Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Le prestataire a reçu une somme de 4 094,51$ de son employeur qui lui a été versée lorsqu’il a cessé d’occuper son emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a décidé que cette somme était une « rémunération » au sens de la loi versée sous forme de paie de vacances. Elle a avisé le prestataire que le montant de 4 094,51$ devait être réparti sur sa période de prestations du 30 octobre 2022 au 14 janvier 2023, et que la balance restante, soit 38,00$, était répartie sur la semaine débutant le 15 janvier 2023. Le prestataire a demandé une révision, mais la Commission a maintenu sa décision initiale.

Le prestataire a fait appel de la décision de la Commission auprès de la division générale. Celle-ci a déterminé que le prestataire a reçu une rémunération totale de 3 860,00$ représentant les paies de vacances de 2019, 2020, 2021 et 2022, et que cette rémunération devait être répartie à compter de la semaine du 30 octobre 2022.

Le prestataire a fait appel de la décision de la division générale à la division d’appel. Il soutient que la division générale a erré puisque seulement la paie de vacances correspondant à la dernière année devrait être répartie et non celles des années antérieures. La Commission a aussi fait appel. Elle soutient que la division générale a erré en fait et en droit.

La Loi sur les Normes du Travail prévoit que les vacances annuelles ne peuvent pas être reportées et accumulées sur plusieurs années, sauf si un décret ou une convention collective le prévoit. La Loi sur les Normes du Travail prévoit également qu’en l’absence de décret ou une convention collective, l’employeur doit verser une indemnité afférente au congé annuel au salarié en un seul versement avant le début de ce congé ou selon les modalités applicables pour le versement régulier de son salaire. La division d’appel a conclu qu’il n’y avait aucune preuve au dossier qui soutient que le prestataire était régi par un décret ou une convention collective. De plus, aucune preuve ne démontre que le prestataire avait consenti à ce que l’employeur accumule les indemnités de vacances.

Dans ces circonstances, la division d’appel a conclu que les paies de vacances pour les années 2019, 2020 et 2021, n’ont pas été versées au prestataire « en raison de son licenciement ou de la cessation de son emploi » au sens de l’article 36(9) du Règlement sur l’assurance-emploi. Les indemnités auraient dû être versées par l’employeur lors des congés annuels. Toutefois, à cause d’une erreur de l’employeur, le prestataire n’a pas reçu ses indemnités de vacances en temps opportun. Le fait que les paies de vacances du prestataire lui aient finalement été versées par l’employeur au même moment où il a cessé de travailler n’est pas pertinent. La division d’appel a déterminé que les indemnités de vacances pour 2019, 2020 et 2021, ne sont pas devenues dues et exigibles au moment de la fin de l’emploi. En d’autres mots, l’obligation de l’employeur de payer les indemnités n’est pas devenue liquide et exigible qu’au moment seulement où a pris fin l’emploi du prestataire. Les indemnités étaient dues et exigibles de l’employeur bien avant la fin de l’emploi du prestataire, sauf pour l’année 2022.

Par conséquent, la division d’appel a conclu que la division générale a erré en droit et qu’il n’y avait pas lieu de répartir les indemnités de vacances du prestataire pour les années 2019, 2020 et 2021, en vertu de l’article 36(9) du Règlement sur l’assurance-emploi.

La division d’appel a accueilli l’appel du prestataire et rejeté l’appel de la Commission. Elle a par la suite rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. Elle a conclu que l’indemnité de vacances de 1 028,58$ pour l’année 2022 est devenue due et exigible à la suite de la cessation d’emploi et qui est survenue le 5 novembre 2022. Il s’agit d’une rémunération qu’il y a lieu de répartir selon l’article 36(9) du Règlement sur l’assurance-emploi.

Contenu de la décision

Citation : GM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 263

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : G. M.
Représentant : É. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Josée Lachance

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
1er novembre 2023 (GE-23-2077)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 12 mars 2024
Personnes présentes à l’audience : Représentant de l’appelant
Représentante de l’intimée
Date de la décision : Le 14 mars 2024
Numéro de dossier : AD-23-1013 et AD-23-1062

Sur cette page

Décision

[1] L’appel du prestataire est accueilli.

