Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 662

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. F.
Représentant : K. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (467335) datée du 4 avril 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Teresa M. Day
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 10 juin 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant
Date de la décision : Le 12 juin 2024
Numéro de dossier : GE-24-456

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Décision

[1] L’appel est accueilli. 

[2] L’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler à compter du 27 décembre 2021. Cela signifie que l’inadmissibilité pour une période indéterminée imposée à sa demande doit être annulée.

[3] Cela signifie également que l’appelant n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les trois congés de l’année scolaire 2021-2022, soit les vacances d’hiver de décembre 2021, les vacances de mars 2022 et le congé d’été de 2022. 

Aperçu

[4] L’appelant travaille à temps partiel comme chauffeur d’autobus. Il travaillait pour X (X)Note de bas de page 1, une entreprise qui fournit des services d’autobus scolaire et de transport local.

[5] Il a conduit selon son itinéraire scolaire régulier jusqu’au 16 décembre 2021, puis il a été mis à pied pendant deux semaines pendant les vacances d’hiver. Il est retourné au travail le 3 janvier 2022 et a continué à travailler jusqu’au 14 mars 2022, puis il a été mis à pied pendant une semaine pendant le congé de mars. Il est retourné au travail le 21 mars 2022 et a continué à travailler jusqu’au 30 juin 2022, puis il a été mis à pied pendant le congé d’été. Il a repris son travail le 7 septembre 2022.

[6] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi et a établi une période de prestations commençant le 26 décembre 2021Note de bas de page 2. 

[7] Cependant, la Commission a décidé qu’il ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi sur cette demande parce qu’il n’était pas disposé à quitter son emploi à temps partiel pour accepter un poste à temps plein et, par conséquent, qu’il n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler. Elle a imposé une inadmissibilité d’une durée indéterminée à sa demande à compter du 27 décembre 2021Note de bas de page 3. 

[8] Par conséquent, l’appelant était inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les 52 semaines de sa période de prestationsNote de bas de page 4 et ne pouvait pas recevoir de prestations pendant les périodes où il a été mis à pied, soit durant les trois congés de l’année scolaire 2021-2022Note de bas de page 5.

[9] L’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision. Il a dit qu’il ne cherchait pas un emploi à temps plein parce qu’il avait 68 ans et qu’il ne voulait pas d’emploi à temps plein.

[10] La Commission a maintenu l’inadmissibilité indéterminée qu’elle avait imposée sur sa demande. Elle a précisé qu’il n’avait pas démontré qu’il était disponible et [traduction] « qu’il cherchait activement un emploi sans restriction indue »Note de bas de page 6. L’appelant a porté cette décision en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[11] La division générale a décidé que l’appelant n’avait pas prouvé qu’il était disponible pour travailler et elle a maintenu l’inadmissibilité indéterminée imposée sur sa demande. L’appelant a porté cette décision en appel à la division d’appel du Tribunal.   

[12] La division d’appel a décidé que la division générale avait commis des erreurs et a renvoyé l’appel à un autre membre de la division générale pour une nouvelle audience. La division d’appel a ordonné que l’appelant et la Commission aient tous deux la possibilité d’examiner si l’inadmissibilité pour une période indéterminée couvrait les trois congés de l’année scolaire 2021-2022 ou si l’appelant pouvait prouver qu’il était disponible pour travailler pendant les trois congés. S’il pouvait prouver sa disponibilité, il aurait droit à des prestations d’assurance-emploi pendant les trois congés.

[13] L’appel m’a été assigné. J’ai donné aux parties l’occasion de déposer des renseignements sur les trois congés de l’année scolaire 2021-2022Note de bas de page 7. Aucune des parties n’a déposé des renseignements supplémentaires. Ma décision découle de la nouvelle audience qui a lieu le 10 juin 2024.   

