Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 277

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. W.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (627425) datée du
13 novembre 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Elyse Rosen
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 9 janvier 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 11 janvier 2024
Numéro de dossier : GE-23-3287

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à présenter ses demandes pour chaque semaine de chômage comprise entre le 20 décembre 2020 et le 18 septembre 2021. Cela signifie que ses demandes ne peuvent pas être traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi le 3 décembre 2020. Il a présenté une demande pour chaque semaine de chômage comprise entre le 6 décembre 2020 et le 2 janvier 2021, en produisant des déclarations électroniques à l’aide du système de déclaration en ligne de la Commission de l’assurance-emploi du Canada.

[4] Lorsqu’il a rempli sa déclaration en ligne pour la période du 20 décembre 2020 au 2 janvier 2021, on lui a demandé de communiquer avec la Commission. En effet, à la lumière des réponses qu’il avait données, l’établissement de son rapport nécessitait l’aide d’un agent.

[5] L’appelant n’a pas communiqué avec la Commission, comme il avait été incité à le faire. Il dit ne pas avoir compris que c’était ce qu’on lui demandait de faireNote de bas de page 1.

[6] Il affirme que vers le mois de juillet ou d’août 2021, il s’est rendu compte qu’il n’avait reçu aucune prestation depuis décembre 2020. Il a alors demandé à un ami de l’aider à comprendre pourquoi. Son ami lui a dit de se rendre dans un bureau de Service Canada pour obtenir plus d’information.

[7] L’appelant affirme que la personne à qui il a parlé lorsqu’il s’est présenté dans un bureau de Service Canada lui a dit de faire ses déclarations par téléphone et lui a dit où téléphoner.

[8] L’appelant affirme avoir téléphoné au numéro plusieurs fois, mais qu’il s’agissait d’un système téléphonique automatisé et qu’il ne comprenait pas ce que disaient les messages. Il a donc arrêté de téléphoner.

[9] Le 6 octobre 2021, l’appelant a téléphoné à la Commission avec son ami et a fait une demande pour les semaines du 19 septembre au 2 octobre 2021.

[10] L’appelant a de nouveau téléphoné à la Commission le 29 novembre 2021 pour demander que ses demandes de prestations pour ses semaines de chômage entre le 20 décembre 2020 et le 19 septembre 2021 soient antidatées (c’est-à-dire, qu’elles soient traitées comme si elles avaient été présentées à temps).

[11] La Commission a décidé que l’appelant n’avait pas de motif valable de ne pas avoir produit ses déclarations à temps. Elle a refusé d’antidater ses demandes. Pour cette raison, elle affirme que l’appelante n’est pas admissible aux prestations du 20 décembre 2020 au 18 septembre 2021.

[12] L’appelant affirme qu’il ne connaissait pas le régime d’assurance-emploi et qu’il ne savait pas comment faire un suivi pour comprendre pourquoi il ne recevait pas de prestations. Il dit avoir eu besoin de son ami, qui parle mieux l’anglais que lui et qui a une meilleure compréhension du régime d’assurance-emploi, pour l’aider.

Question en litige

[13] L’appelant avait-il un motif valable de ne pas présenter ses demandes à temps?

Analyse

[14] En général, pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, il faut présenter une demande pour chaque semaine pendant laquelle on n’a pas travaillé et pour laquelle on veut recevoir des prestationsNote de bas de page 2. Pour présenter une demande, il faut remplir une déclaration et la soumettre à la Commission. Habituellement, les demandes sont faites en ligne, mais ce n’est pas la seule façon de faire.

[15] Il y a des dates limites pour présenter une demandeNote de bas de page 3. Si une personne ne respecte pas une date limite, elle peut demander à la Commission d’antidater sa demande et de la traiter comme si elle avait été présentée à une date antérieure. C’est ce qu’on appelle antidater une demande.

[16] Pour faire antidater une demande, une personne doit prouver qu’elle avait un motif valable justifiant le retard. De plus, elle doit avoir eu ce motif valable pendant toute la période du retardNote de bas de page 4. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle avait un motif valable justifiant son retard.

[17] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, une personne doit prouver qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 5. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle a agi de façon aussi raisonnable et prudente que n’importe quelle autre personne dans sa situation l’aurait fait.

[18] La personne doit également démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement son admissibilité aux prestations et ses obligations au titre de la loiNote de bas de page 6. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’elle a tenté de s’informer de ses droits et responsabilités dès que possible et du mieux qu’elle pouvait. Si la personne n’a pas fait ces démarches, elle doit démontrer qu’il y avait des circonstances exceptionnelles qui expliquent pourquoi elle ne l’a pas faitNote de bas de page 7.

