Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Le prestataire est étudiant au secondaire. Il a demandé des prestations d’assurance-emploi lorsqu’il a cessé de travailler. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé de façon rétroactive que le prestataire n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant ses études. Le prestataire a fait appel à la division générale, laquelle a conclu qu’il n’était pas admissible pour la même raison. Le prestataire a ensuite fait appel de la décision de la division générale à la division d’appel. La division d’appel a conclu que la division générale avait mal interprété la jurisprudence relative à la disponibilité et avait ainsi commis une erreur de droit.

La division d’appel a conclu que la division générale avait commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé qu’une partie prestataire qui se fie à ses antécédents de travail pour réfuter la présomption de non-disponibilité peut seulement tenir compte des emplois exercés à temps plein. Selon la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Page c Canada (Procureur général), 2023 CAF 169, il faut adopter une approche contextuelle. Les emplois à temps partiel que le prestataire avait exercés par le passé étaient donc pertinents pour décider s’il avait réfuté la présomption.

La division d’appel a accueilli l’appel, puis a rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. La division d’appel est arrivée au même résultat que la division générale. Le prestataire n’a pas réfuté la présomption de non-disponibilité et il n’a pas satisfait aux trois éléments énoncés dans la décision Faucher. Pour cette raison, il n’a pas prouvé qu’il était disponible pour travailler. Le prestataire demeure inadmissible aux prestations d’assurance-emploi.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : AS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 148

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Appelant : A. S.
Représentant : H. S.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Isabelle Thiffault

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 4 juillet 2023
(GE-23-1133)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Mode d’audience : Téléconférence
Date de la décision : Le 16 février 2024
Numéro de dossier : AD-23-675

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de droit.

[2] Je rends la décision qu’elle aurait dû rendre et je suis arrivée à la même conclusion. Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler. Cela signifie qu’il n’a pas droit à des prestations régulières d’assurance‑emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] A. S. est le prestataire. Il est étudiant au secondaire et il a demandé des prestations d’assurance‑emploi lorsqu’il a cessé de travailler.

[4] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a décidé rétroactivement qu’il n’avait pas droit à des prestations d’assurance‑emploi parce qu’il n’a pas prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant ses étudesNote de bas de page 2.

[5] Le prestataire a fait appel devant la division générale du Tribunal, qui a conclu qu’il n’avait pas droit à des prestations d’assurance‑emploi pour le même motifNote de bas de page 3.

[6] Le prestataire a porté la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Il fait valoir que la division générale a commis plusieurs erreursNote de bas de page 4.

[7] La division générale a commis une erreur de droit, car elle a mal interprété la jurisprudence portant sur la question de la disponibilité. Cela me permet de rendre la décision : le prestataire n’était pas disponible pour travailler et n’a pas droit aux prestations d’assurance‑emploi qu’il a reçues.

Questions en litige

[8] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a‑t‑elle commis une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’était pas disponible pour travailler?
  2. b) Dans l’affirmative, comment l’erreur ou les erreurs devraient‑elles être corrigées?

Analyse

[9] La division d’appel ne peut prendre en considération que les erreurs susceptibles de révision qui relèvent de l’un des moyens d’appel suivantsNote de bas de page 5 :

  • la division générale a commis une erreur de droit;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante;
  • elle a agi de manière injuste;
  • elle a excédé sa compétence ou refusé de l’exercer.

[10] L’un ou l’autre de ces types d’erreurs me permettrait d’intervenir dans la décision de la division généraleNote de bas de page 6.

Le prestataire soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs

[11] Lors de l’audience tenue devant la division d’appel, le prestataire n’a pas parlé et il a plutôt permis à son père, en tant que représentant, de parler en son nom. Donc, lorsque je parle du prestataire dans la présente décision, je fais référence à ce que son représentant, son père, a fait valoir en son nom.

