Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : FS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 430

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : F. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (507256) datée du 20 octobre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Katherine Parker
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Les 1er et 21 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 23 février 2024
Numéro de dossier : GE-22-3718

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Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. L’appelant a reçu une rémunération, mais la Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas réparti cette rémunération aux bonnes semaines. La Commission a également commis une erreur en établissant l’indemnité de fin d’emploi en fonction de la rémunération hebdomadaire moyenne plutôt que de la rémunération hebdomadaire normale.

[2] Le montant de 26 464 $ que l’appelant a reçu constitue une rémunération. Cette rémunération doit être appliquée en fonction de la rémunération hebdomadaire normale de 734,81 $ pour 36 semaines. La répartition de la rémunération s’applique aux semaines du 13 janvier 2019 au 21 septembre 2019. Le solde de 11,23 $ sera réparti au cours de la semaine du 22 septembre 2019.

[3] Comme il est indiqué ci-dessus, la répartition peut modifier le montant du trop-payé. Je n’annule pas ni ne réduis le montant du trop-payé parce que je n’ai pas le pouvoir de le faire.

Aperçu

[4] L’appelant fait appel du calcul du trop-payé. Il a affirmé qu’il y avait trop de calculs et de changements, et qu’aucun de ces changements ne lui avait été expliqué.

[5] Bien que l’appel porte sur la répartition de la rémunération qui a entraîné un trop‑payé important, pour l’appelant, c’est beaucoup plus. Le Tribunal a estimé qu’il était important de fournir un certain contexte dans la décision parce qu’elle comporte plusieurs couches d’erreurs de la part de la Commission, l’une étant aggravée par l’autre. Ces erreurs ont provoqué la colère et la confusion d’un appelant qui avait déjà vécu un traumatisme et un deuil personnels.

[6] La Commission et l’Agence du revenu du Canada (ARC) ont commis de nombreuses erreurs et erreurs d’écriture dans leurs observations. Il a fallu plusieurs enquêtes et lettres pour obtenir les renseignements dont le Tribunal avait besoin pour rédiger la présente décision.

Questions que je dois examiner en premier

Erreurs de la part de la Commission et de l’ARC

[7] Bien que l’appel porte sur un trop-payé important qui découle de la répartition d’une rémunération et d’un paiement rétroactif de prestations, pour l’appelant, c’est beaucoup plus. La Commission a commis plusieurs erreurs en traitant le relevé d’emploi modifié de l’appelant, en modifiant les demandes de l’appelant et en versant des prestations supplémentaires de façon rétroactiveNote de bas de page 1. Ces erreurs ont provoqué la colère et la confusion de l’appelant, qui avait déjà vécu un traumatisme et un deuil personnels.

[8] Les erreurs de la Commission se sont poursuivies dans ses observations au Tribunal. De plus, l’ARC a commis des erreurs dans sa décision relative à l’assurabilité, lesquelles ont nécessité des clarifications supplémentairesNote de bas de page 2. Il a fallu plusieurs demandes d’enquête et lettres pour obtenir les renseignements exacts nécessaires pour trancher les questions en litige.

[9] Je m’excuse d’avoir pris autant de temps pour rendre la présente décision, mais il m’a fallu beaucoup de temps pour obtenir les renseignements exacts nécessaires pour y arriver.

Questions en litige

[10] L’indemnité de fin d’emploi que l’appelant a reçue représente-t-elle une rémunération?

[11] Si l’indemnité représente une rémunération, comment cette rémunération sera-t-elle répartie?

[12] Puis-je annuler ou réduire le trop-payé?

Analyse

L’indemnité de fin d’emploi que l’appelant a reçue représente-t-elle une rémunération?

[13] Oui, je conclus que le montant de 26 464,39 $ que l’appelant a reçu constitue une rémunération. Il s’agit d’une paie de vacances de 2 950,49 $, d’une indemnité de préavis de 5 878,46 $ et d’une indemnité de départ de 17 635,44 $ découlant de la fin de son emploi. Voici les motifs pour lesquels j’ai décidé que l’indemnité constituait une rémunération.

[14] La loi prévoit que la rémunération est le revenu intégral qu’une personne peut obtenir de tout emploiNote de bas de page 3. La loi définit « revenu » et « emploi ».

[15] Le revenu peut être tout ce qu’une personne reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne. Ce n’est pas forcément de l’argent, mais c’est souvent le casNote de bas de page 4. Selon la jurisprudence, l’indemnité de départ est une rémunérationNote de bas de page 5.

