Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1838

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (593236) rendue le 21 juin 2023 par la
Commission de l’assurance-emploi du Canada
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Elizabeth Usprich
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 30 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 7 septembre 2023
Numéro de dossier : GE-23-1872

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] Elle n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. Autrement dit, elle n’a pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, sa demande ne peut pas être traitée comme si elle l’avait présentée plus tôtNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] Le 19 mars 2023, l’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi. Elle veut maintenant que sa demande soit traitée comme si elle l’avait présentée plus tôt, soit le 19 juin 2022. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a déjà rejeté cette requête.

[4] Je dois décider si l’appelante a prouvé qu’elle avait un motif valable de ne pas demander des prestations plus tôt.

[5] Selon la Commission, l’appelante n’avait pas de motif valable parce qu’elle n’a pas fait ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans des circonstances semblables pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la Loi. La Commission affirme que l’appelante connaissait le programme d’assurance-emploi parce qu’elle avait reçu des prestations d’assurance-emploi par le passé. La Commission dit que, cette fois‑ci, l’appelante aurait pu vérifier si elle remplissait les conditions requises.

[6] L’appelante n’est pas d’accord. Elle dit qu’elle ne s’est pas rendu compte qu’elle remplissait les conditions requises pour toucher de l’assurance-emploi. Elle explique qu’elle ne savait pas que son employeuse avait envoyé un relevé d’emploi. Elle ajoute qu’elle pensait en avoir besoin pour faire une demande.

Question que je dois examiner en premier

L’audience du présent appel a eu lieu en même temps que celle du dossier GE-23-1870

[7] L’appelante avait deux dossiers d’appel. Pour lui faciliter la tâche, la date d’audience était la même pour les deux appels. Autrement dit, le deuxième appel a été examiné tout de suite après le premier appel. Mais ils ont été traités séparément.

Question en litige

[8] Peut‑on traiter la demande de prestations comme si l’appelante l’avait présentée le 19 juin 2022? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande (en devancer la date).

Analyse

[9] Pour faire devancer la date d’une demande de prestations, il faut prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 2 :

  1. a) Un motif valable justifiait le retard durant toute la période du retard. Autrement dit, il y a une explication qui est acceptable selon la loi.
  2. b) À la date antérieure (c’est‑à-dire la date à laquelle on veut faire devancer la demande), on remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations.

[10] Dans cette affaire‑ci, les principaux arguments portent sur la question de savoir si l’appelante avait un motif valable. Je vais donc commencer par là.

[11] Pour démontrer qu’elle avait un motif valable, l’appelante doit prouver qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 3. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle s’est comportée de façon prudente et raisonnable, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait dans une situation semblable.

[12] L’appelante doit démontrer qu’elle a agi ainsi pendant toute la période du retardNote de bas de page 4. Cette période s’étend de la date à laquelle elle veut faire antidater sa demande jusqu’à la date où elle a présenté sa demande. Par conséquent, le retard de l’appelante s’étend du 19 juin 2022 au 19 mars 2023.

[13] L’appelante doit aussi démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et ses obligations légalesNote de bas de page 5. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle a fait de son mieux pour essayer de s’informer dès que possible au sujet de ses droits et de ses responsabilités. Si l’appelante n’a pas fait de telles démarches, elle doit démontrer que des circonstances exceptionnelles expliquent pourquoi elle ne l’a pas faitNote de bas de page 6.

[14] L’appelante doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire qu’elle doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’un motif valable justifiait son retard.

[15] Selon l’appelante, un motif valable justifie son retard parce qu’elle ne s’est pas rendu compte qu’elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle dit qu’elle ignorait que son employeuse avait envoyé un relevé d’emploi et qu’elle croyait en avoir besoin pour faire une demande.

[16] L’appelante travaillait pour une agence de placement. L’employeuse l’a placée dans une entreprise en janvier 2022. À un moment donné, l’entreprise ne voulait plus que l’appelante travaille pour elle. Le dernier jour de travail de l’appelante à cet endroit était le 17 juin 2022Note de bas de page 7.