[12] Voici un résumé des arguments écrits et oraux que le prestataire a présentés à l’audience de la division d’appelNote de bas de page 7 :

  • Il a été injustement ciblé par la Commission après avoir commis une erreur dans l’une de ses déclarations bimensuelles. C’était une erreur commise de bonne foi et il n’essayait pas d’escroquer qui que ce soit.
  • La Commission lui a dit qu’il n’avait pas assez d’heures pour recevoir des prestations d’assurance‑emploi.
  • Il souhaite que la Commission fournisse des renseignements sur le nombre total d’étudiants qui ont touché des prestations d’assurance‑emploi pour l’année en question.
  • Il affirme que le gouvernement a accordé des prestations d’assurance‑emploi à tous, qu’ils y aient été admissibles ou non.
  • La division générale lui a prêté des propos et a déformé la loi pour qu’il perde. Elle a confondu le terme « formation » avec le terme « éducation ».
  • La division générale a fait fi de tous les faits relatifs à la [traduction] « faveur 2 » et a pris parti pour la Commission.
  • Personne ne l’a aidé dans son dossier, notamment en lui fournissant une jurisprudence qui pourrait l’aider. Il n’est pas avocat et il n’a pas les moyens d’embaucher un avocat.
  • On l’a empêché de présenter pleinement sa preuve à la division générale parce qu’il n’a pu parler du passé.
  • Enfin, il soutient qu’il a prouvé qu’il était disponible pour travailler et incapable de trouver un emploi et qu’il avait droit à des prestations d’assurance‑emploi.

La Commission fait valoir que la division générale n’a commis aucune erreur

[13] La Commission fait valoir que l’appel du prestataire devrait être rejeté parce que la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision.

[14] Voici un résumé des arguments écrits et oraux que la Commission a présentés à l’audience tenue devant la division d’appelNote de bas de page 8 :

  • La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a conclu qu’il n’était pas disponible pour travailler.
  • La division générale a soupesé tous les éléments de preuve dont elle disposait et a appliqué le bon critère juridique pour déterminer si le prestataire était disponible pour travailler pendant ses études à temps plein.
  • La Commission soutient que la récente décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Page se distingue des faits de la présente affaireNote de bas de page 9.

La division générale a-t-elle commis une erreur susceptible de révision lorsqu’elle a décidé que le prestataire n’était pas disponible pour travailler?

La division générale n’a agi d’aucune manière qui était injuste pour le prestataire

[15] Le prestataire soutient notamment qu’on l’a empêché de présenter pleinement sa preuve à la division générale parce qu’il n’a pu parler du passé. Il affirme également que personne ne l’a aidé dans son dossier, notamment en lui fournissant une jurisprudence qui pourrait l’aider.

[16] Dans la présente affaire, le prestataire soutient essentiellement que la division générale n’a pas suivi un processus équitable. Il s’agit d’une erreur susceptible de révision que je peux prendre en considérationNote de bas de page 10.

[17] Le droit à une audience équitable devant le Tribunal est assorti de certaines protections procédurales. Cela comprend le droit à un décideur impartial et le droit d’une partie de connaître la preuve qu’elle doit réfuter et d’avoir la possibilité d’y répondre.

[18] J’ai examiné le dossier et la décision de la division générale et j’ai écouté l’enregistrement audio de l’audience. Cette dernière a duré 58 minutes.

[19] Le prestataire ne précise pas les renseignements sur le passé qu’on lui a interdit de mentionner lors de l’audience de la division générale.

[20] Toutefois, il ressort de l’enregistrement audio de l’audience de la division générale que le prestataire a témoigné et que son représentant a également eu l’occasion de présenter tous ses arguments. Il n’y a donc rien qui prouve qu’il n’a pas été en mesure de présenter toute sa preuve (ou de « parler du passé ») lors de l’audience de la division générale.

[21] Il ressort aussi de l’enregistrement audio que la division générale a demandé au prestataire s’il comprenait le droit sur la disponibilité. Lorsqu’il est devenu évident qu’il ne comprenait pas, la division générale a expliqué le droit sur la disponibilité et les trois facteurs, tirés de la décision Faucher, qu’elle prendrait en considérationNote de bas de page 11.

[22] La division générale a également donné au prestataire l’occasion de présenter des renseignements supplémentaires sur les emplois qu’il a postulés après la tenue de l’audienceNote de bas de page 12. Le prestataire a dit qu’il enverrait ces renseignements au Tribunal avant la date limite. Dans sa décision, la division générale a signalé qu’il n’avait pas fourni de documents supplémentaires après l’audience pour étayer ses démarches de recherche d’emploiNote de bas de page 13.

[23] Il n’y a aucune preuve que la division générale a agi d’une manière qui n’était pas équitable pour le prestataire. Le processus et l’audience tenus par la division générale étaient équitables.

