Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 875

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance‑emploi du Canada (649570) datée du
11 avril 2024 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 4 juin 2024
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 11 juin 2024
Numéro de dossier : GE-24-1718

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Décision

Première question en litige (disponibilité)

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler du 28 novembre au 13 décembre 2023. Cela signifie qu’elle ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi du 28 novembre au 13 décembre 2023.

Deuxième question en litige (fin de la formation dirigée)

[3] L’appel est rejeté.

[4] L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable de quitter le programme de formation vers lequel elle a été dirigée. Cela signifie qu’elle était visée par une exclusion d’une durée de six semaines du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi à compter de la semaine où elles étaient par ailleurs payables, le 10 décembre 2023.

Aperçu

Première question en litige

[5] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a décidé que l’appelante était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance‑emploi du 28 novembre au 13 décembre 2023 parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler Pour recevoir des prestations régulières d’assurance‑emploi, la partie prestataire doit être disponible pour travailler. Il s’agit d’une exigence continue. Cela signifie qu’elle doit chercher un emploi.

[6] Je dois décider si l’appelante a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Par conséquent, elle doit démontrer qu’il est plus probable que le contraire qu’elle était disponible pour travailler.

[7] La Commission affirme que l’appelante n’était pas disponible parce qu’elle n’a pas pu prouver qu’elle était inscrite à une formation dirigée entre le 28 novembre et le 13 décembre 2023. La Commission affirme en outre que l’appelante s’est déclarée non disponible pendant qu’elle étudiait à ces dates.

[8] L’appelante n’est pas d’accord et affirme qu’elle méritait de recevoir des prestations d’assurance‑emploi pendant qu’elle étudiait pour passer l’examen de l’Alberta Apprenticeship and Industry Training (AIT).

Deuxième question en litige

[9] L’appelante a commencé la formation vers laquelle elle a été dirigée le 11 octobre 2023 chez « Women Building Futures ». La date de fin prévue de la formation en question était le 16 février 2024. L’appelante a quitté la formation le 24 novembre 2023. Elle en a été officiellement expulsée par « Women Building Futures » le 27 novembre 2023.

[10] La Commission affirme que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle avait un motif valable de refuser de reprendre sa formation. Elle affirme en outre que l’appelante était visée par une exclusion d’une durée de six semaines à compter de la semaine où elles étaient par ailleurs payables, le 10 décembre 2023.

[11] L’appelante affirme qu’elle a quitté la formation vers laquelle elle a été dirigée parce que le programme [traduction] « ne visait aucunement à permettre aux femmes d’accéder aux métiers ».

Première question en litige (disponibilité)

[12] L’appelante était-elle disponible pour travailler du 28 novembre au 13 décembre 2023?

Analyse

[13] Deux dispositions différentes de la loi exigent qu’une partie appelante démontre qu’elle est disponible pour travailler. La Commission a décidé que l’appelante était inadmissible conformément à ces deux dispositions. Cette dernière doit donc satisfaire aux critères des deux articles pour recevoir des prestations.

[14] Premièrement, la Loi sur l’assuranceemploi (Loi) prévoit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance‑emploi (Règlement) énonce des critères qui expliquent ce que sont des « démarches habituelles et raisonnables »Note de bas de page 2. Je vais examiner ces critères plus loin.

[15] Deuxièmement, la Loi dispose qu’un prestataire doit prouver qu’il est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’il est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3. La jurisprudence énumère trois éléments qu’une partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4. Je vais examiner ces éléments plus loin.

[16] La Commission a décidé que l’appelante était inadmissible au bénéfice des prestations du 28 novembre au 13 décembre 2023 parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler selon ces deux dispositions de la loi.

