Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 469

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (618412) datée du 3 octobre 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 27 mars 2024
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 2 avril 2024
Numéro de dossier : GE-24-648

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas agi dans les 36 mois suivant le versement des prestations à l’appelante.

[3] La Commission n’a pas non plus démontré qu’il était raisonnable de conclure que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[4] Cela signifie que la Commission ne peut pas prolonger le délai de réexamen de la demande de l’appelante à 72 mois.

[5] Cela signifie également que l’appelante n’a pas à rembourser les prestations qu’elle a reçues.

Aperçu

[6] Il a été établi que la demande de prestations de maternité de l’assurance-emploi de l’appelante entrait en vigueur le 1er octobre 2017Note de bas de page 1.

[7] La Commission affirme qu’une enquête a révélé que pendant la période de prestations, l’appelante a travaillé du 18 mai 2018 au 27 juillet 2018, alors qu’elle recevait des prestationsNote de bas de page 2.

[8] Le 10 décembre 2021, la Commission a envoyé à l’appelante une lettre lui demandant de préciser pourquoi elle n’avait déclaré aucune rémunération provenant de cet emploi. Le 7 janvier 2022, l’appelante a répondu à la lettreNote de bas de page 3.

[9] Le 8 août 2023, la Commission a informé l’appelante qu’elle croyait que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse relativement à sa demande de prestations du 1er octobre 2017, ce qui signifie qu’elle avait le pouvoir de réexaminer sa demande dans un délai de 72 mois, plutôt que dans un délai de 36 moisNote de bas de page 4.

[10] En même temps, la Commission a également informé l’appelante qu’elle avait rendu deux décisions relativement à sa demande de prestations du 1er octobre 2017.

[11] Premièrement, la Commission a décidé que l’argent que l’appelante a reçu de son emploi du 18 mai 2018 au 27 juillet 2018 était une rémunération et qu’il devait être réparti en tant que telleNote de bas de page 5.

[12] Deuxièmement, la Commission a décidé que l’appelante avait sciemment fait six déclarations fausses et trompeuses, et lui a imposé une pénalité non pécuniaireNote de bas de page 6.

[13] L’appelante affirme qu’elle n’avait pas l’intention de faire quoi que ce soit de mal. À l’époque, elle était dans une relation abusive et n’a pas vu l’argent provenant de son emploi ou de l’assurance-emploi parce qu’on le lui avait volé. Elle pensait également que son employeur avait automatiquement déclaré sa rémunération et ne s’était rendu compte qu’elle devait la déclarer elle-même qu’après avoir cessé de travailler. Elle a ensuite tenté de déclarer cette rémunération par l’entremise du programme Ontario au travail en septembre ou en octobre 2018Note de bas de page 7.

Questions en litige

[14] La Commission peut-elle réexaminer la demande de l’appelante?

[15] Dans l’affirmative, la Commission a-t-elle agi judiciairement lorsqu’elle a réexaminé la demande de l’appelante?

[16] La Commission a-t-elle agi judiciairement lorsqu’elle a décidé d’imposer une pénalité à l’appelante?

[17] L’argent que l’appelante a reçu constitue-t-il une rémunération? Dans l’affirmative, la Commission a-t-elle correctement réparti la rémunération?

Analyse

La Commission peut-elle réexaminer la demande de l’appelante?

[18] Non.

[19] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la Commission peut réexaminer une demande de prestations pour quelque raison que ce soit dans les 36 mois suivant le versement des prestationsNote de bas de page 8.

[20] Cependant, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit également que, si la Commission veut réexaminer une demande après l’expiration du délai de 36 mois, elle peut le faire jusqu’à 72 mois après le versement des prestations, mais seulement si elle estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demandeNote de bas de page 9.

[21] La Commission affirme que l’appelante n’a déclaré aucune rémunération pour son emploi du 18 mai 2018 au 27 juillet 2018. C’est la partie de la demande de l’appelante que la Commission a décidé de réexaminer.

[22] Par conséquent, je conclus que le délai de 36 mois de la Commission pour réviser la demande de l’appelante pour quelque raison que ce soit a commencé le 27 juillet 2018 et expiré le 27 juillet 2021.

