Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : TK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1910

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : T. K.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (595200) datée du 31 mai 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 24 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-1670

Sur cette page

Décision

[1] T. K. est l’appelante dans le présent appel. Je rejette son appel.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a démontré qu’elle a versé à l’appelante une somme plus élevée de prestation d’assurance-emploi d’urgence que ce à quoi elle était admissibleNote de bas de page 1. Autrement dit, elle a reçu un trop-payé.

[3] Lorsque la Commission a rendu sa décision, le trop-payé s’élevait à 2 000 $Note de bas de page 2. Il s’agissait du montant du versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence que l’appelante a reçu, mais qu’elle ne pouvait pas conserver.

Aperçu

[4] L’appelante travaillait au service à la clientèle chez X (employeur). En mars 2020, son employeur l’a mise à pied en raison d’une fermeture liée à la pandémie de COVID-19.

[5] Le 31 mars 2020, elle a demandé des prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 3.

[6] La Commission a décidé que l’appelante était admissible à la prestation d’assurance-emploi d’urgence. La Commission a versé à l’appelante un paiement anticipé (2 000 $) peu de temps après sa demande. Elle a ensuite reçu 10 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[7] En juin 2020, elle a repris le travail.

[8] Environ deux ans plus tard, la Commission a décidé que l’appelante n’était pas légalement admissible au versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence. La Commission a envoyé une lettre de décision à l’appelante pour en expliquer les raisons et un avis de dette de 2 000 $.

[9] L’appelante n’est pas d’accord avec la Commission. Elle dit avoir essayé de rembourser le versement anticipé tout de suite après l’avoir reçu, mais personne ne voulait l’accepter. L’appelante affirme que la Commission aurait dû le déduire de ses premières semaines de prestations d’assurance-emploi. La décision de la Commission d’établir et de recouvrer le trop-payé de 2 000 $ en prestation d’assurance-emploi d’urgence constitue une mesure de représailles.

Question en litige

[10] Je dois décider si l’appelante doit rembourser le versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence (2 000 $).

Analyse

[11] Il revient à la personne qui demande des prestations d’assurance-emploi de démontrer qu’elle y est admissible.

[12] Dans le présent appel, l’appelante doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était admissible à toutes les semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence qu’elle a reçues. En d’autres termes, elle doit prouver son admissibilité selon la prépondérance des probabilités.

La prestation d’assurance-emploi d’urgence

[13] En réponse à la pandémie de COVID-19, le gouvernement fédéral a apporté des modifications temporaires à la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4. L’une de ces modifications consistait à créer la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Voici les règles relatives à la prestation d’assurance-emploi d’urgence qui importent pour le présent appel :

  • Entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020, la Commission a dû traiter les demandes de prestations régulières et de prestations de maladie de l’assurance-emploi comme des demandes de prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 5.
  • Toute personne pouvait présenter une demande de prestation d’assurance-emploi d’urgence pour une période de deux semaines. Elle devait suivre les règles de la Commission et lui fournir les renseignements dont elle avait besoin pour trancher sa demandeNote de bas de page 6.
  • La somme hebdomadaire habituelle de prestation d’assurance-emploi d’urgence versée par la Commission était de 500 $Note de bas de page 7.
  • La Commission a versé des paiements anticipés de prestation d’assurance-emploi d’urgence de 2 000 $ aux personnes admissibles dès que possible après la présentation de leur demande d’assurance-emploiNote de bas de page 8.
  • La Commission a décidé de recouvrer le paiement anticipé de 2 000 $ en ne versant pas à une personne la somme hebdomadaire de prestation d’assurance-emploi d’urgence sur 4 semaines distinctes (semaines 13, 14, 18 et 19)Note de bas de page 9.

[14] Les modifications apportées à la loi permettaient également à la Commission de réexaminer l’admissibilité d’une personne à la prestation d’assurance-emploi d’urgence jusqu’à 36 mois après qu’elle a reçu un paiement de prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 10. De plus, les modifications permettaient à la Commission d’établir et de recouvrer un trop-payé si une personne recevait une somme plus élevée de prestation d’assurance-emploi d’urgence que ce à quoi elle était admissibleNote de bas de page 11.

