Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 317

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : S. B.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance‑emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 6 décembre 2023
(GE-23-1579)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 26 mars 2024
Numéro de dossier : AD-24-31

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Décision

[1] L’autorisation (permission) de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, S. B. (le prestataire) a été congédié de son emploi dans un établissement de santé régional. Son employeur a dit qu’il avait été congédié parce qu’il ne respectait pas sa politique de vaccination contre la COVID-19.

[3] Le prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi. La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire avait été licencié en raison de son inconduite. La Commission a maintenu sa décision après que le prestataire eut demandé une révision.

[4] Le prestataire a fait appel de la décision de révision devant la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel. Elle a conclu que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite et qu’il ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[5] Le prestataire souhaite maintenant faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel du Tribunal. Il doit toutefois obtenir la permission pour que son appel puisse aller de l’avant. Le prestataire soutient que la division générale a commis de nombreuses erreurs dans sa décision.

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur susceptible de révision sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[7] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. a) Peut-on soutenir que la division générale a fait preuve de partialité?
  2. b) Peut-on soutenir que la division générale a porté atteinte à l’équité procédurale en ne tenant pas compte du témoignage des témoins du prestataire?
  3. c) Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en s’appuyant sur une décision de la Cour fédérale?
  4. d) Peut-on soutenir que la division générale a fait preuve de partialité en acceptant certains éléments de preuve de la Commission?
  5. e) Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en établissant une distinction entre la présente affaire et une décision sur laquelle s’appuyait le prestataire?
  6. f) Le prestataire soulève-t-il une autre erreur susceptible de révision de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[8] Le critère juridique auquel la prestataire doit satisfaire dans une demande de permission de faire appel est peu exigeant : Y a-t-il un moyen défendable sur le fondement duquel l’appel pourrait être accueilliNote de bas de page 1?

[9] Pour trancher cette question, je me suis concentrée sur la question de savoir si la division générale aurait pu commettre une ou plusieurs des erreurs pertinentes (moyens d’appel) énumérées dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 2.

[10] Un appel n’est pas une nouvelle audition de la demande initiale. Je dois plutôt décider si la division générale :

  1. a) a omis de suivre une procédure équitable;
  2. b) a omis de trancher une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  3. c) a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 3;
  4. d) a commis une erreur de droitNote de bas de page 4.

[11] Avant que le prestataire puisse passer à l’étape suivante de l’appel, je dois être convaincue qu’il y a une chance raisonnable de succès compte tenu d’un ou de plusieurs de ces moyens d’appel. Une chance raisonnable de succès signifie que le prestataire pourrait plaider sa cause et peut-être gagner. Je devrais également tenir compte des autres moyens d’appel possibles qui n’ont pas été mentionnés expressément par le prestataireNote de bas de page 5.

Contexte

[12] L’employeur du prestataire était assujetti à un décret provincial en matière de santé (décret) exigeant que les travailleurs et travailleuses des établissements de santé soient vaccinés contre la COVID-19. Dans sa demande de prestations d’assurance-emploi, le prestataire a déclaré qu’il avait été licencié parce que son employeur avait tenté de le contraindre à se faire vacciner et qu’il ne répondait pas à ses questions au sujet du vaccin, de sorte qu’il ne pouvait pas donner un consentement éclairéNote de bas de page 6.

[13] La Commission a décidé que le prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. La division générale a rejeté l’appel du prestataire. Elle a conclu que la Commission avait prouvé que le prestataire avait été congédié pour inconduiteNote de bas de page 7.

On ne peut soutenir que la division générale a fait preuve de partialité

[14] Le prestataire fait valoir qu’il a soulevé de nombreux exemples de partialité et de corruption à la Commission et au Tribunal. À titre d’exemple, il affirme avoir demandé à la Commission si elle avait un incitatif financier pour refuser des demandes valides. Il a obtenu une réponse affirmative. Il soutient que cela indique une corruption endémique et que la division générale n’a pas tenu compte de ses préoccupations concernant la partialité et la corruptionNote de bas de page 8.

[15] Le critère pour conclure à la partialité est exigeant. Il incombe à la partie qui prétend qu’elle existe de la prouver. Une allégation de partialité ne peut reposer sur de simples soupçons, de pures conjectures, des insinuations ou encore de simples impressionsNote de bas de page 9. La Cour suprême du Canada a énoncé le critère de partialité dans les termes suivants : « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratiqueNote de bas de page 10? »

[16] La division générale a traité directement des préoccupations du prestataire au sujet de la partialitéNote de bas de page 11. Elle a reconnu la préoccupation du prestataire au sujet de la Commission et a expressément fait référence à son argument concernant l’incitatif financier de rejeter des demandesNote de bas de page 12. La division générale a expliqué que ces arguments ne relèvent pas de sa compétence d’examen. Elle a expliqué qu’il pouvait poursuivre ces préoccupations d’autres façonsNote de bas de page 13.

