Assurance-emploi (AE)
Informations sur la décision
Le prestataire a été mis à pied de son emploi dans un restaurant en mars 2021. Il a établi une période de prestations d’assurance-emploi à compter du 7 mars 2021. Du 8 mars 2021 au 24 juin 2021 et à partir du 8 septembre 2021, le prestataire allait à l’école secondaire. En mai 2021, il a repris le travail au restaurant où il avait déjà occupé un emploi, et il a déclaré ces heures dans ses déclarations.
Le 23 mai et le 13 septembre 2021, le prestataire a rempli des questionnaires en ligne dans lesquels il a répondu à des questions sur ses études et sa disponibilité pour le travail. En octobre 2022, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a communiqué avec lui pour avoir plus de renseignements sur ses études. Le 9 février 2023, la Commission a dit au prestataire qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations d’assurance-emploi du 8 mars 2021 au 24 juin 2021, et du 8 septembre 2021 jusqu’à la fin de sa période de prestations parce qu’il n’avait pas prouvé sa disponibilité. Cela a donné lieu à un trop-payé. Le prestataire a fait appel de la décision de la Commission à la division générale.
La division générale a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler et qu’il n’avait pas fait des démarches habituelles et raisonnables pour obtenir du travail. Elle a également jugé que le prestataire avait établi des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.
Le prestataire a fait appel de la décision de la division générale à la division d’appel.
La division d’appel a conclu que la division générale avait commis une erreur de droit dans sa décision parce qu’elle avait mal appliqué le critère relatif à la disponibilité et n’avait pas respecté la jurisprudence contraignante de la Cour d’appel fédérale sur la présomption de non-disponibilité pour les personnes aux études.
La Cour fédérale a affirmé qu’il faut procéder à une analyse contextuelle pour décider si une partie prestataire a réussi à réfuter la présomption de non-disponibilité. La division d’appel a établi qu’on avait posé très peu de questions au prestataire et qu’on ne l’avait pas interrogé sur ses expériences antérieures de travail pendant qu’il était à l’école ou sur la nature du travail qu’il recherchait. De plus, aucune question n’avait été posée au prestataire au sujet des démarches qu’il avait pu faire pour trouver un emploi convenable comme prévu à l’article 9.001 du Règlement sur l’assurance-emploi. La division d’appel n’était pas convaincue que le prestataire connaissait les arguments avancés contre lui ni la preuve qu’il devait fournir et qui était pertinente à la question que la division générale devait trancher. Pour cette raison, la division d’appel a conclu que le dossier était incomplet.
La division d’appel a accueilli l’appel et a renvoyé l’affaire à la division générale pour la tenue d’une nouvelle audience.
Contenu de la décision
[TRADUCTION]
Citation : SC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 677
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision
Parties appelante : | S. C. |
Représentant : | S. S. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Représentant : | J. Duggan |
Décision portée en appel : | Décision rendue par la division générale le 6 décembre 2023 (GE-23-2245) |
Membre du Tribunal : | Melanie Petrunia |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 22 mai 2024 |
Personnes présentes à l’audience : | Appelant Représentant de l’appelant Représentant de l’intimée |
Date de la décision : | Le 18 juin 2024 |
Numéro de dossier : | AD-24-33 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est accueilli. Je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen.
Aperçu
[2] L’appelant, S. C. (prestataire), a demandé et reçu des prestations régulières d’assurance-emploi pendant ses études. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que le prestataire n’était pas admissible aux prestations du 8 mars 2021 au 24 juin 2021 et à partir du 8 septembre 2021 parce qu’il n’avait pas prouvé sa disponibilité pour travailler.
[3] Le prestataire a porté la décision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel. Elle a conclu que le prestataire n’avait pas réfuté la présomption selon laquelle il n’était pas disponible pendant qu’il suivait un cours de sa propre initiative. Le prestataire fait maintenant appel de la décision de la division générale à la division d’appel.
[4] J’accueille l’appel. La division générale a commis des erreurs de droit dans sa décision. Je renvoie l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.
Questions en litige
[5] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :
- a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en appliquant incorrectement le critère juridique de la disponibilité?
- b) Si oui, comment l’erreur devrait-elle être corrigée?
Analyse
[6] Je peux intervenir dans la présente affaire seulement si la division générale a commis une erreur pertinente. Je dois donc vérifier si la division générale a fait l’une des choses suivantesNote de bas de page 1 :
- elle a omis d’offrir une procédure équitable;
- elle a omis de trancher une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
- elle a mal interprété ou mal appliqué la loi;
- elle a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits de l’affaire.
Contexte
[7] Le prestataire travaillait dans un restaurant. Il a été mis à pied en mars 2021. Il a établi une période de prestations d’assurance-emploi commençant le 7 mars 2021.Note de bas de page 2 Du 8 mars 2021 au 24 juin 2021 et à partir du 8 septembre 2021, le prestataire était aux études secondaires. En mai 2021, il est retourné travailler au restaurant, et il a déclaré ces heures dans ses déclarations de prestations.Note de bas de page 3
[8] Le prestataire a rempli des questionnaires en ligne le 23 mai et le 13 septembre 2021, répondant à des questions sur ses études et sa disponibilité pour travailler.Note de bas de page 4 En octobre 2022, la Commission a communiqué avec le prestataire pour obtenir de plus amples renseignements sur ses études.Note de bas de page 5
[9] Le 9 février 2023, la Commission a informé le prestataire qu’elle ne pouvait pas lui verser de prestations d’assurance-emploi du 8 mars 2021 au 24 juin 2021 et du 8 septembre 2021 jusqu’à la fin de sa période de prestations parce qu’il n’avait pas prouvé sa disponibilité.Note de bas de page 6 Cela a créé un trop-payé pour le prestataire. Il a porté la décision de la Commission en appel à la division générale.