[23] Cependant, la Commission soutient qu’elle peut réexamienr la demande de l’appelante parce qu’elle estime que l’appelante a fait une déclaration fausse et trompeuse, de sorte qu’elle avait jusqu’à 72 mois pour réexaminer sa demandeNote de bas de page 10.

[24] J’estime que la Commission soulève trois points pour expliquer pourquoi elle peut prolonger le délai à 72 mois. Les voici :

  • L’appelante n’a pas déclaré sa rémunération à la Commission.
  • L’appelante a accepté une déclaration d’exemption selon laquelle elle devait informer la Commission si elle travaillait ou recevait de l’argent.
  • La réponse de l’appelante à la lettre du 10 décembre 2021 de la Commission montre qu’elle a fait des déclarations fausses ou trompeuses.

[25] J’examinerai un par un les arguments de la Commission dans la présente décision.

Défaut de déclarer la rémunération

[26] La Commission a affirmé dans sa lettre de décision initiale envoyée à l’appelante qu’elle pensait avoir fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse parce qu’elle [traduction] « n’a pas déclaré correctement sa rémunérationNote de bas de page 11 ».

[27] Je note que les deux parties conviennent que l’appelante n’a soumis aucune déclaration à la Commission dans le cadre de sa demande du 1er octobre 2017. Cela s’explique par le fait qu’elle avait été exemptée de soumettre des déclarations après avoir accepté une déclaration d’exemption relativement à sa demande de prestations, qui était datée du 23 octobre 2017Note de bas de page 12.

[28] Une décision du juge-arbitre du Canada sur les prestations (CUB), le prédécesseur du Tribunal, indique que, si une partie appelante est exemptée de soumettre des déclarations périodiques pour recevoir des prestations parentales, « on ne saurait lui reprocher des déclarations fausses ou trompeusesNote de bas de page 13 ».

[29] Je ne suis pas lié par les autres décisions CUB. Cela signifie que je n’ai pas à les suivre automatiquement, mais je peux choisir de le faire si je suis d’accord avec leurs conclusions.

[30] Dans la présente affaire, je suis d’accord avec la décision CUB. À mon avis, il est clair qu’une partie appelante ne peut pas être considérée comme ayant fait une déclaration fausse ou trompeuse si elle n’a soumis aucune déclaration dans le cadre de sa demande. De plus, je conclus que ce raisonnement est convaincant et s’applique à la situation de l’appelante, puisqu’elle n’a pas non plus présenté de déclarations dans le cadre de sa demande.

[31] J’accorde donc une grande importance à la décision CUB dans la présente décision.

[32] Pour cette raison, je juge que l’appelante ne peut être considérée comme ayant fait des déclarations ou des affirmations fausses ou trompeuses en omettant de déclarer correctement sa rémunération, comme l’affirme la Commission. Elle n’a soumis aucune déclaration dans le cadre de sa demande; on ne peut pas lui reprocher d’avoir fait des déclarations ou affirmations fausses ou trompeuses si elle n’a jamais fait de déclarations.

[33] De plus, je reconnais que l’appelante n’a pas communiqué avec la Commission pour l’informer qu’elle travaillait à l’époque. Aucune des parties ne conteste ce fait.

[34] Cependant, je conclus que le silence de l’appelante ne signifie pas non plus qu’elle a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[35] Je note que la Loi sur l’assurance-emploi précise que la Commission dispose de 72 mois pour réexaminer une demande si elle estime qu’une « déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demande de prestationsNote de bas de page 14 ».

[36] Compte tenu de ce que prévoit la Loi sur l’assurance-emploi, j’estime que la Commission peut seulement prolonger le délai de réexamen d’une demande de 36 mois à 72 mois si elle estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite, et non pour toute autre raison, comme le défaut de fournir des renseignements.

[37] À mon avis, si le législateur avait voulu que la Commission ait un plus grand pouvoir à l’égard de la prolongation du délai de réexamen d’une demande de 36 mois à 72 mois, il aurait utilisé une formulation différente dans la Loi sur l’assurance-emploi. Plus précisément, il aurait indiqué d’autres façons pour la Commission de le faire, mais compte tenu de ce que prévoit la Loi sur l’assurance-emploi, je ne peux pas conclure que le législateur avait l’intention de définir ainsi le processus.