Ce que disent la Commission et l’appelante

[15] La Commission affirme avoir versé à l’appelante un paiement anticipé de 2 000 $ en prestation d’assurance-emploi d’urgence. Elle a ensuite versé à l’appelante 10 semaines de prestation, en se fondant sur les déclarations que celle-ci a produitesNote de bas de page 12.

[16] La Commission affirme qu’après 10 semaines, l’appelante est retournée au travail et n’était plus admissible à la prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 13. Par conséquent, la Commission n’a pas pu recouvrer le versement anticipé de 2 000 $ de prestation d’assurance-emploi d’urgence en retenant ses prestations hebdomadaires des semaines 13, 14, 18 et 19.

[17] La Commission affirme donc que le paiement anticipé est un trop-payé, qu’elle doit rembourser.Note de bas de page 14

[18] L’appelante n’est pas d’accord avec la CommissionNote de bas de page 15.

[19] Elle dit qu’elle remplissait les critères permettant de recevoir la prestation canadienne d’urgence (c’est-à-dire la prestation d’assurance-emploi d’urgence). Lorsqu’elle a reçu le versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence, elle a essayé de le rembourser, mais personne ne voulait l’accepter. La Commission a téléphoné à l’appelante et lui a dit qu’elle faisait passer ses prestations de la prestation canadienne d’urgence à des prestations régulières d’assurance-emploi. L’appelante a repris le travail à la fin de mai ou en juin 2020. Cependant, une partie de son salaire provenait de la subvention salariale d’urgence du Canada que son employeur a reçue. Elle a ensuite contracté la COVID-19 et ne pouvait pas travailler.

[20] L’appelante affirme que la Commission aurait dû déduire le versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence de ses premières semaines de prestations d’assurance-emploi. Elle a produit des déclarations de revenus pour les années 2020 et 2021 et il n’y avait rien qui indiquait qu’elle avait reçu un trop-payé de prestation canadienne d’urgence. De plus, il a fallu près de deux ans à la Commission pour répondre à sa demande de révision.

[21] L’appelante affirme que la décision de la Commission d’établir et de recouvrer le trop-payé de 2 000 $ est une stratégie de représailles contre elle. Elle conteste la décision de la Commission de comptabiliser ses indemnités pour accidents du travail (déclarées sur son T4E) comme un revenu, ce qui a entraîné un trop-payé de 20 500 $. Cependant, elle a demandé une révision et la Commission a annulé sa décision. L’appelante dit que, comme elle a eu gain de cause, la Commission s’en est prise à elle pour ravoir le trop-payé de 2 000 $.

[22] Enfin, l’appelante affirme que lorsqu’elle a téléphoné à l’Agence du revenu du Canada (ARC) en avril 2023, le solde de son compte était nul. Elle n’a pas été en mesure de trouver du travail depuis que son employeur l’a congédiée en 2021. De plus, elle n’a pas pu recevoir de prestations d’assurance-emploi en raison de la dette qu’elle devait, selon les déclarations de la Commission et de l’ARC. Toutes deux lui ont dit qu’elles retiendraient ses prestations d’assurance-emploi pour rembourser sa dette. L’appelante a dépensé ses économies. La Commission est une source de stress pour elle depuis sept mois. Elle dit qu’elle se fait avoir dans tous les sens pour avoir été honnête et avoir dit la vérité. Ce n’est pas juste et elle n’a pas les moyens de rembourser les 2 000 $.

La décision de la Commission concernant le trop-payé est correcte

[23] La plupart des éléments de preuve présentés par l’appelante ne sont pas pertinents à une question de droit que je dois trancher. L’appelante croit que la Commission a établi le trop-payé de prestation d’assurance-emploi d’urgence en guise de représailles contre elle. Je comprends que le moment des décisions de la Commission donne l’impression que c’est vrai. Cependant, même si c’est le cas, je dois décider si la Commission a correctement appliqué le droit sur les prestations d’assurance-emploi d’urgence à la demande de prestations d’assurance-emploi de l’appelante. Je n’ai pas le pouvoir légal de punir la Commission. Je ne peux pas non plus lui ordonner de l’indemniser du stress important qu’elle a subi.

