Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 238

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : A. B.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 20 novembre 2023
(GE-23-2871)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 9 mars 2024
Numéro de dossier : AD-23-1133

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, A. B. (prestataire), et son épouse ont décidé de partager 40 semaines de prestations parentales standards de l’assurance-emploi après que leur enfant leur a été confié en vue de son adoption le 3 mai 2022.

[3] L’épouse du prestataire a demandé et reçu des prestations du 16 octobre 2022 au 6 mai 2023. Le prestataire a ensuite demandé 10 semaines de prestations parentales à compter du 21 mai 2023.

[4] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire pouvait seulement recevoir des prestations pendant la période de prestations parentales, qui se terminait 52 semaines après la date à laquelle l’enfant du prestataire lui a été confié. Par conséquent, il n’était pas admissible aux prestations parentales qu’il avait demandées.

[5] Le prestataire a fait appel de la décision de la Commission à la division générale du Tribunal, mais son appel a été rejeté. La division générale a conclu que le prestataire pouvait seulement recevoir des prestations pendant la période de prestations parentales, que cette période ne pouvait pas être prolongée et que le prestataire ne pouvait pas modifier son choix pour passer des prestations parentales standards aux prestations parentales prolongées.

[6] Le prestataire demande maintenant de faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Toutefois, il a besoin de la permission pour que son appel aille de l’avant. Le prestataire soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs de droit dans sa décision.

[7] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[8] Voici les questions en litige :

  1. a) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de prendre en considération que le prestataire a été induit en erreur par la Commission?
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de l’application d’autres lois parce que l’information sur les prestations parentales est déraisonnablement vague et ambiguë?
  3. c) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’examiner si sa demande de prestations aurait pu être antidatée parce qu’il a été induit en erreur par la Commission?

Je ne donne pas au prestataire la permission de faire appel

[9] Le critère juridique que le prestataire doit remplir pour demander la permission de faire appel est peu rigoureux : y a-t-il un moyen défendable qui permettrait à l’appel d’être accueilliNote de bas de page 1?

[10] Pour trancher cette question, je me suis surtout demandé si la division générale aurait pu commettre une ou plusieurs des erreurs pertinentes (ou « moyens d’appel ») énumérées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 2.

[11] Un appel n’est pas une nouvelle occasion de débattre de la demande originale. Je dois plutôt décider si la division générale a :

  1. a) omis d’offrir une procédure équitable;
  2. b) omis de décider d’une question qu’elle aurait dû trancher ou décidé d’une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  3. c) fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 3;
  4. d) commis une erreur de droitNote de bas de page 4.

[12] Avant que le prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue qu’au moins un de ces moyens d’appel donne à l’appel une chance raisonnable de succès. Une chance raisonnable de succès signifie que le prestataire pourrait plaider sa cause et possiblement gagner. Je dois aussi tenir compte d’autres moyens d’appel possibles que le prestataire n’a pas cernés avec précisionNote de bas de page 5.

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur

La décision de la division générale

[13] La période pendant laquelle des prestations parentales peuvent être versées est appelée la période de prestations parentales. La Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la période de prestations parentales se termine 52 semaines après la naissance ou le placement de l’enfant aux fins d’adoptionNote de bas de page 6. Cette période peut être prolongée dans certaines circonstances. Lorsqu’un prestataire choisit de recevoir des prestations parentales prolongées, la période est prolongée de 26 semainesNote de bas de page 7.

[14] La division générale a examiné les articles pertinents de la loiNote de bas de page 8. Elle a ensuite examiné quand la période de prestations parentales du prestataire avait commencé. Il a fait valoir à la division générale que la période de prestations parentales ne devrait pas commencer à la date du placement. La mère biologique de l’enfant du prestataire avait 21 jours pour changer d’avis au sujet de l’adoption. Le prestataire a dit que la période de prestations parentales devrait commencer après la fin de cette périodeNote de bas de page 9.

[15] La division générale a reconnu cet argument, mais a conclu que l’enfant du prestataire avait été placé chez lui aux fins d’adoption le 3 mai 2022. En tirant cette conclusion, elle a examiné et interprété la loi régissant les adoptions dans la province où réside le prestataireNote de bas de page 10.

[16] La division générale a jugé qu’aucune des circonstances permettant la prolongation de la période de prestations parentales ne s’appliquait au prestataire. Elle a conclu que le prestataire avait choisi de recevoir les prestations parentales standards et que la période de prestations parentales s’était terminée 52 semaines après la date à laquelle son enfant lui avait été confié, soit le 6 mai 2023Note de bas de page 11.

