Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 524

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (637327) datée du
18 janvier 2024 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Marc St-Jules
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 8 mars 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 2 avril 2024
Numéro de dossier : GE-24-462

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il est disponible pour travailler. Par conséquent, il n’est pas inadmissible [sic] au bénéfice des prestations.

Aperçu

[3] Le présent appel porte sur la disponibilité à travailler de l’appelant.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que l’appelant est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 8 janvier 2024, parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Une partie prestataire doit être disponible pour travailler pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’une partie prestataire doit être à la recherche d’un emploi.

[5] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il est disponible pour travailler. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est disponible pour travailler.

[6] La Commission affirme que l’appelant n’est pas disponible parce qu’il est inscrit à un programme à temps plein. L’appelant ne remplit pas les exigences de disponibilité qui sont en place pour toutes les personnes qui souhaitent recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi.

[7] L’appelant n’est pas d’accord et affirme que le programme auquel il s’est inscrit ne peut plus être accepté comme cours approuvé. Seuls les cours d’une durée maximale de 12 mois peuvent désormais être approuvés. Le cours de l’appelant est de 16 mois et ne peut pas être approuvé.

[8] L’appelant affirme qu’en raison de son âge, il a été extrêmement difficile de trouver du travail. Il a essayé pendant plusieurs années d’obtenir un emploi à temps plein qui lui permettrait de subvenir à ses besoins.

[9] Il n’a cependant pas réussi à trouver du travail et soutient que ce cours est la meilleure façon pour lui de trouver un emploi durable.

Question en litige

[10] L’appelant est-il disponible pour travailler?

Analyse

[11] Deux articles de loi différents exigent qu’une partie prestataire démontre sa disponibilité pour le travail. La Commission a décidé que l’appelant était inadmissible selon ces deux articles. Il doit donc remplir les critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[12] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une personne doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi énonce des critères qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnables »Note de bas de page 2. Je vais examiner ces critères ci-dessous.

[13] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une personne doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 3. La jurisprudence énonce trois choses qu’une partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4. Je vais les examiner ci-dessous.

[14] La Commission a décidé que l’appelant était inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il n’est pas disponible pour travailler selon ces deux articles de loi.

[15] Je vais maintenant examiner moi-même ces deux articles pour déterminer si l’appelant est disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[16] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de l’appelant sont habituelles et raisonnablesNote de bas de page 5. Je dois vérifier si ses démarches sont soutenues et si elles visent à trouver un emploi convenable. Autrement dit, l’appelant doit avoir continué de chercher un emploi convenable.

[17] Je dois aussi tenir compte des démarches de l’appelant pour trouver un emploi. Le Règlement dresse la liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. En voici quelques-unesNote de bas de page 6 :

  • rédiger un curriculum vitae ou une lettre de présentation;
  • s’inscrire à des outils de recherche d’emploi ou à des banques d’emplois ou à des agences de placement en ligne;
  • faire du réseautage;
  • communiquer avec des employeurs potentiels;
  • postuler pour des emplois.

[18] J’ai examiné la preuve au dossier d’appel. La Commission ne semble pas avoir demandé à l’appelant de prouver qu’il avait fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[19] Je juge convaincante la décision de la division d’appel sur l’inadmissibilité au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 7 Selon cette décision, la Commission peut demander à une partie prestataire de prouver qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. Elle peut déclarer une partie prestataire inadmissible si elle ne satisfait pas à cette demande. Cependant, elle doit demander à la partie prestataire de fournir cette preuve et lui dire quel type de preuve répondra à ses exigences.

[20] Je n’ai vu aucune preuve démontrant que la Commission avait demandé à l’appelant de prouver que ses démarches étaient habituelles et raisonnables. La Commission n’a présenté aucune observation sur la façon dont l’appelant n’a pas prouvé qu’il ne faisait pas [sic] des démarches habituelles et raisonnables. La Commission a seulement résumé ce que dit la loi au sujet de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi et de l’article 9.001 du Règlement sur l’assurance-emploi.

[21] Je conclus que la Commission n’a pas déclaré l’appelant inadmissible au titre de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploi. Cela est fondé sur l’absence de preuve. Par conséquent, je n’ai pas besoin de tenir compte de cette partie de la loi pour rendre ma décision sur cette question.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[22] La jurisprudence établit trois éléments que je dois prendre en considération pour décider si l’appelant est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable. L’appelant doit prouver les trois choses suivantesNote de bas de page 8 :

  1. a) Il veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert.
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Il n’a pas établi de conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire excessivement) ses chances de retourner travailler.

[23] Ces trois éléments sont communément appelés les « éléments de la décision Faucher » après l’affaire dans laquelle ils ont été énoncés pour la première fois par la cour. Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois examiner l’attitude et la conduite de l’appelantNote de bas de page 9.

[24] La Cour a déclaré que la disponibilité est établie pour chaque jour ouvrable d’une période de prestationsNote de bas de page 10.

