[TRADUCTION]
Citation : SJ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 1080
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | S. J. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (658927) datée du 19 avril 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Audrey Mitchell |
Mode d’audience : | En personne |
Date de l’audience : | Le 27 juin 2024 |
Personne présente à l’audience : | Appelant |
Date de la décision : | Le 19 juillet 2024 |
Numéro de dossier : | GE-24-1861 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelant.
[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand il l’a fait. L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.
Aperçu
[3] L’appelant a quitté trois de ses emplois en tant que superviseur. Il a quitté son premier emploi le 3 avril 2023, son deuxième le 18 août 2023 et son troisième le 25 janvier 2024. L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi après avoir quitté son troisième emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de l’appelant pour quitter ses emplois. Elle a conclu que ce dernier a quitté volontairement ses emplois (c’est-à-dire qu’il a choisi de quitter ses emplois) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.
[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé que quitter ses emplois était la seule solution raisonnable dans son cas.
[5] Pour le premier emploi, la Commission affirme que l’appelant aurait pu demeurer en poste pendant qu’il cherchait un autre travail, étant donné que la situation ne semblait pas intolérable.
[6] L’appelant n’est pas d’accord et affirme qu’un employé du service des technologies de l’information lui a crié après devant les personnes qu’il supervisait, ce qui l’a rendu mal à l’aise.
[7] Pour le deuxième emploi, la Commission affirme que l’appelant aurait pu travailler avec son supérieur pour résoudre tout conflit existant. Elle ajoute qu’il aurait pu conserver cet emploi jusqu’à ce qu’il en trouve un autre.
[8] L’appelant n’est pas d’accord et affirme que s’il était demeuré en poste, il n’aurait pas pu envoyer de curriculum vitæ pour trouver un autre travail puisqu’il travaillait de jour.
[9] Pour le troisième emploi, la Commission affirme que l’appelant aurait pu travailler avec le service des ressources humaines pour tenter de résoudre ses conflits au travail. Elle ajoute que l’appelant aurait pu rester à l’emploi pendant qu’il en cherchait un autre.
[10] L’appelant n’est pas d’accord. Il dit qu’il a été insulté et s’est senti gêné lorsque son employeur lui a crié après devant les autres. L’appelant se demande comment il aurait pu demeurer en poste alors que son gestionnaire a dit qu’il ne méritait pas son travail.
Question en litige
[11] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement ses trois emplois sans justification?
[12] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite décider s’il était fondé à quitter ses emplois.
Analyse
Les parties sont d’accord sur le fait que l’appelant a quitté volontairement ses emplois
[13] J’accepte le fait que l’appelant a quitté volontairement ses trois emplois. L’appelant reconnaît qu’il a quitté ses emplois respectivement le 3 avril 2023, le 18 août 2023 et le 25 janvier 2024. Je n’ai aucune preuve du contraire.
Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement ses emplois
[14] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement ses emplois quand il l’a fait.
[15] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 1. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.
[16] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 2.
[17] Parmi les circonstances à prendre en considération, il y a l’excès d’heures supplémentaires ou la non-rémunération de celles-ciNote de bas de page 3, et les relations conflictuelles avec un supérieur si la personne employée n’est pas la principale responsable de ces relationsNote de bas de page 4. Cependant, la personne employée doit discuter des conditions de travail avec son employeur pour savoir s’il est possible de les modifier afin de tenir compte de ses préoccupationsNote de bas de page 5.
[18] L’appelant est responsable de prouver que son départ était fondéNote de bas de page 6. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter ses emplois était la seule solution raisonnable. Pour trancher la question, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand l’appelant a quitté ses emplois.
Premier emploiNote de bas de page 7
[19] L’appelant affirme avoir quitté son emploi parce que son poste de travail n’était pas propre ni bien aménagé. Il ajoute qu’il n’envisageait pas d’avenir avec cet employeur.
[20] La Commission affirme que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Elle précise que l’appelant aurait pu conserver son emploi jusqu’à ce qu’il en trouve un autre.
[21] J’estime que l’appelant aurait pu trouver un autre emploi avant de démissionner.
[22] L’appelant a été embauché en tant que superviseur de la production. Il a occupé ce poste une seule journée.
[23] L’appelant a parlé à la Commission des raisons pour lesquelles il a quitté son emploi. Il a dit que l’employeur ne lui avait pas offert son propre bureau. Il a dit qu’il devait s’asseoir avec une personne qui travaille aux opérations même s’il avait été embauché pour un poste de supervision. Cependant, l’appelant a dit qu’il n’avait pas parlé à l’employeur de l’état de son poste de travail. Il a ajouté que l’environnement était trop poussiéreux et qu’il ne voulait pas perdre son temps à cet endroit.
