté.

[85] La preuve n’appuie pas les arguments de la prestataire voulant qu’elle se soit entièrement conformée à la politique de vaccination mise à jour de son employeur. Déclarer son statut vaccinal n’était pas suffisant. Elle devait aussi fournir une preuve de vaccination.

[86] Comme la division générale l’a établi, la prestataire connaissait ou aurait dû connaître les exigences de son employeur et les conséquences en cas de non-respect. La prestataire a pris la décision délibérée de ne pas se conformer à la politique de vaccination de son employeur. La Commission a prouvé qu’il y avait eu inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

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