Questions en litige

[14] La Commission a imposé une inadmissibilité indéterminée à la demande de l’appelant à compter du 27 décembre 2021. Cependant, il demande seulement des prestations d’assurance-emploi pour les trois périodes où il a été mis à pied au cours de l’année scolaire 2021-2022, soit pendant les vacances d’hiver de décembre 2021, le congé de mars 2022 et le congé d’été 2022. Pour le reste de sa période de prestations, il travaillait ses heures habituelles et ne demande pas de prestations. 

[15] Cela signifie que je dois décider s’il a prouvé qu’il était disponible pour travailler et admissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les périodes suivantes :

  1. a) les vacances d’hiver de décembre 2021;
  2. b) le congé de mars 2022;
  3. c) le congé d’été 2022.

Analyse

[16] Pour être considéré comme disponible pour travailler aux fins des prestations régulières d’assurance-emploi, l’appelant doit démontrer qu’il est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 8.

[17] Il ne fait aucun doute que l’appelant était capable de travailler pendant cette périodeNote de bas de page 9. Je vais donc passer directement à l’analyse de la disponibilité pour évaluer son admissibilité aux prestations régulières d’assurance-emploi pour chacun des trois congés de l’année scolaire 2021-2022.

[18] La Cour d’appel fédérale a déclaré qu’on doit établir la disponibilité en analysant trois facteurs :

  1. a) le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert;
  2. b) l’expression de ce désir par des efforts pour trouver un emploi convenable;
  3. c) le non-établissement de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 10.

Ces trois éléments sont communément appelés les « facteurs de Faucher », d’après l’affaire dans laquelle la Cour les a énoncés pour la première fois.

[19] Lorsque j’examine chacun de ces éléments, je dois examiner l’attitude et la conduite de l’appelantNote de bas de page 11.

Question en litige no 1 : L’appelant était-il disponible pour travailler pendant les vacances d’hiver de décembre 2021?

Réponse courte :

[20] Oui, il l’était. L’appelant a satisfait aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour démontrer sa disponibilité au cours de cette période.

La preuve :

[21] En ce qui concerne son désir de retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Il travaille comme chauffeur d’autobus scolaire depuis 10 ans et [traduction] « n’a jamais manqué une journée de travail ».
  • Il cesse de travailler seulement lorsqu’il est mis à pied pendant les congés scolaires annuels d’hiver, du mois de mars et d’été. 
  • Il connaît toujours la date de son retour au travail lorsqu’il est mis à pied et se présente toujours au travail dès que les enfants retournent à l’école après chaque congé. 
  • Il a besoin de cet emploi à temps partiel parce que son revenu de retraite provenant du RPC et de la SV n’est pas suffisant pour couvrir ses dépenses. Son épouse a également un emploi à temps partiel pour la même raison. En mars 2023, il s’est trouvé un deuxième emploi à temps partiel parce qu’ils avaient besoin de l’argent pour pourvoir à ses besoins. 
  • Il a 70 ans et doit toujours travailler à temps partiel. Il assure la sécurité à la « prison » régionale les fins de semaine et conduit son trajet d’autobus scolaire pendant la semaine. 

[22] En ce qui concerne ses démarches de recherche d’emploi pendant les vacances d’hiver de décembre 2021, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Son dernier jour de travail était le vendredi 17 décembre 2021. 
  • Il savait que les écoles allaient être fermées pendant les deux prochaines semaines pour les vacances de Noël. 
  • Lorsqu’il a terminé sa journée de travail le 17 décembre 2021, l’employeur a dit qu’il n’y aurait pas de travail au cours des deux prochaines semaines et lui a demandé de se présenter de nouveau au travail le 3 janvier 2022. L’appelant a confirmé qu’il le ferait.
  • Il croyait que sa meilleure chance (la plus rapide) de retourner au travail était de se présenter au travail à la date de rappel prévue et confirmée.
  • Il s’est également porté volontaire [traduction] « pour les itinéraires d’autobus nolisés »; il a dit à l’employeur qu’il était disponible s’il y avait du travail pendant les vacances de Noël, que ce soit conduire pour les garderies, les équipes sportives, les mariages ou les trajets d’aéroport.

