Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 361

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : A. B.
Représentant : Tom Thiru
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Jessica Earles

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 18 décembre 2023 (GE-23-2917)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 9 avril 2024

Personnes présentes à l’audience :

Appelante
Représentant de l’appelante
Représentante de l’intimée

Date de la décision : Le 12 avril 2024
Numéro de dossier : AD-24-94

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale a commis une erreur de fait importante.

[2] J’ai remplacé sa décision par la mienne. Je suis toutefois arrivée au même résultat : je refuse d’avancer la date de la demande de prestations.

Aperçu

[3] A. B. est la prestataire dans la présente affaire. Elle a travaillé pour la même entreprise pendant de nombreuses années, jusqu’à la fin de son emploi. Son ancienne employeuse lui a versé une indemnité de départ. Par la suite, la prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi. Elle a demandé à la Commission d’avancer la date de sa demande d’assurance-emploi (c’est ce qu’on appelle une demande d’antidatation).

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’aucun motif valable ne justifiait le retard de la demande de prestations d’assurance-emploi. Elle a donc refusé d’en avancer la dateNote de bas de page 1 (antidater la demande). La prestataire a porté cette décision en appel à la division générale.

[5] La division générale a tiré la même conclusion. Elle a rejeté l’appelNote de bas de page 2. La prestataire a donc porté cette décision en appel à la division d’appelNote de bas de page 3.

[6] J’ai décidé que la division générale avait commis une erreur de fait importante. Je rends la décision qu’elle aurait dû rendre. La prestataire n’a pas de motif valable.

Nouveaux éléments de preuve

[7] Les nouveaux éléments de preuve sont ceux qui n’avaient pas été portés à la connaissance de la division générale lorsqu’elle a rendu sa décision.

[8] En général, la division d’appel refuse les nouveaux éléments de preuveNote de bas de page 4. En effet, la division d’appel n’est pas la juge des faits ni celle qui instruit l’affaire à nouveau. Son rôle est de réviser la décision de la division générale en fonction des mêmes éléments de preuveNote de bas de page 5.

[9] Il y a quelques exceptions qui permettent l’examen des nouveaux éléments de preuveNote de bas de page 6. Par exemple, je peux accepter les nouveaux éléments de preuve qui ont l’une des caractéristiques suivantes :

  • ils contiennent seulement des renseignements d’ordre général;
  • ils mettent en lumière les conclusions tirées en l’absence de preuve;
  • ils démontrent que le Tribunal a agi de façon injuste.

[10] Avec sa demande à la division d’appel, la prestataire a présenté un billet médical daté du 14 février 2024. Il est rédigé par son médecinNote de bas de page 7. La prestataire a aussi précisé que trois autres choses ont eu une incidence sur son retard : les renseignements erronés que la Commission lui a donnés, l’anticipation de trouver un autre emploi et un décès dans sa familleNote de bas de page 8.

[11] J’ai demandé aux parties si les éléments de preuve ci-dessus étaient nouveaux et, si oui, si je devais les accepter.

[12] Le représentant de la prestataire a dit que ces éléments de preuve n’étaient pas nouveaux puisque la prestataire a des problèmes de santé depuis de nombreuses années, longtemps avant l’audience de la division générale. Il a fait remarquer que la division générale avait probablement une copie du billet médical ou aurait dû en avoir une. Il a expliqué que si la prestataire n’a pas parlé de ses problèmes de santé à l’audience de la division générale, c’est parce qu’elle considère que ses renseignements médicaux sont confidentiels.

[13] Par ailleurs, le représentant de la prestataire a fait valoir que si la division générale n’avait pas eu connaissance de ces éléments de preuve, ils devraient correspondre à l’une des exceptions pour les nouveaux éléments de preuve. Plus précisément, il a dit qu’il faudrait les accepter comme des renseignements d’ordre général.

[14] Selon la représentante de la Commission, le billet médical et les trois autres éléments soulevés par la prestataire constituent de nouveaux éléments de preuve qui n’ont pas été présentés à la division générale. Elle soutient que les nouveaux éléments de preuve ne relèvent d’aucune des exceptions et que le Tribunal devrait donc les écarter.

