Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AC c Commission de l’assurance‑emploi du Canada, 2024 TSS 167

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : A. C.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 20 décembre 2023
(GE-23-3008)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 21 février 2024
Numéro de dossier : AD-24-14

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Décision

[1] Je refuse l’autorisation (la permission) de faire appel. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] A. C. est le demandeur. Étant donné qu’il a demandé des prestations d’assurance‑emploi, je l’appellerai le prestataire.

[3] Le prestataire est maître‑électricien. Il travaille comme employé pour d’autres employeurs de l’industrie cinématographique dans le cadre de contrats à court terme, mais il travaille aussi dans sa propre entreprise. Après avoir terminé un contrat en juillet 2023, il a demandé des prestations d’assurance‑emploi.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, a rejeté sa demande. Elle ne le considérait pas comme sans emploi parce qu’il était travailleur indépendant dans son entreprise. Le prestataire a demandé une révision parce qu’il ne considérait pas que l’étendue de son travail indépendant était importante. La Commission n’a pas modifié sa décision.

[5] Le prestataire a fait appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais la division générale a rejeté son appel. Il demande maintenant à la division d’appel la permission de porter la décision de la division générale en appel.

[6] Je refuse la permission de faire appel. Le prestataire n’a pas établi que l’on pouvait soutenir que la division générale a commis l’une ou l’autre des erreurs que je pourrais prendre en considération.

Questions en litige

[7] Peut‑on soutenir que la division générale a injustement refusé au prestataire la possibilité complète d’être entendu?

[8] Peut‑on soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante en ne tenant pas compte de la preuve du prestataire ou en comprenant mal la preuve :

  1. a) du peu de temps qu’il consacrait à sa propre entreprise;
  2. b) de la façon dont l’entreprise ne lui a pas fourni assez de revenus pour subvenir à ses besoins?

[9] Peut‑on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en tenant compte de la recherche d’emploi du prestataire?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

Principes généraux

[10] Pour que la demande de permission de faire appel du prestataire soit accueillie, les motifs de son appel devraient correspondre aux « moyens d’appel ». Les moyens d’appel établissent les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[11] Je ne peux tenir compte que des erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 1.

[12] Pour accueillir cette demande de permission et permettre à la procédure d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure qu’il y a une chance raisonnable de succès sur le fondement d’un ou de plusieurs moyens d’appel. D’autres décisions judiciaires ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendable »Note de bas de page 2.

Équité procédurale

[13] Le prestataire a déclaré qu’il faisait appel parce qu’il avait fourni à la division générale tous les documents que celle‑ci avait demandés, mais que son audience n’avait pas repris pour en discuter.

[14] On ne peut soutenir que la procédure suivie par la division générale a traité le prestataire de façon inéquitable.

[15] L’audience devant la division générale n’est pas une enquête. En fin de compte, il incombe au prestataire de faire valoir ses arguments. Dans le cours habituel des choses, les appelants doivent fournir à la division générale tous les documents ou autres éléments de preuve sur lesquels ils ont l’intention de se fonder, soit avant l’audience ou à l’audience elle‑même.

[16] La division générale n’a pas demandé au prestataire de fournir des documents supplémentaires. Elle a plutôt offert au prestataire l’occasion de présenter des documents après l’audience, à sa discrétion. Lorsque le prestataire a présenté ces documents, la division générale les a acceptés et pris en considération.

[17] Le prestataire a peut-être compris qu’il aurait l’occasion de discuter davantage de ces documents avec la membre de la division générale avant qu’elle prenne sa décision. Dans l’affirmative, la division générale n’était pas responsable du malentendu du prestataire.

[18] J’ai passé en revue l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale. La membre a admis que le prestataire pouvait présenter des documents postérieurs à l’audience. Elle a ajouté qu’elle pourrait devoir envoyer des copies à la Commission pour qu’elle ait l’occasion de répondreNote de bas de page 3. Toutefois, elle n’a rien dit qui aurait pu laisser entendre qu’elle ajournait à une date ultérieure ou qu’elle convoquerait de nouveau l’audience après avoir reçu les documents supplémentaires du prestataire.

[19] Je note également que le prestataire a fourni une preuve de déclaration de revenus après l’audience qui a aidé la division générale à comprendre que sa rémunération nette était très inférieure à celle sur laquelle la Commission s’est fondéeNote de bas de page 4. Je ne suis pas certain que cela l’ait aidé à démontrer également que son temps de participation à l’entreprise était limité, mais quant aux deux questions, la division générale a donné raison au prestataire. Elle a conclu qu’il n’avait pas passé beaucoup de temps dans son entreprise et que son revenu net d’entreprise n’était pas suffisant pour lui permettre de subvenir à ses besoins.