[2] L’appel de la Commission est rejeté.

Aperçu

[3] L’appelant (prestataire) a reçu une somme de 4 094,51 $ de son employeur qui lui a été versée lorsqu’il a cessé d’occuper son emploi.

[4] L’intimée (Commission) a décidé que cette somme était une « rémunération » au sens de la loi versée sous forme de paie de vacances. Elle a avisé le prestataire que le montant de 4 094,51 $ devait être réparti sur sa période de prestations du 30 octobre 2022 au 14 janvier 2023, et que la balance restante, soit 38,00 $, était répartie sur la semaine débutant le 15 janvier 2023.

[5] Le prestataire a demandé une révision mais la Commission a maintenu sa décision initiale. Le prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale.

[6] La division générale a déterminé que le prestataire a reçu une rémunération totale de 3 860,00 $représentant les paies de vacances de 2019, 2020, 2021, et 2022, et que cette rémunération devait être répartie à compter de la semaine du 30 octobre 2022.

[7] Le prestataire a obtenu la permission d’en appeler à la division d’appel de la décision de la division générale. Il soutient que la division générale a erré puisque seulement la paie de vacances correspondant à la dernière année devrait être répartie et non celles des années antérieures. La Commission a également obtenu la permission d’en appeler. Elle soutient que la division générale a erré en fait et en droit.

[8] J’accueille l’appel du prestataire. Je rejette l’appel de la Commission.

Questions en litige

[9] Est-ce que la division générale a commis une erreurdans son interprétation de l’article 36(9) du Règlement sur l’Assurance-emploi (Règlement sur l’AE)lorsqu’elle a conclu queles paies de vacances des années antérieures devaient être réparties à compter du 30 octobre 2022?

[10] Est-ce que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en déterminant que la somme reçue à titre de paie de vacances était 3 860,00 $ et que la Commission n’avait pas réparti la somme correctement selon l’article 36(9) du Règlement sur l’AE?

Remarques préliminaires

[11] Afin de décider du présent appel, j’ai écouté l’enregistrement de l’audience devant la division générale.

[12] Tel qu’expliqué lors de l’audience du 12 mars 2024, la division d’appel n’accepte pas de nouvelle preuve puisqu’il ne s’agit pas d’une audience de nouveau.Note de bas de page 1

Analyse

Mandat de la division d’appel

[13] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.Note de bas de page 2

[14] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[15] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ousans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je dois rejeter l'appel.

  • Est-ce que la division générale a commis une erreur dans son interprétation de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE lorsqu’elle a conclu que les paies de vacances des années antérieures devaient être répartie à compter du 30 octobre 2022?
  • Est-ce que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en déterminant que la somme reçue à titre de paie de vacances était 3 860,00 $ et que la Commission n’avait pas réparti la somme correctement selon l’article 36(9) du Règlement sur l’AE?

[16] Le prestataire soutient que la division générale a erré puisque seulement la paie de vacances correspondant à la dernière année de travail devrait être répartie et non celles des années antérieures.

[17] Selon la Commission, la division générale n’a pas commis d’erreur de droit puisque le libellé de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE est clair. Il prévoit que toute rémunération payée ou payable au prestataire en raison de son licenciement ou de la cessation de son emploidoit être, abstraction faite de la période pour laquelle elle est présentée comme étant payée ou payable, répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine du licenciement ou de la cessation d'emploi.

[18] Cependant, la Commission soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en déterminant que la somme reçue à titre de paie de vacances était 3 860,00 $ et que la Commission n’avait pas réparti la somme correctement selon l’article 36(9) du Règlement sur l’AE.

[19] Le prestataire plaide que l’employeur avait une obligation légale en vertu de la Loi sur les Normes du Travail (LNT) de lui payer ses vacances chaque année, ce qu’il n’a pas fait. Le prestataire soutient qu’il n’a en aucun temps demandé le cumul de ses paies de vacances puisqu’il ignorait avoir droit à une paie de vacances.