[15] Je conclus que le billet médical et les trois autres points soulevés par la prestataire constituent bien de nouveaux éléments de preuve. J’ai examiné le dossier de la division générale et aucun de ces éléments ne s’y trouve. Ils ne figurent pas non plus dans l’enregistrement audio de l’audience de la division générale. La division générale n’avait pas connaissance de ces éléments de preuve lorsqu’elle a rendu sa décision.

[16] Je reconnais que la prestataire souhaite présenter ces nouveaux éléments de preuve parce qu’ils expliquent plus en détail pourquoi elle a tardé à demander des prestations d’assurance-emploi. Toutefois, faire appel à la division d’appel ne veut pas dire qu’on a une nouvelle occasion de déposer d’autres éléments de preuve, en plus de ceux déjà présentés à la division généraleNote de bas de page 9. C’est plutôt l’occasion de vérifier ce que la division générale a fait en fonction des mêmes éléments de preuve.

[17] Je n’accepte pas les nouveaux éléments de preuve de la prestataire parce que ce ne sont pas des renseignements d’ordre général et qu’ils ne correspondent à aucune des autres exceptions. Par conséquent, je ne peux pas tenir compte des nouveaux éléments de preuve de la prestataire pour rendre ma décision.

Questions en litige

[18] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de fait importante parce qu’elle n’a pas tenu compte de l’effet cumulatif (ou de l’ensemble) des circonstances dans lesquelles se trouvait la prestataire, y compris celles décrites dans la section « Autres questions »?
  2. b) Si oui, comment faut-il corriger l’erreur?

Analyse

[19] Dans sa demande à la division d’appel, la prestataire a coché les cases indiquant que la division générale a fait une erreur de droit, qu’elle a commis une erreur de fait importante et qu’elle n’a pas respecté l’équité procéduraleNote de bas de page 10.

[20] Il peut y avoir une erreur de droit lorsque la division générale n’applique pas la bonne loi ou quand elle utilise la bonne loi, mais comprend mal ce qu’elle signifie ou comment l’appliquerNote de bas de page 11.

[21] Il y a erreur de fait lorsque la division générale fonde sa décision sur une « conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 12 ».

[22] Il faut donc examiner certaines des questions suivantesNote de bas de page 13 :

  • Est-ce que l’une des principales conclusions de la division générale contredit carrément la preuve?
  • Y a-t-il des éléments de preuve qui pourraient rationnellement appuyer l’une des principales conclusions de la division générale?
  • La division générale a-t-elle ignoré des éléments de preuve importants qui allaient à l’encontre de l’une de ses principales conclusions?

[23] La procédure de la division générale doit être équitable. On parle alors d’équité procédurale. Par conséquent, si la division générale n’a pas agi de façon équitable d’une façon ou d’une autre, je peux intervenirNote de bas de page 14.

[24] À l’audience de la division d’appel, le représentant de la prestataire a confirmé qu’il présenterait des arguments sur les trois moyens d’appel.

La division générale a décidé qu’il n’y avait pas de motif valable d’antidater la demande d’assurance-emploi de la prestataire

[25] La division générale devait décider si la prestataire pouvait faire antidater sa demande de prestations d’assurance-emploi, c’est-à-dire en faire avancer la date du 3 avril 2022 au 6 mars 2023 [sic]Note de bas de page 15.

[26] Pour ce faire, la prestataire devait démontrer qu’un « motif valable » justifiait le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi pendant toute la période du retardNote de bas de page 16.

[27] Pour établir l’existence d’un motif valable, la prestataire doit démontrer qu’elle a fait ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans des circonstances semblables pour vérifier ses droits et responsabilités aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi, sauf en cas de circonstances exceptionnellesNote de bas de page 17.

[28] Cette règle comprend l’obligation pour la prestataire de vérifier assez rapidement son admissibilité aux prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 18.

[29] Dans la présente affaire, la division générale a décidé que la prestataire n’avait pas démontré qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi pour toute la période du retardNote de bas de page 19.

[30] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas agi comme une personne raisonnablement prudente l’aurait fait dans la même situation. Elle a dit que la prestataire ne s’est pas informée assez rapidement de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi parce qu’elle a attendu près d’un an avant de tenter de communiquer avec Service CanadaNote de bas de page 20.