[23] En ce qui concerne les conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Il se limitait à son emploi régulier et habituel de chauffeur d’autobus à temps partiel parce que c’est l’emploi qu’il exerçait avant d’être mis à pied et c’est ce qu’il peut faire à son âge. 
  • Son trajet habituel exige de 20 à 24 heures de travail par semaine, du lundi au vendredi.
  • De temps à autre, il accumule quelques heures additionnelles en conduisant des autobus « nolisés » ou en faisant le trajet d’aéroport. 
  • C’est ce qu’il peut faire à son âge (il avait 68 ans à l’époque).  
  • Il se limitait également à travailler pour cet employeur parce qu’il savait que sa mise à pied ne durerait que deux semaines et qu’il reprendrait ensuite son emploi régulier et ses heures habituelles.
  • Il croyait que c’était le meilleur moyen de retourner au travail le plus rapidement possible.

[24] J’accepte la preuve de l’appelant comme étant crédible dans son ensemble. Il a affirmé qu’il dirait la vérité, et il a été franc et direct en répondant à mes questions. Grâce à la prise de décision active lors de son témoignage, l’appelant a été en mesure de fournir des détails et un contexte important concernant ses antécédents d’emploi, la façon dont l’employeur communiquait avec lui au sujet des mises à pied et du retour au travail, et les possibilités de conduire des véhicules « nolisés » en plus de son itinéraire scolaire habituel. Ses commentaires étaient logiques et concordaient avec la preuve et les observations qu’il avait présentées dans son appel à la division d’appel. 

Mes conclusions

[25] Je conclus qu’un emploi convenable pour l’appelant était un emploi à temps partiel comme chauffeur d’autobus parce qu’il s’agissait de son emploi régulier et habituel pendant de nombreuses années avant sa mise à pied. Il a établi sa demande de prestations d’assurance-emploi en fonction de son emploi à temps partiel et il n’est pas tenu de commencer soudainement à chercher un emploi à temps plein pour recevoir des prestations.

[26] Je conclus également que l’appelant a satisfait aux trois facteurs énoncés dans la décision Faucher en ce qui concerne les vacances d’hiver de décembre 2021 :

  1. a) La preuve montre qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert. L’appelant est un adulte et doit travailler pour payer ses factures et pourvoir à ses besoins. Il a prouvé qu’il était prêt à retourner sur le marché de travail dès que possible. En effet, pendant plusieurs années, il retournait au travail dès son rappel et conduisait même des autobus nolisés pendant les congés scolaires.
  2. b) Dans une décision récente de la Cour d’appel fédérale, la Cour a déclaré qu’il n’y a pas de règle absolue selon laquelle une partie prestataire doit immédiatement se lancer dans une recherche d’emploi en toutes circonstances. Il y a des situations où les prestataires devraient se voir accorder un délai raisonnable avant de commencer à chercher du travail pour voir s’ils seront rappelésNote de bas de page 12. Cela signifie que, dans certaines circonstances, une partie prestataire peut, pendant une période raisonnable, considérer la promesse d’être rappelée comme la façon la plus probable d’obtenir un nouvel emploi et agir en conséquence. Je conclus que de telles circonstances existaient pour l’appelant pendant les vacances d’hiver de décembre 2021.
  3. Il ne s’agit pas d’une situation où l’appelant a passé les deux semaines de vacances d’hiver de décembre 2021 à attendre et à se demander s’il allait un jour être rappelé à son ancien emploi. Sa mise à pied était temporaire. Il avait déjà accepté une offre ferme de rappel qui lui permettrait de reprendre son emploi régulier et habituel à peine deux semaines plus tard. Il s’est d’ailleurs présenté au travail à la date du rappel. Il croyait qu’être rappelé à une date précise était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible et il l’a accepté immédiatement. C’est suffisant pour satisfaire au deuxième facteur Faucher pour cette période.
  4. c) Le troisième facteur de l’arrêt Faucher ne signifie pas qu’il est interdit aux prestataires d’établir une condition quelconque quant au type de travail qu’ils seraient disposés à accepter. Il indique plutôt que les prestataires ne peuvent pas établir des conditions qui limitent « indûment » (ou déraisonnablement) leurs chances de retourner sur le marché d’emploi. 
  5. Je ne suis pas d’accord avec la Commission pour dire que le fait de se limiter à son employeur et d’accepter l’offre de rappel a indûment limité les chances de l’appelant de retourner travailler entre le 20 décembre 2021 et le 3 janvier 2022. Au contraire, cela a facilité son retour au travail le plus rapidement possible et lui a permis d’être pris en considération pour tout emploi d’« affrètement » qui se présenterait entretemps. Le maintien de cette relation d’emploi ne l’a pas empêché de trouver un emploi convenable ni de retourner à son emploi pendant les vacances d’hiver de décembre 2021. 
  6. Je dois analyser la période de deux semaines pendant laquelle l’appelant a été mis à pied, soit du 20 décembre 2021 au 3 janvier 2022. J’ai déjà conclu qu’un emploi à temps partiel était un emploi convenable pour l’appelant et que l’acceptation de l’offre de rappel était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible au cours de cette période. Je ne vois aucune autre preuve de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