[17] Le prestataire avait fait valoir qu’il y avait un certain nombre d’autres facteurs qui devraient permettre de prolonger la période de prestations parentales dans son cas, de sorte qu’il puisse recevoir des prestations. La division générale a résumé ces points ainsi que l’autre argument du prestataire selon lequel lui et son épouse devraient avoir le droit de passer aux prestations parentales prolongées afin que des semaines supplémentaires puissent leur être verséesNote de bas de page 12.

[18] La division générale a conclu que le prestataire et son épouse étaient crédibles et a accepté leur preuveNote de bas de page 13. Elle a souligné qu’elle était sensible à la situation du prestataire, mais a conclu qu’il n’avait pas droit aux prestations en dehors de la période de prestations parentales.

[19] Enfin, la division générale a examiné si le prestataire pouvait modifier son choix pour passer des prestations parentales standards aux prestations parentales prolongées. Elle a conclu que le choix des prestations parentales standards est devenu irrévocable dès que des prestations ont été verséesNote de bas de page 14.

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit

[20] Le prestataire s’appuie sur les commentaires formulés dans la décision de la division générale, qui reconnaissent que la loi et les renseignements disponibles sont peu clairs et souvent déroutants pour les parents et d’autres personnes. Il affirme que ces commentaires laissent entendre qu’il était déraisonnable de s’attendre à ce qu’il s’informe correctement de ses droitsNote de bas de page 15.

[21] Le prestataire soulève également un argument selon lequel la Loi sur la protection du consommateur pourrait s’appliquer dans sa situation, étant donné les ambiguïtés de la loi et des descriptions des prestations offertes par la CommissionNote de bas de page 16.

[22] La division générale a reconnu les arguments du prestataire concernant la conduite de la Commission et le manque de renseignements clairsNote de bas de page 17. Elle a reconnu à juste titre que la Commission ne peut pas être tenue responsable de ne pas avoir fourni de façon proactive des renseignements clairs. Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit.

[23] En ce qui concerne l’argument du prestataire concernant la Loi sur la protection du consommateur, la division générale devait appliquer la Loi sur l’assurance-emploi. Sa compétence se limite à examiner si le prestataire a droit à des prestations au titre des dispositions de cette loi. Le prestataire n’a pas soulevé la question de la Loi sur la protection du consommateur, et celle-ci ne s’applique pas dans ces circonstances. La division générale n’a pas commis d’erreur de droit en omettant d’examiner ou d’appliquer cette loi.

[24] Le prestataire soutient que la division générale aurait dû suivre une décision de la division d’appel qui a conclu qu’un prestataire avait été induit en erreur par le formulaire de demande de la Commission et qu’il n’avait donc pas fait un choix clair entre les prestations parentales standards et les prestations parentales prolongéesNote de bas de page 18.

[25] La décision sur laquelle le prestataire s’appuie a été portée en appel à la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 19. La Cour d’appel fédérale a conclu que la division générale et la division d’appel avaient toutes deux commis une erreur de droit dans l’interprétation de la loi.

[26] La division générale a cité et suivi les décisions contraignantes de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale lorsqu’elle a conclu que le choix du prestataire ne pouvait pas être modifié, malgré le manque de clarté des renseignements dans le formulaire de demandeNote de bas de page 20.

[27] Le prestataire fait également référence à une décision concernant l’antidatation d’une demande de prestations. Il affirme que, comme dans cette affaire, son épouse et lui avaient un motif valable justifiant le retard de leur demande de prestations parce qu’ils avaient été induits en erreur. Le prestataire laisse entendre que la division générale aurait dû en tenir compteNote de bas de page 21. 

[28] La question dont la division générale était saisie était de savoir si le prestataire avait droit à des prestations en dehors de la période de prestations parentales. Rien ne laisse croire que le prestataire avait demandé une antidatation ou que la Commission avait rendu une décision sur cette question. Il n’appartenait pas à la division générale de trancher la question et il est impossible de soutenir qu’elle a commis une erreur de droit en ne se demandant pas si le prestataire pouvait faire antidater sa demande.

[29] La division générale a pris en considération tous les éléments de preuve et les arguments du prestataire. Elle a suivi la jurisprudence contraignante et a appliqué le critère juridique approprié à la situation du prestataire. Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit.

[30] En plus des arguments du prestataire, j’ai également examiné les autres moyens d’appel. Le prestataire n’a signalé aucune erreur de compétence et je ne vois aucune preuve d’une telle erreur. Il est impossible de soutenir que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale ni fondé sa décision sur des erreurs de fait.

[31] Le prestataire n’a relevé aucune erreur que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[32] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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