[31] À l’audience de la division générale, le membre a demandé à la prestataire si des circonstances exceptionnelles pourraient l’exempter de l’obligation de faire des vérifications assez rapidement. La prestataire a répondu qu’aucune circonstance exceptionnelle ne l’avait empêchée, pas même de façon temporaire, de demander des prestations d’assurance-emploi ou de communiquer avec Service CanadaNote de bas de page 21. La division générale a donc admis que sa situation n’était pas exceptionnelleNote de bas de page 22.

Les parties sont d’accord sur un point : la division générale a commis une erreur de fait importante

[32] La prestataire et la Commission conviennent que la division générale a commis une erreur de fait importanteNote de bas de page 23.

[33] Elles sont d’accord à ce sujet parce que la division générale n’a pas tenu compte de toutes les circonstances dans lesquelles se trouvait la prestataire avant de décider qu’elle n’avait pas de motif valable. Plus précisément, elle n’a pas considéré certaines des circonstances décrites dans la section « Autres questions ».

[34] Les parties soutiennent que la division générale aurait dû examiner la situation de la prestataire dans son ensemble, y compris ce qu’elle a décrit dans la section « Autres questions », pour décider s’il y avait un motif valable.

[35] Je suis d’accord avec les parties. Voici pourquoi.

[36] Après avoir conclu qu’il n’y avait pas de motif valable ni de circonstances exceptionnelles, la division générale a relevé d’« autres questions » dans sa décision.

[37] Elle a fait remarquer qu’elle avait tiré ses conclusions malgré elle. Aux paragraphes 19 à 24 de sa décision, elle a souligné les circonstances suivantes :

  • La prestataire avait travaillé et contribué à la société durant toute sa vie.
  • Elle est arrivée au Canada il y a 40 ans et a toujours travaillé, jusqu’à ce que son emploi prenne fin en avril 2022.
  • Elle ne voulait pas être un fardeau pour les programmes d’aide sociale du gouvernement. Elle pensait aussi qu’une demande de prestations d’assurance-emploi nuirait à son droit à l’indemnité de départ.
  • Son employeuse est une grande entreprise dont la structure est complexe et qui dispose d’un service de ressources humaines. La prestataire s’est fait dire de ne pas dévoiler les modalités de son indemnité de départ et elle a dû signer une lettre de garantie en faveur de l’employeuse.
  • Son employeuse ne lui a pas dit de communiquer avec Service Canada pour se renseigner sur son admissibilité aux prestations d’assurance-emploi.
  • L’employeuse n’a pas respecté son obligation légale de produire le relevé d’emploi de la prestataire à temps. L’employeuse a attendu plus d’un an après la fin de l’emploi avant de produire le relevé.
  • Le relevé d’emploi contient des renseignements importants sur les demandes de prestations d’assurance-emploi. Mais la prestataire ne l’a jamais reçu. De plus, le relevé d’emploi ne recommande pas aux personnes qui demanderont peut-être des prestations d’assurance-emploi de communiquer immédiatement avec Service Canada pour savoir si elles y auront droit même si elles reçoivent une indemnité de départ.
  • Enfin, la production rapide du relevé d’emploi et l’usage d’un langage clair dans le relevé auraient aidé la prestataire à obtenir les prestations d’assurance-emploi auxquelles elle aurait eu droit.

[38] La division générale a mentionné les circonstances ci-dessus comme si elles étaient des questions secondaires après avoir tiré ses conclusions sur le motif valable. Toutefois, certaines de ces circonstances étaient pertinentes pour trancher la question du motif valable (par exemple, son arrivée au Canada, ses 40 ans d’expérience de travail, la taille et le degré de complexité de l’employeuse et le retard de l’employeuse dans la production du relevé d’emploi).

[39] Ce faisant, elle n’a pas tenu compte de la situation de la prestataire dans son ensemble (ce qui comprend les circonstances désignées comme étant d’autres questions) et elle n’a pas vérifié si l’ensemble des circonstances engendrait un motif valable.

[40] Pour les motifs que je viens d’expliquer, je conclus que la division générale a commis une erreur de fait importanteNote de bas de page 24. Par conséquent, je n’ai pas à examiner les autres erreurs alléguées.