[20] La LNT prévoit que les vacances annuelles ne peuvent pas être reportées et accumulées sur plusieurs années, sauf si un décret ou une convention collective le prévoit. Note de bas de page 3 Je constate qu’il n’y a aucune preuve au dossier qui soutient que le prestataire était régi par un décret ou une convention collective.

[21] La LNT prévoit également qu’en l’absence de décret ou de convention collective, l’employeur doit verser une indemnité afférente au congé annuel au salarié en un seul versement avant le début de ce congé ou selon les modalités applicables pour le versement régulier de son salaire. Note de bas de page 4

[22] Les faits du présent dossier sont particuliers en ce que la preuve ne démontre pas que le prestataire a consenti à ce que l’employeur accumule les indemnités de vacances.

[23] Dans ces circonstances, je suis d’avis que les paies de vacances pour les années 2019, 2020 et 2021, n’ont pas été versées au prestataire « en raison de son licenciement ou de la cessation de son emploi » au sens de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE. Les indemnités auraient dû être versées par l’employeur lors des congés annuels. Toutefois, à cause d’une erreur de l’employeur, le prestataire n’a pas reçu ses indemnités de vacances en temps opportun. Le fait que les paies de vacances du prestataire lui aient finalement été versées par l’employeur au même moment où il a cessé de travailler n'est pas pertinent.

[24] En effet, appliquant les enseignements de la Cour d’appel fédérale, les indemnités de vacances pour 2019, 2020 et 2021, ne sont pas devenues dues et exigibles au moment de la fin de l’emploi. En d’autres mots, l’obligation de l’employeur de payer les indemnités n’est pas devenu liquide et exigible qu’au moment seulement où a pris fin l’emploi du prestataire. Les indemnités étaient dues et exigibles de l’employeur bien avant la fin de l’emploi du prestataire, sauf pour l’année 2022. Note de bas de page 5

[25] Je conclu que la division générale a erré en droit et qu’il n’y avait pas lieu de répartir les indemnités de vacances du prestataire pour les années 2019, 2020 et 2021, en vertu de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE.

[26] Je suis donc justifié d’intervenir.

Remède

[25] Je suis d’avis que les parties ont eu l’occasion de défendre leur cause devant la division générale, je vais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[27] Pour les raisons précédemment mentionnées, il n’y avait pas lieu de répartir les indemnités de vacances du prestataire pour les années 2019, 2020 et 2021, en vertu de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE.

[28] En ce qui concerne l’indemnité de vacances de 1 028,58 $ pour l’année 2022, celle-ci est devenue dû et exigible à la suite de la cessation d’emploi qui est survenue le 5 novembre 2022. Il s’agit d’une rémunération qu’il y a lieu de répartir selon l’article 36(9) du Règlement sur l’AE.

[29] La rémunération hebdomadaire moyenne calculé selon le relevé d'emploi au dossier est de 385,84 $. Comme le prestataire a travaillé la semaine du 2022/10/30 au 2022/11/05, la rémunération gagnée durant cette semaine calculé au prorata est de 198,34 $. Donc, 187,50 $ de la somme totale de la paie de vacances doit être ajouté à la rémunération de la dernière semaine de travail pour venir combler la valeur de la rémunération hebdomadaire moyenne. Ensuite, le montant de 385,84 $ doit être réparti sur les semaines du 2022/11/06 et 2022/11/13, ainsi qu'un solde résiduel de 69,40 $ dans la semaine du 2022/11/20.

Conclusion

[30] L’appel du prestataire est accueilli.

[31] L’appel de la Commission est rejeté.

[32] Comme le prestataire a travaillé la semaine du 2022/10/30 au 2022/11/05, la rémunération gagnée durant cette semaine calculé au prorata est de 198,34 $. Donc, 187,50 $ de la somme totale de la paie de vacances doit être ajouté à la rémunération de la dernière semaine de travail pour venir combler la valeur de la rémunération hebdomadaire moyenne. Ensuite, le montant de 385,84 $ doit être réparti sur les semaines du 2022/11/06 et 2022/11/13, ainsi qu'un solde résiduel de 69,40 $ dans la semaine du 2022/11/20.

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