[38] Par conséquent, je conclus que le fait que l’appelante n’ait présenté aucune déclaration à la Commission pendant qu’elle travaillait et qu’elle recevait des prestations n’est pas non plus une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse. Elle n’a aucunement communiqué avec la Commission à ce moment-là, ce qui signifie qu’elle n’a fait aucune déclaration ou affirmation, et encore moins une déclaration ou affirmation fausse ou inexacte.

Déclaration d’exemption

[39] La Commission affirme également, dans ses observations, que l’appelante a été exemptée de présenter des déclarations pendant qu’elle recevait des prestations, mais qu’elle n’a pas communiqué avec la Commission pour l’informer qu’elle avait travaillé et reçu un revenu du 18 mai 2018 au 27 juillet 2018, malgré le fait qu’elle a accepté de le faire comme l’exigeait la déclaration d’exemption qu’elle a acceptée lorsqu’elle a présenté sa demande de prestationsNote de bas de page 15.

[40] Je conclus que la déclaration d’exemption que l’appelante a acceptée n’est pas une preuve qu’elle a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[41] Je note que la déclaration d’exemption que l’appelante a acceptée indique expressément ce qui suitNote de bas de page 16 :

Normalement, vous devez remplir une déclaration toutes les deux semaines pour recevoir votre paiement de prestations d’assurance-emploi. Chaque déclaration complétée devient une demande de prestations pour les semaines de chômage. Cependant, vous pourriez être exempté(e) de compléter ces déclarations.

Avant de demander une exemption, vous devez accepter l’énoncé suivant :

Je comprends que je présente une demande de prestations pour chaque semaine de ma période d’admissibilité. J’accepte de ne pas être tenu(e) de remplir les déclarations pendant cette période. J’accepte également d’informer immédiatement Service Canada, si pendant que je touche des prestations :

  • je travaille;
  • je reçois de l’argent; [ou]
  • il se produit tout autre événement qui pourrait avoir des répercussions sur mes prestations d’AE.

J’accepte également, à la fin de mes prestations, de communiquer avec Service Canada afin de confirmer que j’ai déclaré toute situation ou toute rémunération ayant pour effet de réduire ou de supprimer mes prestations. Je sais que je peux être passible d’une pénalité ou d’une poursuite si j’omets de fournir les renseignements ci-dessus.

Je suis d’accord avec les énoncés précédents et je désire être exempté(e) de remplir des déclarations.

[42] Je note que l’appelante a ensuite eu la possibilité de choisir « Oui » ou « Non » en réponse à l’énoncé ci-dessus. Elle a sélectionné « OuiNote de bas de page 17 ».

[43] Compte tenu de la preuve ci-dessus, je conclus que la déclaration d’exemption ne posait aucune question directe à l’appelante. Elle lui donnait simplement des instructions sur ce qu’elle devait faire si elle l’acceptait. Elle lui demandait ensuite si elle était d’accord ou non avec celle-ci, ce qui, à mon avis, n’est pas la même chose que de lui demander de répondre à une question de manière sincère et exacte.

[44] Selon une autre décision CUB, on ne peut pas affirmer qu’une partie appelante qui se trouvait à l’extérieur du Canada a fait une déclaration fausse ou trompeuse parce qu’on ne lui a jamais demandé si elle se trouvait à l’extérieur du Canada pendant cette période, ce qui signifie qu’elle n’a jamais faire de déclaration à cet effetNote de bas de page 18.

[45] Dans la présente affaire, je suis également d’accord avec la décision CUB. Je conclus qu’il est clair que, pour conclure qu’une partie appelante a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse, la partie appelante doit répondre à une question directe liée à sa situation d’une manière qui n’est ni véridique ni exacte. Il est également clair que, si l’on ne pose aucune question directe à une partie appelante et qu’on lui donne simplement des instructions générales qu’elle ne respecte pas par la suite, on ne peut pas affirmer qu’elle a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse sur cette base parce que son inaction ne l’a pas amené à fournir des renseignements faux ou inexacts. Je conclus que ce raisonnement est convaincant et qu’il s’applique également à la situation de l’appelante, puisque la déclaration d’exemption qu’elle a acceptée ne lui posait pas non plus de questions directes.