Correction de l’erreur

[41] Il y a deux façons de corriger les erreurs de la division généraleNote de bas de page 25. La première option consiste à lui renvoyer le dossier pour réexamen. La deuxième est de rendre la décision qu’elle aurait dû rendre.

[42] J’ai demandé aux parties ce que je devais faire pour corriger l’erreur.

[43] Selon la prestataire, je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Plus précisément, elle veut que je rende une décision en sa faveur. Elle veut que je conclue qu’elle avait un motif valable de faire avancer la date de sa demande d’assurance-emploi et qu’elle remplit les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle dit toutefois qu’elle n’aurait pas d’objection si l’affaire était renvoyée à la division générale pour réexamen.

[44] La Commission dit aussi que je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Elle pense que je dois tenir compte de l’effet cumulatif des circonstances dans lesquelles se trouvait la prestataire ou de sa situation dans son ensemble pour décider qu’il n’y avait pas de motif valable ni de circonstance exceptionnelle.

Je vais corriger l’erreur en rendant la décision qu’il fallait rendre

[45] Je suis d’accord avec les parties. Elles ont eu toutes les chances de présenter leurs arguments et le dossier est complet. Je vais donc corriger l’erreur en rendant la décision que la division générale aurait dû rendre. Pour ce faire, je peux tirer les conclusions de fait nécessairesNote de bas de page 26.

Antidatation

La période du retard

[46] La prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 6 mars 2023Note de bas de page 27.

[47] Le 1er mai 2023, elle a demandé à la Commission d’avancer la date de sa demande au 3 avril 2022Note de bas de page 28.

[48] Je conclus que la période du retard va du 3 avril 2022 au 6 mars 2023. Voilà donc la période pour laquelle la prestataire doit démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement si elle a droit aux prestations d’assurance-emploi et quelles sont les obligations que lui impose la loi.

Raisons pour lesquelles la prestataire a tardé à demander des prestations d’assurance-emploi

[49] La prestataire a fourni plusieurs raisons pour expliquer le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi. Je les résume ainsi :

  • Elle travaille depuis son arrivée au Canada il y a 40 ans.
  • Tarder à demander des prestations d’assurance-emploi était une erreur de bonne foi.
  • Son employeuse lui a donné une indemnité de départ, qu’elle lui a versée du 28 août 2022 au 12 mars 2023Note de bas de page 29.
  • Une des conditions de la cessation d’emploi était de déclarer sans délai tout emploi ou travail indépendant à son ancienne employeuse.
  • Si elle demandait des prestations d’assurance-emploi, elle craignait que toute prestation soit considérée comme une rémunération, ce qui aurait pu avoir des répercussions sur son indemnité de départ, dont elle avait besoin financièrement.
  • Son ancienne employeuse est une grande entreprise dont la structure est complexe et qui possède un service de ressources humaines.
  • On lui a dit de garder les conditions de son indemnité de départ confidentielles. Elle a aussi signé une lettre de garantie en faveur de l’employeuse.
  • L’employeuse ne lui a pas dit de communiquer avec Service Canada pour s’informer au sujet des prestations d’assurance-emploi.
  • Elle se concentrait sur l’obtention d’un nouvel emploi et ne voulait pas être un fardeau pour les programmes d’aide sociale du gouvernement.
  • Elle pensait aussi qu’elle devait attendre son relevé d’emploi. L’employeuse a mis trop de temps à le produire.

La prestataire n’a pas de motif valable

[50] Je conclus que la prestataire n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[51] Elle n’a pas agi comme une personne prudente et raisonnable l’aurait fait dans une situation semblable pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi.

[52] La prestataire a supposé qu’elle devait attendre la fin de son indemnité de départ avant de demander des prestations d’assurance-emploi, mais elle n’a rien fait pour vérifier cette information auprès de Service Canada.

[53] La prestataire aurait pu communiquer avec Service Canada par téléphone ou se rendre dans un centre pour se renseigner en personne. Si elle l’avait fait, elle n’aurait pas eu à dévoiler les modalités de son indemnité de départ. Elle aurait tout simplement pu demander si elle était admissible aux prestations d’assurance-emploi pendant qu’elle recevait une indemnité de départ.

