Assurance-emploi (AE)

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Citation : ES c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 336

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : E. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (626772) datée du 1 novembre 2023 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 4 janvier 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 5 janvier 2024
Numéro de dossier : GE-23-3198

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] Je conclus l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi.

Aperçu

[3] Le 18 septembre 2023, l’appelant a présenté une demande de prestations de maladie. Il a alors indiqué avoir cessé d’occuper son emploi pour des raisons de santé le 6 septembre 2023, mais que la date de son retour à l’emploi n’était pas connue.

[4] Le 1er novembre 2023, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a conclu que l’appelant n’était pas admissible à recevoir des prestations de maladie du 10 septembre 2023 au 23 septembre 2023 parce qu’il a quitté volontairement son emploi le 6 septembre 2023. Pour cette raison, la Commission a conclu qu’il n’a pas prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant qu’il était malade. De plus, elle indique que l’appelant ne peut pas recevoir des prestations régulières parce qu’il a quitté volontairement son emploi et que ce n’était pas la seule solution raisonnable dans ce cas.

[5] L’appelant explique qu’il ressentait un niveau élevé d’anxiété pendant cette période et qu’après un incident survenu au travail le 6 septembre 2023, il a quitté les lieux du travail de façon impulsive. Cependant, il a pris un rendez-vous avec son médecin et il a contacté son employeur pour recommencer à travailler dès que son problème de santé serait réglé.

[6] Je dois déterminer si l’appelant a quitté son emploi et, dans l’affirmative, s’il a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

Questions en litige

[7] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification ?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite déterminer s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi ?

[9] Pour déterminer si l’appelant a quitté volontairement son emploi, je dois répondre à la question suivante : Est-ce que l’appelant avait le choix de rester ou de quitter son emploi ?Note de bas page 1

[10] La Commission affirme que l’appelant a quitté volontairement son emploi parce qu’il a demandé à son employeur d’être réembauché. Elle soutient donc qu’il y avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi le 6 septembre 2023. Elle fait valoir que, bien qu’il ait pris l’initiative de recontacter son employeur deux semaines plus tard, ce comportement ne justifie pas son départ volontaire le 6 septembre 2023.

[11] L’appelant explique qu’après un incident survenu avec deux contremaîtres le 6 septembre 2023, il a quitté les lieux du travail de façon impulsive. L’appelant a indiqué qu’il est opérateur de pelle mécanique et que son contremaître a voulu restreindre le territoire qu’il disposait pour travailler sous prétexte qu’un autre contremaître voulait déposer du matériel sur son espace de travail. L’appelant explique qu’il ne comprenait pas cette demande et qu’étant donné qu’il terminait sa journée de travail à 14h00, le contremaître pouvait attendre avant de mettre en application son plan.

[12] Il a alors dit à son contremaître que si son espace de travail était restreint, il allait s’en aller. Le contremaître a alors discuté avec le deuxième contremaître, mais lorsqu’il est revenu, il a dit à l’appelant que la décision était inchangée. L’appelant explique qu’il ressentait un niveau d’anxiété élevé pendant cette période et, impulsivement, il a alors dit au contremaître qu’il s’en allait. Il explique qu’au moment de quitter les lieux du travail, il a également contacté le directeur, mais celui-ci était absent.

[13] L’appelant a témoigné qu’il ressentait un niveau d’anxiété élevé pendant cette période, notamment en raison d’une séparation, mais aussi en raison d’une accumulation d’irritants au travail. Il indique que le 6 septembre 2023, il a pris un rendez-vous avec son médecin parce qu’il ne se sentait pas bien.

[14] Un certificat médical, daté du 13 septembre 2023, indique que son médecin lui prescrit un arrêt de travail et que l’appelant sera revu le 29 septembre 2023.Note de bas page 2

[15] La journée-même, l’appelant a contacté l’employeur pour lui dire qu’il avait un billet médical attestant un arrêt de travail pour des problèmes de santé. Le 15 septembre 2023, le supérieur de l’appelant l’a contacté pour lui dire de prendre son temps, qu’il comprenait et qu’il pourrait revenir au travail après sa période de maladie.

[16] L’appelant explique que le 13 septembre 2023, il a commencé à prendre une médication pour mieux gérer son anxiété et qu’après quelques jours d’arrêt de travail, il se sentait mieux. Pour cette raison, il a recommencé à travailler le 25 septembre 2023, c’est-à-dire avant la fin de son arrêt de travail prévu le 29 septembre 2023. L’appelant indique qu’il est quand même allé rencontrer son médecin le 29 septembre 2023.