Conclusion :

[27] L’appelant doit satisfaire aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour prouver sa disponibilité conformément à la loi. D’après mes conclusions, il a satisfait à tous les éléments. Par conséquent, je conclus que l’appelant a démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable pendant les vacances d’hiver de décembre 2021.

[28] Cela signifie qu’il n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’a pas prouvé sa disponibilité pour le travail pendant les semaines du 20 décembre 2021 et du 27 décembre 2021.

[29] La Commission doit annuler l’inadmissibilité pour une période indéterminée imposée à la demande de l’appelant à compter du 27 décembre 2021. 

Question en litige no 2 : L’appelant était-il disponible pour travailler pendant le congé de mars 2022?

Réponse courte :

[30] Oui, il l’était. L’appelant a satisfait aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour démontrer sa disponibilité au cours de cette période.

La preuve :

[31] Le témoignage de l’appelant concernant son désir de retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert est exposé au paragraphe 21 ci-dessus.

[32] En ce qui concerne ses démarches de recherche d’emploi pendant la semaine de relâche de mars 2022, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Son dernier jour de travail était le vendredi 11 mars 2022. 
  • Il savait que les écoles étaient fermées la semaine suivante à cause du congé de mars. 
  • Lorsqu’il a terminé sa journée de travail le 11 mars 2022, l’employeur a déclaré qu’il n’avait pas à travailler la semaine suivante et qu’il devait se présenter de nouveau au travail le 3 janvier 2022 [sic]. Il a confirmé qu’il le ferait.
  • Il croyait que sa meilleure chance (la plus rapide) de retourner au travail était de se présenter au travail à la date de rappel prévue et confirmée.
  • Il s’est également porté volontaire [traduction] « pour les itinéraires d’autobus nolisés ». Il a dit à l’employeur qu’il était disponible s’il y avait du travail pendant la semaine de relâche de mars, que ce soit conduire pour les garderies, les équipes sportives, les mariages ou les trajets d’aéroport.

[33] Le témoignage de l’appelant concernant les conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail est exposé au paragraphe 23 ci-dessus. 

[34] Pour les motifs énoncés au paragraphe 24 ci-dessus, j’accepte le témoignage de l’appelant comme crédible dans son ensemble.

