Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 725

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. C.
Représentante ou représentant : A. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission
de l’assurance-emploi du Canada (647609) datée
du 22 février 2024 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Paula Turtle
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 10 mai 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelante
La personne qui représente l’appelante
Date de la décision : Le 16 mai 2024
Numéro de dossier : GE-24-1162

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi pour proches aidants afin de prendre soin de son mari.

[3] La Commission de l’assurance-emploi a rejeté sa demande. Elle affirme que le mari de l’appelante n’était pas gravement malade ou blessé.

[4] Le mari de l’appelante a subi une chirurgie de remplacement d’un genou. L’appelante affirme avoir présenté un rapport médical qui indique que son mari était gravement malade.

[5] L’appelante me demande de conclure qu’elle pouvait recevoir des prestations pendant la période où elle a pris congé pour prendre soin de son mari.

Question en litige

[6] L’appelante est-elle admissible aux prestations pour proches aidants?

Analyse

[7] Les prestations pour proches aidants d’adultes sont des prestations spéciales offertes à une personne qui doit mettre son travail de côté pour s’occuper d’une ou d’un adulte gravement malade dans sa famille.

[8] Pour recevoir des prestations, une personne doit avoir une lettre d’une praticienne ou d’un praticien de la santé qui montre qu’elle doit prendre soin d’une ou d’un adulte gravement malade dans sa famille et qui précise la période où les soins sont requisNote de bas de page 1. Les prestations pour proches aidants sont versées pendant une période maximale de 15 semainesNote de bas de page 2.

[9] Le Règlement sur l’assurance-emploi définit ce qu’est une ou un adulte gravement malade dans le cadre des prestations pour proches aidantsNote de bas de page 3. Voici les 2 critères à remplir pour montrer que l’adulte en question est gravement malade :

  • son état de santé habituel a subi un changement important;
  • sa vie est en danger en raison d’une maladie ou d’une blessure.

[10] En l’absence d’un rapport médical qui montre ces 2 choses, l’adulte qui requiert des soins ne correspond pas à la définition de « gravement malade ». Par conséquent, aucune prestation pour proches aidants ne pourra être versée.

Les rapports médicaux n’indiquent pas que le mari de l’appelante était gravement malade

[11] L’appelante n’a pas démontré que son mari était gravement malade.

[12] Elle m’a remis les rapports médicaux suivants, signés par une médecin de familleNote de bas de page 4 :

  • Un formulaire de congé familial pour les aidants naturels ou de congé en cas de maladie grave au titre de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi de l’Ontario est daté du 11 décembre 2023. On dit que le patient a un problème de santé grave. Mais la partie du formulaire concernant le congé en cas de maladie grave n’est pas remplie. La médecin aurait pu cocher une case indiquant que la vie du patient était en danger, mais elle ne l’a pas cochéeNote de bas de page 5.
  • Un formulaire au sujet des prestations d’assurance-emploi pour proches aidants au titre de la Loi sur l’assurance-emploi est daté du 15 janvier 2024. Je l’appellerai le « deuxième formulaire ». On dit que le patient a subi une chirurgie de remplacement d’un genou et qu’il a besoin du soutien de quelqu’un. Le formulaire comprend l’énoncé [traduction] « La vie de la personne est en danger en raison d’une maladie ou d’une blessure. » À côté de cet énoncé, la médecin a coché la case [traduction] « Non »Note de bas de page 6.
  • Un autre formulaire au sujet des prestations d’assurance-emploi pour proches aidants au titre de la Loi sur l’assurance-emploi est daté du 31 janvier 2024. Je l’appellerai le « troisième formulaire ». Ce formulaire comprend aussi l’énoncé [traduction] « La vie de la personne est en danger en raison d’une maladie ou d’une blessure. » Il y a un premier « x » au-dessus de la case [traduction] « Oui », un deuxième « x » au-dessus de la case [traduction] « Non » et un troisième « x » à côté des 2 casesNote de bas de page 7.
  • La médecin a ajouté des commentaires sur le troisième formulaireNote de bas de page 8. Sous l’énoncé concernant le risque pour la vie du patient, elle a écrit : [traduction] « Cela ne mettait pas la vie du patient en danger, mais il avait une maladie grave qui nécessitait le soutien de son épouse ».

[13] L’appelante affirme qu’elle devait être là pour prendre soin de son mari. Il ne pouvait pas bouger sans son soutien physique. Elle devait l’aider à monter les escaliers qui menaient à la salle de bain. Et elle devait lui apporter ses repas.

[14] L’appelante ajoute que si elle n’était pas là pour aider son mari à monter et descendre les escaliers, il aurait pu tomber. Et s’il tombait, sa vie pouvait être en danger.

[15] À l’occasion, pendant le rétablissement de son mari, l’appelante a dû quitter la maison. Elle devait faire certaines choses comme aller à l’épicerie ou rencontrer le personnel de l’assurance-emploi au sujet de sa demande. Lorsqu’elle quittait la maison, elle s’organisait pour que quelqu’un soit là pour prendre soin de son mari.