[24] La division générale est un décideur indépendant et impartial. Elle ne peut donc effectuer de recherches juridiques pour le prestataire ni agir au nom de l’une ou l’autre partie.

[25] Par conséquent, je conclus que la division générale n’a pas agi d’une manière qui n’était pas équitable pour le prestataire. Il n’y a eu aucun manquement à la justice naturelleNote de bas de page 14.

La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé que la présomption ne pouvait être réfutée que par des antécédents de travail à temps plein

[26] La division générale commet une erreur de droit notamment si elle ne respecte pas le droit, ou si elle applique le droit en ayant mal compris son sens ou comment l’appliquerNote de bas de page 15.

[27] La division générale a énoncé le droit pertinent et le critère juridique dans sa décisionNote de bas de page 16. Elle a dit que les étudiants à temps plein sont présumés ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 17. Elle a expliqué que la présomption pouvait être réfutée dans des circonstances exceptionnelles ou si la personne avait des antécédents de travail à temps plein et d’études ou de formation à temps pleinNote de bas de page 18.

[28] La division générale a conclu que le prestataire était étudiant à temps plein parce qu’il fréquentait l’école du lundi au vendredi pendant environ 35 heures par semaineNote de bas de page 19. Elle a dit que la présomption de non‑disponibilité s’appliquait à son égard, sauf preuve contraireNote de bas de page 20.

[29] La division générale s’est demandé si le travail à temps partiel pouvait avoir pour effet de réfuter la présomption ou s’il constituait une circonstance exceptionnelle. Toutefois, elle n’était pas convaincue que la présomption puisse être réfutée par une preuve d’antécédents de travail à temps partielNote de bas de page 21.

[30] Elle a décidé que le travail à temps partiel le soir et la fin de semaine ne serait pas pris en compte pour déterminer si une partie prestataire a réfuté la présomption de non‑disponibilitéNote de bas de page 22.

[31] Elle a également jugé que le travail à temps partiel n’était pas une circonstance exceptionnelleNote de bas de page 23.

[32] La division générale a expliqué pourquoi elle a conclu que la présomption ne pouvait être réfutée par la preuve d’un travail à temps partiel. Elle a dit que la Cour d’appel fédérale fait toujours référence au travail à temps plein dans ses décisions portant sur la réfutation de la présomption de non‑disponibilité par une preuve d’antécédents de travail pendant des études ou une formationNote de bas de page 24. Elle n’a en outre relevé aucun cas où la Cour avait accepté ces antécédents de travail à temps partiel comme étant des circonstances exceptionnelles qui permettent de réfuter la présomptionNote de bas de page 25.

[33] Toutefois, dans une décision rendue récemment dans Page, la Cour d’appel fédérale a examiné les principes en vigueur sur la disponibilité pour travailler pendant les études et la présomption de non‑disponibilitéNote de bas de page 26.

[34] Dans la décision Page, la Cour d’appel fédérale confirme qu’il existe une présomption réfutable selon laquelle les prestataires qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 27. Elle affirme qu’il faut procéder à une « analyse contextuelle » pour décider si cette présomption est réfutée et qu’il s’agit d’une décision factuelleNote de bas de page 28.

[35] La Cour fournit des exemples précis de situations factuelles dans lesquelles la présomption a été réfutée avec succès. En voici quelques‑unsNote de bas de page 29 :

  • Lorsque la partie prestataire affirme qu’elle est disposée à abandonner ses études pour accepter un emploi.
  • Lorsque la partie prestataire a régulièrement occupé un emploi pendant ses études dans le passé et qu’elle cherche un emploi avec un horaire de travail semblable à celui qu’elle avait avant.
  • La capacité de la partie prestataire de suivre des cours en ligne au moment de son choix.

[36] Fait important, la Cour d’appel fédérale affirme qu’il n’y a pas de règle claire établissant que les étudiants à temps plein qui doivent suivre des cours de jour du lundi au vendredi n’ont pas droit à des prestations d’assurance‑emploiNote de bas de page 30. Elle signale que les étudiants versent également des cotisations d’assurance‑emploi sur leur salaire à temps partiel, de sorte qu’il existe des circonstances où ils peuvent toucher des prestations d’assurance‑emploiNote de bas de page 31.