[19] Une personne doit démontrer qu’elle a agi de façon raisonnable et prudente pendant toute la période du retardNote de bas de page 8. Cette période s’étend du jour où la personne souhaite que sa demande soit antidatée au jour où elle l’a présentée.

[20] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à produire ses déclarations.

[21] Premièrement, si l’appelant n’a pas été en mesure de remplir ses déclarations en ligne (parce qu’on lui a demandé de communiquer avec la Commission pour les remplir), il aurait dû avoir le réflexe de téléphoner ou de se rendre dans un bureau de Service Canada pour savoir pourquoi on l’empêchait de remplir ses déclarations. J’estime qu’il aurait dû le faire, peu importe s’il avait compris ou non que le système lui disait de communiquer avec la Commission. Une personne raisonnable et prudente qui avait de la difficulté à produire ses déclarations aurait communiqué avec la Commission pour savoir pourquoi.

[22] Deuxièmement, il a fallu à l’appelant jusqu’en juillet ou en août 2021 pour se rendre compte qu’il n’avait reçu aucune prestation depuis décembre 2020, pour demander à son ami ce qu’il devait faire à ce sujet et pour se rendre dans un bureau de Service Canada afin d’essayer de régler le problème. J’estime qu’une personne raisonnable qui avait besoin du soutien du revenu fourni par l’assurance-emploi et qui ne le recevait pas aurait été motivée à agir beaucoup plus tôt. S’il ne savait pas quoi faire, il aurait sûrement pu demander conseil ou entamer certaines démarches plus tôt.

[23] Troisièmement, si l’appelant n’a pas été en mesure de remplir ses déclarations à l’aide du système de déclarations par téléphone que la personne avec qui il a parlé lui avait dit d’utiliser lorsqu’il s’est rendu dans un bureau de Service Canada en juillet ou en août, il aurait dû continuer à poursuivre l’affaire jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée. C’est ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans ces circonstances. Au lieu de cela, il a simplement abandonné.

[24] Quatrièmement, même si l’appelant affirme qu’il ne voit pas souvent l’ami qui l’a finalement aidé à téléphoner à la Commission en octobre 2021, et que cet ami était à l’extérieur de la ville, une personne raisonnable aurait insisté pour que son ami l’aide plus tôt ou aurait trouvé une autre personne pour l’aider. L’appelant travaille chez le même employeur depuis 2017. Il me semble qu’une personne du service des ressources humaines de son employeur aurait pu l’aider s’il l’avait demandé.

[25] Enfin, je constate qu’après avoir demandé l’antidatation de ses déclarations en novembre 2021, l’appelant n’a pas téléphoné de nouveau à la Commission même si celle-ci a tenté de le joindre et a demandé qu’il communique avec elle. Ce n’est qu’en 2023, après que la Commission a finalement pu le joindre, que la question de sa demande d’antidatation a finalement été tranchée. Une personne raisonnable aurait continué à faire un suivi après avoir présenté sa demande d’antidatationNote de bas de page 9.

[26] Je reconnais que l’anglais n’est pas la langue maternelle de l’appelant et que sa difficulté à comprendre la langue ont joué un rôle dans le retard à produire ses déclarations. Cependant, j’ai trouvé que l’anglais de l’appelant était assez bon pour téléphoner à la Commission afin d’obtenir de l’aide pour produire ses déclarationsNote de bas de page 10. Pourtant, il n’a jamais fait cet appel.

[27] Je souligne également que l’appelant a pu se faire comprendre lorsque la Commission a communiqué avec lui le 16 octobre 2023 pour obtenir l’information qui lui manquait pour sa demande d’antidatationNote de bas de page 11. Il est donc clair que sa difficulté à comprenre la langue ne peut constituer en elle-même un motif valable justifiant son retard.

[28] J’estime que l’appelant aurait dû agir plus tôt. Rien ne l’empêchait de le faire. Il n’y a aucune preuve de circonstances exceptionnelles (c’est-à-dire spéciales) qui auraient pu l’empêcher de s’informer des raisons pour lesquelles il n’avait pas reçu de prestations depuis décembre 2020 ou sur les démarches qu’il devait faire pour remplir ses déclarations. Les raisons qu’il a fournies ne sont pas exceptionnelles.

Conclusion

[29] Je juge que l’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à présenter ses demandes entre le 20 décembre 2020 et le 18 septembre 2021. Il n’a pas agi comme une personne raisonnablement prudente l’aurait fait dans les mêmes circonstances. Cela signifie que ses demandes ne peuvent pas être traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt.

[30] L’appel est donc rejeté.

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