[16] L’appelante m’a expliqué ce qu’elle pensait que la médecin voulait dire dans le troisième formulaire. La médecin voulait en fait répondre à la fois « oui » et « non » à l’énoncé au sujet du danger pour la vie de son mari. L’appelante a ajouté qu’il fallait considérer les 3 « x » et les commentaires de la médecin comme un tout. Ainsi, on comprend que la médecin voulait dire que la vie de son mari était en danger, parce qu’il avait besoin de soutien physique et qu’il aurait pu tomber sans l’aide de son épouse.

[17] Le 31 janvier 2024, la Commission a écrit à l’appelante. Dans sa lettre, la Commission a annoncé que l’appelante n’était pas admissible aux prestations parce que la médecin n’avait pas dit que son mari était gravement malade ou blessé.

[18] À la suite de la lettre du 31 janvier 2024, l’appelante est retournée voir la médecin. Elle lui a dit qu’elle pourrait recevoir des prestations seulement si la vie de son mari était en danger. Puis elle a reçu le troisième formulaire.

[19] Les 2 premiers formulaires indiquent clairement que la vie du mari de l’appelante n’était pas en danger.

[20] L’appelante affirme avoir expliqué à la médecin qu’on lui avait refusé des prestations et lui avoir parlé des règles de l’assurance-emploi. Ainsi, la médecin comprenait mieux ce qu’était une vie en danger lorsqu’elle a rempli le troisième formulaire. Selon l’appelante, le troisième formulaire est alors le plus fiable.

[21] Je n’accepte pas cet argument. La médecin n’avait pas besoin de se faire expliquer les règles de l’assurance-emploi pour comprendre ce qu’est une vie en danger. Je ne suis donc pas d’accord que le troisième formulaire est le plus fiable. En fait, je pense le contraire. La médecin avait déjà rempli 2 autres formulaires médicaux sans déclarer que la vie de son patient était en danger. Il semble que l’appelante cherchait quelque chose qui l’aiderait à obtenir des prestations d’assurance-emploi quand elle est retournée voir la médecin pour lui demander un nouveau formulaire.

[22] J’estime donc que les 2 premiers formulaires sont plus fiables. Et même si l’on avait seulement le troisième formulaire, je considère qu’il n’indique pas que la vie du patient était en danger. J’explique mon raisonnement ci-dessous.

[23] Dans le troisième formulaire, la médecin a inscrit un « x » au-dessus de [traduction] « Oui » et de [traduction] « Non », puis un autre « x » à côté de [traduction] « Non ». L’appelante me demande de regarder l’ensemble du formulaire, y compris les commentaires additionnels de la médecin.

[24] Le troisième formulaire ne dit pas que la vie du patient était en danger. Voici pourquoi :

  • La médecin a inscrit un « x » au-dessus des 2 cases qui permettent de savoir si la vie du patient était en danger. Cela signifie qu’elle a soit rempli les 2 cases ou qu’elle n’en a rempli aucune. Le fait de ne remplir ni l’une ni l’autre des cases ou de les remplir les 2 ne confirme pas que la vie du patient était en danger. En fait, remplir les 2 cases (ou n’en remplir aucune) est contradictoire et ambigu.
  • Sous l’énoncé concernant le risque pour la vie du patient, la médecin a écrit : [traduction] « Cela ne mettait pas la vie du patient en danger, mais il avait une maladie grave qui nécessitait le soutien de son épouse ». Elle ne dit pas que la vie du patient était en danger. Elle dit que sa vie n’était pas en danger et qu’il avait besoin de l’aide de son épouse. Et lorsqu’elle a écrit qu’il avait une maladie grave, mais que sa vie n’était pas en danger, voilà une façon de dire qu’il n’était pas gravement malade au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[25] Les formulaires indiquent que le patient avait besoin des soins ou du soutien de l’appelante.

[26] Je n’ai aucun doute que le mari de l’appelante avait besoin d’aide. Mais ce n’est pas suffisant pour pouvoir recevoir des prestations.

[27] Les formulaires n’indiquent pas qu’il était gravement malade parce qu’ils n’indiquent pas que sa vie était en danger. Je ne peux pas modifier la loi ni l’interpréter d’une manière qui va à l’encontre de son sens ordinaireNote de bas de page 9.

[28] Je conclus que l’appelante n’a pas présenté d’attestation médicale qui indique que son mari était gravement malade.

Les formulaires n’indiquent pas que son état de santé habituel a subi un changement important

[29] L’appelante doit aussi démontrer que la médecin affirme que l’état de santé habituel de son mari a changé de façon importante. Cependant, j’ai déjà établi que les formulaires n’indiquent pas qu’il était gravement malade. Pour cette raison, l’appelante n’est pas admissible aux prestations.

[30] Il y a une contradiction entre les deuxième et troisième formulaires. Le deuxième formulaire n’indique pas que l’état de santé habituel du patient a changé. Le troisième formulaire indique que oui. Je n’ai pas à décider si cette contradiction signifie que son état de santé habituel a changé ou n’a pas changé de façon importante. En effet, j’ai déjà établi que les formulaires n’indiquent pas que sa vie était en danger.

Conclusion

[31] L’appel est rejeté.

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