[17] On ne peut soutenir que la division générale a fait preuve de partialité contre le prestataire ou a commis une erreur de quelque façon que ce soit en ne tenant pas compte de ses allégations de partialité et de corruption à la Commission. La division générale a examiné les arguments du prestataire et a expliqué que la question ne relevait pas de sa compétence. Le prestataire n’est pas d’accord avec les conclusions tirées par la division générale, mais cela n’équivaut pas à de la partialité.

[18] Le prestataire a également soulevé des préoccupations au sujet de la partialité de la division générale lorsqu’elle a accepté le témoignage de la Commission selon lequel le prestataire s’est fait dire qu’il devait se faire vaccinerNote de bas de page 14. La division générale faisait référence à l’argument de la Commission selon lequel le prestataire s’en est remis au libellé du décret et de la politique de l’employeurNote de bas de page 15. La division générale a également expliqué, en se référant à la preuve, pourquoi elle a conclu qu’il était plus probable qu’improbable que cela ait été communiqué au prestataireNote de bas de page 16.

[19] La division générale a examiné les éléments de preuve présentés par le prestataire et ceux de la Commission. Elle a soupesé la preuve qu’elle a entendue et a pris une décision comme elle est tenue de le faire. J’estime qu’on ne peut soutenir que la division générale a fait preuve de partialité dans sa décision.

On ne peut soutenir que la division générale a porté atteinte à l’équité procédurale

[20] Le prestataire affirme que la division générale a porté atteinte à l’équité procédurale en rejetant le témoignage de son premier témoin sur la question de savoir si sa conduite était délibérée. Il dit que la division générale aurait dû demander plus de détails si elle n’était pas satisfaite et si cela compromettait son droit à une audience équitableNote de bas de page 17.

[21] La division générale a abordé le témoignage du témoin du prestataire. Elle a conclu que le témoignage ne comportait pas assez de détails sur le moment où les réunions ont eu lieu et sur la conduite à laquelle on faisait référenceNote de bas de page 18. La division générale a expliqué pourquoi elle n’a pas accepté le témoignage du témoin comme preuve que l’action ou l’inaction du prestataire n’était pas délibérée et que ce n’était donc pas une inconduiteNote de bas de page 19.

[22] On ne peut soutenir que la division générale n’a pas respecté l’équité procédurale. Les témoins du prestataire ont pu témoigner et la division générale a expliqué pourquoi elle n’a pas accepté le témoignage comme preuve que les actes du prestataire n’étaient pas délibérés.

[23] Le prestataire soutient également que la division générale a commis une erreur en rejetant le témoignage de son deuxième témoinNote de bas de page 20. La division générale a expliqué qu’elle ne tenait pas compte du témoignage de ce témoin au sujet des données sur l’innocuité à long terme du vaccin contre la COVID-19 et des effets sur le consentement éclairé. Elle a fait référence à des paragraphes précédents dans sa décision dans lesquels elle expliquait que les questions d’innocuité et d’efficacité du vaccin et du droit au consentement éclairé ne relèvent pas de la compétence du TribunalNote de bas de page 21.

[24] On ne peut soutenir que la division générale a manqué à l’équité procédurale en ne tenant pas compte du témoignage du deuxième témoin au sujet du vaccin. Elle a expliqué pourquoi la preuve fournie par le témoin sur ce sujet n’était pas pertinente aux questions qu’elle devait trancher.

On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de droit

[25] Le prestataire soutient que la division générale n’aurait pas dû se fonder sur une décision de la Cour fédérale, soit Cecchetto c Canada (Procureur général)Note de bas de page 22. Il affirme que l’affaire est fondamentalement différente de la sienne et qu’elle n’est pas pertinente pour son appel. Le prestataire ajoute qu’une décision de la Cour fédérale sur laquelle il s’est fondé, Astolfi c Canada (Procureur général), est pertinente et n’aurait pas dû être rejetée par la division généraleNote de bas de page 23.

[26] La division générale a fait référence à la décision Cecchetto, qui portait sur une politique de vaccination contre la COVID-19 et sur l’inconduite. Elle a fait référence à cette décision pour étayer sa conclusion selon laquelle elle ne peut prendre de décisions concernant l’innocuité ou l’efficacité du vaccin ou du consentement éclairéNote de bas de page 24. Je ne vois aucune preuve que cette décision exécutoire ne serait pas pertinente dans la situation du prestataire. On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur en renvoyant à cette décision.

[27] La division générale a également abordé les arguments du prestataire concernant la décision Astolfi. Elle a expliqué en quoi les faits dans cette affaire diffèrent de ceux du prestataire et a conclu qu’ils ne s’appliquaient pasNote de bas de page 25. On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en n’appliquant pas cette décision.

[28] La division générale a appliqué le critère juridique approprié et a suivi la jurisprudence exécutoire de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale. Elle a tenu compte de la preuve et des arguments du prestataire et n’a tenu compte d’aucune preuve non pertinente. On ne peut soutenir que la division générale a commis quelque erreur susceptible de révision que ce soit dans sa décision.

[29] Le prestataire n’a signalé aucune erreur de la division générale sur le fondement de laquelle l’appel pourrait être accueilli. Par conséquent, je refuse l’autorisation de faire appel.

Conclusion

[30] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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