Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : YH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 566

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : Y. H.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 15 janvier 2024
(GE-22-4196)

Membre du Tribunal : Solange Losier
Date de la décision : Le 20 mai 2024
Numéro de dossier : AD-24-61

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Y. H. est le prestataire dans la présente affaire. Il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 21 juin 2022.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’une période de prestations ne pouvait pas être établie parce que le prestataire avait accumulé seulement 322 heures d’emploi assurable pendant la période de référence. Elle a précisé qu’il avait besoin de 420 heures pour établir une période de prestationsNote de bas de page 1.

[4] La division générale a rejeté l’appel du prestataireNote de bas de page 2. Elle a conclu qu’il n’avait pas démontré qu’il avait accumulé assez d’heures pour établir une période de prestationsNote de bas de page 3.

[5] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale à la division d’appelNote de bas de page 4. Il soutient que la division générale n’a pas suivi une procédure équitable et qu’elle a commis une erreur de droit, une erreur de compétence et une erreur de fait importante.

[6] Je rejette la demande de permission de faire appel parce qu’il n’y a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[7] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur révisable?

Analyse

[8] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel donne la permission de faire appelNote de bas de page 5. Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Il doit y avoir un moyen de soutenir que l’appel pourrait être accueilliNote de bas de page 6.

[9] Les moyens d’appel possibles à la division d’appel sont les suivantsNote de bas de page 7 :

  • La division générale a agi de façon injuste.
  • La division générale a outrepassé ses pouvoirs ou a refusé de les exercer.
  • La division générale a commis une erreur de droit.
  • La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.

[10] Si l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès, je dois refuser la permission de faire appelNote de bas de page 8.

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[11] Dans sa demande à la division d’appel, le prestataire soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs.

[12] Voici un résumé des arguments que le prestataire a présentés à la division d’appelNote de bas de page 9 :

  • Il est dégoûté par l’injustice et la partialité de la membre de la division générale. C’était une décision partiale.
  • La mauvaise date d’audience a été fixée. Cela l’a amené à se présenter à une audience à la dernière minute, même s’il a été informé que la prochaine date d’audience était annulée.
  • On lui a dit qu’une décision finale serait rendue dans les trois à quatre semaines suivant l’audience, mais la décision a été rendue seulement environ quatre mois et demi plus tard.
  • Enfin, la division générale n’a pas respecté le droit et les faits.

Il est impossible de soutenir que la division générale n’a pas suivi une procédure équitable

[13] Les principes de justice naturelle portent sur l’équité procédurale. Le droit à une audience équitable devant le Tribunal comprend certaines protections procédurales. Par exemple, le droit à un décideur impartial, le droit d’une partie de connaître les accusations portées contre elle et d’avoir la possibilité d’y répondre.

[14] Si la division générale ne suit pas une procédure équitable, je peux intervenirNote de bas de page 10.

[15] Une allégation de partialité est une allégation grave. Selon la loi, une telle allégation ne peut reposer sur de simples soupçons, de pures conjectures, des insinuations ou de simples impressionsNote de bas de page 11.

[16] Le critère juridique pour établir la partialité est de savoir si une personne bien renseignée, qui étudierait la question en profondeur et de façon réaliste et pratique, conclurait qu’il était plus probable qu’improbable que la ou le membre de la division générale, consciemment ou non, ne trancherait pas l’affaire de façon équitableNote de bas de page 12.

[17] J’ai examiné le dossier et écouté l’enregistrement audio de l’audience de la division générale. L’audience par téléconférence a duré environ 54 minutes et seul le prestataire y a assisté.

[18] L’enregistrement audio de l’audience de la division générale révèle ce qui suit :

  • La division générale a écouté le prestataire présenter ses arguments.
  • La division générale lui a posé des questions pertinentes au besoin.
  • La division générale a été respectueuse tout au long de l’audience.
  • La division générale a permis au prestataire de déposer des documents après l’audience pour appuyer sa causeNote de bas de page 13.

[19] Il est impossible de soutenir que la division générale a fait preuve de partialité. Une personne bien renseignée qui étudierait l’affaire de façon raisonnable et pratique et qui aurait réfléchi à l’affaire ne conclurait pas qu’il y avait plus de chances que la division générale avait un parti pris.

[20] L’allégation du prestataire semble constituer un désaccord avec l’issue de l’affaire. Toutefois, un désaccord avec l’issue ne suffit pas à conclure à une partialité et non à une erreur révisable.

