Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SR c Commission de l’assurance‑emploi du Canada, 2023 TSS 1898

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelant : S. R.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (580658) datée du 5 avril 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 29 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 12 septembre 2023
Numéro de dossier : GE-23-1510

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

Aperçu

[2] L’appelant a demandé des prestations régulières d’assurance‑emploi. La Commission affirme qu’il y a eu une erreur en ce qui concerne la date de début de sa demande. Il en est résulté un versement excédentaire. La Commission a émis un avis de dette le 6 novembre 2021.   

[3] L’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision dans un formulaire daté du 22 février 2023. La Commission a reçu la demande le 14 mars 2023. Elle a décidé que la demande ne satisfaisait pas aux exigences de la loi. En effet, elle a conclu que la demande dépassait la période de révision de 30 jours.

Questions en litige

[4] La demande de révision de l’appelant était-elle tardive?

[5] La Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a rejeté la demande de l’appelant de prolonger le délai de 30 jours pour demander une révision?

Analyse

Date de la demande de révision

[6] Un prestataire peut demander à la Commission de réviser sa décision dans les 30 jours suivant la date à laquelle il en reçoit communicationNote de bas de page 1.

[7] La Commission a donné un avis de dette à l’appelant le 6 novembre 2021. L’appelant a déclaré qu’il a reçu l’avis de dette à un moment donné en décembre 2021. Même s’il a reçu l’avis de dette le 31 décembre 2021, cela signifie qu’il avait jusqu’au 30 janvier 2022 pour demander à la Commission de réviser sa décision.

[8] L’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision dans un formulaire daté du 22 février 2023. Service Canada a estampillé la demande de révision comme ayant été reçue le 14 mars 2023. Je conclus donc que l’appelant n’a pas demandé à la Commission de réviser sa décision dans les 30 jours suivant la date à laquelle il a reçu communication de la décision initiale.

Exercice du pouvoir judiciaire discrétionnaire pour rendre une décision de révision

[9] La Commission peut accorder un délai supplémentaire pour la présentation d’une demande de révisionNote de bas de page 2. Elle doit alors être convaincue qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai. Elle doit également être convaincue que le prestataire a manifesté l’intention constante de demander la révisionNote de bas de page 3.

[10] La Commission doit être convaincue de deux autres choses en ce qui concerne les demandes présentées après un an. Premièrement, que la demande de révision a des chances raisonnables de succès; Deuxièmement, que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partieNote de bas de page 4.

[11] Les décisions de la Commission d’accorder plus de temps pour demander une révision sont discrétionnaires. Je ne peux pas modifier une décision discrétionnaire de la Commission à moins que cette dernière n’ait pas agi de façon judiciaire; autrement dit, si elle n’a pas agi de bonne foi, compte tenu de tous les facteurs pertinentsNote de bas de page 5.

L’appelant a-t-il donné une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai?

[12] L’appelant a expliqué de façon raisonnable pourquoi il a demandé un délai plus long pour présenter à la Commission une demande de révision de sa décision initiale.

[13] L’appelant a demandé des prestations d’assurance‑emploi le 11 décembre 2020. Il a témoigné qu’il l’avait fait en ligne. Il a expliqué que tout allait bien jusqu’en mai 2021, date à laquelle il a conclu un règlement avec son entreprise et a annulé ses prestations. Un peu plus tard, il a recommencé ses prestations, car il n’avait pas trouvé d’emploi.

[14] Le 6 novembre 2021, la Commission lui a remis un avis de dette de 1 719 $. Elle a donné comme raison à cet égard qu’un trop payé avait été établi en raison d’une modification de la date de début de ses prestations.

[15] Dans un formulaire daté du 22 février 2023, l’appelant a demandé à la Commission de réviser le trop payé. Dans sa demande de révision, l’appelant a affirmé qu’il avait parlé du trop payé à Service Canada et que l’agent lui avait dit que le celui‑ci serait corrigé et qu’il ne devrait pas s’en inquiéter. Il a dit avoir eu de nombreuses discussions avec Service Canada à ce sujet.

[16] La Commission affirme que l’appelant a fourni une explication raisonnable du retard dans la demande de révision. Elle fait cette affirmation parce que l’agent à qui il a parlé en premier lui a dit que la modification ayant entraîné le trop payé serait corrigée. La Commission affirme également que l’appelant a reçu des prestations d’assurance‑emploi après avoir reçu l’avis de dette et qu’il a cru que la dette n’était pas en souffrance.

[17] L’appelant a affirmé dans son témoignage que l’Agence du revenu du Canada (ARC) l’avait appelé pour tenter de recouvrer la dette. Il a dit que, jusqu’à ce moment‑là, il croyait que le trop payé allait être corrigé.

[18] Je n’ai aucune raison de douter du témoignage de l’appelant. Il a témoigné de façon claire et franche. Et son témoignage concordait avec les déclarations qu’il a faites à la Commission. J’accepte donc comme fait qu’il a cru que la Commission corrigerait le problème qui a mené au trop payé. Je conclus que cela explique raisonnablement le retard dans la présentation à la Commission d’une demande de révision de sa décision concernant le trop payé.

L’appelant a-t-il manifesté l’intention constante de demander une révision?

[19] Non, l’appelant n’a pas manifesté l’intention constante de demander une révision.