[46] J’accorde donc également une grande importance à cette décision CUB.

[47] Par conséquent, je conclus que l’appelante ne peut pas être considérée comme ayant fait des déclarations ou affirmations fausses ou trompeuses en acceptant la déclaration d’exemption, comme l’affirme la Commission. Elle n’a répondu à aucune question au sujet de sa demande de façon fausse ou inexacte parce qu’on ne lui a posé aucune question, de sorte qu’on ne peut pas affirmer qu’elle a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse sur cette base.

[48] Je conclus également que le moment où l’appelante a accepté la déclaration d’exemption est pertinent dans la présente décision. Comme il a été discuté ci-dessus, l’appelante a accepté la déclaration d’exemption lorsqu’elle a présenté sa demande de prestations le 23 octobre 2017Note de bas de page 19. Je conclus que plus de six mois se sont écoulés depuis qu’elle avait travaillé et reçu la rémunération en cause, tout en recevant aussi des prestations (à savoir, encore une fois, du 18 mai 2018 au 27 juillet 2018).

[49] En d’autres termes, je conclus que l’appelante n’a pas accepté la déclaration d’exemption pendant qu’elle travaillait et recevait des prestations. Cela s’est produit bien avant. Cela signifie qu’elle n’était pas dans une position où elle aurait même pu faire une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse lorsqu’elle a accepté la déclaration d’exemption parce qu’elle n’avait pas encore commencé à recevoir des prestations ou à travailler.

Réponse de l’appelante à la lettre du 10 décembre 2021 de la Commission

[50] Je reconnais que la Commission renvoie maintenant à la réponse de l’appelante à sa lettre du 10 décembre 2021 pour expliquer pourquoi elle a décidé de réexaminer sa demandeNote de bas de page 20.

[51] Je juge que, peu importe ce que l’appelante a pu dire à la Commission dans sa réponse à la lettre du 10 décembre 2021, la Commission ne peut pas l’utiliser pour prolonger le délai de révision à 72 mois.

[52] J’estime que la lettre du 10 décembre 2021 constitue un réexamen du dossier de l’appelante. La lettre demandait à l’appelante de préciser les renseignements sur sa rémunérationNote de bas de page 21. Cela montre clairement que la Commission a réexaminé le dossier de l’appelante afin de déterminer les renseignements sur son travail et sa rémunération.

[53] Le 10 décembre 2021, le délai de 36 mois dans lequel la Commission pouvait examiner la demande de l’appelante pour quelque raison que ce soit était écoulé. La partie de la période de prestations de l’appelante que la Commission a décidé de réexaminer s’est terminée le 27 juillet 2018, de sorte que le délai de 36 mois a expiré le 27 juillet 2021.

[54] Cela signifie qu’à moins qu’il soit raisonnable pour la Commission de croire que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse au plus tard le 10 décembre 2021 (le moment où la Commission a décidé de réexaminer sa demande et de lui envoyer une lettre), la Commission n’était pas autorisée à réexaminer la demande à ce moment-là.

[55] Comme je l’ai conclu ci-dessus, l’appelante n’a fait aucune déclaration ou affirmation à la Commission le 10 décembre 2021 ou avant cette date, de sorte que je conclus que la Commission n’aurait pas pu raisonnablement être d’avis qu’elle avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[56] Cela signifie que la Commission n’aurait pas pu réexaminer la demande de l’appelante le 10 décembre 2021, puisque le délai de 36 mois était expiré et qu’elle n’avait fait aucune déclaration ou affirmation, encore moins une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse, à ce moment-là.

[57] La Commission ne peut pas procéder en sens inverse. Elle ne peut pas décider de procéder à un réexamen au-delà du délai de 36 mois sans qu’une déclaration fausse ou trompeuse soit faite, obtenir des renseignements auprès de l’appelante, puis tenter d’utiliser ces renseignements pour prolonger le délai à 72 mois afin de justifier un réexamen au-delà du délai de 36 mois.