[24] La Commission a parlé à l’employeur. Celui-ci a déclaré que l’appelant a envoyé un courriel quelques jours après avoir quitté son emploi pour dire qu’il n’était pas satisfait du bureau qu’on lui avait attribué parce qu’il était sale. L’employeur a dit qu’il avait vérifié le bureau, qu’il avait été nettoyé et qu’il était dans un état acceptable. Il a ajouté que l’appelant s’était peut-être rendu compte que l’emploi ne lui convenait pas.
[25] J’ai interrogé l’appelant au sujet de ce que l’employeur avait déclaré à la Commission. L’appelant a simplement dit que ce que l’employeur avait déclaré à propos du bureau était faux. Cependant, il a admis que l’emploi ne lui convenait pas.
[26] La Commission a déclaré que l’appelant n’avait pas accordé assez de temps à l’employeur pour régler les problèmes liés à l’emploi. L’appelant a répondu que le bureau sale ne lui posait pas problème. Il a dit que l’emploi n’était pas dans le domaine dans lequel il voulait travailler et que c’est la raison pour laquelle il a quitté son emploi.
[27] Je n’ai aucune raison de douter de la déclaration de l’appelant selon laquelle le poste de travail qu’on lui a attribué ne répondait pas à ses attentes. Cependant, j’estime selon le témoignage de l’appelant qu’il a quitté son emploi parce qu’il ne lui convenait pas. Bien que je comprenne cela, je juge que l’appelant aurait pu demeurer en poste jusqu’à ce qu’il trouve un autre travail.
[28] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que le départ de l’appelant n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi quand il l’a fait.
Deuxième emploiNote de bas de page 8
[29] L’appelant affirme avoir quitté son emploi à cause de la façon dont un collègue du service des technologies de l’information lui a parlé. Il précise aussi qu’il n’était pas payé pour ses heures supplémentaires et qu’il n’avait pas d’avantages sociaux.
[30] La Commission affirme que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce que le départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Elle précise que l’appelant aurait pu conserver son emploi pendant qu’il en cherchait un autre étant donné que la situation ne semblait pas intolérable.
[31] J’estime que l’appelant aurait pu demeurer en poste et essayer de régler les problèmes avec son employeur. Selon moi, la situation dans laquelle il se trouvait au cours des quelque six semaines où il a travaillé pour l’employeur n’était pas à ce point intolérable qu’il a dû quitter son emploi quand il l’a fait.
[32] L’appelant a travaillé comme superviseur dans le cadre de son deuxième emploi. Il a déclaré que le vice-président le connaissait très bien en tant que fournisseur. Le vice-président a donc téléphoné à l’appelant pour lui demander s’il voulait travailler pour lui. L’appelant a dit qu’à son premier jour de travail, il n’avait pas ni table ni machine. Le vice‑président lui a demandé d’aider d’autres membres du personnel.
[33] L’appelant a déclaré que l’une des raisons pour lesquelles il a quitté son emploi était l’excès d’heures supplémentaires. Il a affirmé qu’on lui avait dit qu’il n’avait pas le droit d’être rémunéré pour ses heures supplémentaires parce qu’il était un employé salarié. Cependant, il a dit qu’il n’était pas d’accord et que son offre d’emploi n’en faisait pas mention.
[34] L’employeur a dit à la Commission qu’il n’a pas forcé l’appelant à faire des heures supplémentaires et qu’il ne peut pas le faire légalement. J’ai interrogé l’appelant à ce sujet. Il a reconnu que l’employeur ne l’avait pas forcé à faire des heures supplémentaires, mais il a dit que l’employeur lui demandait sans cesse de travailler. J’ai demandé à l’appelant s’il avait pu dire non. Il a répondu qu’il aurait pu dire non, mais qu’il ne l’a pas fait parce qu’il sentait la pression au travail. Il a ajouté que ce n’était pas le problème principal qui l’avait amené à quitter son emploi. En fin de compte, il travaillait seulement de 8 h à 16 h 30.
[35] L’appelant a envoyé à la Commission des courriels de la part du service de la paie et des ressources humaines et des courriels à l’attention du service. Le 13 juillet 2023, l’appelant a demandé à l’employeur s’il allait recevoir une rémunération pour ses heures supplémentaires dans le cas où il travaillait plus de 42,5 heures par semaine. L’employeur a répondu que lorsqu’il travaillait moins de 8,5 heures par jour, il était payé 8,5 heures par jour en tant qu’employé salarié. Il a ajouté que, habituellement, le personnel salarié n’est pas rémunéré pour les heures supplémentaires.