[37] La Commission soutient que la décision Page ne s’applique pas ici parce que les faits sont différentsNote de bas de page 32. Par exemple, elle affirme que le prestataire dans la présente affaire n’était pas disponible pour travailler 40 heures par semaine, comme l’était M. Page.

[38] La Commission soutient également que M. Page avait des antécédents de travail plus longs, d’environ 26 semaines, et qu’il avait travaillé des heures irrégulières pendant des années, contrairement au prestataire dans le cas qui nous occupe. Elle affirme qu’à un moment donné, M. Page a occupé trois emplois tout en fréquentant l’école.

[39] Comme je ne savais pas si le prestataire et son représentant avaient un exemplaire de la récente décision Page, le Tribunal leur en a fait parvenir un afin qu’ils puissent l’examiner avant l’audience de la division d’appelNote de bas de page 33.

[40] À l’audience devant la division d’appel, le prestataire et son représentant ont confirmé avoir reçu un exemplaire de la décision Page, mais ils ont dit ne pas en avoir pris connaissance. Ils n’avaient donc rien de précis à dire sur l’affaire.

[41] Je prends note du fait que la division générale n’avait pas la décision Page à prendre en considération lorsqu’elle a rendu sa décision.

[42] Suivant la décision Page, il faut adopter une approche contextuelle pour déterminer si la présomption a été réfutée. Cela signifie donc que la division générale aurait dû prendre en considération l’horaire de travail à temps partiel et les heures irrégulières du prestataire pour décider s’il avait réfuté la présomption de non‑disponibilité. Comme le signale la Cour, il n’y a pas de règle claire établissant que les étudiants à temps plein qui doivent suivre des cours le jour du lundi au vendredi n’ont pas droit à des prestations d’assurance‑emploi.

[43] Je conclus que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a décidé qu’un prestataire qui invoque ses antécédents de travail pour réfuter la présomption ne peut invoquer que des antécédents de travail à temps pleinNote de bas de page 34. La décision Page nous enseigne qu’il faut adopter une approche contextuelle, de sorte que les antécédents de travail à temps partiel du prestataire étaient pertinents pour déterminer s’il avait réfuté la présomption.

[44] Comme j’ai conclu à l’existence d’une erreur de droit, je n’ai pas besoin de tenir compte des autres erreurs que, de l’avis du prestataire, la division générale a commises. Je vais maintenant réfléchir à la façon de corriger l’erreur.

Réparation – comment corriger l’erreur clusion

[45] Il existe deux options pour corriger une erreur commise par la division généraleNote de bas de page 35. Je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen ou rendre la décision qu’elle aurait dû rendre.

[46] Le prestataire affirme que l’affaire devrait être renvoyée à la division générale pour réexamen parce que la division d’appel ne dispose pas de tous les renseignements nécessaires pour rendre la décision. Il explique que les choses traînent en longueur depuis plus d’un an et qu’il mérite une nouvelle audience.

[47] Subsidiairement, le prestataire affirme que si je rends une décision équitable, c’est ce que je devrais faire au lieu de renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.

[48] La Commission affirme que la division d’appel devrait rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Elle affirme que le dossier est complet.

Je vais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre

[49] Je suis convaincue que le dossier est complet. La division générale a déjà été saisie de ce dossier à deux reprises. Le prestataire a eu pleinement l’occasion de présenter sa preuve devant la division générale. S’il y avait eu manquement à la justice naturelle, cela signifierait habituellement que l’affaire doit être renvoyée à la division générale. Toutefois, j’ai déjà conclu qu’il n’y avait pas eu manquement à la justice naturelle.

[50] Je substituerai donc ma décision à celle de la division générale. Cela signifie que je peux décider si le prestataire était disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance‑emploi et tirer les conclusions de fait nécessaires.

Le prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance emploi qu’il a reçues

[51]  La personne qui veut des prestations régulières d’assurance‑emploi doit démontrer qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 36.

[52] La Loi sur l’assurance‑emploi ne dit pas ce qu’elle entend par « disponible ». Trois éléments guident l’évaluation par le Tribunal de la disponibilité d’une personne. Ainsi qu’il a été mentionné précédemment, ces éléments sont souvent appelés les facteurs FaucherNote de bas de page 37 :

  • La personne veut‑elle retourner au travail dès qu’un emploi convenable lui sera offert?
  • La personne a‑t‑elle fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi convenable?
  • La personne a‑t‑elle établi des conditions personnelles qui pourraient limiter indûment (trop) ses chances de retourner au travail?