[25] La Cour a également déclaré que les personnes qui sont aux études à temps plein sont présumées ne pas être disponibles pour travaillerNote de bas de page 11. C’est ce qu’on appelle communément la présomption de non-disponibilité. Je vais commencer par cette analyse.

Présomption de non-disponibilité

[26] La présomption selon laquelle les personnes qui étudient ne sont pas disponibles pour travailler s’applique seulement aux personnes qui étudient à temps plein. Je juge que l’appelant est inscrit à un cours à temps plein. C’est ce qu’il a déclaré. Cela concorde également avec ce qu’il a dit à la Commission. Je n’ai aucun élément de preuve devant moi qui laisse entendre qu’il s’agit d’un cours à temps partiel. Cette présomption s’applique donc à l’appelant.

[27] La présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler peut être réfutée. Si la présomption était réfutée, elle ne s’appliquerait pas.

[28] L’appelant peut réfuter la présomption de deux façons. Il peut démontrer qu’il a déjà travaillé à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas de page 12. Il peut aussi démontrer qu’il y a des circonstances exceptionnelles dans son cas.

[29] L’appelant n’a jamais travaillé pendant qu’il était aux études. Cette information provient du questionnaire rempli pour le cours de formation que l’appelant a présentéNote de bas de page 13. Je n’ai aucune raison de douter de ce formulaire rempli par l’appelant. Rien ne prouve le contraire. De plus, il n’a rien dit à la Commission ni à l’audience au sujet du fait qu’il aurait déjà travaillé à temps plein pendant ses études. Je conclus que l’appelant ne peut pas réfuter la présomption fondée sur ses antécédents de travail pendant qu’il était aux études à temps plein.

[30] Je conclus également que l’appelant n’a pas démontré qu’il existait des circonstances exceptionnelles qui réfuteraient la présomption. À l’audience, il n’a rien dit qui me porte à croire qu’il existe des circonstances exceptionnelles.

[31] La Cour d’appel fédérale n’a pas encore précisé en quoi la présomption et les articles de loi traitant de la disponibilité sont liés. Comme ce n’est pas clair, je vais continuer à trancher les articles de loi qui traitent de la disponibilité, même si j’ai déjà conclu que l’appelant est présumé ne pas être disponible.

[32] Autrement dit, même si une personne réfute la présomption, elle doit quand même prouver qu’elle est disponible. Cela nécessite une analyse des éléments de la décision Faucher.

Vouloir retourner travailler

[33] L’appelant a démontré qu’il souhaite retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui est offert.

[34] L’appelant soutient qu’il est aux études pour lui permettre d’obtenir un emploi convenable. Il aimerait poursuivre le cours et espérait travailler la fin de semaine pour son ancien employeur.

[35] L’appelant affirme qu’il arrêterait son cours s’il se voyait offrir un emploi convenable. Il a déclaré qu’un emploi convenable serait un emploi de 20 $ par heure ou plus. Il faudrait que ce soit un emploi qui n’est pas trop exigeant sur le plan physique.

[36] J’accorde beaucoup d’importance au témoignage de l’appelant. Je le crois lorsqu’il dit que le cours est une façon pour lui d’obtenir un emploi convenable. Je crois qu’il souhaite trouver un emploi convenable.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[37] L’appelant n’a pas fait assez de démarches pour trouver un emploi convenable.

[38] J’ai tenu compte de la liste d’activités de recherche d’emploi donnée ci-dessus pour décider de ce deuxième élément. Pour celui-ci, cette liste est fournie à titre de référence seulementNote de bas de page 14.

[39] Les démarches de l’appelant pour trouver un nouvel emploi comprenaient l’affichage de son curriculum vitae sur des sites Web de recherche d’emploi.

[40] L’appelant s’était initialement fait promettre un emploi qui commencerait au début de la saison de golf au printemps 2024. L’entente prévoyait qu’il travaillerait les fins de semaine. Toutefois, l’appelant a dit que cela n’a pas fonctionné. Lorsqu’il en a été avisé, l’appelant a déclaré qu’il a postulé pour des emplois à trois terrains de golf différents.

[41] Selon la jurisprudence, le facteur déterminant dans l’évaluation de la disponibilité est une recherche d’emploi active, sérieuse, continue et intensive, démontrée par un registre vérifiable des demandes d’emploiNote de bas de page 15.

[42] J’estime que les démarches de l’appelant ne sont pas suffisantes pour répondre aux exigences de ce deuxième élément. L’appelant affirme qu’il abandonnerait son cours si un emploi convenable lui était offert. Il ajoute qu’il a affiché son curriculum vitae sur IndeedNote de bas de page 16.

[43] Il y a des affaires judiciaires où une personne doit effectuer une recherche d’emploi et doit le faire même lorsque les chances de trouver un emploi sont très faibles. La Loi sur l’assurance-emploi est très claire : pour être admissible aux prestations, une partie prestataire doit établir sa disponibilité pour le travail, ce qui exige une recherche d’emploi.