[17] Je vais maintenant examiner ces deux dispositions moi‑même pour décider si l’appelante était disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[18] La loi énonce les critères dont je dois tenir compte pour décider si les démarches de l’appelante étaient habituelles et raisonnablesNote de bas de page 5. Je dois établir si ses démarches étaient soutenues et si elles étaient orientées vers l’obtention d’un emploi convenable. Autrement dit, l’appelante doit avoir continué de chercher un emploi convenable.

[19] Je dois également prendre en considération les démarches effectuées par l’appelant pour trouver un emploi. Le Règlement dresse une liste de neuf activités de recherche d’emploi dont je dois tenir compte. Voici quelques‑unes de ces activitésNote de bas de page 6 :

  • la communication avec des employeurs éventuels;
  • la présentation de demandes d’emploi;
  • la participation à des entrevues.

[20] La Commission affirme que l’appelante n’a pas fait assez de démarches pour tenter de trouver un emploi. Plus précisément, la Commission affirme que l’appelante n’a pas pu prouver qu’elle était inscrite à une formation vers laquelle on l’a dirigée du 28 novembre au 13 décembre 2023. Elle affirme en outre que l’appelante s’est déclarée non disponible pendant qu’elle étudiait pendant cette période (page GD3‑83).

[21] L’appelante n’est pas d’accord. Elle affirme qu’elle étudiait pour passer son examen de l’Alberta Apprenticeship and Industry Training (AIT) et qu’elle méritait de recevoir des prestations d’assurance‑emploi pendant cette période.

[22] J’estime que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail pour les raisons suivantes.

[23] Premièrement, l’appelante a dit dans son témoignage qu’elle n’était pas disponible pour travailler du 28 novembre au 13 décembre 2023. Elle a également dit à la Commission qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant cette période (page GD3‑83). Je sais que l’appelante a dit dans son témoignage qu’elle méritait des prestations parce qu’elle étudiait en vue de passer l’examen de l’AIT. Toutefois, elle a confirmé à l’audience qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant cette période. Bref, il n’y a aucune preuve que l’appelante faisait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver du travail pendant cette période.

[24] Deuxièmement, l’appelante a quitté la formation vers laquelle elle a été dirigée le 24 novembre 2023. Plus précisément, l’appelante n’a pas pu prouver qu’elle était inscrite à une formation vers laquelle elle a été dirigée du 28 novembre au 13 décembre 2023. Je sais que l’appelante a expliqué qu’elle étudiait pour passer l’examen de l’AIT pendant cette période. Néanmoins, je dois appliquer la loi à la preuve dont je dispose. Autrement dit, je ne peux faire fi de la loi ni remanier celle‑ci même pour des raisons d’ordre humanitaire.

[25] En résumé : L’appelante n’a pas prouvé que ses démarches pour trouver un emploi du 28 novembre au 13 décembre 2023 étaient habituelles et raisonnables.

Capable de travailler et disponible à cette fin

[26] La jurisprudence énonce trois éléments que je dois prendre en considération pour décider si l’appelante était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable d’obtenir un emploi convenable. L’appelante doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 7 :

  1. a) Elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.
  2. b) Elle a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Elle n’a établi aucune condition personnelle qui pourrait avoir limité indûment (c’est‑à‑dire trop) ses chances de retourner travailler.

[27] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de l’appelanteNote de bas de page 8.

Volonté de retourner sur le marché du travail

[28] L’appelante n’a pas démontré qu’elle voulait retourner au travail dès qu’un emploi convenable lui serait offert entre le 28 novembre et le 13 décembre 2023. À ce sujet, l’appelante a dit avec franchise qu’elle étudiait en vue de passer l’examen de l’AIT et qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant cette période.

Démarches pour trouver un emploi convenable

[29] L’appelante n’a pas fait assez de démarches pour trouver un emploi convenable.

[30] J’ai tenu compte de la liste des activités de recherche d’emploi susmentionnée pour statuer sur ce deuxième élément. À l’égard de cet élément, la liste est fournie à titre indicatif seulementNote de bas de page 9.