[36] L’appelant a déclaré que la pratique de l’employeur, c’est-à-dire de s’attendre à ce qu’il travaille après les heures régulières sans recevoir une rémunération pour ses heures supplémentaires, est contraire à la loi. Bien que l’appelant ait dit que l’employeur lui demandait sans cesse de travailler, il a reconnu que son employeur ne l’avait pas forcé à travailler et qu’il aurait pu dire non. J’estime que dans les circonstances, l’appelant aurait simplement pu dire à l’employeur qu’il ne pouvait pas faire d’heures supplémentaires. Quant au fait de ne pas recevoir de rémunération pour les heures supplémentaires en tant qu’employé salarié, l’appelant aurait pu consulter l’autorité provinciale responsable des normes d’emploi à ce sujet.
[37] L’appelant a aussi mentionné qu’il ne recevait pas d’avantages sociaux collectifs par l’entremise de l’employeur. Il a dit à la Commission qu’il avait interrogé l’employeur sur les prestations de santé qu’on lui avait offertes à l’embauche. Il a dit que l’employeur répétait qu’il attendait que sa demande soit acceptée.
[38] Dans un échange de courriels avec l’appelant datés du 24 et du 25 juillet 2023, l’employeur a confirmé à l’appelant qu’il n’y avait pas de délai de carence pour recevoir des prestations, mais qu’il attendait que la compagnie d’assurance traite ses documents et délivre une carte.
[39] L’appelant a déclaré que l’employeur avait accepté de lui verser des prestations, mais qu’il ne l’avait jamais fait. Il a dit que si l’employeur avait présenté une demande, il voulait en voir la preuve. Toutefois, l’appelant était certain qu’il n’avait jamais présenté de demande de prestations.
[40] Selon le relevé d’emploi produit par l’employeur, l’appelant a commencé à travailler le 5 juillet 2023. Je ne suis pas convaincue que le fait de ne pas délivrer une carte de prestations démontre que l’employeur n’a pas envoyé d’informations à la compagnie d’assurance, même s’il s’agit d’une période pouvant aller jusqu’aux six semaines pendant lesquelles l’appelant a travaillé pour l’employeur. J’estime que l’appelant aurait pu continuer de faire un suivi, soit auprès de l’employeur, soit directement auprès de la compagnie d’assurance, pour finaliser le tout.
[41] L’appelant a parlé à la Commission d’un incident impliquant un écran d’ordinateur qui s’est produit deux jours avant qu’il envoie une lettre de démission à son employeur. Il a dit qu’un de ses écrans ne fonctionnait pas. Après en avoir vu un de rechange, il a décidé de l’emprunter. Il a ajouté qu’un employé du service des technologies de l’information lui a dit qu’il n’avait pas obtenu la permission de l’utiliser. Lorsque l’appelant en a parlé à son gestionnaire, celui-ci a admis qu’il aurait dû demander la permission avant d’utiliser l’écran.
[42] L’appelant a déclaré que l’employé du service des technologies de l’information lui avait crié après devant la personne qu’il supervisait. L’appelant a dit qu’il avait organisé une rencontre avec le vice-président et qu’il lui avait parlé de la façon dont l’employé du service des technologies de l’information lui avait crié après. L’appelant a dit que le vice-président avait répondu que cette personne travaillait pour l’entreprise depuis longtemps et lui avait suggéré d’oublier l’incident.
[43] J’ai demandé à l’appelant s’il avait essayé de parler à une autre personne que le vice-président au sujet de l’incident. Il a répondu que non. Il a dit que lorsqu’il a essayé de s’adresser au service des ressources humaines, on lui a dit de régler la situation avec le vice-président étant donné qu’il occupait un poste supérieur. Quant au président de l’entreprise, l’appelant soutient qu’il était à l’hôpital à ce moment‑là.
[44] La Commission a déclaré que l’appelant aurait pu conserver son emploi pendant qu’il en cherchait un autre puisque la situation ne semblait pas intolérable. J’ai interrogé l’appelant à ce sujet. Il a dit qu’il se sentait mal à l’aise étant donné que l’employé du service des technologies de l’information lui avait crié après devant la personne qu’il supervisait. Il a ajouté que la situation liée aux heures supplémentaires et le fait de ne pas recevoir de prestations l’affectaient. Il estimait qu’il n’était pas traité équitablement. Il a précisé qu’il avait été embauché pour être superviseur, mais qu’il s’occupait du fonctionnement des machines.
