Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : GH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1992

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : G. H.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (582214) datée du 5 mai 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Elyse Rosen
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 25 juillet 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 26 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-1615

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Je conclus que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelant travaillait pour un fournisseur de produits métalliques. Il trouvait son superviseur agressif et grossier. Il avait aussi des préoccupations au sujet de la sécurité au travail. Il a donc quitté son emploi et demandé des prestations d’assurance-emploi.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’elle ne pouvait pas lui verser de prestations parce qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification.

[5] L’appelant affirme qu’il était fondé à quitter son emploi. Il fait valoir que personne ne devrait être traité de la façon que son superviseur l’a traité. Et il sentait que son milieu de travail était dangereux. Il croit avoir droit à des prestations en raison de ces circonstances.

[6] Je dois établir si l’appelant était fondé à quitter son emploi au moment où il l’a fait.

Question en litige

[7] L’appelant est-il fondé à quitter son emploi?

Analyse

[8] Pour trancher l’appel, je dois d’abord établir si l’appelant a quitté volontairement son emploi. Dans l’affirmative, je dois décider s’il était fondé à quitter son emploi quand il l’a fait.

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi?

[9] L’appelant affirme avoir démissionné. La Commission et son employeur sont d’accord, et le relevé d’emploi de l’appelant le confirmeNote de bas de page 2. Je conclus donc qu’il a quitté volontairement son emploi.

[10] Comme j’ai décidé que l’appelant a quitté volontairement son emploi, je dois maintenant décider s’il était fondé à le faire.

L’appelant était-il fondé à quitter son emploi?

[11] Je juge que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi lorsqu’il l’a fait.

[12] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 3. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que l’on était fondé à le faire.

[13] La loi prévoit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ était la seule solution raisonnable dans son cas. Je dois tenir compte de toutes les circonstances au moment où l’appelant a quitté son emploi pour décider si son départ était la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 4. La loi énonce certaines des circonstances que je dois examinerNote de bas de page 5.

[14] C’est à l’appelant de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 6.

[15] Une fois que j’aurai établi quelles circonstances s’appliquent dans le cas de l’appelant, celui-ci devra démontrer que son départ était la seule solution raisonnable qui s’offrait à lui à ce moment-làNote de bas de page 7.

Les circonstances dans lesquelles se trouvait l’appelant

[16] La loi fournit une liste de circonstances dont je dois tenir compte pour décider si une personne était fondée à quitter son emploi. Elles comprennent :

[17] Je conclus que ces deux circonstances existaient dans la présente affaire.

i. Harcèlement

[18] Le harcèlement est généralement défini comme tout comportement inapproprié d’une personne envers une autre qui est offensant (c’est-à-dire grossier, insultant ou agressif) et dont la première personne savait ou aurait dû savoir qu’il serait indésirable. Il peut prendre de nombreuses formes, y compris des gestes, une conduite, des commentaires, de l’intimidation et des menaces.

[19] L’appelant affirme que son superviseur était grossier, méprisant et agressif. Il refusait de répondre aux questions de l’appelant liées à son emploi ou répondait avec un [traduction] « fais de l’air » désinvolte, il injuriait l’appelant, se moquait de lui, criait et lançait des choses régulièrement. Il va sans dire que son superviseur aurait dû savoir que ce comportement était indésirable.

[20] L’appelant décrit son superviseur comme un homme très gros. Parce qu’il était tellement imprévisible et explosif, l’appelant, qui se dit un homme beaucoup plus petit, avait peur de lui.

[21] Il affirme être quelqu’un qui aime travailler, mais en raison du comportement de son superviseur, il a commencé à avoir peur d’aller au travail. Il ne dormait pas la nuit.

[22] Il dit que personne ne devrait avoir à subir ce genre de traitement au travail. Je suis d’accord. Je conclus que l’appelant a été victime de harcèlement.

ii. Sécurité

[23] L’appelant travaillait pour un fournisseur de produits métalliques. Les supports sur lesquels les matériaux étaient conservés auraient dû être boulonnés au sol et aux murs, mais ne l’étaient pas. L’appelant avait peur qu’ils tombent sur lui et le tuent.