[16] L’emploi est tout travail qu’une personne a effectué ou effectuera faisant l’objet d’un contrat de louage de services ou de tout autre contrat de travailNote de bas de page 6.

[17] L’appelant convient que son ancien employeur lui a versé 17 635,44 $ en paiements bimensuels, à raison de 734,81 $ par paiement, soit l’équivalent de sa rémunération hebdomadaire normale. Il l’a payé du 13 janvier 2019 au 29 juin 2019. C’est un revenu qui découle directement de l’emploi de l’appelant. Rien dans les documents d’appel ne me permettrait de conclure le contraire. Par conséquent, je conclus que l’appelant a reçu une rémunération de 17 635,44 $ en raison de la fin de son emploi.

Comment cette rémunération doit-elle être répartie?

[18] La rémunération qui est versée ou payable à une partie prestataire est appliquée aux demandes de la partie prestataire et déduite de ses prestations d’assurance-emploi. Cela s’appelle la répartition. La raison d’être de la répartition de la rémunération est d’éviter la double indemnisationNote de bas de page 7.

[19] La rémunération est répartie en fonction de sa nature : pourquoi la rémunération a-t-elle été versée? La rémunération est répartie en fonction de la rémunération hebdomadaire normale de l’appelant.

[20] La rémunération hebdomadaire normale est la rémunération ordinaire ou habituelle qu’une personne reçoit régulièrement de son emploiNote de bas de page 8. Cela ne comprend pas l’argent versé en raison de la fin d’un emploi.

[21] La loi précise quelle répartition s’applique à la rémunération versée en raison de la fin permanente d’un emploi. La Cour d’appel fédérale a précisé qu’un paiement est versé « en raison de » la fin d’un emploi au moment où on y a mis finNote de bas de page 9.

[22] La répartition de cette rémunération commence la semaine au cours de laquelle l’appelant a perdu son emploi, qui était, dans la présente affaire, la semaine du 13 janvier 2019. La répartition commence cette semaine-là indépendamment du moment où la rémunération a été versée ou était payableNote de bas de page 10.

[23] Je conclus que l’appelant a été congédié la semaine du 13 janvier 2019, compte tenu de ce qu’indique son relevé d’emploiNote de bas de page 11. L’ARC a rendu une décision et a déclaré que ces paiements constituaient une rémunérationNote de bas de page 12.

[24] La Commission a révisé la répartition de la rémunération lorsqu’elle a reçu des renseignements sur l’indemnité de préavis et la paie de vacances. Toutefois, elle a utilisé la rémunération hebdomadaire moyenne pour effectuer la répartition, plutôt que la rémunération hebdomadaire normaleNote de bas de page 13. Comme je l’ai mentionné ci-dessus, la loi prévoit que le montant total de la rémunération de fin d’emploi doit être réparti en fonction de la rémunération hebdomadaire normale de la personne, et non de sa rémunération hebdomadaire moyenneNote de bas de page 14.

[25] Je conclus que la rémunération hebdomadaire normale de l’appelant était de 734,81 $. Cela est étayé par le fait que l’employeur a versé son indemnité de fin d’emploi toutes les deux semaines, à raison de son salaire bihebdomadaire normal de 1 469,62 $. Toutefois, la Commission a réparti l’indemnité de fin d’emploi en fonction de la rémunération hebdomadaire moyenne de l’appelant, mais ce n’est pas ce que la loi prévoit.

[26] Je conclus donc que l’indemnité de fin d’emploi de 26 464,39 $ de l’appelant doit être répartie dans ses demandes d’assurance-emploi à raison de 734,81 $ par semaine pendant 36 semaines, du 13 janvier 2019 au 21 septembre 2019. Le solde de 11,23 $ sera réparti sur la semaine du 22 septembre 2019.

Puis-je annuler ou réduire le trop-payé?

[27] Je n’ai pas compétence pour trancher les demandes d’annulation ou de réduction d’un trop-payé. Ce pouvoir appartient à la CommissionNote de bas de page 15.

[28] Toutefois, la loi prévoit qu’un montant payable à titre de trop-payé en vertu de l’article 43 de la Loi sur l’assurance-emploi peut être annulé par la Commission si le trop-payé est attribuable à un retard ou à une erreur de la part de la CommissionNote de bas de page 16. Elle prévoit également qu’un trop-payé peut être annulé dans les cas où les prestations ont été reçues plus de 12 mois avant que la Commission avise la personne endettée du trop-payé.