[45] La preuve de l’appelant ne me convainc pas qu’il a dû quitter son emploi quand il l’a fait. Je ne doute pas que le fait d’avoir un conflit avec une autre personne devant une personne subalterne soit inconfortable. De plus, il aurait été idéal que le vice-président ou qu’une autre personne en ait parlé à l’employé du service des technologies de l’information. Cependant, je ne suis pas convaincue que cette seule expérience soit un motif valable pour quitter cet emploi.
[46] J’estime que l’appelant aurait pu retourner voir son vice-président pour lui expliquer comment un employé qui lui crie après devant son personnel peut miner son autorité à son égard. Sinon, l’appelant aurait pu avoir cette conversation avec l’employé du service des technologies de l’information pour s’assurer que cela ne se reproduise plus.
[47] Je ne considère pas non plus que l’ensemble des plaintes de l’appelant constitue des circonstances qui démontrent que le départ de l’appelant était la seule solution raisonnable dans son cas. Parmi les plaintes de l’appelant, notons le retard à recevoir des prestations, la pression de faire des heures supplémentaires sans être rémunéré parce qu’il était salarié, et le fait de devoir s’occuper du fonctionnement des machines alors qu’il était superviseur, et ce, tout au long des six semaines pendant lesquelles il a travaillé pour l’employeur.
[48] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que le départ de l’appelant n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, je juge qu’il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi quand il l’a fait.
Troisième emploiNote de bas de page 9
[49] L’appelant affirme avoir quitté cet emploi parce que son employeur lui a crié après devant les membres de son personnel. Il dit que c’était très gênant et que cela l’a rendu mal à l’aise.
[50] La Commission affirme que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce que son départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Elle précise que l’appelant aurait pu travailler avec le service des ressources humaines pour tenter de régler le conflit. Elle ajoute que l’appelant aurait pu chercher un autre emploi étant donné que la situation ne semblait pas intolérable.
[51] Je considère que l’appelant aurait pu tenter de régler la situation avec son gestionnaire, avec ou sans l’aide du service des ressources humaines ou du directeur général. J’estime qu’il aurait aussi pu trouver un autre emploi avant de quitter celui-ci.
[52] L’appelant travaillait comme superviseur. Il a déclaré que ses tâches consistaient notamment à superviser les opérations, à programmer les machines, à résoudre des problèmes, et à veiller à l’efficacité du travail, au respect des exigences en matière de santé et de sécurité et au maintien des normes. L’appelant a déclaré qu’il supervisait deux personnes pour le quart de jour et deux autres personnes pour le deuxième quart.
[53] L’appelant a décrit la structure de gestion dans laquelle il travaillait. Il relevait d’un gestionnaire qui se rapportait à un directeur général. Il a dit qu’il y avait un service des ressources humaines ainsi que des personnes qui supervisent l’atelier d’outillage.
[54] Dans sa demande de prestations, l’appelant a déclaré que son gestionnaire n’avait pas reconnu ses efforts au travail et qu’il lui avait crié après devant d’autres responsables de la supervision. Il a dit qu’il avait déjà demandé à son gestionnaire de lui parler en privé, mais celui-ci a insisté pour le faire devant d’autres personnes.
[55] L’appelant a déclaré qu’il avait autrefois sa propre entreprise qui approvisionnait l’employeur. Il a dit que c’est ainsi que le gestionnaire le connaissait. Le gestionnaire lui a offert un poste de superviseur. L’appelant a accepté l’offre. Toutefois, l’employeur utilisait un logiciel différent de celui qu’utilisait l’appelant dans sa propre entreprise. Il a dit que la haute direction ne lui permettait pas d’utiliser le logiciel qu’il connaissait. Il a donc dû apprendre le nouveau logiciel. Cela a nui à la vitesse de son travail.
[56] L’appelant a déclaré qu’il avait eu de petites disputes avec son gestionnaire au début. Il a précisé que juste avant Noël, il avait dit à son gestionnaire que s’il n’était pas satisfait de son travail, il devait le lui dire et il démissionnerait. Selon l’appelant, son gestionnaire lui avait dit de simplement prendre son temps et d’essayer d’accélérer les choses.
[57] Dans sa demande de révision, l’appelant a décrit l’incident qui l’a amené à quitter son emploi. Il a dit à la Commission que son gestionnaire lui avait crié après parce qu’il n’avait pas effectué une tâche comme il le voulait. Comme le gestionnaire l’a fait devant d’autres membres du personnel, l’appelant a dit qu’il s’est senti très gêné. L’appelant a déclaré avoir dit à son gestionnaire qu’il n’était pas à l’aise dans son poste. Il a démissionné le jour même.