Il existe une présomption réfutable selon laquelle les prestataires qui fréquentent l’école à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[53] La loi présume que les étudiants à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 38. Il s’agit d’une présomption réfutable, et la question de savoir si elle est réfutée est factuelleNote de bas de page 39.

[54] Je conclus que le prestataire est un étudiant du secondaire à temps plein, de sorte que la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler s’applique. Le prestataire ne le conteste pas.

[55] Je déciderai maintenant si le prestataire a réfuté la présomption. Le Tribunal doit adopter une approche contextuelle pour déterminer si la présomption est réfutée.

[56] Dans la décision Page, la Cour d’appel fédérale affirme que la présomption a été réfutée avec succès dans des situations factuelles où un prestataire affirme être disposé à abandonner ses études pour accepter un emploi, ou encore dans les situations factuelles où un prestataire a des antécédents d’emploi régulier pendant ses études et cherche un emploi dont les heures sont semblables à celles qu’il a déjà travaillées ou a la capacité de suivre des cours en ligne au moment de son choixNote de bas de page 40.

[57] J’examinerai si l’une ou l’autre de ces situations factuelles est présente en l’espèce.

[58] Premièrement, le prestataire a dit à la Commission et a témoigné devant la division générale que, s’il obtenait un emploi et que celui‑ci entrait en conflit avec ses études, il n’était pas disposé à abandonner ses études pour un emploiNote de bas de page 41.

[59] Deuxièmement, rien au dossier n’indique que le prestataire a pu assister à ses cours du secondaire en ligne ou suivre des cours en ligne au moment de son choix.

[60] Troisièmement, le prestataire a déjà travaillé à temps partiel pendant ses études secondaires, mais d’après la Commission, ce n’était que pour une courte période, soit pendant environ 16 semainesNote de bas de page 42. Elle se fonde sur trois relevés d’emploi du prestataire totalisant 16 semaines de travail; ils font partie du dossierNote de bas de page 43.

[61] Le prestataire a témoigné devant la division générale qu’il a commencé à travailler au restaurant Western en mai 2021; il s’agissait de son premier emploiNote de bas de page 44. Il a admis qu’il travaillait au plus 21 heures par semaine, qu’il effectuait la plupart de ces heures les fins de semaine et qu’il lui arrivait à l’occasion de travailler quelques heures après l’école les jours de semaineNote de bas de page 45.

[62] Je conclus que l’emploi habituel du prestataire consistait à travailler à temps partiel après l’école et les fins de semaine, mais pas plus de 21 heures par semaine. La preuve démontre qu’à l’époque, il avait des antécédents de travail de 16 semaines seulement.

[63] Je conclus que le prestataire n’a pas réfuté la présomption. Bien qu’il ait des antécédents de travail après l’école et les fins de semaine, ce n’est que pour une courte période. À mon avis, le prestataire n’a pas d’antécédents de travail régulier pendant ses études. Il n’était pas disposé à abandonner l’école pour un emploi et rien ne prouve qu’il pouvait suivre ses cours en ligne ou au moment de son choix. Outre la pandémie de COVID-19 qui sévissait à l’époque, je n’ai trouvé aucune autre circonstance à prendre en considération et aucune n’a été soulevée.

[64] J’examinerai maintenant les facteurs Faucher pour déterminer si le prestataire a prouvé qu’il était disponible pour travailler.

Le prestataire a démontré qu’il voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable serait offert

[65] Je conclus que le prestataire a démontré qu’il voulait retourner au travail dès qu’il trouverait un emploi convenable.

[66] Il a démontré qu’il voulait trouver un travail semblable à temps partiel après l’école et les fins de semaine. Cela concorde avec le témoignage qu’il a donné au cours de l’audience tenue devant la division généraleNote de bas de page 46. Il a expliqué qu’il essayait d’économiser de l’argent pour ses études et son avenir. De plus, le fait de travailler lui procure un peu d’argent de poche.

[67] Cela signifie qu’il a satisfait au premier facteur Faucher.