[58] Si le délai de 36 mois accordé à la Commission pour procéder à un réexamen pour quelque raison que ce soit était expiré, la Commission doit avoir des renseignements à l’appui de son avis selon lequel une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite avant de procéder au réexamen du dossier de l’appelante.

[59] Je note que la Commission a communiqué avec l’ancien employeur de l’appelante le 12 octobre 2018 pour obtenir de plus amples renseignements sur sa rémunération, et l’employeur a répondu le 21 octobre 2018, ce qui était dans le délai de 36 moisNote de bas de page 22.

[60] J’estime que l’échange entre la Commission et l’ancien employeur de l’appelante en octobre 2018 montre que la Commission faisait le réexamen du dossier de l’appelante à ce moment-là, mais cela ne permet pas à la Commission de prolonger le délai à 72 mois.

[61] Je juge que la preuve de l’ancien employeur de l’appelante ne démontre pas que l’appelante a fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse. La Commission a parlé à l’ancien employeur de l’appelante, et non à l’appelante, de sorte qu’on ne pourrait pas reprocher à l’appelante de dire quelque chose de faux ou d’inexact à la Commission à la suite de cette conversation. La Commission ne peut donc pas utiliser cette preuve pour justifier la prolongation du délai.

[62] De plus, je conclus que le fait que la Commission ait communiqué avec l’ancien employeur de l’appelante en octobre 2018 ne lui permet pas d’accorder des droits acquis à l’égard de sa lettre du 10 décembre 2021.

[63] Comme j’en ai discuté ci-dessus, le délai de 36 mois pour réexaminer le dossier de l’appelante a expiré le 27 juillet 2021. Je conclus que cela signifie que la Commission ne pouvait également plus réexaminer le dossier de l’appelante pour quelque raison que ce soit à cette même date. Cela signifie aussi que l’enquête de la Commission qui était en cours en octobre 2018 lorsqu’elle a communiqué avec l’ancien employeur de l’appelante devait également être terminée et réglée à cette date (le 27 juillet 2021). De plus, même si ce n’avait pas été le cas, la seule façon pour la Commission de continuer aurait été qu’elle estime raisonnablement que l’appelant avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[64] Cependant, étant donné que l’appelante n’avait fait aucune déclaration ou affirmation en date du 27 juillet 2021, je conclus que la Commission ne pouvait pas raisonnablement croire que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse, et que la Commission ne pouvait donc pas poursuivre son enquête en décembre 2021.

Résumé

[65] La Cour d’appel a déclaré que « le fardeau de preuve qui incombe à la Commission lorsqu’elle veut remonter plus de trois ans en arrière pour réclamer d’un prestataire le remboursement d’un trop-payé, n’est pas un fardeau négligeable. Les conséquences subies par un prestataire peuvent être considérablesNote de bas de page 23 ».

[66] Je conclus que la Commission ne s’est pas acquittée de ce fardeau de preuve.

[67] Étant donné que l’appelante n’a fait aucune déclaration ou affirmation, encore moins une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse, je conclus que la Commission n’a pas démontré qu’il était raisonnable de conclure que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[68] Cela signifie que la Commission ne dispose pas d’un délai de 72 mois pour réexaminer la demande de prestations de l’appelante.

[69] De plus, pour cette raison, je ne peux pas examiner les autres questions en litige dans le présent appel.

Conclusion

[70] L’appel est accueilli.

[71] La Commission de l’assurance-emploi du Canada n’a pas agi dans les 36 mois suivant le versement des prestations à l’appelante.

[72] La Commission n’a pas non plus démontré qu’il était raisonnable de conclure que l’appelante avait fait une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse.

[73] Cela signifie que la Commission ne peut pas prolonger le délai de réexamen de la demande de l’appelante à 72 mois.

[74] Cela signifie également que l’appelante n’a pas à rembourser les prestations qu’elle a reçues. Il n’y a aucun trop-payé.

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