[58] J’ai demandé à l’appelant si son gestionnaire lui avait déjà parlé en haussant le ton devant les autres. L’appelant a répondu qu’une semaine avant le dernier incident, son gestionnaire et lui avaient eu une grosse dispute. Il a dit qu’il voulait juste que son gestionnaire le prenne à part pour lui parler. Il a ajouté que si on lui crie après devant d’autres personnes, il n’est pas en mesure de faire son travail de superviseur.
[59] J’ai demandé à l’appelant s’il avait parlé de l’incident à une personne des ressources humaines. L’appelant a répondu que non. Il a dit qu’il n’avait pas été présenté correctement au personnel du service, y compris le directeur général. Il a dit qu’on lui avait présenté le service des ressources humaines, mais que les responsables étaient en formation et qu’il n’avait pas eu l’occasion de les rencontrer.
[60] L’appelant a ajouté que même s’il s’était plaint de ce qui s’était passé, les personnes qui travaillent aux opérations devant qui son gestionnaire lui avait crié après ne le respecteraient plus parce qu’il avait perdu sa dignité.
[61] La Commission a parlé à la représentante des ressources humaines de l’employeur. Celle-ci a dit qu’elle ne savait pas que l’appelant ne s’entendait pas avec son gestionnaire. Elle a dit que le gestionnaire était très gentil et qu’il n’avait jamais crié après personne. J’ai interrogé l’appelant à ce sujet. Il a répondu que ce que la représentante des ressources humaines a dit n’était pas vrai. Il a ajouté que le gestionnaire avait un [traduction] « tempérament imprévisible ».
[62] La preuve de l’appelant et celle de la Commission sur le fait de savoir si le gestionnaire aurait crié après une autre personne en milieu de travail sont différentes. Malgré tout, j’estime que si le gestionnaire avait effectivement crié après l’appelant, celui-ci aurait pu tenter de régler son conflit avec le gestionnaire. L’appelant aurait pu essayer d’obtenir de l’aide auprès du service des ressources humaines ou du directeur général.
[63] La déclaration que la représentante des ressources humaines a faite à la Commission appuie le fait que l’appelant aurait pu demander de l’aide pour régler le conflit avec son gestionnaire. Elle a dit à la Commission que le service des ressources humaines était offert à tout le personnel qui souhaitait obtenir de l’aide. Elle a ajouté qu’il semble que l’appelant n’ait pas non plus tenté de régler les choses avec son gestionnaire puisqu’il a démissionné le jour même.
[64] Comme je l’ai déjà mentionné, j’ai interrogé l’appelant à propos de ce que la représentante des ressources humaines a dit. Il a dit que cela s’applique à tout le monde. Il a expliqué que si son gestionnaire avait un problème avec lui, il aurait dû orienter l’appelant vers le service des ressources humaines. Comme il avait perdu le respect des autres, l’appelant a dit qu’il n’avait plus le cœur de travailler pour l’employeur. Il a ajouté qu’il se sentait abattu.
[65] La Commission a soutenu que l’appelant aurait pu conserver son emploi pendant qu’il en cherchait un autre puisque la situation ne semblait pas intolérable. L’appelant a répondu qu’il était insulté et qu’il se sentait gêné. Il s’est demandé comment il pouvait s’attendre à regagner sa dignité et le respect des autres s’il demeurait en poste.
[66] L’appelant a fait référence à l’article de loi qui précise qu’une partie prestataire est fondée à quitter un emploi, qu’elle ait ou non des relations conflictuelles avec un supérieur. Que le gestionnaire de l’appelant lui ait parlé en haussant le ton ou qu’il lui ait crié après devant les autres, je ne suis pas convaincue que le départ de l’appelant était la seule solution raisonnable dans son cas.
[67] J’estime que l’appelant et son employeur ont eu un conflit en raison du temps que l’appelant a pris pour accomplir son travail. De plus, je juge que c’était quelque chose qui pouvait être résolu avec ou sans l’aide du service des ressources humaines ou du directeur général. Selon moi, l’appelant n’en a pas fait assez pour régler le conflit. J’estime que, dans les circonstances, l’appelant n’a pas démontré que son gestionnaire le contrariait.
[68] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que le départ de l’appelant n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, je conclus qu’il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi quand il l’a fait.
Conclusion
[69] Je conclus que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.
[70] Par conséquent, l’appel est rejeté.