[24] L’appelant était souvent laissé seul dans l’atelier, où il devait transporter de gros morceaux de métal avec un chariot élévateur à fourche. Il dit que ce n’est pas sécuritaire. S’il avait un accident, il n’y aurait personne dans le coin pour appeler à l’aide.

[25] Bien que je n’aie aucune preuve des normes de sécurité acceptables dans l’industrie où l’appelant travaillait, je reconnais que des supports sur lesquels on range des matériaux lourds devraient être fixés au sol. Je reconnais également qu’il est risqué pour une personne qui utilise de la machinerie lourde de travailler seule. La Commission ne semble pas avoir mené d’enquête sur ces allégations.

[26] En l’absence de preuve du contraire, je suis d’accord avec l’appelant pour dire que son environnement de travail n’était pas sécuritaire.

L’appelant avait-il d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi?

[27] J’estime que l’appelant avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi.

[28] Même si les circonstances dans lesquelles se trouvait l’appelant pouvaient donner lieu à une justification, il avait l’obligation d’essayer de trouver une solution aux circonstances dans lesquelles il se trouvait avant de démissionner.

[29] L’appelant n’a jamais signalé au propriétaire de l’entreprise les problèmes auxquels il était confronté. Il dit que s’il s’était plaint, il aurait été congédié. Cependant, l’appelant a démissionné. S’il s’était plaint avant de démissionner, il est possible que le propriétaire ait fait quelque chose.

[30] Si l’appelant a raison de dire qu’il aurait été congédié pour s’être plaint, sa situation n’aurait pas été pire que celle qu’il a vécue lorsqu’il a démissionné. Et même s’il n’avait pas l’assurance que le propriétaire ferait quoi que ce soit pour régler le problème, il aurait dû essayer. Je juge qu’il aurait été raisonnable que l’appelant signale au propriétaire les problèmes auxquels il faisait face plutôt que de démissionner.

[31] L’appelant aurait également pu faire part de ses préoccupations à la santé et sécurité au travail (SST) de l’Alberta (Occupational Health and Safety Alberta). Il dit l’avoir fait, mais seulement après son départ.

[32] J’estime qu’il aurait dû signaler les problèmes avant de partir. S’il l’avait fait, la SST de l’Alberta aurait peut-être demandé à son employeur de corriger la situation ou lui aurait conseillé de ne pas retourner au travail avant que la situation ne soit corrigée. Je juge qu’il aurait été raisonnable que l’appelant parle à la SST de l’Alberta plutôt que de démissionner.

[33] L’appelant a déclaré qu’il avait peur de son superviseur. La peur d’une personne au travail pourrait, dans certains cas, être une raison de partir immédiatement. Cependant, l’appelant affirme qu’il a commencé à avoir peur de son superviseur des semaines après le début de son emploi. Pourtant, il a conservé son emploi pendant environ 15 mois. Je conclus donc qu’il n’avait pas tellement peur de son superviseur que cela pouvait justifier son départ immédiat.

[34] La Commission affirme que l’appelant aurait dû trouver un autre emploi avant de démissionner. Cependant, l’appelant affirme qu’il a cherché du travail de manière diligente pendant environ cinq mois avant de démissionner. Il cherchait du travail comme conducteur de chariot élévateur à fourche, conducteur de grue et livreur. Il a vérifié les annonces d’offres, il s’est inscrit à Indeed et à Kijiji et il a affiché son curriculum vitae, et il a informé ses amis et ses connaissances qu’il cherchait du travail. Je juge qu’il a fait de son mieux pour essayer d’obtenir un emploi avant de démissionner.

[35] Cependant, j’estime que l’appelant n’en a pas fait assez avant de décider de démissionner. Plutôt que de prendre des mesures pour essayer de changer les circonstances dans lesquelles il se trouvait, il a continué de faire face à la situation jusqu’à ce qu’il en arrive au point où il ne pouvait plus le tolérer. À mon avis, ce n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas.

Conclusion

[36] Je conclus que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification. Pour cette raison, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[37] L’appel est rejeté.

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