Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : EH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 959

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : E. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (448124) rendue le 17 avril 2023 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 18 juillet 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Témoin de l’appelant
Date de la décision : Le 24 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-1228

Sur cette page

Décision

[1] E. H. est l’appelant dans le présent appel. Je rejette son appel.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a démontré qu’elle lui a versé plus de prestations d’assurance-emploi d’urgence que celles auxquelles la loi lui donnait droitNote de bas de page 1. Autrement dit, il a reçu trop de prestations.

[3] Il doit rembourser le trop-payé (2 000 $). C’est la somme de prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’il a reçue comme avance.

Aperçu

[4] L’appelant travaillait comme gérant dans une franchise de X (employeur). En mars 2020, son employeur l’a mis à pied en raison de la pandémie de COVID-19.

[5] Par la suite, l’appelant a demandé la Prestation canadienne d’urgence (PCU), c’est‑à-dire la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[6] La Commission lui a versé une avance de 2 000 $ peu de temps après qu’il a fait sa demande.

[7] Son employeur l’a cependant rappelé au travail très peu de temps après la mise à pied. L’appelant a donc annulé sa demande de prestation d’assurance-emploi d’urgence avant même que la Commission ne lui verse des prestations hebdomadaires.

[8] Environ deux ans plus tard, la Commission a décidé que, selon la loi, l’appelant n’avait pas droit à l’avance de prestations d’assurance-emploi d’urgence. Elle lui a envoyé une lettre expliquant les motifs de sa décision ainsi qu’un avis de dette de 2 000 $.

[9] L’appelant affirme que sa situation est unique. Son employeur a reçu la Subvention salariale d’urgence du Canada. L’appelant a repris le travail peu de temps après, sans subir d’interruption de salaire. Mais son employeur a déduit de sa paie le montant de l’avance de prestations d’assurance-emploi d’urgence, soit 500 $ pendant 4 semaines (2 000 $ au total). En conséquence, la prestation d’assurance-emploi d’urgence n’a pas rapporté un sou à l’appelant. Le remboursement de la dette lui causerait des difficultés financières. Il ne devrait donc pas être obligé de rembourser l’avance.

Question en litige

[10] L’appelant doit-il rembourser l’avance de prestations d’assurance-emploi d’urgence (2 000 $)?

Analyse

Prestation d’assurance-emploi d’urgence

[11] En réponse à la pandémie de COVID-19, le gouvernement fédéral a modifié de façon temporaire la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2. L’une des modifications était la création de la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Certaines des règles concernant cette prestation sont importantes pour le présent appel. Les voici :

  • Du 15 mars 2020 au 26 septembre 2020, la Commission devait traiter les demandes de prestations régulières et de prestations de maladie de l’assurance-emploi comme des demandes de prestation d’assurance-emploi d’urgence.
  • N’importe qui pouvait demander la prestation d’assurance-emploi d’urgence pour une période de deux semaines. Il fallait suivre les règles de la Commission et lui fournir les renseignements dont elle avait besoin pour trancher la demandeNote de bas de page 3.
  • La Commission versait la prestation d’assurance-emploi d’urgence à raison de 500 $ par semaineNote de bas de page 4.
  • La Commission a versé une avance de 2 000 $ aux personnes admissibles le plus tôt possible après la présentation de la demande d’assurance-emploiNote de bas de page 5.
  • La Commission a décidé de récupérer l’avance de 2 000 $ en retenant les versements de la prestation d’assurance-emploi d’urgence pendant 4 semaines (les 13e, 14e, 18e et 19e semainesNote de bas de page 6).

[12] Les modifications apportées à la loi ont aussi permis à la Commission de revenir en arrière et d’examiner l’admissibilité d’une personne jusqu’à 36 mois après le versement de la prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 7. De plus, si la personne avait reçu plus d’argent que les prestations d’assurance-emploi d’urgence auxquelles elle avait droit, la Commission pouvait établir et recouvrer un trop-payéNote de bas de page 8.