[17] L’appelante explique qu’elle croyait qu’elle travaillait encore pour son employeuse. Elle dit qu’elle ne s’est pas rendu compte que l’employeuse avait envoyé un relevé d’emploi. L’appelante confirme qu’après le 17 juin 2022, elle n’a pas travaillé ni été placée dans une entreprise par son l’employeuse. L’appelante ne s’est pas renseignée auprès de son employeuse pour savoir s’il y avait du travail ou un relevé d’emploi.

[18] Selon la Commission, l’appelante n’a pas démontré qu’un motif valable justifiait son retard parce qu’elle n’a pas fait ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans une situation semblable pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la Loi. La Commission affirme qu’après avoir arrêté de travailler, l’appelante aurait dû vérifier ce qui se passait et quelles options s’offraient à elle.

[19] La Commission affirme que l’appelante connaissait le programme d’assurance-emploi parce qu’elle avait déjà reçu des prestations d’assurance-emploi par le passé. La Commission dit que, cette fois‑ci, l’appelante aurait pu vérifier si elle remplissait les conditions requises.

[20] L’appelante a déclaré que rien ne l’empêchait de présenter une demande ou de s’informer de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi. Elle explique qu’elle ne s’est pas renseignée parce qu’elle a supposé qu’elle ne serait pas admissible.

[21] Je juge que l’appelante n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations parce qu’elle n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblables. Elle aurait dû en faire plus quand elle a cessé de travailler en juin 2022. Elle affirme avoir tenté de communiquer avec son employeuse à une reprise quelques mois après juin 2022 pour savoir ce qui se passait. Elle dit avoir envoyé un courriel, mais il n’a pas pu être livré à la destinataire. Elle n’a rien fait d’autre pour tenter de joindre son employeuse.

[22] Je juge qu’il aurait été raisonnable de demander à son employeuse si elle allait encore la placer dans des entreprises. Si l’employeuse répondait que non, l’appelante aurait pu se renseigner sur son admissibilité à l’assurance-emploi. Je juge aussi qu’après la cessation d’emploi, il aurait été raisonnable de vérifier si l’employeuse avait produit un relevé d’emploi.

[23] L’appelante aurait pu s’informer auprès de la Commission. Si elle l’avait fait, elle aurait appris qu’elle n’avait pas besoin de son relevé d’emploi pour demander des prestationsNote de bas de page 8.

[24] L’appelante ne s’est pas renseignée au sujet de l’assurance-emploi. Elle n’a pas non plus vérifié si elle avait encore un emploi. Je juge que ce n’est pas ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 9. Ainsi, l’appelante aurait pu et aurait dû se renseigner pour voir si elle était admissible aux prestations.

[25] Durant son témoignage, l’appelante a dit qu’elle a demandé de l’assurance-emploi seulement parce qu’on lui a dit qu’elle devait le faire pour être admissible au programme Ontario au travail. L’appelante a demandé des prestations le 19 mars 2023, seulement après qu’Ontario au travail lui a recommandé de le faireNote de bas de page 10.

[26] J’ai demandé à l’appelante s’il y avait des circonstances exceptionnelles dont je devais tenir compte. J’ai demandé si quelque chose l’avait peut-être empêchée de demander des prestations d’assurance-emploi. Elle a dit qu’il n’y avait rien d’autre que ce qu’elle avait déjà mentionné dans son témoignage.

[27] Je conclus qu’aucune circonstance exceptionnelle n’a empêché l’appelante de présenter sa demande. Autrement dit, à moins de circonstances exceptionnelles, on s’attend à ce qu’une personne raisonnable vérifie assez rapidement si elle a droit aux prestations et quelles sont ses obligations aux termes de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 11.

[28] Je n’ai pas besoin de vérifier si, à la date antérieure, l’appelante remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations. Sans motif valable, on ne peut pas traiter sa demande de prestations comme si elle l’avait présentée plus tôt.

Conclusion

[29] L’appelante n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations pendant toute la durée du retard.

[30] L’appel est rejeté.

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