Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 453

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une prolongation de délai et à
une demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : R. N.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 30 octobre 2019
(GE-19-3183)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Date de la décision : Le 30 avril 2024
Numéro de dossier : AD-24-97

Sur cette page

Décision

[1] La demande à la division d’appel n’a pas été présentée en retard.

[2] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[3] R. N. est le prestataire dans cette affaire. Il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il n’était pas admissible aux prestations parce qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 1.

[5] La division générale a tiré la même conclusionNote de bas de page 2. Elle a décidé que le prestataire avait fait le choix personnel de quitter son emploi et qu’il était donc exclu du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi. Elle a conclu que quitter son emploi n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas.

[6] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel. Il affirme que la procédure de la division générale n’était pas équitable.

[7] Je rejette la demande de permission de faire appel parce que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 3.

Questions préliminaires

J’ai envoyé des lettres au prestataire pour lui demander des renseignements supplémentaires

[8] Dans sa demande à la division d’appel, le prestataire a avancé que la procédure de la division générale n’était pas équitableNote de bas de page 4. Sa demande semblait aussi avoir été présentée en retard.

[9] J’ai donc envoyé une lettre au prestataire pour lui demander de plus amples renseignementsNote de bas de page 5. Je lui ai demandé de préciser la date à laquelle il avait reçu la décision de la division générale. S’il l’avait reçue plus tard, je lui ai demandé d’expliquer pourquoi. Je lui ai aussi demandé les motifs de son appel.

[10] Le prestataire a répondu à ma lettre. Il a expliqué qu’il avait eu un accident d’auto et qu’il avait fait des traitements en 2019Note de bas de page 6. Il a indiqué qu’il n’avait rien reçu par la poste ou par courriel. De plus, il n’avait pas accès à ses courriels parce qu’il recevait des traitements à ce moment-là. Il a expliqué qu’il avait de la difficulté à suivre ce qui se passait en 2019. Il a conclu en écrivant : [traduction] « Il s’agit d’une déclaration d’iniquité et la procédure n’a pas été suivie. »

[11] J’ai réécrit au prestataire pour lui dire que j’avais reçu sa réponse, mais qu’il n’avait pas répondu à une question importanteNote de bas de page 7. Je lui ai demandé la date à laquelle il avait reçu la décision de la division générale (la date de la communication).

[12] Le prestataire a répondu qu’il n’avait reçu aucun courriel à ce sujetNote de bas de page 8. Il a supposé qu’il était censé recevoir un courriel. De plus, il ne vivait pas à la même adresse à ce moment-là.

J’ai organisé une conférence préparatoire

[13] J’ai organisé une conférence préparatoire par téléconférence avec les parties, afin d’expliquer les dispositions législatives au sujet des appels en retard et de demander au prestataire à quel moment la décision de la division générale lui avait été communiquée. J’ai mis tous les renseignements pertinents dans l’invitation que j’ai envoyée aux partiesNote de bas de page 9.

[14] La conférence préparatoire a eu lieu le 29 avril 2024. Le prestataire et la Commission y ont assisté par téléconférence. J’ai expliqué les dispositions législatives au sujet des appels en retard. J’ai demandé au prestataire à quel moment il avait reçu la décision de la division générale.

[15] Le prestataire m’a dit qu’il a reçu un courriel à la toute fin de décembre 2023 et que la décision de la division générale s’y trouvait en pièce jointe. Il a expliqué qu’il avait déjà eu des problèmes avec son ordinateur et le chargement des courriels, mais que ce courriel était tout nouveau. Il a dit que le courriel provenait du Tribunal de la sécurité sociale et qu’il ne savait pas pourquoi il l’avait reçu.

[16] La Commission n’avait aucune question à poser au prestataire ni aucun commentaire sur la date de la communication.

[17] Un résumé de la conférence préparatoire a été envoyé aux parties par la suiteNote de bas de page 10.