Versions de la Commission et de l’appelant

[13] La Commission affirme avoir versé à l’appelant une avance de 2 000 $ en prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[14] Elle dit qu’elle ne lui a versé aucune prestation hebdomadaire. Son employeur lui a versé un salaire normal jusqu’au 22 mars 2020. À compter du 23 mars 2020, son employeur lui a versé un salaire à l’aide de la Subvention salariale d’urgence du Canada. L’appelant a donc annulé sa demande de prestation d’assurance-emploi d’urgence. En conséquence, la Commission n’a pas pu récupérer l’avance de 2 000 $ en retenant les prestations pour les 13e, 14e, 18e et 19e semaines. Ainsi, l’avance constitue un trop-payé, qu’il doit rembourserNote de bas de page 9.

[15] Selon l’appelant, son employeur l’a rappelé au travail une semaine après sa mise à pied. Son employeur a continué de le payerNote de bas de page 10. L’appelant convient donc qu’il n’était pas admissible aux versements hebdomadaires de la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[16] Cependant, l’appelant affirme que sa situation est unique. Son employeur lui a dit de demander la PCU. Par la suite, lorsque son employeur a reçu la subvention, il lui a dit d’annuler sa PCU. Mais il était trop tard. L’appelant avait déjà reçu l’avance. Son employeur a dit qu’il voulait s’assurer que l’appelant et les autres membres de l’équipe de gestion ne recevaient pas à la fois la prestation d’assurance-emploi d’urgence et l’argent provenant de la subvention (ce que l’employeur appelait un « double salaire »). L’employeur a supposé que l’appelant et ses collègues devraient rembourser l’argent au gouvernement fédéral plus tard. Pour éviter une telle chose, l’employeur a déduit 500 $ de sa paie pendant 4 semaines (2 000 $ au total).

[17] Selon l’appelant, comme son employeur a déduit 2 000 $ de sa paie, la prestation d’assurance-emploi d’urgence ne lui a pas rapporté un sou. Il a déclaré que, s’il doit rembourser 2 000 $ à la Commission, il aura de graves difficultés financières puisque ses finances ne se sont pas encore rétablies de la pandémie. En conséquence, il ne devrait pas être obligé de rembourser la Commission.

[18] Le témoin de l’appelant a déclaré qu’il travaille pour le même employeur. Celui‑ci l’avait chargé de la gestion des programmes de la PCU et de la subvention. Il est venu à l’audience pour expliquer la situation entourant la PCU, la subvention et la rémunération des membres de l’équipe de gestion. Le témoin a décrit les circonstances. Il a mentionné la lettre que l’employeur a écrite pour expliquer la situation à la CommissionNote de bas de page 11. (L’appelant en a fait parvenir une copie à la Commission dans le cadre de sa demande de révisionNote de bas de page 12.)

[19] J’ai demandé au témoin si l’employeur avait communiqué avec la Commission pour tenter de résoudre le problème auquel l’appelant et d’autres membres de l’équipe de gestion doivent maintenant faire face. Il a dit que oui. Cependant, la Commission a dit à l’employeur qu’elle devait [traduction] « suivre à la lettre ce qui était écrit noir sur blanc dans la loi ». Le témoin a demandé au Tribunal de tenir compte de ce [traduction] « malheureux concours de circonstances » et de réduire la dette de l’appelant.

La Commission a rendu la bonne décision au sujet du trop-payé

[20] J’accepte la preuve de l’appelant et le témoignage de son collègue. Je n’ai aucune raison de douter de leurs propos. Les deux ont témoigné de façon franche et détaillée. La version de l’appelant est demeurée la même depuis le début. De plus, le témoignage de son collègue appuyait ce que l’appelant a dit à la Commission et ce qu’il a dit à l’audience.

[21] Mais les éléments de preuve que l’appelant et son témoin ont présentés au Tribunal ne changent rien à ma décision.

[22] J’ai examiné la preuve de la Commission sur les prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’elle a versées à l’appelantNote de bas de page 13. J’ai aussi examiné le calcul du trop-payé que la Commission lui réclameNote de bas de page 14. Je n’ai aucune raison de douter de la preuve de la Commission concernant ces deux éléments. Et aucune preuve ne vient les contredire.