[20] La Commission affirme que l’appelant n’a pas manifesté l’intention constante de demander une révision. En effet, il a reçu plusieurs relevés de compte et il n’a posé aucune question à leur sujet. La Commission affirme que, même s’il a été informé d’une erreur qui serait résolue, il n’y a aucune preuve qu’il a communiqué avec la Commission pour tenter de résoudre le problème pendant le long délai.

[21] Après l’avis de dette original, la Commission a envoyé à l’appelant 10 relevés de compte datés du 6 décembre 2021 au 6 janvier 2023. Après que l’appelant eut demandé à la Commission de réviser le trop payé, cette dernière a envoyé un autre relevé de compte daté du 6 mars 2023.

[22] L’appelant ne conteste pas qu’il a obtenu les relevés de compte que la Commission dit lui avoir envoyés. Donc, je lui ai demandé pourquoi il n’avait rien fait après avoir reçu chacun des relevés de compte. L’appelant a dit qu’il les avait simplement rangés dans un tiroir.

[23] L’appelant a répondu à l’argument de la Commission selon lequel il n’a pas manifesté l’intention constante de demander une révision. Il a témoigné que l’agente de Service Canada à qui il a parlé lui a assuré que le trop payé était une erreur d’écriture. Il a dit s’être fié à ses propos.

[24] Je n’ai aucune raison de douter que l’appelant ait compris que l’erreur à l’origine du trop payé serait corrigée, comme l’en a assuré Service Canada. Et la Commission est d’accord pour dire que cela explique raisonnablement le délai mis dans la présentation d’une demande de révision. Malgré cela, et parce qu’il a reçu un avis de dette et neuf relevés de compte au cours des 14 mois environ allant de novembre 2021 à janvier 2023, je ne crois pas que l’appelant ait manifesté l’intention constante de demander une révision.

La demande de révision de l’appelant a‑t‑elle une chance raisonnable de succès?

[25] Je conclus que la demande de révision de l’appelant a une chance raisonnable de succès

[26] La Commission affirme qu’elle a établi un trop payé par suite d’une modification de la date de début de la demande de prestations de l’appelant. Elle fait valoir que le dernier jour de travail de l’appelant était différent de celui initialement déclaré.

[27] L’appelant affirme que son dernier jour de travail devrait être le 11 novembre 2020 et que la lettre de son employeur mettant fin à son emploi et son relevé d’emploi (RE) le confirment.

[28] L’appelant a joint à son avis d’appel la lettre de son employeur datée du 16 septembre 2020. Selon cette lettre, son emploi a pris fin ce jour‑là. L’appelant a mentionné le paragraphe de la lettre qui mentionne que son relevé d’emploi serait délivré après sa dernière paie et qu’il pourrait demander des prestations d’assurance‑emploi à Service Canada à ce moment‑là.

[29] L’appelant a joint à son avis d’appel le relevé d’emploi, délivré le 27 novembre 2020. Il y est mentionné que le dernier jour pour lequel l’appelant a été payé est le 11 novembre 2020. Y figurent également les heures et la rémunération assurable jusqu’à la période de paie se terminant le 21 novembre 2020, ainsi que les montants de l’indemnité de vacances et de l’indemnité de départ.

[30] La Commission n’a pas commenté l’écart apparent entre le relevé d’emploi et la lettre que l’employeur de l’appelant a envoyée à ce dernier. Et il ne ressort pas de son dossier de révision que la Commission a pris en considération la lettre de l’employeur et l’effet que celle‑ci a pu avoir sur la date de début de la demande de l’appelant; la lettre ne figure pas dans le dossier.

[31] Je conclus que la lettre de l’employeur est une preuve pertinente que la Commission n’a probablement pas prise en compte lorsqu’elle a décidé que la demande de révision de l’appelant n’avait aucune chance raisonnable de succès.

[32] Je conclus que l’appelant a une cause défendable concernant le trop payé. Je ne crois pas qu’il soit évident à première vue que la demande de révision de l’appelant est vouée à l’échec. Cela est particulièrement attribuable à la divergence entre la lettre de l’employeur et son relevé d’emploi, ainsi qu’aux conseils que l’employeur a fournis à l’appelant sur le moment où il devrait présenter une demande de prestations d’assurance‑emploi. Je conclus donc que la demande de révision de l’appelant a une chance raisonnable de succès

L’autorisation d’un délai supplémentaire pour présenter la demande porterait‑elle préjudice à la Commission ou à une partie?

[33] Je ne crois pas que l’autorisation d’un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision porterait préjudice à la Commission.

[34] L’emploi de l’appelant a pris fin et l’appelant a ensuite demandé des prestations d’assurance‑emploi. C’était il y a un peu moins de trois ans. Il semble que l’appelant et la Commission aient tous deux des documents liés à l’emploi perdu.

[35] La Commission affirme qu’elle ne subirait aucun préjudice si un délai supplémentaire était accordé à l’appelant pour demander une révision. Même si l’appelant a attendu environ 16 mois avant de demander à la Commission de réviser sa décision, je ne crois pas que ce retard porterait préjudice à la Commission.

Donc, la Commission a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire?

[36] La Commission n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. Cela s’explique par le fait qu’elle n’a pas tenu compte des éléments de preuve pertinents concernant la date de début de la demande de l’appelant. Toutefois, comme cela ne concerne que l’un des quatre éléments dont la Commission doit être convaincue, cela ne change pas la décision de la Commission de ne pas accorder plus de temps à l’appelant pour demander une révision.

Conclusion

[37] L’appel est rejeté.

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