Mes conclusions :

[35] Je conclus qu’un emploi convenable pour l’appelant était un emploi à temps partiel comme chauffeur d’autobus parce qu’il s’agissait de son emploi régulier et habituel pendant de nombreuses années avant sa mise à pied. Il a établi sa demande de prestations d’assurance-emploi en fonction de son emploi à temps partiel et il n’est pas tenu de commencer soudainement à chercher un emploi à temps plein pour recevoir des prestations.

[36] Je conclus également que l’appelant a satisfait aux trois facteurs énoncés dans la décision Faucher pour la semaine de relâche de mars 2022 :

  1. a) La preuve montre qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert. L’appelant est un adulte et doit travailler pour payer ses factures et pourvoir à ses besoins. Il a prouvé qu’il était prêt à retourner sur le marché de travail dès que possible. En effet, pendant plusieurs années, il retournait au travail dès son rappel et conduisait même des autobus nolisés pendant les congés scolaires.
  2. b) Comme la Cour d’appel fédérale l’a déclaré dans la décision PageNote de bas de page 13, il y a des circonstances dans lesquelles une partie prestataire peut, pendant une période raisonnable, considérer la promesse d’être rappelée comme la façon la plus probable d’obtenir un nouvel emploi et d’agir en conséquence. Je conclus que de telles circonstances existaient pour l’appelant pendant la semaine de relâche de mars 2022. 
  3. Il ne s’agit pas d’une situation où l’appelant a passé la semaine de relâche de mars 2022 à attendre et à se demander s’il allait un jour être rappelé à son ancien emploi. Encore une fois, sa mise à pied était temporaire. Il avait déjà accepté une offre ferme de rappel qui lui permettrait de reprendre son emploi régulier et habituel exactement une semaine plus tard. D’ailleurs, il s’est présenté au travail à la date du rappel. Il croyait qu’être rappelé à une date précise était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible et il l’a accepté immédiatement. C’est suffisant pour satisfaire au deuxième facteur Faucher pour cette période.
  4. c) L’appelant n’a pas établi de conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner travailler pendant le congé de mars 2022. La période de prestations que je dois prendre en considération est la semaine du 14 au 21 mars 2022. J’ai déjà conclu que l’emploi à temps partiel était un emploi convenable pour l’appelant et que l’acceptation de l’offre de rappel était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible pendant cette période. Le maintien de cette relation d’emploi ne l’a pas empêché de trouver un emploi convenable ni de retourner à son emploi. Et je ne vois aucune autre preuve de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment les chances de l’appelant de retourner sur le marché du travail.

Conclusion :

[37] L’appelant doit satisfaire aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour prouver sa disponibilité conformément à la loi. D’après mes conclusions, il a satisfait à tous les éléments. Par conséquent, je conclus que l’appelant a démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable pendant la semaine de relâche de mars 2022.

[38] Cela signifie qu’il n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’a pas prouvé sa disponibilité pour travailler pendant la semaine du 14 mars 2022.

[39] La Commission doit annuler l’inadmissibilité pour une période indéterminée imposée à la demande de l’appelant à compter du 27 décembre 2021. 

Question en litige no 3 : L’appelant était-il disponible pour travailler pendant les vacances d’été 2022?

Réponse courte :

[40] Oui, il l’était. L’appelant a satisfait aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour démontrer sa disponibilité au cours de cette période.

La preuve :

[41] Le témoignage de l’appelant concernant son désir de retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert est exposé au paragraphe 21 ci-dessus.