[31] L’appelante a dit franchement qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle étudiait en vue de passer l’examen de l’AIT du 28 novembre au 13 décembre 2023. Cela ne suffisait pas à satisfaire aux exigences de ce deuxième facteur parce que l’appelante ne faisait aucune démarche pour trouver un emploi convenable parce qu’elle se préparait à l’examen de l’AIT.

Conditions pouvant limiter indûment les chances de retourner au travail

[32] L’appelante a établi des conditions personnelles qui pourraient avoir limité indûment ses chances de retourner au travail.

[33] L’appelante affirme qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant ses études en vue de passer l’examen de l’AIT.

[34] La Commission affirme que l’appelante a mentionné dans ses déclarations qu’elle n’était pas disponible pour travailler du 28 novembre au 13 décembre 2023, parce qu’elle étudiait alors en vue de passer l’examen de l’AIT.

[35] J’estime que l’appelante a indûment limité ses chances de retourner au travail parce qu’elle a dit qu’elle n’était pas disponible pour travailler pendant qu’elle étudiait en vue de passer l’examen de l’AIT. Je réalise que l’appelante a témoigné qu’elle méritait des prestations d’assurance‑emploi parce qu’elle se préparait à passer l’examen de l’AIT. Toutefois, l’appelante a confirmé qu’elle a décidé de quitter le cours de formation vers lequel elle a été dirigée le 24 novembre 2023, et elle n’a pas pu prouver qu’elle était inscrite au cours du 28 novembre au 13 décembre 2023.

Par conséquent, l’appelante était-elle capable de travailler et disponible à cette fin du 28 novembre au 13 décembre 2023?

[36] Compte tenu des conclusions que j’ai tirées sur les trois facteurs, j’estime que l’appelante n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable de trouver un emploi convenable du 28 novembre au 13 décembre 2023.

Deuxième question en litige (fin de la formation dirigée)

[37] L’appelante a-t-elle quitté la formation vers laquelle elle a été dirigée?

[38] Dans l’affirmative, avait-elle un motif valable de quitter cette formation?

Analyse

[39] La loi prescrit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si la Commission a mis fin à la formation vers laquelle elle a été dirigée pour les raisons suivantes :

  1. la partie prestataire, sans motif valable, a abandonné le cours, le programme ou l’activité;
  2. la partie prestataire a fait l’objet d’une expulsion par l’organisme responsable du cours, du programme ou de l’activité en causeNote de bas de page 10.

[40] Une personne peut faire l’objet d’une exclusion d’une à six semaines pour avoir refusé de suivre un cours ou une autre activité liée à l’emploi selon les instructions de la Commission ou d’une autorité désignée. Si le cours ou l’activité devait durer moins de six semaines, le nombre de semaines d’exclusion ne dépasse pas la durée de la période pendant laquelle la partie prestataire aurait suivi le cours ou participé à l’activité si elle avait accepté. Toute partie d’une semaine sera comptabilisée comme une semaine entièreNote de bas de page 11.

[41] Ce principe s’applique également à la partie prestataire visée par une exclusion parce qu’elle a abandonné un cours ou une autre activité liée à l’emploi vers lequel elle a été dirigée par la Commission ou une autorité désignée, alors qu’il restait moins de six semaines à cette activité ou à ce coursNote de bas de page 12.

[42] Pour prouver qu’elle avait un motif valable, la partie prestataire doit démontrer qu’elle a agi comme l’aurait fait toute personne raisonnable et prudente dans des circonstances semblablesNote de bas de page 13.

L’appelante a-t-elle quitté la formation vers laquelle elle a été dirigée?