Le prestataire n’a pas fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable

[68] Je conclus que le prestataire n’a pas fait suffisamment de démarches pour trouver un emploi convenable. Je vais expliquer pourquoi.

[69] Les démarches du prestataire ont consisté notamment à distribuer son curriculum vitæ à d’éventuels employeurs locaux, à consulter des annonces d’aide recherchée et à postuler des emplois à temps partiel dont il avait vu les annonces.

[70] Le prestataire a témoigné devant la division générale qu’il a postulé aux endroits suivants et passé une entrevueNote de bas de page 47 :

  • Sport Chek, en mars 2022;
  • Walmart, à l’été 2022;
  • Superstore,en août 2022;
  • Volcom, en septembre 2022.

[71] Il a postulé un emploi au Dollarstoreà la fin août ou en septembre 2022 et au Footlocker en octobre 2022, mais il n’a pas obtenu d’entrevueNote de bas de page 48.

[72] Le dossier montre que le prestataire a postulé certains emplois sur Indeed, un site Web de recherche d’emploi. Il montre qu’il a postulé chez Alley YMM, Supplement King et Fort McMurray ToyotaNote de bas de page 49. Il n’a pas pu retrouver tous les emplois qu’il a postulés parce qu’il a dit que le site Web d’Indeed les supprime après un certain temps.

[73] Je suis d’accord pour dire que le prestataire a fait des démarches pour trouver du travail, mais je conclus qu’il n’a pas présenté suffisamment de demandes d’emploi pendant la période pertinente.

[74] La période en cause est d’environ six mois. Il était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi du 2 janvier 2022 au 27 juin 2022. Toutefois, il semble qu’il n’ait postulé que quelques emplois au cours de la période visée.

[75] Le prestataire a témoigné qu’il a postulé et qu’il a passé une entrevue chez Sport Chek en mars 2022, soit pendant la période en cause. Toutefois, on ne peut dire avec certitude si l’emploi postulé chez Walmart et l’entrevue à l’été 2022 ont eu lieu avant ou après le 27 juin 2022.

[76] Il est important de noter que les démarches qu’il a faites en dehors de la période du 2 janvier 2022 au 27 juin 2022 ne sont pas pertinentes; je ne peux donc pas en tenir compte.

[77] La documentation au dossier montre qu’il a postulé trois emplois, mais il manque des détails importantsNote de bas de page 50. Par exemple, elle ne fournit pas les dates auxquelles les demandes d’emploi ont été faites chez Alley YMM, Supplement King et Fort McMurray Toyota. Il n’est donc pas certain qu’elles aient effectivement été faites pendant la période pertinente.

[78] Par conséquent, je conclus que les démarches du prestataire pour trouver du travail n’étaient pas suffisantes du 2 janvier 2022 au 27 juin 2022. Il a seulement établi qu’il a postulé quelques emplois pendant la période visée, ce qui, à mon avis, ne suffit pas. Je reconnais que certaines de ses démarches ont consisté à rechercher des emplois, à passer des entrevues, à distribuer son curriculum vitæ et à postuler des emplois en ligne, et j’ai également tenu compte de ces démarches.

[79] Cela signifie qu’il n’a pas satisfait au deuxième facteur Faucher.

Le prestataire avait des conditions personnelles, mais elles ne limitaient pas indûment ses chances de retourner au travail

[80] Le prestataire était un élève du secondaire qui fréquentait l’école pendant la journée du lundi au vendredi.

[81] J’admets que l’école est une condition personnelle qu’il a imposée, mais je ne crois pas que cela limite indûment ses chances de retourner au travail. Son emploi régulier et habituel avant sa perte d’emploi était un travail à temps partiel les soirs et les fins de semaine. Il cherchait un type de travail et des heures semblables. Rien dans la preuve n’indique que sa présence à l’école a indûment limité ses chances de trouver un travail à temps partiel le soir ou la fin de semaine.

[82] Cela signifie qu’il a satisfait au troisième facteur Faucher.

Conclusion

[83] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de droit.

[84] J’ai remplacé sa décision par la mienne et le résultat est resté le même. Le prestataire n’a pas réfuté la présomption ni satisfait aux trois facteurs tirés de la décision Faucher. Pour cette raison, il n’a pas prouvé qu’il était disponible pour travailler. Il demeure inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

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