Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : MS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 222

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : M. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue le 19 décembre 2023 par la division générale (GE-23-2904)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 5 mars 2024
Numéro de dossier : AD-24-79

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira pas plus loin.

Aperçu

[2] M. S. est le demandeur dans le présent dossier. Je l’appellerai « prestataire » parce que la présente demande vise sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[3] Après avoir perdu son emploi, le prestataire a quitté le Canada pour rendre visite à sa famille. Pendant son absence, il a été traité par un psychothérapeute. Il était à l’étranger du 24 avril 2023 au 10 juin 2023.

[4] Selon la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, le prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations pendant cette période pour deux raisons. Premièrement, il se trouvait à l’étranger. Deuxièmement, il n’était pas disponible pour travailler.

[5] Le prestataire n’était pas d’accord avec la décision de la Commission. Il lui a donc demandé de la réviser. La Commission a maintenu sa décision. Par conséquent, le prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[6] La division générale a rejeté son appel. Il veut maintenant obtenir la permission de porter la décision de la division générale en appel à la division d’appel.

[7] Je refuse la permission de faire appel. Le prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a agi de façon injuste ou qu’elle a commis une erreur de fait importante.

Questions en litige

[8] Est-il possible de soutenir que la division générale a agi de façon injuste?

[9] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante parce qu’elle aurait ignoré ou mal compris les effets des problèmes de santé du prestataire?

[10] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante parce qu’elle aurait ignoré ou mal compris ses démarches de recherche d’emploi?

Je refuse la permission de faire appel

Principes généraux

[11] Pour que la demande de permission de faire appel soit accueillie, il faut que les raisons pour lesquelles le prestataire veut faire appel s’inscrivent dans les « moyens d’appel ». Ce sont les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[12] Je peux me pencher uniquement sur les erreurs suivantes :

  1. a) La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question alors qu’elle aurait dû le faire ou elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 1.

[13] Pour accueillir la demande de permission de faire appel et permettre à l’appel de passer à la prochaine étape, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel donne à l’appel une chance raisonnable de succès. Dans d’autres décisions judiciaires, une chance raisonnable de succès était l’équivalent d’une « cause défendableNote de bas de page 2 ».

Équité procédurale

[14] Lorsque le prestataire a rempli son formulaire de demande à la division d’appel, il a sélectionné deux moyens d’appel. Le premier invoquait une erreur d’équité procédurale.

[15] L’« équité procédurale » concerne l’équité de la procédure. Il ne s’agit pas de savoir si une partie estime que la décision amène un résultat équitable.

[16] Les parties qui se présentent devant la division générale ont droit à certaines garanties procédurales comme le droit d’être entendues, le droit de connaître les arguments avancés contre elles et le droit d’obtenir une décision rendue par une personne impartiale.

[17] Le prestataire n’a pas expliqué en quoi la procédure de la division générale avait été injuste. Il n’a pas dit qu’il n’avait pas eu une chance équitable de se préparer pour l’audience ni qu’il ne savait pas ce qui se passait durant l’audience. Il n’a pas dit qu’au cours de l’audience, il n’avait pas eu une chance équitable de présenter ses arguments ou de répondre à ceux de la Commission. Il ne s’est pas plaint que le membre de la division générale avait un parti pris ou qu’il avait jugé l’affaire d’avance.

[18] Quand je lis la décision et que j’examine le dossier d’appel, je constate que rien dans la conduite de la division générale, c’est-à-dire dans ce qu’elle a fait ou oublié de faire, ne m’amène à douter de l’équité de la procédure.

[19] On ne peut pas soutenir que la division générale a fait une erreur d’équité procédurale.

Erreur de fait importante

[20] Il faut que le prestataire comprenne qu’il n’avait pas droit aux prestations pour deux raisons différentes. Il était d’abord inadmissible parce qu’il était à l’étranger. Il était aussi inadmissible parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. La Commission devait conclure que le prestataire n’était pas admissible au bénéfice des prestations soit s’il se trouvait à l’étranger (et qu’aucune exception ne s’appliquait), soit s’il n’était pas disponible pour travailler. Elle n’avait pas à conclure qu’il était à l’étranger et qu’en plus, il n’était pas disponible pour travailler.

[21] Ainsi, l’appel du prestataire aura une chance raisonnable de succès seulement s’il peut démontrer que la division générale s’est trompée quand elle a décidé qu’il était à l’étranger et qu’aucune exception ne s’appliquait à lui et qu’elle s’est aussi trompée quand elle a décidé qu’il n’était pas disponible pour travailler.

Effets des problèmes de santé du prestataire

[22] Les prestataires qui se trouvent à l’étranger ne sont pas admissibles aux prestations d’assurance-emploi à moins de remplir les exigences d’une des exceptions qui figurent sur une courte listeNote de bas de page 3.