[20] On ne peut soutenir que la division générale a agi de façon injuste.

Erreur de fait importante

[21] Le prestataire a soutenu que la division générale s’était trompée et qu’il ne travaillait pas « des semaines entières » à son entreprise. Il a aussi insisté sur le fait qu’il n’aurait pas pu vivre des revenus de son entreprise. Je considère cela comme un argument selon lequel la division générale a commis une erreur de fait importante.

[22] Toutefois, on ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de fait.

[23] Premièrement, lorsque la division générale a mentionné des semaines complètes de travail dans son aperçu et lorsqu’elle en est arrivée à sa conclusion, elle appliquait la définition que le Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) utilise pour les travailleurs indépendants. Le Règlement parle expressément d’un travailleur indépendant qui a une « semaine entière de travail » dans les termes suivants :

[…] le prestataire est considéré comme ayant effectué une semaine entière de travail lorsque, durant la semaine, il exerce un emploi à titre de travailleur indépendant ou exploite une entreprise soit à son compte, soit à titre d’associé ou de coïntéressé, ou lorsque, durant cette même semaine, il exerce un autre emploi dans lequel il détermine lui-même ses heures de travail.

[24] Deuxièmement, la division générale a démontré qu’elle a examiné et accepté le témoignage du prestataire selon lequel il n’a consacré qu’un temps limité à l’entreprise et qu’on ne pouvait s’attendre à ce qu’il gagne sa vie grâce à son revenu de l’entrepriseNote de bas de page 5. Elle a résolu les deux questions en faveur du prestataire.

[25] Même si je pouvais voir un argument selon lequel la division générale aurait pu ignorer ou mal comprendre l’un ou l’autre des éléments de preuve du prestataire sur ces deux questions, cela n’aurait pas pu influer sur la décision. Ayant accepté que le prestataire ait consacré un temps limité à l’entreprise et qu’il ne tirait qu’un revenu limité de l’entreprise, la division générale s’est fondée sur les quatre autres facteurs (de ceux qu’elle devait prendre en considération) pour décider que sa participation à son entreprise n’était pas limitée. Par conséquent, sa décision selon laquelle le prestataire effectuait des « semaines entières de travail » (selon la définition du Règlement) n’était fondée sur aucune conclusion concernant les faits soulevés par le prestataire dans la présente demande.

[26] La division générale ne commet une erreur de fait importante que lorsqu’elle fonde sa décision sur une conclusion de fait qui néglige ou comprend mal la preuve pertinente, ou sur une conclusion qui ne découle pas rationnellement de la preuveNote de bas de page 6.

[27] La prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

Erreur de droit

[28] Le prestataire a également fait valoir que sa recherche d’emploi n’était pas pertinente et que la division générale n’aurait pas dû en tenir compte.

[29] Cependant, on ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de droit. Le Règlement l’obligeait à tenir compte de six facteurs. L’ampleur de la recherche d’emploi du prestataire est clairement pertinente par rapport au dernier de ces facteurs, que le Règlement décrit comme « l’intention et la volonté du prestataire de chercher et d’accepter immédiatement un autre emploi »Note de bas de page 7.

[30] La division générale a examiné la preuve relativement à chacun des six facteurs comme elle était tenue de le faire. Elle a donné raison au prestataire sur deux des facteurs et s’est prononcée contre lui sur les quatre autres. Elle a également évoqué la jurisprudence qui a identifié deux des six facteurs comme étant particulièrement importantsNote de bas de page 8. L’un des deux « facteurs importants » est ce dernier facteur, c’est-à-dire qu’un prestataire doit vouloir trouver un emploi rapidement.

[31] Je comprends que le prestataire puisse être en désaccord avec la façon dont la division générale a soupesé la preuve pour tirer ses conclusions sur chacun des six facteurs, ou avec la façon dont elle a soupesé chaque facteur.

[32] Encore une fois, on ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur. Lorsqu’il s’agit de la façon dont la division générale évalue la preuve, la division d’appel ne peut que décider si elle a ignoré ou mal compris la preuve ou si ses conclusions ne découlent pas de la preuve disponible. La division d’appel ne peut apprécier ou réévaluer la preuve pour en arriver à une conclusion différenteNote de bas de page 9.

[33] Quant au poids accordé par la division générale aux divers facteurs utilisés pour décider si le travail indépendant d’un prestataire est mineur, il s’agit d’une question mixte de fait et de droit. La division générale appliquait le « droit établi » aux faitsNote de bas de page 10. La division d’appel ne peut intervenir dans le cas d’une question mixte de fait et de droitNote de bas de page 11.

[34] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[35] Je refuse la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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