[44] Même si une partie prestataire croit qu’une recherche d’emploi aurait peu de chances de succès, la Loi sur l’assurance-emploi est conçue de façon à ce que seules les personnes qui sont véritablement au chômage et qui cherchent activement du travail reçoivent des prestationsNote de bas de page 17.

[45] Je conviens qu’afficher son curriculum vitae sur des sites Web peut mener à un emploi. Toutefois, je considère que cela ne répond pas aux exigences de recherche active d’emploi établies par les tribunaux.

[46] La recherche d’emploi de l’appelant n’est pas une recherche d’emploi active, sérieuse, continue et intensive, ce qui est le seuil que les tribunaux ont déclaré nécessaire.

[47] Ces démarches ne sont pas suffisantes pour répondre aux exigences de ce deuxième élément parce qu’elles sont trop limitées pour prouver la disponibilité.

Limiter excessivement ses chances de retourner travailler

[48] L’appelant a établi des conditions personnelles qui pourraient limiter excessivement ses chances de retourner travailler.

[49] L’appelant affirme qu’il ne l’a pas fait, parce qu’il a essayé de trouver un emploi convenable et qu’il en a été incapable. Le cours qu’il suit actuellement est la meilleure façon d’obtenir un emploi convenable.

[50] La Commission affirme que l’appelant est disponible seulement la fin de semaine. Il limite excessivement ses chances de retourner travailler.

[51] En examinant ce troisième élément, j’ai tenu compte de ce que dit la loi :

  • Tenter d’adapter un horaire de travail en fonction d’un horaire d’études ne répond pas aux exigences de disponibilité prévues par la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 18.
  • Le fait d’être disponible seulement à certaines heures certains jours restreint la disponibilité et limite les chances de trouver un emploiNote de bas de page 19.

[52] Je considère que l’appelant a établi des conditions personnelles qui limiteraient ses chances de trouver du travail. Il attendait pour l’emploi à temps partiel dans un terrain de golf et il est disponible seulement la fin de semaine. Il est allé postuler pour des emplois à d’autres terrains de golf seulement quand il n’a pas obtenu l’emploi qu’il pensait avoir.

[53] Dans une décision récente intitulée Page, la Cour d’appel fédérale a déclaré que selon la jurisprudence (c’est-à-dire les décisions des tribunaux) « il n’y a pas de principe établissant l’inadmissibilité systématique de tous les étudiants à temps plein au bénéfice des prestations d’assurance-emploi s’ils sont tenus d’être présents en classe à temps plein durant les jours ouvrables, soit du lundi au vendrediNote de bas de page 20 ».

[54] Dans la décision Page, la Cour d’appel fédérale a également affirmé que conclure qu’une partie prestataire est disponible pour travailler si elle est disponible pour travailler selon son horaire de travail précédent ne constitue pas une erreur de droitNote de bas de page 21.

[55] Comment la décision Page s’applique-t-elle à l’appelant? L’appelant travaillait à temps plein pendant qu’il travaillait au terrain de golf. Il a accumulé 149 heures entre le 11 avril 2023 et le 5 novembre 2023Note de bas de page 22. Il s’agit d’environ 30 semaines, avec une moyenne d’un peu plus de 38 heures par semaine. Toutefois, l’appelant cherche maintenant un emploi à temps partiel seulement. Il se limite au travail de fin de semaine seulement en raison de son cours. J’estime que cela restreint sa disponibilité.

[56] Je conclus que l’appelant ne peut pas se limiter au travail à temps partiel seulement. L’emploi qu’il avait pour établir la période de prestations était à temps plein.

L’appelant est-il donc capable de travailler et disponible à cette fin?

[57] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je juge que l’appelant n’a pas démontré qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[58] L’appelant fait valoir qu’il a essayé pendant de nombreuses années de trouver un emploi. Il a dû fermer son entreprise de rénovation lorsqu’il s’est rendu compte qu’il ne serait pas en mesure de continuer. Depuis 2020, il est à la recherche d’un emploi. Cependant, il n’a pas été en mesure de trouver un emploi convenable lui permettant de subvenir à ses besoins.

[59] Même si je comprends les arguments de l’appelant, je ne peux pas modifier la loiNote de bas de page 23. La loi dit qu’il faut avoir une recherche d’emploi active sans restriction pour prouver sa disponibilité. La disponibilité est une exigence pour recevoir des prestations régulières.

[60] La caisse de l’assurance-emploi ne peut pas appuyer le poids économique de la décision de retourner aux étudesNote de bas de page 24.

Conclusion

[61] L’appelant n’a pas démontré qu’il est disponible pour travailler au sens de la loi. Pour cette raison, je conclus qu’il est inadmissible au bénéfice des prestations.

[62] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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