Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : SD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 592

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance emploi du Canada (635496) datée du
12 décembre 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Katherine Parker
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 février 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 27 février 2024
Numéro de dossier : GE-24-264

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande initiale de prestations. Autrement dit, l’appelant a donné une explication que la loi accepte. Par conséquent, la demande initiale de l’appelant peut être traitée comme si elle avait été présentée plus tôtNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations d’assurance‑emploi le 11 octobre 2023. La demande a pris effet le 8 octobre 2023. Il demande maintenant que sa demande soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 21 mai 2023. La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a déjà refusé cette demande.

[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il avait un motif valable de ne pas avoir demandé de prestations plus tôt.

[5] La Commission affirme que l’appelant n’avait pas de motif valable parce qu’il n’a pas communiqué avec la Commission pour s’informer au sujet des prestations d’assurance‑emploi. Elle a déclaré qu’elle n’acceptait pas son affirmation selon laquelle la santé mentale l’empêchait de présenter une demande parce qu’il était en mesure de chercher un emploi et de participer à des entrevues d’emploi.

[6] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme que sa santé mentale était la raison pour laquelle il n’a pas présenté de demande. Il a dit que la honte et l’embarras de perdre son emploi ont aggravé sa santé mentale. Il a mentionné qu’il n’avait dit à personne qu’il était sans emploi. Il vivait dans l’hypocrisie en prétendant qu’il travaillait encore. Il a dit que cela lui avait causé de grandes souffrances.

Question en litige

[7] L’appelant avait-il un motif valable justifiant le retard de sa demande initiale de prestations d’assurance‑emploi?

Analyse

[8] L’appelant souhaite que sa demande initiale de prestations d’assurance‑emploi soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 21 mai 2023. C’est ce qu’on appelle antidater la demande initiale.

[9] Pour démontrer qu’il avait un motif valable, l’appelant doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 2. Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi comme une personne raisonnable et réfléchie l’aurait fait dans une situation semblable.

[10] L’appelant doit le prouver pour toute la période du retardNote de bas de page 3. Cette période s’étend de la date à laquelle il veut que sa demande initiale soit antidatée à la date à laquelle il a effectivement présenté sa demande. Par conséquent, la période de retard de l’appelant est du 21 mai 2023 au 11 octobre 2023.

[11] L’appelant doit aussi démontrer qu’il a vérifié assez rapidement s’il avait droit à des prestations et quelles obligations la loi lui imposaitNote de bas de page 4. C’est donc dire que l’appelant doit démontrer qu’il a fait de son mieux pour en apprendre davantage sur ses droits et ses responsabilités dès que possible. Si l’appelant ne l’a pas fait, il doit alors démontrer les circonstances exceptionnelles qui l’en ont empêchéNote de bas de page 5.

[12] L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant le retard.

[13] L’appelant affirme qu’il avait un motif valable justifiant le retard parce que sa situation était exceptionnelle. Il a dit qu’il était le fils aîné et qu’il a été élevé dans une famille indienne stricte. Il a dit que sa famille dépendait de lui et se tournait vers lui pour obtenir de la stabilité. Il était paralysé par l’anxiété et il ne savait pas vers qui se tourner. Il a dit que sa santé mentale était atteinte et qu’il s’est concentré sur l’obtention d’un nouvel emploi dès que possible.

[14] La Commission affirme que l’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard parce que sa santé mentale ne l’a pas empêché de chercher un emploi et de mener des entrevues d’emploi. Elle a dit qu’une personne raisonnable aurait communiqué avec la Commission pour commencer à toucher des prestations pendant qu’elle continuait à chercher un emploi.

[15] Je conclus que l’appelant a démontré qu’il avait un motif valable justifiant d’avoir tardé à présenter une demande de prestations parce que sa situation était exceptionnelle et aggravée par des problèmes de santé mentale. Il a éprouvé des problèmes de santé mentale lorsqu’il a perdu son emploi de façon inattendue, puis il a senti qu’il devait vivre dans le mensonge et prétendre qu’il travaillait toujours pour éviter de déshonorer sa famille. Il a dit que cela l’a rattrapé jusqu’à ce qu’il se confie enfin à un ancien collègue qui lui a prodigué des conseils sur la façon de procéder.

  • L’appelant est le fils aîné. Il a été élevé dans une famille indienne stricte. Il estimait qu’il lui incombait de ne pas causer de honte ou d’embarras à sa famille. Il a donc caché le fait qu’il avait perdu son emploi et qu’il était en chômage parce qu’il croyait que cela apporterait de la disgrâce.
  • L’appelant a tardé à présenter sa demande parce qu’il était certain qu’il trouverait un emploi rapidement avant que quiconque découvre qu’il a perdu cet emploi.
  • Lorsqu’il est devenu évident qu’un de ses proches découvrait son mensonge, il a demandé conseil. Il a alors appris qu’il pouvait et devrait demander des prestations d’assurance‑emploi. Il a alors agi sur-le-champ.

[16] J’ai conclu que l’appelant a témoigné de façon crédible, honnête et directe. Je crois son témoignage selon lequel sa situation était exceptionnelle et lui a causé des problèmes de santé mentale au point où il a tardé à présenter une demande de prestations d’assurance‑emploi.

Conclusion

[17] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pendant toute la période du retard. Par conséquent, ses demandes peuvent être traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt.

[18] L’appel est accueilli.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.