[24] L’appelante affirme que la Commission a fait passer ses prestations aux prestations régulières d’assurance-emploi après lui avoir versé le paiement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence. La preuve de la Commission démontre le contraire. Je préfère la preuve de la Commission qui montre qu’elle a versé 10 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence à l’appelante. La preuve de la Commission est détaillée et tirée de son dossier informatisé de l’assurance-emploi. Je n’ai aucune raison d’en douter. De plus, à part le souvenir qu’a l’appelante d’une conversation téléphonique en avril 2020, il n’y a aucune preuve contraire à celle de la Commission à ce sujet.

[25] J’accepte la preuve de l’appelante concernant deux questions juridiques sur lesquelles je dois me prononcer. J’admets qu’elle a reçu le versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence (2 000 $). C’est ce que la preuve de la Commission démontre. J’admets aussi qu’elle a repris le travail en mai ou en juin 2020. Son témoignage sur son retour au travail est confirmé par la preuve de la Commission. Selon cette preuve, le dernier versement de prestation d’assurance-emploi d’urgence a été effectué pour la semaine du 7 juin 2020Note de bas de page 16. Je n’ai aucune raison d’en douter.

[26] J’ai examiné la preuve de la Commission concernant les prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’elle a versées à l’appelante. J’ai également examiné le calcul du trop-payé que l’appelante doit rembourser d’après Commission.Note de bas de page 17 Je n’ai aucune raison de douter de la preuve de la Commission concernant ces deux éléments. Et il n’y a aucune preuve du contraire.

[27] Ainsi, selon la preuve que j’ai acceptée, je conclus ce qui suit :

  • L’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi et, peu de temps après, la Commission lui a versé un paiement anticipé de 2 000 $ au titre de la prestation d’assurance-emploi d’urgence.
  • L’appelante a prouvé qu’elle était admissible à 10 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence (5 000 $), ce que la Commission lui a versé.
  • L’appelante a recommencé à travailler le 14 juin 2020, après avoir reçu 10 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence; elle n’était pas admissible à des semaines supplémentaires de prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 18.
  • Par conséquent, la Commission n’a pas pu recouvrer le versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence pour les semaines 13, 14, 18 et 19.

[28] Ainsi, je conclus que l’appelante a reçu quatre semaines (2 000 $) de prestations d’assurance-emploi d’urgence auxquelles elle n’était pas légalement admissible. (Il s’agit du versement anticipé de prestation d’assurance-emploi d’urgence.) Cette somme est devenue un trop-payé qu’elle devait rembourser.

Le Tribunal ne peut pas annuler le trop-payé

[29] Le trop-payé est une dette que l’appelante doit à Emploi et Développement des compétences Canada (EDSC). EDSC est le ministère fédéral responsable de la Commission.

[30] Je reconnais à quel point le trop-payé semble injuste à l’appelante, ainsi que le stress financier et mental important qu’il lui cause. Au cours de la dernière année, elle a consacré tant de temps et d’énergie à contester les décisions de la Commission.

[31] Malheureusement pour l’appelante, je dois respecter la loiNote de bas de page 19. Je n’ai pas le pouvoir de rendre une décision fondée sur des principes généraux d’équité, de compassion ou des difficultés financières.

[32] La Commission peut annuler un trop-payé en tout ou en partieNote de bas de page 20. Le Tribunal n’a pas le pouvoir légal de le faireNote de bas de page 21. Par conséquent, si l’appelante n’a pas déjà demandé à la Commission d’annuler son trop-payé, elle peut le faire.

[33] L’ARC perçoit les créances au nom de certains ministères fédéraux, dont EDSC. L’appelante peut obtenir de plus amples renseignements sur les plans de remboursement et l’allégement de la dette en consultant la page Web de l’ARC sur la perception des trop-payés de prestation d’assurance-emploi d’urgence (https://www.canada.ca/fr/agence-revenu/services/a-propos-agence-revenu-canada-arc/lorsque-vous-devez-argent-recouvrements-a-arc.html) ou en composant sans frais le 1-800-864-5823Note de bas de page 22.

Conclusion

[34] L’appelante n’a pas démontré qu’elle était admissible au versement anticipé de 2 000 $ de prestation d’assurance-emploi d’urgence. Il s’agit donc d’un trop-payé.

[35] La loi prévoit que l’appelante doit rembourser ce trop-payé (2 000 $).

[36] Je dois donc rejeter son appel.

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