Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 515

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire
appel

Partie demanderesse : B. R.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 2 avril 2024
(GE-24-435)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 9 mai 2024
Numéro de dossier : AD-24-257

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. L’appel ne sera pas instruit.

Aperçu

[2] B. R. est le prestataire. Je l’appelle le prestataire parce que la présente demande concerne sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[3] Le prestataire et son épouse ont eu un bébé le 18 novembre 2021. Son épouse a demandé des prestations parentales de l’assurance-emploi. Elle a annulé le délai de carence, a choisi les prestations prolongées et a reçu 61 semaines de prestations. Le prestataire a demandé des prestations parentales le 4 février 2022. Le prestataire a demandé cinq semaines de prestations standards et les a reçues.

[4] En octobre 2023, la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a examiné sa demande et a décidé que le prestataire aurait dû observer un délai de carence d’une semaine et recevoir les prestations prolongées. La Commission a déclaré un trop-payé de 1 275 $.

[5] Le prestataire n’était pas d’accord et a demandé à la Commission de réviser sa décision, mais celle-ci n’a pas changé d’avis. Lorsque le prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, celle-ci a rejeté son appel. Le prestataire demande maintenant à la division d’appel la permission de faire appel.

[6] Je refuse la permission de faire appel. Le prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a commis une erreur dont je peux tenir compte.

Questions en litige

[7] Voici les questions en litige dans la présente affaire :

  1. a) Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur d’équité procédurale en faisant l’une des choses suivantes?
    1. i. Elle n’a pas tenu compte du trouble de lecture du prestataire.
    2. ii. Elle n’a pas obtenu et fourni l’enregistrement d’une conversation téléphonique que le prestataire a eue avec un employé du gouvernement.
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit dans la façon dont elle a interprété le partage des prestations parentales?
  3. c) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante en ignorant ou en interprétant mal le témoignage du prestataire concernant ce qu’un employé du gouvernement lui avait dit?

Je ne donne pas au prestataire la permission de faire appel

Principes généraux

[8] Pour que j’accorde au prestataire la permission de faire appel, ses motifs doivent correspondre aux « moyens d’appel » possibles. Les moyens d’appel sont les types d’erreurs dont je peux tenir compte.

[9] Je peux examiner seulement les erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou bien, elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.Note de bas de page 1

[10] Pour accueillir la demande de permission de faire appel et permettre au processus d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Les tribunaux ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendable ».Note de bas de page 2

Erreur d’équité procédurale

Mesures d’adaptation

[11] Le prestataire a soutenu que la procédure de la division générale était injuste en raison du volume de documents et de la nature longue et complexe des textes à lire. Le prestataire dit avoir de la difficulté avec de longs documents, il se pourrait d’ailleurs qu’il soit dyslexique.

[12] Pour autant que je puisse en juger, c’est la première fois que le prestataire soulève cette préoccupation. Si le prestataire croyait être incapable de comprendre les documents, il aurait fallu soulever la question à la division générale pour que celle-ci puisse envisager des mesures d’adaptation.Note de bas de page 3

[13] On ne peut pas soutenir que la division générale a agi injustement en suivant ses procédures habituelles concernant l’audience et la communication de documents. Le prestataire n’a pas demandé les mesures d’adaptation qui seraient maintenant nécessaires. Il n’était pas évident que le prestataire en avait besoin.

[14] Les dossiers du Tribunal montrent qu’on a envoyé des documents par courriel au prestataire le 2 février 2024, de sorte que le prestataire avait de sept à huit semaines pour examiner les documents avant l’audience. Je remarque également que le prestataire a fait preuve de capacité de communication efficace par écrit. Sa correspondance et ses arguments au Tribunal sont rédigés avec compétence et le prestataire a apposé son titre professionnel de géoscientifique à côté de sa signature.

Enregistrement

[15] Le prestataire affirme que la division générale aurait dû fournir et examiner l’enregistrement de sa conversation avec un [traduction] « employé du gouvernement ».Note de bas de page 4

[16] On ne peut pas soutenir que la division générale a agi injustement en omettant de fournir l’enregistrement.

[17] La division générale doit trancher les appels en fonction des éléments portés à sa connaissance. Le prestataire avait soutenu dans sa demande de révision que le « gouvernement » l’avait convaincu de prendre un congé de paternité, mais le dossier de révision de la Commission ne contenait ni ne mentionnait aucun enregistrement d’une conversation particulière avec un agent de la Commission. Autrement dit, l’enregistrement ne faisait pas partie du dossier de la division générale. Par conséquent, la division générale n’était pas en mesure de divulguer un enregistrement au prestataire.

[18] Il appartient à la partie prestataire de présenter lors de son appel les éléments de preuve dont elle estime avoir besoin.Note de bas de page 5 La division générale n’a pas l’obligation légale d’enquêter, bien qu’elle ait le pouvoir discrétionnaire de demander des éléments de preuve à la Commission.Note de bas de page 6

[19] En l’espèce, la division générale n’avait aucune raison de demander à la Commission de chercher un enregistrement de l’appel. D’ailleurs, le prestataire n’en a jamais fait la demande. En fait, ce n’est qu’au moment de présenter sa demande de permission de faire appel que le prestataire a laissé entendre que l’enregistrement (en supposant qu’il existe un tel enregistrement) était requis pour son appel devant la division générale.