[54] Dans une autre affaire, un prestataire a aussi reçu une indemnité de départ de son employeur. C’était l’équivalent de 11 mois de salaireNote de bas de page 30. Après la fin de son emploi, il a attendu environ 11 mois pour demander des prestations d’assurance-emploi. Il a aussi demandé à la Commission d’avancer la date de sa demande. La Cour a décidé qu’ignorer la loi n’était pas un motif valable pour les prestataires.

[55] La prestataire a déposé une des pages de l’entente de cessation d’emploi qu’elle a conclue avec l’employeuseNote de bas de page 31. En plus des détails de l’indemnité de départ, la page comprend une section intitulée [traduction] « Limitation ». Cette section précise que si la prestataire trouve un autre emploi ou exerce un travail indépendant pendant qu’elle reçoit une indemnité de départ, elle doit en aviser les ressources humaines. Elle dit aussi que si la rémunération est égale à 75 % de son salaire de base, elle recevra la moitié du solde de l’indemnité de départ.

[56] L’entente de cessation d’emploi ne dit pas qu’elle ne peut pas demander et recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle dit juste que si elle a un emploi ou fait du travail indépendant, elle risque de perdre une partie de son indemnité de départ.

[57] L’employeuse a produit le relevé d’emploi le 19 avril 2023, peu après la fin de l’indemnité de départNote de bas de page 32. La prestataire aurait quand même pu s’informer auprès de Service Canada ou même demander des prestations d’assurance-emploi en attendant que le relevé d’emploi soit produit. En fait, c’est quand elle s’est rendu compte que l’employeuse prenait trop de temps pour produire le relevé d’emploi qu’elle aurait dû penser à communiquer avec Service Canada.

[58] Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas d’une affaire où l’employeuse a donné à la prestataire de faux renseignements au sujet des prestations d’assurance-emploi. En fait, l’employeuse lui a simplement versé une indemnité de départ pendant un certain temps et elle ne lui a rien dit sur les prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 33. De plus, ce n’est pas la responsabilité de l’employeuse d’informer la prestataire de ses droits et de ses obligations selon la Loi sur l’assurance-emploi.

[59] La prestataire affirme qu’elle ne voulait pas être un fardeau pour les programmes d’aide sociale du gouvernement et qu’elle cherchait un autre emploi. Cependant, dans une autre affaire, la Cour a conclu qu’il n’y avait pas de motif valable lorsqu’une personne qui essayait de trouver un emploi recevait aussi une indemnité de départ et ne voulait « aucune aide » du gouvernementNote de bas de page 34.

[60] La prestataire travaille au Canada depuis très longtemps et elle savait qu’il y avait des prestations d’assurance-emploi. Je suis d’avis qu’une personne raisonnable se trouvant dans la situation de la prestataire aurait fait des démarches plus tôt pour discuter de sa situation particulière avec Service Canada.

Aucune circonstance exceptionnelle

[61] Je conclus qu’il n’y avait aucune circonstance exceptionnelle dans la présente affaire. À l’audience de la division générale, on a demandé à la prestataire si ses circonstances étaient exceptionnelles. Elle a répondu que nonNote de bas de page 35.

[62] Aucune des raisons fournies par la prestataire n’est exceptionnelle. À tout moment après avoir cessé de travailler, elle aurait pu se renseigner ou demander des prestations d’assurance-emploi.

Résumé

[63] Je conclus qu’aucun motif valable ne justifie le retard de la demande de prestations d’assurance-emploi de la prestataire pendant toute la période du retard. J’ai examiné les raisons avancées par la prestataire ainsi que ses circonstances. Qu’on les regarde de façon individuelle ou cumulative, elles ne constituent pas un motif valable. Même si elle était de bonne foi et qu’elle a fait une erreur sans le vouloir, ce n’est pas un motif valable. Il n’y avait pas de circonstances exceptionnelles. Par conséquent, je refuse d’antidater sa demande d’assurance-emploi.

Conclusion

[64] L’appel est rejeté. La division générale a fait une [erreur] de fait importante. J’ai remplacé la décision de la division générale par la mienne, mais le résultat demeure le même. La prestataire n’a pas de motif valable, alors l’antidatation de sa demande est refusée.

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