[29] Le montant final du trop-payé n’a pas encore été déterminé. Cela fait plus de cinq ans que ces prestations sont payables. La présente affaire a également été retardée en raison de multiples erreurs et erreurs d’écriture de la part de la Commission et de l’ARC.

[30] L’appelant affirme qu’il s’attendait à ce que sa rémunération totale soit répartie correctement dès le début. Il ne savait pas que le traitement du relevé d’emploi révisé par la Commission avait entraîné une révision importante de ses prestations.

[31] Le 3 février 2020, l’appelant a reçu un paiement forfaitaire important de 8 000 $ de la part de la Commission. Le 8 février 2020, la Commission a envoyé un avis de dette d’un montant de 3 780 $Note de bas de page 17. Toute prestation reçue entre le 30 juin 2019 et le 21 septembre 2019 serait considérée comme un trop-payé si la rémunération était supérieure au seuil de rémunération ou au montant de toute prestation payable.

[32] Les raisons pour lesquelles la Commission a versé à l’appelant des paiements rétroactifs de prestations pour proches aidants pour les semaines du 13 janvier 2019 au 30 juin 2019, alors qu’il recevait son plein salaire, ne sont pas claires. Il semble que la Commission l’ait fait lorsqu’elle a traité la demande de l’appelant en vue d’antidater sa demande afin qu’elle entre en vigueur le 17 octobre 2019, mais l’appelant avait seulement demandé à antidater sa demande afin qu’elle entre en vigueur le 22 septembre 2019. Par conséquent, le trop-payé pour cette période découle d’erreurs de la part de la Commission.

[33] Le versement de prestations par la Commission, alors que l’appelant recevait son plein salaire, a donné lieu à des prestations partielles. Pour cette raison, la prolongation de la période de prestations a été annulée. La Commission a envoyé une lettre de décision le 13 décembre 2019, informant l’appelant que sa période de prestations serait prolongée jusqu’au 23 mai 2020. Cette période avait été prolongée du nombre de semaines pendant lesquelles il recevait ses paiements bihebdomadaires au titre de l’indemnité de fin d’emploi. Toutefois, une fois que la Commission a réparti les prestations pendant la période de rémunération de l’appelant, l’appelant n’avait plus droit à une prolongation de la période de prestations. Cela a eu pour conséquence que l’appelant ne pouvait plus obtenir des prestations supplémentaires.

[34] Je reconnais que la loi prévoit qu’un montant payable pour un trop-payé en vertu de l’article 43 de la Loi sur l’assurance-emploi peut être annulé par la Commission si elle estime que, compte tenu de toutes les circonstances, le remboursement du montant imposerait une contrainte excessive à la personne endettée (le prestataire)Note de bas de page 18.

[35] Toutefois, une décision de la Commission renonçant au trop-payé ou l’annulant ne peut pas faire l’objet d’un appel devant le TribunalNote de bas de page 19. C’est la Cour fédérale du Canada qui a compétence pour entendre un appel au sujet d’une annulationNote de bas de page 20.

[36] Toutefois, dans la présente affaire, je recommande à la Commission d’examiner la possibilité d’annuler la dette de l’appelant en vertu de l’article 43 de la Loi sur l’assurance-emploi ou des articles 56(2) et 56(1)f)(ii) du Règlement sur l’assurance-emploi. L’appelant a subi un traumatisme considérable et de la confusion, et il n’avait aucun contrôle sur les décisions et les erreurs de la Commission qui ont entraîné le trop-payé.

[37] Je vous demande également d’examiner la question de savoir si la nouvelle répartition de la rémunération, comme elle est décrite ci-dessus, prolonge la période de prestations, et, dans l’affirmative, d’examiner de manière plus approfondie la question de savoir si l’appelant peut être admissible à des prestations pendant la période prolongée.

Conclusion

[38] L’appel est accueilli en partie.

[39] L’appelant a reçu une rémunération de 26 464,39 $ en raison de la fin de son emploi. Cette rémunération est répartie à 734,81 $ par semaine pendant 36 semaines, du 13 janvier 2019 au 21 septembre 2019. Le solde de 11,23 $ sera réparti sur la semaine du 22 septembre 2019.

[40] Je recommande à la Commission d’envisager l’annulation du trop-payé ou de décéder si le trop-payé peut être réduit par les prestations auxquelles l’appelant pourrait avoir droit s’il était admissible à une prolongation de la période de prestations.

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