[21] Le prestataire soutient également que la division générale a fixé la mauvaise date d’audience et que cela l’a amené à comparaître à la dernière minute. Il dit qu’on lui a dit à la date d’audience précédente [le 23 août 2023] que la prochaine date d’audience [le 30 août 2023] avait été annulée.

[22] Le prestataire semble faire référence à un autre dossier de la division générale (numéro de dossier du Tribunal GE-22-4195), qui devait être entendu par la division générale le 30 août 2023 avec le même membre du TribunalNote de bas de page 14. La question de droit dans ce dossier portait sur une inadmissibilité aux prestations d’assurance-emploi en raison d’une inconduite présumée.

[23] J’ai examiné la demande du prestataire à la division d’appel et il a écrit expressément qu’il porte en appel les décisions relatives aux dossiers suivants du Tribunal : GE-22-4193 (antidatation) et GE-22-4196 (heures)Note de bas de page 15.

[24] Par conséquent, les seuls appels devant la division d’appel sont les appels GE‑22-4193 et GE-22-4196 (et non GE-22-4195).

[25] Le dossier montre que le prestataire a reçu l’avis d’audience avant l’audience prévue le 23 août 2023Note de bas de page 16. Il a confirmé sa présence par écrit et il a assisté à l’audienceNote de bas de page 17.

[26] Il est donc impossible de soutenir que la division générale n’a pas suivi une procédure équitable. Le prestataire a reçu l’avis d’audience à l’avance et il n’y avait aucune confusion quant au moment où l’audience aurait lieu pour ce dossier particulier.

[27] Le prestataire soutient également qu’il s’attendait à ce que la division générale rende sa décision dans les trois à quatre semaines suivant l’audience. Le prestataire n’avait pas tort de penser cela parce que la division générale lui a dit qu’elle s’attendait à rendre sa décision dans les trois à quatre semaines suivant le 6 septembre 2023Note de bas de page 18.

[28] La division générale a rendu sa décision le 13 janvier 2024. Sa décision et le dossier ne contiennent aucune explication sur la raison pour laquelle elle n’a pas rendu sa décision dans les trois à quatre semaines.

[29] Il est impossible de soutenir que la division générale a omis de suivre une procédure équitable lorsqu’elle a rendu sa décision plus tard qu’elle ne l’avait dit. Dans certains cas, la division générale peut avoir besoin de plus de temps pour rendre sa décision selon la complexité des dossiers, le volume de dossiers ou la présence de multiples dossiers pour une seule personne. 

[30] En résumé, il est impossible de soutenir que la division générale a fait preuve de partialité ou qu’elle n’a pas suivi une procédure équitable. Le prestataire a assisté à l’audience de la division générale le 23 août 2023 et il n’y avait aucune confusion quant au moment où cette audience aurait lieu. En fait, la décision a été rendue en retard, mais il est possible que la division générale ait eu besoin de plus de temps pour rendre sa décision, d’autant plus qu’elle avait trois dossiers concernant le prestataire.

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou de compétence

[31] Une erreur de droit peut survenir lorsque la division générale n’applique pas la bonne loi ou lorsqu’elle utilise la bonne loi, mais qu’elle l’interprète ou l’applique incorrectementNote de bas de page 19.

[32] Une erreur de compétence signifie que la division générale n’a pas décidé d’une question qu’elle devait trancher, ou qu’elle a décidé d’une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancherNote de bas de page 20.

[33] Le pouvoir du Tribunal de réviser les décisions découle de la Loi sur l’assurance-emploi. Celle-ci prévoit que le Tribunal peut examiner uniquement les décisions de révision rendues par la Commission qui font l’objet d’un appel au TribunalNote de bas de page 21.

[34] Dans la présente affaire, le prestataire a fait appel de la décision de révision rendue par la Commission le 2 décembre 2022, qui disait qu’une période de prestations ne pouvait pas être établieNote de bas de page 22.

[35] Selon la loi, pour avoir droit aux prestations d’assurance-emploi, il faut avoir travaillé assez d’heures au cours d’une certaine période (période de référence)Note de bas de page 23. Le nombre d’heures dont une personne a besoin dépend du taux de chômage dans sa régionNote de bas de page 24.

[36] La division générale a énoncé le bon critère juridique à appliquer dans sa décisionNote de bas de page 25. Elle devait décider si le prestataire avait accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestations et c’est exactement ce qu’elle a fait.