[42] En ce qui concerne ses démarches de recherche d’emploi pendant les vacances d’été 2022, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Son dernier jour de travail était le jeudi 30 juin 2022. 
  • Il savait que les écoles étaient fermées pendant les vacances d’été.
  • Lorsqu’il a terminé sa journée de travail le 30 juin 2022, l’employeur a déclaré qu’il n’avait pas à travailler pendant l’été et qu’il devait se présenter de nouveau au travail le 7 septembre 2022. Il a confirmé qu’il le ferait.
  • Il croyait que sa meilleure chance (la plus rapide) de retourner au travail était de se présenter au travail à la date de rappel prévue et confirmée.
  • Il s’est également porté volontaire [traduction] « pour les itinéraires d’autobus nolisés ». Il a dit à l’employeur qu’il était disponible s’il y avait du travail pendant les vacances d’été, que ce soit conduire pour les garderies, les équipes sportives, les mariages ou les trajets d’aéroport.
  • X était le service d’affrètement le plus achalandé dans la région à l’époque. Pendant l’été, il offrait des emplois non scolaires que d’autres entreprises de transport n’offraient pas :   
    • Il y a beaucoup de fermes dans la région où vit le prestataire. Les personnes qui travaillent aux fermes doivent être déplacées d’un endroit à un autre. Les fermes affrètent également des autobus pour que les ouvriers puissent assister aux rassemblements sociaux et faire leurs courses personnelles. 
    • Il y a aussi des installations des Forces armées canadiennes dans la région et elles sont particulièrement actives en été. Les membres des forces armées doivent être reconduits à divers endroits dans le cadre des [traduction] « déplacements de l’armée ».
  • X était le propriétaire de l’autobus scolaire qu’il conduisait et payait l’assurance automobile. L’appelant stationnait l’autobus chez lui parce qu’il vivait sur la route scolaire, ce qui lui permettait de gagner du temps. Cependant, il n’était pas autorisé à conduire l’autobus à des fins personnelles ni à travailler pour un autre employeur ou à son compte.
  • Au cours de l’été, il a continué à stationner l’autobus chez lui. Il l’a gardé propre et entretenu pour qu’il puisse être [traduction] « facilement mobilisé » pour les itinéraires d’autobus nolisés. L’employeur l’a bel et bien appelé pour travailler pendant l’été. Après chaque trajet, il nettoyait l’autobus, le remplissait d’essence, et le gardait prêt pour le prochain appel. 
  • Il se renseignait régulièrement auprès de l’employeur pour savoir si celui-ci pouvait lui offrir d’autres itinéraires d’autobus nolisés ou d’autre travail de chauffeur. Il était prêt à conduire à tout moment.  
  • Cependant, il n’a pas accumulé assez d’heures de travail pour compenser les 20 à 24 heures de travail hebdomadaire qu’il faisait en conduisant l’itinéraire scolaire régulier.   
  • Dans les déclarations du prestataire produites pour recevoir des prestations pendant le congé d’été 2022, il a déclaré sa rémunération provenant des autobus nolisés.

[43] En ce qui concerne les conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner sur le marché du travail, l’appelant a déclaré ce qui suit :

  • Il se limitait à son emploi régulier de chauffeur d’autobus à temps partiel parce que c’est ce à quoi il travaillait avant d’être mis à pied et c’est ce qu’il peut faire à son âge. 
  • C’est ce qu’il peut faire à son âge (il avait 68 ans à l’époque).
  • Il se limitait également à travailler pour cet employeur pour deux raisons :
    • Il savait qu’il serait mis à pied seulement pendant neuf semaines et qu’il reprendrait ensuite son emploi régulier et ses heures habituelles de travail.
    • X était la compagnie d’affrètement la plus occupée durant l’été, et il savait que le maintien de sa relation d’emploi avec X était son meilleur moyen d’accumuler des heures de travail pendant sa mise à pied.
  • Il croyait que c’était son meilleur moyen de recommencer à travailler le plus tôt possible.