[17] L’appelant soutient qu’il a quitté les lieux du travail le 6 septembre 2023 et que si son niveau d’anxiété n’avait pas été aussi élevée et qu’il avait pu la gérer, il n’aurait pas quitté les lieux du travail de cette manière. Il explique qu’il ne veut pas mettre l’emphase sur son anxiété pour justifier son « départ volontaire » parce que l’accumulation de différents irritants, tant au travail que dans sa vie personnelle, ont mené à cette situation.

[18] Je suis d’avis que l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi. Bien que les explications fournies à la Commission comme à l’audience démontrent l’utilisation de termes comme « départ volontaire » ou qu’il a été « réembauché » et qu’il est vrai que l’appelant a quitté les lieux du travail impulsivement le 6 septembre 2023, les faits démontrent qu’il éprouvait des problèmes de santé à ce moment et qu’il a contacté son médecin et ensuite son employeur pour régler la situation. Après une période d’arrêt de travail pour maladie, l’appelant a recommencé à travailler le 25 septembre 2023.

[19] En ce sens, un billet médical, daté du 13 septembre 2023, prescrit un arrêt de travail pour des raisons de santé jusqu’au 29 septembre 2023. L’appelant a commencé à prendre une médication contre l’anxiété le 13 septembre 2023 et comme il se sentait mieux, il a recommencé à travailler avant la fin de son congé.

[20] Bien qu’il ait quitté les lieux du travail de façon précipitée le 6 septembre 2023, il a immédiatement contacté son directeur qui était absent et il a pris un rendez-vous chez son médecin pour régler cette situation.

[21] Dès la fin du rendez-vous chez son médecin le 13 septembre 2023, l’appelant a contacté de nouveau son directeur pour régler la situation.

[22] Ainsi, j’accepte ses explications indiquant que le 15 septembre 2023, son supérieur l’a contacté pour confirmer qu’il comprenait qu’il devait prendre un congé de maladie et qu’il pourrait recommencer à travailler dès la fin de son congé.

[23] Ainsi, bien qu’au 6 septembre 2023, cette situation puisse apparaître comme un départ volontaire, les faits exposés ultérieurement démontrent que ce n’est pas le cas. Cette journée-là, l’événement qui s’est produit s’est ajouté aux événements qu’il vivait déjà, et il n’a pas pu gérer son anxiété. Il a quitté impulsivement les lieux du travail, mais il n’avait pas l’intention de quitter son emploi.

[24] Les faits démontrent que l’appelant a contacté son médecin ainsi que son directeur pour régler ses problèmes et qu’il s’est entendu avec l’employeur. Après avoir commencé à prendre une médication contre l’anxiété, l’appelant a recommencé à travailler avant même la fin de son congé. D’ailleurs, lorsqu’il a présenté sa demande de prestations, l’appelant indique qu’il retournera travailler pour le même employeur, mais que la date de son retour au travail n’est pas connue.

[25] Ainsi, bien que la Commission soutienne que l’appelant a quitté volontairement son emploi parce qu’il l’a avoué, je suis d’avis que les termes choisis par l’appelant pour expliquer son histoire doivent être interprétés en fonction du contexte. De plus, en soutenant que l’appelant a pourtant recommencé son emploi selon les mêmes conditions deux semaines plus tard, la Commission ne soupèse pas les éléments démontrant que l’appelant était malade à ce moment et que c’est pour cette raison qu’il a quitté les lieux de son travail le 6 septembre 2023. Elle ne prend pas non plus en considération que s’il a pu reprendre son emploi, c’est parce qu’il a commencé à prendre une médication et que son employeur a compris la situation.

[26] Je dois rendre ma décision suivant la balance des probabilités et les faits démontrent que l’appelant a quitté les lieux du travail le 6 septembre 2023, mais qu’il voulait conserver son emploi. Bien sûr, il y avait certains irritants au travail, comme le fait qu’il travaillait sur un projet à plus de 450 kilomètres de sa résidence, mais il souhaitait conserver son emploi et il s’est entendu avec son employeur. En ce sens, aucune paie de vacances en raison de la cessation d’emploi n’a été versé à l’appelant en septembre 2023.Note de bas page 3

[27] Je conclus que l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi. L’employeur a compris la situation et l’appelant a eu le choix de rester à l’emploi. Les faits démontrent d’ailleurs après sa période de maladie, il a réintégré son emploi.

[28] Puisque l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi le 6 septembre 2023, il n’a pas à démontrer qu’il était fondé à le quitter.

Conclusion

[29] L’appel est accueilli.

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