La décision de la division générale
[10] Dans sa décision, la division générale a souligné qu’il existe une présomption en droit selon laquelle une personne qui étudie à temps plein n’est pas disponible pour travailler au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Elle a souligné à juste titre que cette présomption peut être réfutée si une partie prestataire peut démontrer qu’elle a déjà travaillé pendant ses études ou si elle présente des circonstances exceptionnelles.Note de bas de page 7 La division générale a ensuite énoncé les facteurs à prendre en considération pour décider si une partie prestataire a réfuté la présomption de non-disponibilité.Note de bas de page 8
[11] La division générale a également énoncé le critère juridique permettant d’établir la disponibilité. Elle a examiné les trois facteurs suivantsNote de bas de page 9 :
- (1) le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert;
- (2) l’expression de ce désir par des efforts pour trouver un emploi convenable;
- (3) le fait de ne pas établir de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail.Note de bas de page 10
[12] De plus, la disponibilité est établie pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel la partie prestataire peut prouver qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable.Note de bas de page 11
[13] La division générale a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler et qu’il n’avait pas fait de démarches habituelles et raisonnables pour obtenir du travail. Elle a également conclu que le prestataire avait établi des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.
La division générale a commis des erreurs de droit
[14] Dans sa décision, la division générale a souligné que le prestataire était inadmissible au titre de deux articles de la Loi.Note de bas de page 12 Toutefois, la décision ne comprend aucune analyse des facteurs prévus à l’article 9.001 du Règlement pour décider si les démarches du prestataire pour trouver un emploi convenable étaient habituelles et raisonnables.
[15] La division générale a également cité la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et déclaré qu’une partie prestataire qui restreint sa disponibilité à des heures en dehors de son horaire de cours n’est pas disponible pour travailler.Note de bas de page 13
[16] Une décision récente de la Cour d’appel fédérale remet en question la déclaration de la division générale. Dans l’arrêt Page c Canada (Procureur général), la Cour a conclu qu’il n’y avait pas de règle claire.Note de bas de page 14 On y a déclaré qu’une analyse contextuelle est nécessaire pour décider si la présomption de non-disponibilité a été réfutée.Note de bas de page 15 La division générale n’a pas fait référence à cette décision.
[17] La division générale a énoncé les facteurs à prendre en considération pour établir si une personne a réfuté la présomption de non-disponibilité, mais elle n’a inclus aucune analyse de ces facteurs dans sa décision. La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas manifesté le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable serait offert et qu’il s’efforçait de terminer ses études.Note de bas de page 16 Elle ne mentionne pas le fait que le prestataire est retourné travailler pour son ancien employeur pendant cette période.
[18] Je signale que la division générale n’a pas non plus examiné si la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé de réexaminer les prestations du prestataire. La Commission avait fait référence à son pouvoir législatif de réexaminer les prestations dans ses observations devant la division générale, mais cette dernière n’a pas abordé cette question dans sa décision.Note de bas de page 17
[19] La division générale a commis une erreur de droit dans sa décision. En effet, elle n’a pas appliqué correctement le critère de la disponibilité et elle n’a pas respecté la jurisprudence exécutoire de la Cour d’appel fédérale concernant la présomption de non-disponibilité pour les personnes qui étudient.
Corriger l’erreur
[20] Pour corriger l’erreur de la division générale, je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre ou je peux renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen.Note de bas de page 18
[21] La Commission affirme que même si la division générale a commis des erreurs dans sa décision, ces erreurs n’ont aucune incidence sur l’issue de l’affaire. Elle soutient que je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre et rejeter l’appel.Note de bas de page 19
[22] Je conclus que la division générale a commis des erreurs de droit. J’ai écouté l’enregistrement de l’audience de la division générale. La Cour d’appel fédérale a déclaré qu’une analyse contextuelle est nécessaire pour établir si une partie prestataire a réussi à réfuter la présomption de non-disponibilité. On a posé très peu de questions au prestataire et on ne lui a pas posé de questions sur ses antécédents de travail pendant ses études ni sur la nature du travail qu’il cherchait.
[23] De plus, le prestataire n’a pas été interrogé sur les démarches qu’il aurait faites pour trouver un emploi convenable au sens de l’article 9.001 du Règlement. Je ne suis pas convaincue que le prestataire connaissait les arguments qu’il devait réfuter ni le type de preuve pertinent qu’il devait fournir étant donné la question que la division générale devait trancher. J’estime que le dossier est incomplet.
[24] Il ne convient pas que je rende la décision que la division générale aurait dû rendre dans la présente affaire. Le prestataire n’a pas eu l’occasion de présenter pleinement sa preuve concernant sa disponibilité. Je renvoie l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.
Conclusion
[25] L’appel est accueilli. La division générale a commis une erreur de droit. Je renvoie l’affaire à la division générale pour une nouvelle audience.