Mes conclusions :

[44] Encore une fois, j’estime qu’un emploi convenable pour l’appelant était un emploi à temps partiel de chauffeur d’autobus parce qu’il s’agissait de son emploi régulier et habituel pendant de nombreuses années avant sa mise à pied. Il a établi sa demande de prestations d’assurance-emploi en fonction de son emploi à temps partiel et il n’est pas tenu de commencer soudainement à chercher un emploi à temps plein pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[45] Je conclus également que l’appelant a satisfait aux trois facteurs énoncés dans la décision Faucher pour la semaine de relâche de mars 2022 :

  1. a) La preuve montre qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert. L’appelant est un adulte et doit travailler pour payer ses factures et pourvoir à ses besoins. Il a prouvé qu’il était prêt à retourner sur le marché de travail dès que possible. En effet, pendant plusieurs années, il retournait au travail dès son rappel et conduisait même des autobus nolisés pendant les congés scolaires.
  2. b) Comme la Cour d’appel fédérale l’a déclaré dans la décision PageNote de bas de page 14, il y a des circonstances dans lesquelles une partie prestataire peut, pendant une période raisonnable, considérer la promesse d’être rappelée comme la façon la plus probable d’obtenir un nouvel emploi et d’agir en conséquence. Je conclus que de telles circonstances existaient pour l’appelant pendant le congé d’été 2022. 
  3. Il ne s’agit pas d’une situation où l’appelant a passé les neuf semaines de vacances d’été 2022 à attendre et à se demander s’il allait un jour être rappelé à son ancien emploi. Encore une fois, sa mise à pied était temporaire. Il avait déjà accepté une offre ferme de rappel qui le ferait retourner à son emploi régulier et habituel neuf semaines plus tard. D’ailleurs, il s’est présenté au travail à la date du rappel. Il croyait qu’être rappelé à une date précise était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible et il l’a accepté immédiatement. C’est suffisant pour satisfaire au deuxième facteur Faucher pour cette période.
  4. Cependant, si je me trompe et que neuf semaines ne constituent pas une période raisonnable, je conclus que l’appelant en faisait assez pour trouver du travail pendant le congé d’été 2022. Ses démarches de recherche d’emploi comprenaient entre autres le fait de s’informer régulièrement auprès de l’employeur pour obtenir des itinéraires d’autobus nolisés et d’autres services de conduite, maintenir son autobus en état de préparation sur appel, conduire des véhicules nolisés, et accumuler des heures de travail supplémentaires. Il a satisfait au deuxième facteur Faucher pour cette période.
  5. c) L’appelant n’a pas établi de conditions personnelles qui limitaient ses chances de retourner travailler pendant le congé d’été 2022. La période de prestations dont je dois tenir compte est la période de neuf semaines du 4 juillet 2022 au 5 septembre 2022. J’ai déjà conclu qu’un emploi à temps partiel était un emploi convenable pour l’appelant et que l’acceptation de l’offre de rappel était sa meilleure chance de retourner à un emploi convenable le plus rapidement possible pendant cette période. Non seulement cela facilitait son retour au travail le plus rapidement possible, mais cela lui permettait de gagner de l’argent en conduisant des « véhicules nolisés » pendant la saison estivale. Le maintien de sa relation d’emploi avec X ne l’empêchait pas de trouver un emploi convenable ou de reprendre son travail régulier. Je ne vois aucune autre preuve de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment les chances de l’appelant de retourner sur le marché du travail.

Conclusion :

[46] L’appelant doit satisfaire aux trois éléments de l’arrêt Faucher pour prouver sa disponibilité conformément à la loi. D’après mes conclusions, il a satisfait à tous les éléments. Par conséquent, je conclus que l’appelant a démontré qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable pendant le congé d’été 2022.

[47] Cela signifie qu’il n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il n’a pas prouvé sa disponibilité pour le travail du 4 juillet 2022 au 5 septembre 2022.  

[48] La Commission doit annuler l’inadmissibilité pour une période indéterminée imposée à la demande de l’appelant à compter du 27 décembre 2021. 

Question en litige no 4 : Qu’est-ce que cela signifie pour l’appelant?