[43] Je conclus que l’appelante a quitté la formation vers laquelle elle a été dirigée chez « Women Building Futures » le 24 novembre 2023. Je tire cette conclusion parce que l’appelante a dit dans son témoignage qu’elle a décidé de ne pas poursuivre le cours de formation en question le 24 novembre 2023. Je sais que la Commission a fait valoir que l’appelante a été officiellement renvoyée de la formation le 27 novembre 2023. La Commission a également fait valoir que l’appelante a eu la possibilité de retourner et de reprendre ses études, mais qu’elle ne l’a pas fait. Néanmoins, j’accepterai le témoignage de l’appelante selon lequel elle a décidé de quitter le cours le 24 novembre 2023. La décision de l’appelante de quitter la formation vers laquelle elle a été dirigée était antérieure à la date à laquelle elle a été officiellement expulsée le 27 novembre 2023 (page GD3‑64).

L’appelante avait-elle un motif valable de quitter la formation vers laquelle elle a été dirigée?

[44] J’estime que l’appelante n’avait pas de motif valable de quitter la formation vers laquelle elle a été dirigée pour les raisons suivantes.

[45] Premièrement, aucune raison médicale n’a empêché l’appelante de terminer la formation en question à la date de fin prévue du 16 février 2024. Je réalise que l’appelante a témoigné que la formation [traduction] « ni visait aucunement à permettre aux femmes d’accéder aux métiers ». Toutefois, c’était le point de vue de l’appelante sur la formation. Néanmoins, j’estime qu’une personne raisonnable et prudente aurait poursuivi le cours malgré ses réserves quant à l’approche globale et à la méthode d’enseignement offerte.

[46] Deuxièmement, l’appelante n’a pas agi comme l’aurait fait une personne raisonnable et prudente dans des circonstances semblables. Plus précisément, une personne raisonnable et prudente aurait suivi la formation vers laquelle elle a été dirigée jusqu’à la date de fin prévue pour voir si elle avait besoin d’autres instructions. Je réalise que l’appelante a écrit que le programme de formation vers lequel elle a été dirigée était une fraude, car l’école n’a pas mis l’élève en contact avec l’employeur (document GD2). Il s’agissait cependant de l’opinion de l’appelante sur cette formation. Bref, j’admettrai que l’appelante avait droit à sa propre opinion. Toutefois, j’estime qu’une personne raisonnable et prudente n’aurait pas abandonné le cours et qu’elle aurait plutôt poursuivi jusqu’à la date de fin prévue du 16 février 2024.

[47] Enfin, la Commission a correctement suivi le Guide de la détermination de l’admissibilité lorsqu’elle a exclu l’appelante du bénéfice des prestations pendant six semaines. Je tire cette conclusion parce que l’appelante et la Commission ont toutes deux convenu que la date de fin prévue du cours en question était le 16 février 2024.

Témoignage supplémentaire de l’appelante

[48] Je suis conscient du fait que l’appelante a témoigné que la Commission lui avait retiré huit semaines de son droit à des prestations. Toutefois, la Commission a fait valoir que le paiement à l’appelante a été retardé de sept semaines au lieu de six semaines parce qu’elle n’était pas disponible du 28 novembre au 13 décembre 2023. Je suis d’accord avec la Commission sur cette question.

[49] Enfin, les prestations d’assurance‑emploi de l’appelante ont repris du 21 janvier au 13 avril 2024. Avant cela, l’appelante avait reçu des prestations pour la période du 25 juin au 27 novembre 2023. Sur cette question, je conviens avec la Commission que l’appelante avait épuisé son droit à 38 semaines de prestations régulières d’assuranceemploi.

Conclusion

Première question en litige

[50] L’appelante n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi du 28 novembre au 13 décembre 2023. Pour cette raison, je conclus que l’appelante ne peut pas toucher de prestations d’assurance‑emploi pour cette période.

[51] Par conséquent, l’appel est rejeté.

Deuxième question en litige

[52] L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable de quitter le programme de formation vers lequel elle a été dirigée. Cela signifie qu’elle était visée par une exclusion d’une durée de six semaines du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi à compter de la semaine où elles étaient par ailleurs payables, le 10 décembre 2023.

[53] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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