[37] Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou une erreur de compétence. Elle a énoncé et appliqué la bonne loi. Elle a tranché uniquement les questions qu’elle avait le pouvoir de trancher et n’a tranché aucune question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.

Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante

[38] Il y a erreur de fait lorsque la division générale a « fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance »Note de bas de page 26.

[39] Seulement certaines erreurs de fait me permettront d’intervenir. Une erreur de fait doit être suffisamment importante pour que la division générale s’y soit fiée pour tirer une conclusion qui a eu une incidence sur l’issue de la décision.

[40] Comme je l’ai mentionné plus haut, la division générale devait décider si le prestataire avait accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour établir une période de prestationsNote de bas de page 27.

[41] J’ai examiné les principales conclusions de la division générale.

[42] La division générale a admis que la région du prestataire était Toronto et que le taux régional de chômage au moment où il a présenté sa demande était de 6,3 %Note de bas de page 28.

[43] La division générale a conclu que la période de référence de 52 semaines du prestataire s’étendait du 20 juin 2021 au 18 juin 2022Note de bas de page 29.

[44] La division générale a expliqué qu’en réponse à la pandémie de COVID-19, le gouvernement a mis en place des mesures spéciales pour aider la population canadienne à obtenir des prestations d’assurance-emploi. L’une d’elles était appelée une « condition d’entrée commune » de 420 heuresNote de bas de page 30.

[45] Par conséquent, pour toute demande d’assurance-emploi présentée entre le 26 septembre 2021 et le 24 septembre 2022, une personne devait avoir accumulé 420 heures d’emploi assurable pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[46] Le dossier montre que le prestataire a demandé des prestations d’assurance-emploi le 21 juin 2022, ce qui signifie que la condition d’entrée commune de 420 heures qui précède s’applique à luiNote de bas de page 31.

[47] La division générale a examiné si le prestataire avait accumulé des heures additionnelles d’emploi assurable chez un autre employeurNote de bas de page 32. Le prestataire a dit à la division générale qu’il travaillait à temps partiel dans un autre collège, mais seulement trois heures par semaineNote de bas de page 33.

[48] La division générale a fait remarquer que même avec les heures supplémentaires à temps partiel, il n’aurait probablement pas eu assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 34.

[49] La division générale a également souligné que le prestataire et la Commission avaient déjà discuté de l’autre emploi à temps partiel qu’il occupaitNote de bas de page 35. Toutefois, le prestataire avait refusé d’obtenir un relevé d’emploi de cet employeur, car il ne voulait pas établir une période de prestations à compter de juin 2022.

[50] Le prestataire n’a pas présenté de relevé d’emploi à la division générale pour cet emploi, alors ces heures additionnelles n’ont pas été incluses.

[51] Enfin, la division générale a décidé que le prestataire n’avait pas prouvé qu’il avait accumulé assez d’heures parce qu’il avait accumulé seulement 322 heures pendant les 52 semaines de référence, mais qu’il en avait besoin de 420Note de bas de page 36. Par conséquent, il n’a pas été possible d’établir une période de prestations.

[52] La division générale a bel et bien commis une erreur de fait dans sa décision.

[53] Plus précisément, la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a écrit dans sa décision que le prestataire avait accumulé 420 heures et qu’elle a accepté ce nombre comme étant exactNote de bas de page 37. Il s’agissait clairement d’une erreur typographique parce que si le prestataire avait accumulé 420 heures, une période de prestations aurait pu être établie. Dans un paragraphe ultérieur, la division générale a déclaré à juste titre qu’il avait besoin de 420 heures, mais qu’il en avait accumulé seulement 322Note de bas de page 38.

[54] La division générale a bel et bien commis une erreur de fait, mais c’est une erreur typographique mineure qui n’a pas eu d’incidence sur l’issue de l’affaire.

[55] Les principales conclusions de la division générale concordaient avec la preuve. Un appel à la division d’appel n’est pas une nouvelle audience. Je ne peux pas réévaluer la preuve pour en arriver à une conclusion plus favorable pour le prestataireNote de bas de page 39.

[56] Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur importante au sujet de l’un ou l’autre des faits de la présente affaire.

Conclusion

[57] J’ai examiné le dossier ainsi que la décision portée en appel et je n’ai trouvé aucun élément de preuve clé que la division générale aurait pu ignorer ou mal interpréterNote de bas de page 40.

[58] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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