[20] De plus, le prestataire n’a pas retenu les coordonnées du fonctionnaire (son nom, son poste ou son bureau). Même si la Commission ou Service Canada ou un autre organisme gouvernemental a consigné la conversation – rien ne laisse croire que c’est le cas – il est douteux que la Commission aurait pu la retrouver à partir des renseignements fournis par le prestataire.

[21] Finalement, il est peu probable qu’un tel enregistrement aurait eu une incidence importante. Le prestataire a déclaré ce que l’employé du gouvernement lui a dit, et la division générale semble avoir accepté sa preuve.Note de bas de page 7

Erreur de droit

[22] Le prestataire a soutenu que la division générale avait mal interprété la loi sur les prestations parentales lorsqu’elle a dit que le choix de son épouse le liait.

[23] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit. La loi précise clairement que le choix du premier parent de demander des prestations parentales lie l’autre parent.

[24] L’article 23(1, 1) de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que les prestataires de prestations parentales doivent choisir entre les prestations standards et les prestations prolongées. L’article 23(1, 2) prévoit que le choix est irrévocable dès que des prestations sont versées. Une série de décisions de la Cour d’appel fédérale ont confirmé que la règle interdisant la révocation d’un choix est absolue. Cette conclusion s’applique également lorsque la partie prestataire a fondé son choix sur des renseignements trompeurs fournis par la Commission.Note de bas de page 8

[25] Par conséquent, la loi prévoit que le premier parent doit choisir le type de prestations parentales et que son choix ne peut pas être révoqué.

[26] L’article 23(1, 3) précise clairement que le choix du premier parent (qui ne peut être modifié) lie l’autre parent si celui-ci demande des prestations parentales pour le même enfant.

[27] Soit dit en passant, je crois que le prestataire a compris que les pères ont droit à cinq semaines de congé de paternité. Bien que ce ne soit pas précisé exactement ainsi dans la loi.

[28] La loi prévoit que l’un ou l’autre des parents peut demander jusqu’à 35 semaines de prestations standards. Toutefois, si les deux parents présentent une demande, ils peuvent recevoir ensemble 40 semaines de prestations. (Cela signifie que le deuxième parent qui demande des prestations standards peut obtenir cinq semaines supplémentaires si le premier parent demande les 35 semaines complètes.)

[29] Le premier parent qui demande des prestations parentales prolongées, comme l’a fait l’épouse du prestataire, a droit à 61 semaines de prestations parentales prolongées. Si les deux parents demandent des prestations parentales, ils peuvent demander jusqu’à 69 semaines de prestations prolongées ensemble.Note de bas de page 9

Erreur de fait

[30] Le prestataire a soutenu que la division générale n’avait pas tenu compte adéquatement de son témoignage sur ce qu’un fonctionnaire du gouvernement lui avait dit.

[31] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait en omettant de tenir compte du témoignage du prestataire.

[32] Premièrement, il ne semble pas que la division générale ait ignoré ou mal compris le témoignage du prestataire. Elle a résumé son témoignage selon lequel on lui a dit qu’il était possible de prendre cinq semaines dans son cas, mais sans lui dire qu’il y avait une différence entre les prestations standards et les prestations prolongées ni que le choix de son épouse le liait. La division générale a compris que le prestataire croyait que la Commission aurait dû lui donner de meilleurs renseignements au moment de présenter sa demande.Note de bas de page 10

[33] Deuxièmement, même si la division générale n’a pas précisé qu’on avait dit au prestataire qu’il avait droit aux prestations parentales standards, elle a en fait accepté la preuve selon laquelle il avait été induit en erreur.

[34] Il importe surtout de souligner que la division générale commet une erreur de fait importante seulement lorsqu’elle fonde sa décision sur une conclusion de fait qui néglige ou interprète mal des éléments de preuve pertinents, ou sur une conclusion qui ne découle pas rationnellement de la preuve.Note de bas de page 11

[35] Même si la division générale avait conclu qu’aucun fonctionnaire du gouvernement n’avait donné au prestataire des renseignements inexacts ou trompeurs au moment où le prestataire a présenté sa demande de prestations, sa décision n’aurait pas été fondée sur cette conclusion.

[36] La décision de la division générale était fondée sur la loi. Peu importe ce que la Commission ou un fonctionnaire du gouvernement a dit au prestataire, il pouvait seulement recevoir les prestations autorisées par la loi. Le prestataire ne pouvait pas recevoir les prestations standards parce que son épouse avait choisi les prestations prolongées et avait déjà reçu des versements. Comme son épouse recevait les prestations prolongées, le prestataire était lié par ce choix. De plus, le prestataire ne pouvait pas reporter le délai de carence d’une semaine, parce que son épouse avait déjà reporté son délai de carence.Note de bas de page 12

[37] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[38] Je refuse la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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