Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : GM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 190

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de prolongation
de délai et de permission de faire appel

Partie demanderesse : G. M.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 31 octobre 2023
(GE-23-1320)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la décision : Le 28 février 2024
Numéro de dossier : AD-24-62

Sur cette page

Décision

[1] Une prolongation du délai pour présenter une demande à la division d’appel est accordée. L’autorisation (la permission) de faire appel de la décision de la division générale est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, G. M. (prestataire) demande une prolongation du délai pour déposer sa demande auprès de la division d’appel. Il demande également l’autorisation (la permission) de faire appel de la décision de la division générale rendue le 31 octobre 2023.

[3] La division générale a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler aux fins de la Loi sur l’assurance-emploi du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021 et du 2 septembre 2021 au 24 octobre 2021Note de bas de page 1. Il n’avait donc pas droit à des prestations d’assurance‑emploi pour ces périodes.

[4] Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de fait importantes. Ses arguments ne portent pas sur la période du 2 septembre 2021 au 24 octobre 2021. Elles portent sur la période du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021. Il soutient qu’il était disponible pour travailler du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021 et que la division générale a commis des erreurs de fait au sujet de cette période.

[5] Le prestataire convient qu’il a déposé tardivement sa demande auprès de la division d’appel. Il affirme qu’il y a eu des retards parce qu’il comptait sur sa représentante pour l’aider. Il a découvert plus tard que cette personne ne l’aiderait pas après tout. Il a donc fini par déposer la demande lui‑même.

[6] Comme le prestataire était en retard, je dois décider s’il y a lieu d’accorder une prolongation de délai. Je dois être convaincue que le prestataire peut expliquer raisonnablement pourquoi il a déposé tardivement sa demande à la division d’appel. S’il n’a pas d’explication raisonnable, cela met fin à l’appel.

[7] Si j’accorde une prolongation de délai, je dois quand même établir si l’appel a une chance raisonnable de succès. Autrement dit, il doit y avoir une cause défendable en droitNote de bas de page 2. Si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, cela met aussi fin à l’affaireNote de bas de page 3.

[8] Le prestataire a une explication raisonnable pour justifier son retard. Toutefois, l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, je ne donne pas au prestataire la permission d’aller de l’avant avec son appel.

Questions en litige

[9] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La demande était-elle en retard?
  2. b) Dans l’affirmative, devrais‑je prolonger le délai pour le dépôt de la demande?
  3. c) Si j’accorde la prolongation de délai, peut-on soutenir que la division générale a commis des erreurs de fait importantes?

Analyse

La demande était tardive

[10] Le prestataire reconnaît qu’il était en retard lorsqu’il a déposé sa demande. Le Tribunal de la sécurité sociale lui a envoyé par courriel une copie de la décision de la division générale le 31 octobre 2023. Il est réputé avoir reçu une copie de la décision de la division générale le jour ouvrable suivant, soit le 1er novembre 2023Note de bas de page 4.

[11] Le prestataire avait alors 30 jours pour déposer une demande de permission de faire appel auprès de la division d’appelNote de bas de page 5. Il aurait dû déposer une demande au plus tard le 1er décembre 2023. Mais il n’a déposé sa demande que le 13 janvier 2024. Il était en retard de plus de 40 jours. Comme le prestataire n’a pas déposé de demande à temps, il doit obtenir une prolongation de délai.

Je prolonge le délai pour déposer la demande

[12] Pour décider s’il convient d’accorder une prolongation du délai, je dois établir si la prestataire a une explication raisonnable pour son retardNote de bas de page 6.

[13] Le prestataire affirme qu’il comptait sur sa représentante. Au départ, elle n’était pas disponible. Plus tard, elle devait trouver un interprète. Mais elle a ensuite décidé qu’elle ne l’aiderait plus dans son dossier. Une fois qu’il a découvert qu’elle ne l’aiderait pas, il a déposé la demande.

[14] Je suis convaincue que le prestataire a une explication raisonnable du retard. J’accorde donc une prolongation.

[15] Je dois ensuite décider s’il convient d’accorder au prestataire la permission de faire appel.

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[16] La division d’appel rejette la demande de permission de faire appel si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il y a une chance raisonnable de succès si la division générale a pu commettre une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de faitNote de bas de page 7. Concernant ces types d’erreurs de fait, la division générale devait avoir fondé sa décision sur une erreur commise de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissanceNote de bas de page 8.

Le prestataire ne peut soutenir que la division générale a commis des erreurs de fait importantes

[17] Le prestataire ne peut soutenir que la division générale a commis des erreurs de fait importantes. La preuve étayait les conclusions de la division générale.

[18] Le prestataire soutient que la division générale ne comprenait pas vraiment la preuve ou qu’elle l’a mal interprétée. Il fait valoir ce qui suit :

  • Son médecin lui a recommandé de ne pas travailler avant mai ou juin 2021 parce qu’il était immunodéprimé. Avec la COVID-19, il était plus à risque et devait éviter les zones publiques bondéesNote de bas de page 9. Son médecin n’a rien dit sur sa force physique.
  • Il a terminé le traitement contre la leucémie le 23 octobre 2020. Il a eu amplement le temps de se reposer et de retrouver son énergie et sa force physique.
  • Il a décidé de suivre un programme d’aide-soignant en ligne le soir afin d’être disponible pour travailler le matin.
  • Il nie avoir déjà dit qu’il était incapable de travailler. Il reconnaît qu’il n’avait pas la même force qu’il avait avant d’être malade. Il soutient qu’il avait l’énergie, la volonté et le temps de travailler. Mais il ne pouvait pas trouver un emploi convenable.