[23] L’une des exceptions examinée par la division générale porte sur les traitements médicaux. Les personnes qui demandent des prestations n’y seront pas inadmissibles si elles sont à l’étranger parce qu’elles subissent dans un hôpital, une clinique médicale ou un établissement du même genre un traitement médical qui n’est pas immédiatement et promptement disponible dans la région où elles résident au CanadaNote de bas de page 4.

[24] Le prestataire soutient qu’il a quitté le Canada pour des raisons de santé, y compris parce qu’il fait des crises de panique. Il a expliqué qu’il devait rentrer à la maison, un endroit où il aurait le soutien nécessaire pour recouvrer la santé. Il a reçu des traitements pour son anxiété pendant son séjour.

[25] Il se peut fort bien que le prestataire ait fait de l’anxiété grave et des crises de panique. Il a possiblement cru (et peut-être avait-il raison) que rentrer à la maison, où il serait entouré de sa famille et recevrait aussi un traitement, serait très utile.

[26] Malgré cela, je peux admettre que la division générale a peut-être commis une « erreur de fait importante » seulement s’il est possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion qu’elle a tirée après avoir ignoré ou mal interprété les éléments de preuve pertinents.

[27] La division générale a fondé sa décision sur la conclusion que le prestataire aurait pu suivre une psychothérapie près de chez lui. En conséquence, elle a jugé que l’exception relative au traitement médical ne s’appliquait pas à sa situation.

[28] Les éléments de preuve du prestataire ne permettaient pas de savoir si un traitement de psychothérapie était immédiatement et promptement disponible dans la région où il habitait au Canada. Il n’a présenté aucun autre élément de preuve qui aurait pu avoir une incidence sur la conclusion de la division générale voulant qu’un traitement était aussi offert dans la région du Canada où il résidait.

Démarches de recherche d’emploi

[29] On ne peut pas soutenir que la division générale a ignoré ou mal interprété les éléments de preuve décrivant les démarches de recherche d’emploi du prestataire.

[30] La loi précise qu’une personne qui demande des prestations n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel elle ne peut pas prouver qu’elle était capable de travailler disponible pour travailler, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 5. Faire des efforts pour trouver du travail n’est qu’un des éléments à prendre en considération pour évaluer la disponibilité des prestataires. Voici les deux autres éléments : il faut que les prestataires aient le désir de retourner au travail dès qu’un emploi convenable est disponible et il ne faut pas que les prestataires établissent des conditions personnelles qui limitent indûment (à tort) leurs possibilités d’emploiNote de bas de page 6.

[31] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas fait assez d’efforts pour essayer de trouver un emploi. Elle a aussi conclu qu’il n’avait pas le désir de retourner au travail dès qu’un emploi convenable était disponible.

[32] Le prestataire n’est pas d’accord avec la conclusion de la division générale voulant que ses efforts pour trouver un emploi étaient insuffisants. Il fait valoir qu’il explorait activement les possibilités d’emploi et qu’il a eu une entrevue à son retour au Canada. Je remarque qu’il a aussi dit à la division générale qu’il aurait mis fin aux séances de consultation psychologique et serait rentré au Canada plus tôt s’il avait reçu une offre d’emploi.

[33] Selon la division générale, le prestataire a dit qu’il avait mis à jour un curriculum vitae et qu’il avait fait des recherches en ligne pour trouver du travail. Elle n’a pas admis que de tels efforts étaient « suffisants ».

[34] La division générale est la principale juge des faits. La division d’appel ne peut pas évaluer ou soupeser à nouveau la preuve pour en arriver à une conclusion différente de celle de la division généraleNote de bas de page 7. De plus, les cours ont affirmé que la division d’appel n’est pas autorisée à intervenir lorsque la division générale s’est appuyée sur la preuve pour appliquer aux faits les règles de droit établiesNote de bas de page 8. Autrement dit, je ne peux pas remettre en question le jugement de la division générale, qui veut que le prestataire n’a « pas fait assez » d’efforts pour essayer de trouver un emploi.

[35] La question que je dois trancher est si la division générale a ignoré ou mal interprété les éléments de preuve concernant les démarches de recherche d’emploi du prestataire.

[36] Le prestataire a dit qu’il explorait activement les possibilités d’emploi. Par contre, il n’a pas dit que cette recherche active allait au-delà de la mise à jour de son curriculum vitae et du repérage de quelques annonces en ligne – c’est ce que la division générale a compris de la preuve qu’il a présentée. Pour ce qui est de ses démarches de recherche d’emploi, il n’a cerné aucun élément de preuve que la division générale aurait ignoré ou mal compris.

[37] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[38] Je refuse la permission de faire appel. Cela met donc un terme à l’appel.

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