[49] La preuve démontre que l’appelant était disponible pour travailler pour son employeur à tout moment pendant sa période de prestations si l’employeur le lui demandait. Soit il conduisait selon son itinéraire scolaire habituel, soit il était mis à pied pour des raisons indépendantes de sa volonté (pendant les trois congés de l’année scolaire 2021-2022) tout en ayant accepté une offre ferme de rappel. De plus, il se portait volontaire pour conduire les « véhicules nolisés » entretemps.

[50] Je conclus donc que l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler à compter du 27 décembre 2021. Par conséquent, la Commission doit annuler l’inadmissibilité pour une période indéterminée imposée à sa demande à compter du 27 décembre 2021.

[51] La preuve montre également que l’appelant considérait l’offre ferme de rappel faite au début de chaque mise à pied comme étant la façon la plus probable pour lui de reprendre un emploi convenable, et il a agi en conséquence. L’appelant connaissait sa date de retour au travail chaque fois qu’il était mis à pied. Il se présentait au travail à la date du rappel. Il faut lui accorder un délai raisonnable avant de l’obliger à chercher un autre emploi. Pour cette raison, j’estime que l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant les deux plus courtes périodes de congé scolaire, soit les deux semaines de vacances d’hiver de décembre 2021 et la semaine de relâche de mars 2022.  

[52] Par conséquent, l’appelant n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les semaines du 20 décembre 2021, du 27 décembre 2021 et du 14 mars 2022. 

[53] Enfin, la preuve démontre que l’appelant était disponible pour travailler pour son employeur – et qu’il a d’ailleurs travaillé et reçu une rémunération de cet employeur – pendant le congé d’été 2022. Il avait une offre ferme de rappel pour reprendre son emploi régulier et habituel et il l’a acceptée. Il connaissait sa date de retour au travail lorsqu’il a été mis à pied et il s’est présenté au travail à cette date. Je conclus que la décision PageNote de bas de page 15 s’applique dans la situation de l’appelant et qu’il ne faut pas s’attendre à ce qu’il entreprenne une recherche d’emploi pour trouver un autre emploi afin de prouver sa disponibilité pendant le congé d’été 2022. 

[54] Sinon, je considère que l’appelant a satisfait aux trois éléments de l’arrêt Faucher et a prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant le congé d’été 2022. Il en a fait assez pour se trouver du travail en maintenant sa relation d’emploi avec le service d’affrètement le plus occupé de la région et en prenant des mesures pour être prêt à effectuer un autre travail convenable pour l’employeur pendant qu’il était mis à pied. 

[55] Pour les motifs exposés aux paragraphes 53 et 54 ci-dessus, je conclus donc que l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler pendant le troisième congé scolaire, soit les neuf semaines de congé estival de 2022. 

[56] Par conséquent, l’appelant n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi du 4 juillet 2022 au 5 septembre 2022. 

[57] L’appelant a déclaré qu’il a déjà produit ses déclarations pour demander des prestations pour les semaines du 20 décembre 2021, du 27 décembre 2021, du 14 mars 2022 et pour les neuf semaines du 5 juillet 2022 au 5 septembre 2022. La Commission doit maintenant traiter ses déclarations et lui verser les prestations d’assurance-emploi auxquelles il a droit.

Conclusion

[58] L’appel est accueilli. 

[59] L’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler à compter du 27 décembre 2021. Cela signifie que l’inadmissibilité indéterminée imposée à sa demande doit être annulée.

[60] Cela signifie également que l’appelant n’est pas inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant les trois congés de l’année scolaire 2021-2022, soit le congé de décembre 2021, le congé de mars 2022 et le congé d’été de 2022. 

[61] L’appelant a déjà produit ses déclarations pour demander des prestations pour ces périodes (plus précisément, les semaines du 20 décembre 2021, du 27 décembre 2021, du 14 mars 2022 et les neuf semaines du 5 juillet 2022 au 5 septembre 2022). La Commission doit maintenant traiter ses déclarations et lui verser les prestations d’assurance-emploi auxquelles il a droit.

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