[19] Le stage du prestataire était à temps plein et s’est déroulé du 2 septembre 2021 au 24 octobre 2021. La division générale a conclu que le stage était assez exigeant pour que le prestataire estime qu’il devait demander deux semaines de congé lorsque sa famille lui a rendu visite en octobre. La division générale a conclu qu’il était plus probable qu’improbable que le prestataire ait été incapable de travailler pendant son stageNote de bas de page 10. Le prestataire ne conteste pas ces conclusions.

[20] Donc, cela laisse la période du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021 en litige.

[21] La question sur l’état de santé du prestataire posait problème jusqu’en mai ou juin 2021. La note du médecin est ainsi rédigée :

[Traduction]

Il a subi un traitement de chimiothérapie de février 2020 à novembre 2020. Il restera immunodéprimé pour les trois à six prochains mois. [Il] aura besoin de cette période pour se remettre de sa maladie grave. Son pronostic est très bon, mais il a suivi de nombreux mois de thérapie et a besoin de temps pour se rétablir. Je l’ai informé qu’il ne devrait pas présentement travailler pendant la pandémie de COVID-19. Il peut envisager un retour au travail en mai ou juin 2021Note de bas de page 11.

[22] Le prestataire soutient que la division générale n’a pas compris pourquoi son médecin lui a recommandé de rester en congé jusqu’en mai ou juin 2021. Il était immunodéprimé à ce moment. Il affirme que la recommandation de son médecin n’avait rien à voir avec sa force physique. Il prétend qu’il aurait pu travailler, même si son médecin lui a recommandé de ne pas le faire.

[23] La division générale a accepté que, malgré la recommandation du médecin de ne pas travailler, le prestataire eût cherché du travail du 1er janvier 2021 au 1er septembre 2021. Toutefois, la division générale a conclu que le prestataire n’était pas capable de travailler ni disponible à cette fin avant mai 2021.

[24] La division générale a expliqué comment elle en est arrivée à cette conclusion. Elle a dit que le prestataire avait admis qu’il était très faible et que même trois ans après son traitement, il trouvait toujours difficile de faire une journée de huit heures. Elle a donc conclu qu’il était peu probable qu’il ait été en mesure de travailler comme nettoyeur ou aide aux soinsNote de bas de page 12, en plus d’assister à quatre heuresNote de bas de page 13 de cours tous les soirs.

[25] Le prestataire nie avoir manqué de force physique ou d’énergie pour travailler. Il nie avoir déjà dit être physiquement incapable de travailler du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021.

[26] Toutefois, lorsque le prestataire a parlé à l’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, il aurait déclaré qu’il n’était pas assez fort pour travaillerNote de bas de page 14. Une autre fois, il a dit à la Commission qu’il n’était pas en mesure de travailler pendant ses étudesNote de bas de page 15.

[27] On ne peut dire avec certitude que le prestataire avait un interprète lorsqu’il a parlé à la Commission. Toutefois, mises à part les notes de la Commission, d’autres éléments de preuve ont démontré que le prestataire était faible. Lorsqu’il a déposé son avis d’appel auprès de la division générale, il a écrit qu’il n’était pas sécuritaire pour lui de travailler avec d’autres personnes et qu’[traduction] « [il] était également très faible en raison du traitement de chimiothérapie »Note de bas de page 16.

[28] À l’audience devant la division générale, le prestataire a témoigné qu’il était incapable de travailler, mais estimait qu’il pourrait suivre une formation pendant la période durant laquelle son médecin a dit qu’il devrait rester en arrêt de travail. Les cours en ligne ne nécessiteraient aucun effort ni travail physiques. Il a pu suivre une formation pendant son congé pour raisons médicales. Il a poursuivi la formation par lui-même. Son médecin le connaissait et le soutenaitNote de bas de page 17. Il a également expliqué qu’il devait suivre un cours pour ne pas être atteint de dépression, car il était seul à l’époque et n’avait pas sa famille avec luiNote de bas de page 18.

[29] La représentante du prestataire a confirmé qu’il était souffrant du fait de son traitement et qu’il n’était pas en mesure de travailler à compter du 25 janvier 2021.

[30] La représentante du prestataire a noté que le médecin du prestataire lui avait recommandé de ne pas travailler jusqu’en juin de la même année parce que la COVID-19 était toujours présente. Le prestataire devait réduire son risque d’exposition en s’absentant du travailNote de bas de page 19.

[31] Le prestataire a également témoigné qu’il comprenait que son médecin lui avait recommandé de rester en arrêt de travail jusqu’en mai ou juin 2021 en raison du risque d’exposition à la COVID-19. Il a témoigné que son [traduction] « immunité était faible »Note de bas de page 20.

[32] Il est clair que le prestataire a dû réduire son risque d’exposition à la COVID-19. Il ne faisait aucun doute qu’il était immunodéprimé. Cependant, des éléments de preuve révélaient également que le prestataire était faible.

[33] La preuve a étayé les conclusions de la division générale selon lesquelles le prestataire ne pouvait pas travailler du 25 janvier 2021 au 30 avril 2021 pour des raisons de santé. Même si la question de savoir s’il était physiquement faible n’était pas problématique, il est clair que l’état d’immunodépression du prestataire l’exposait trop pour qu’il envisage de travailler.

[34] Je ne suis pas convaincue que l’on puisse soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

Conclusion

[35] Une prolongation de délai est accordée. Cependant, comme l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, la permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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