Questions en litige

[18] Voici les questions à trancher :

  1. a)  La demande à la division d’appel était-elle en retard? Si oui, dois-je prolonger le délai de dépôt de la demande?
  2. b)  Peut-on soutenir que la procédure de la division générale n’était pas équitable?

La demande n’était pas en retard

[19] La décision de la division générale est datée du 28 octobre 2019Note de bas de page 11. Le Tribunal a reçu la demande du prestataire à la division d’appel le 26 janvier 2024Note de bas de page 12.

[20] Pour présenter une demande à la division d’appel selon les modalités prévues par règlement, une personne a 30 jours suivant la date où elle reçoit communication par écrit de la décision de la division généraleNote de bas de page 13.

[21] Une personne peut demander au Tribunal de prolonger le délai pour déposer un appel en expliquant son retardNote de bas de page 14. Le Tribunal prolonge ou refuse de prolonger le délai après avoir vérifié si la personne a une explication raisonnable pour son retardNote de bas de page 15.

[22] À première vue, il semblait que la demande du prestataire à la division d’appel avait été présentée plus d’un an en retard. Notons que le Tribunal ne peut pas prolonger le délai pour les demandes présentées plus d’un an après la date de la communication par écrit de la décision et des motifsNote de bas de page 16.

[23] J’ai examiné la demande que le prestataire a présentée à la division d’appel. Il n’a pas précisé la date à laquelle il a reçu la décision de la division généraleNote de bas de page 17. J’ai examiné le dossier pour voir si l’on mentionnait quelque part que la décision de la division générale lui avait été communiquée, mais je n’ai rien trouvé. Je lui ai écrit deux lettres pour le lui demander, mais il n’a pas répondu à cette question précise.

[24] À la conférence préparatoire, j’ai interrogé le prestataire sur la date de la communication. Il a dit qu’il a seulement appris qu’il y avait une décision de la division générale lorsqu’il a reçu un courriel du Tribunal à la toute fin de décembre 2023.

[25] Selon moi, il est étrange que le prestataire ait reçu un courriel non sollicité du Tribunal à la fin de décembre 2023, qui comprenait une copie de la décision de la division générale d’octobre 2019. Je ne vois aucune trace de ce courriel de décembre 2023 dans le dossier du Tribunal, et le prestataire n’a présenté aucune preuve de ce courriel.

[26] Toutefois, aucune autre preuve au dossier ne laisse croire que la décision de la division générale a été communiquée à une autre date ou à une date antérieure. La Commission n’a pas contesté la date de la communication non plus. Par conséquent, il est plus probable qu’improbable que le prestataire ait pris connaissance de la décision de la division générale seulement à la toute fin de décembre 2023, comme il l’a affirmé.

[27] J’accepte que le prestataire a reçu communication de la décision de la division générale au plus tard le 31 décembre 2023. Il a ensuite déposé sa demande à la division d’appel le 26 janvier 2024.

[28] Je conclus que la demande du prestataire à la division d’appel a été déposée à temps (dans les 30 jours) selon la date à laquelle il dit avoir reçu communication de la décision de la division générale.

Analyse

[29] Il ne peut pas y avoir d’appel à la division d’appel sans permission Note de bas de page 18.

[30] Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès Note de bas de page 19. Autrement dit, il doit y avoir des motifs défendables qui permettraient à l’appel d’être accueilli Note de bas de page 20.

[31] Je peux examiner seulement certains types d’erreurs. Je dois voir si la division générale a pu commettre une ou plusieurs des erreurs pertinentes (c’est ce qu’on appelle les « moyens d’appel ») Note de bas de page 21.

[32] Je présente ci-dessous les moyens d’appel possibles à la division d’appel. Il faut que la division générale ait fait l’une des choses suivantes Note de bas de page 22 :

  • agir de façon injuste;
  • outrepasser ses pouvoirs ou refuser de les exercer;
  • commettre une erreur de droit;
  • fonder sa décision sur une erreur de fait importante.