[23] La Commission et l’appelant s’entendent sur les principaux faits. Je les ai confirmés en examinant les documents au dossier de révision de la CommissionNote de bas de page 15. Voici donc mes conclusions :

  • L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission lui a versé une avance de 2 000 $ comme prestations d’assurance-emploi d’urgence.
  • L’appelant n’était admissible à aucune semaine de prestations d’assurance-emploi d’urgence parce qu’il a continué à toucher un revenu d’emploiNote de bas de page 16.
  • L’appelant a recommencé à travailler et sa prestation d’assurance-emploi d’urgence a pris fin. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas récupérer l’avance aux 13e, 14e, 18e et 19e semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[24] Je conclus donc que l’appelant a reçu la prestation d’assurance-emploi d’urgence pendant quatre semaines (2 000 $) alors qu’il n’y était pas admissible au sens de la loi. (Il s’agit de l’avance de prestations d’assurance-emploi d’urgence.) C’est donc un trop-payé qu’il doit rembourser.

[25] Lorsque j’ai posé la question au témoin, il m’a dit que l’employeur n’avait pas reçu de conseils juridiques avant de déduire les 2 000 $ de la paie des membres de l’équipe de gestion. Je lui ai aussi demandé si l’employeur avait l’habitude de gérer l’argent de son personnel et de prendre des décisions à sa place. Il a dit que les membres de l’équipe ne comprenaient pas vraiment ce qui se passait avec leur paie et que cela générait beaucoup d’anxiété. L’employeur a donc décidé d’agir pour essayer de calmer les nerfs de tout le monde. Au lieu de demander à 16 ou 17 personnes d’essayer de comprendre les choses, l’employeur a décidé de déduire 2 000 $ de la rémunération de chaque membre de l’équipe de gestion.

[26] Aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, l’employeur n’avait pas le pouvoir de recouvrer l’avance au nom de la Commission. Lorsqu’il a déduit la somme de 2 000 $ du salaire de l’appelant, il aurait pu verser cette somme à la Commission pour lui afin de rembourser le trop-payé. Mais ce n’est pas ce qu’il a fait.

[27] Ainsi, selon la Loi sur l’assurance-emploi, que je dois suivre, l’appelant doit rembourser le trop-payé de 2 000 $.

Le Tribunal ne peut pas annuler le trop-payé

[28] Le trop-payé est une dette que l’appelant doit à Emploi et Développement social Canada. C’est le ministère fédéral qui s’occupe de l’administration de la Commission.

[29] Je reconnais à quel point le trop-payé est injuste pour l’appelant. Il lui manquera 4 000 $, soit les 2 000 $ que son employeur a déduits de son salaire et les 2 000 $ qu’il doit à Emploi et Développement social Canada. Mais le Tribunal n’a pas le pouvoir d’annuler un trop-payé, que ce soit en partie ou en totalitéNote de bas de page 17.

[30] Par contre, la Commission peut annuler un trop-payé en totalité ou en partieNote de bas de page 18. Si l’appelant ne l’a pas déjà fait, il peut demander à la Commission d’annuler son trop-payé.

[31] L’Agence du revenu du Canada recouvre les sommes dues à certains ministères fédéraux, dont Emploi et Développement social Canada. L’appelant peut obtenir de plus amples renseignements sur les ententes de paiement et les mesures d’allégement de la dette en consultant sur le site de l’Agence la page Web qui parle du recouvrement des dettes liées à prestation d’assurance-emploi d’urgence Note de bas de page 19 ou en composant sans frais le 1‑800-864-5823.

Conclusion

[32] La Commission a prouvé que l’appelant a reçu 2 000 $ en prestations d’assurance-emploi d’urgence sans y être admissible. C’est un trop-payé.

[33] Selon la loi, l’appelant doit rembourser cet argent (2 000 $).

[34] Je dois donc rejeter son appel.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.