[TRADUCTION]
Citation : MD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 827
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | M. D. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (641319) datée du 16 février 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Paula Turtle |
Mode d’audience : | Vidéoconférence |
Date de l’audience : | Le 15 mai 2024 |
Personne présente à l’audience : | Appelant |
Date de la décision : | Le 17 mai 2024 |
Numéro de dossier : | GE-24-882 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.
[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations. Autrement dit, l’appelant n’a pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, sa demande ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôtNote de bas de page 1.
Aperçu
[3] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi le 21 mai 2022. Il demande maintenant que sa demande soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 21 novembre 2021. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a déjà rejeté cette demande.
[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il avait un motif valable de ne pas demander des prestations plus tôt.
[5] La Commission soutient que l’appelant n’avait pas de motif valable parce qu’il n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans sa situation. Une personne raisonnable aurait posé des questions à Service Canada, à son syndicat ou à son employeur au sujet de ses droits et obligations aux termes de la Loi.
[6] L’appelant n’est pas d’accord. Il a reçu des prestations d’assurance-emploi pour la dernière fois il y a 30 ans. Il croyait avoir besoin d’un relevé d’emploi pour en demander. La dernière fois qu’il a reçu des prestations, son employeur lui a envoyé son relevé d’emploi par la poste. Il a donc aussi attendu son relevé d’emploi cette fois-ci.
Question en litige
[7] La demande de prestations de l’appelant peut-elle être traitée comme si elle avait été présentée le 21 novembre 2021? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande.
Analyse
[8] Pour que la demande de prestations d’une personne soit antidatée, celle-ci doit prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 2 :
- a) Elle avait un motif valable justifiant son retard pendant toute la période du retard. Autrement dit, elle a une explication que la loi accepte.
- b) Elle remplit les conditions requises à la date antérieure (c’est-à-dire la date à laquelle elle souhaite que sa demande soit antidatée).
[9] Dans la présente affaire, les principaux arguments portent sur la question de savoir si l’appelant avait un motif valable. Je vais donc commencer par cela.
[10] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, l’appelant doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 3. Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi de façon raisonnable et prudente, comme n’importe quelle autre personne l’aurait fait si elle s’était trouvée dans une situation semblable.
[11] L’appelant doit démontrer qu’il a agi de cette façon pendant toute la période du retardNote de bas de page 4. Cette période s’étend du jour où il veut que sa demande soit antidatée au jour où il a présenté sa demande. Par conséquent, pour l’appelant, la période de retard s’étend du 21 novembre 2021 au 21 mai 2022.
[12] L’appelant doit également démontrer qu’il a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et les obligations que lui impose la loiNote de bas de page 5. Cela signifie que l’appelant doit démontrer qu’il a essayé de s’informer de ses droits et responsabilités dès que possible et du mieux qu’il pouvait. Si l’appelant n’a pas fait ces démarches, il doit démontrer qu’il y avait des circonstances exceptionnelles qui expliquent pourquoi il ne l’a pas faitNote de bas de page 6.
[13] L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant son retard.
[14] L’appelant affirme qu’il avait un motif valable justifiant son retard parce qu’il a supposé que les règles de l’assurance-emploi étaient exactement comme la dernière fois qu’il avait présenté une demande d’assurance-emploi. Il croyait devoir attendre son relevé d’emploi.
[15] L’appelant a déclaré à l’audience qu’il croyait ne pas avoir droit aux prestations d’assurance-emploi. Il a vu des bulletins de nouvelles qui disaient que des personnes comme lui qui ont perdu leur emploi parce qu’elles n’ont pas reçu le vaccin contre la COVID-19 ne reçoivent pas de prestations d’assurance-emploi. C’est donc une autre raison pour laquelle il n’a pas présenté sa demande plus tôt.
[16] La Commission affirme que l’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard parce qu’il aurait pu apprendre de Service Canada, de son syndicat ou de son employeur qu’il n’avait pas besoin de recevoir son relevé d’emploi de son employeur pour demander des prestations. Il aurait aussi pu apprendre qu’il devrait aller de l’avant et demander des prestations, même s’il pensait qu’il pourrait ne pas y être admissible.
[17] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations parce qu’il n’a pas fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les circonstances pour s’informer de ses droits et de ses obligations.
[18] L’employeur de l’appelant l’a mis en congé sans solde en novembre 2021. Par la suite, il l’a congédié en décembre 2021. Le syndicat a déposé un grief pour lui. Il a parlé de son grief au syndicat en janvier.
[19] Il aurait pu demander à son syndicat s’il avait besoin d’un relevé d’emploi et s’il devrait demander des prestations d’assurance-emploi. De plus, il aurait pu communiquer avec Service Canada ou son employeur pour s’informer au sujet du relevé d’emploi et de son droit aux prestations.
[20] L’appelant a plutôt supposé que les règles pour recevoir des prestations d’assurance-emploi étaient les mêmes qu’il y a 30 ans. Ce n’est pas une hypothèse raisonnable. Une personne raisonnable aurait vérifié les règles pour savoir si elle devait attendre une copie papier du relevé d’emploi de son employeur.
[21] Aussi, une personne raisonnable qui veut recevoir des prestations d’assurance-emploi ferait une demande et verrait ce qui se passe. Elle agirait ainsi même si elle n’était pas certaine d’avoir droit à des prestations. Ou bien, elle interrogeait son syndicat à ce sujet, au lieu de retarder les choses parce qu’elle pense qu’elle n’y a pas droit.
[22] L’appelant a eu beaucoup d’occasions d’obtenir des renseignements, mais il n’en a pris aucune.
[23] J’estime que l’appelant n’a pas vérifié assez rapidement s’il avait besoin d’un relevé d’emploi. Il a seulement posé la question à son syndicat en mai 2022. Le syndicat lui a dit que non. Il aurait pu demander plus tôt à son syndicat s’il devait demander des prestations même s’il croyait ne pas y avoir droit.
[24] Si une partie prestataire peut démontrer qu’il existait des circonstances exceptionnelles qui expliquent pourquoi elle n’a pas posé de questions sur les règles plus tôt, cela pourrait excuser son retard. Cependant, l’appelant n’a pas dit qu’il y avait des circonstances exceptionnelles dans son cas.
[25] De plus, rien dans le dossier n’indique l’existence de circonstances exceptionnelles.
[26] Je n’ai pas besoin de vérifier si l’appelant remplissait les conditions requises à la date antérieure pour recevoir des prestations. Si l’appelant n’a pas de motif valable, sa demande ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.
Conclusion
[27] L’appelant n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pendant toute la période écoulée.
[28] L’appel est rejeté.