[33] Pour que l’appel passe à l’étape suivante, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Le prestataire affirme que la procédure de la division générale n’était pas équitable

[34] Le prestataire est d’avis que la division générale n’a pas suivi une procédure équitableNote de bas de page 23. Pour appuyer sa position, il a écrit ce qui suitNote de bas de page 24 :

  • Il n’a pas reçu la décision [de la division générale] en 2019 par courriel ou par la poste et ne vivait pas à la même adresse à ce moment-là.
  • Il essayait de se remettre sur pied et recevait des traitements en 2019.
  • Il avait de la difficulté à suivre ce qui se passait parce qu’il n’allait pas bien.
  • Il avait une dette à payer et c’était trop pour lui.
  • [traduction] « Il s’agit d’une déclaration d’iniquité et la procédure n’a pas été suivie. »

[35] Si la division générale a agi de façon injuste, je suis autorisée à intervenirNote de bas de page 25.

On ne peut pas soutenir que la procédure de la division générale était inéquitable

[36] L’équité procédurale concerne le caractère équitable de la procédure. Il comprend des garanties procédurales, dont le droit d’obtenir une décision rendue par une personne impartiale, ainsi que le droit, en tant que partie, d’être entendue, de connaître les arguments avancés contre elle et d’avoir la possibilité d’y répondre.

[37] La division générale devait décider si le prestataire avait quitté volontairement son emploiNote de bas de page 26. Elle devait aussi décider s’il était fondé à démissionner et s’il y avait d’autres solutions raisonnables compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 27.

[38] La division générale a établi que le prestataire avait quitté volontairement son emploi le 10 septembre 2018. Aucune des deux parties ne l’a contestéNote de bas de page 28.

[39] Par la suite, la division générale a décidé que le prestataire avait fait le choix personnel de quitter son emploi, mais qu’il n’était pas fondé à le faireNote de bas de page 29. La division générale a établi que quitter son emploi n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas.

[40] Selon la division générale, les solutions raisonnables qui s’offraient au prestataire auraient pu être d’obtenir un congé pour prendre soin de lui, de demander à son employeur d’autres types de tâches ou de chercher un autre emploi plus approprié avant de démissionnerNote de bas de page 30.

[41] Le prestataire n’explique pas vraiment en quoi la procédure de la division générale n’était pas équitable. Ses arguments semblent plutôt montrer qu’il n’est pas d’accord avec le résultat de l’affaire.

[42] Je reconnais que le prestataire peut être insatisfait de la décision de la division générale et la trouver injuste, mais un désaccord avec le résultat ne suffit pas pour que j’intervienne.

[43] Le rôle de la division d’appel se limite à décider si la division générale a commis un type précis d’erreurNote de bas de page 31. Je ne peux pas tenir une nouvelle audience et soupeser de nouveau la preuve afin d’arriver à un résultat différent pour le prestataireNote de bas de page 32.

[44] La division générale a examiné les faits. Elle était libre d’évaluer la preuve (y compris le certificat médical) et de conclure que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi.

[45] J’ai examiné le dossier, la décision de la division générale et l’enregistrement audio de l’audience de la division générale.

[46] Je remarque que l’audience a duré environ 18 minutes. La division générale a posé des questions pertinentes au prestataire et celui-ci a présenté ses arguments. Le prestataire a confirmé avoir reçu les documents envoyés par le Tribunal, ce qui comprenait son dossier et les arguments de la CommissionNote de bas de page 33. La division générale lui a aussi donné l’occasion de présenter un document après l’audience (c’est-à-dire un certificat médical), ce qu’il a faitNote de bas de page 34.

[47] On ne peut pas soutenir que la procédure de la division générale était inéquitable.

Il n’y a aucune autre raison d’accorder au prestataire la permission de faire appel

[48] Je n’ai trouvé aucun élément de preuve pertinent que la division générale aurait pu ignorer ou mal interpréterNote de bas de page 35. De plus, la division générale a expliqué et appliqué la loi pertinente.

Conclusion

[49] La demande à la division d’appel a été présentée à temps. Toutefois, le présent appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[50] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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