[TRADUCTION]
Citation : MS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 686
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | M. S. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada datée (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Jean Yves Bastien |
Date de la décision : | Le 28 février 2024 |
Numéro de dossier : | GE-23-3241 |
Sur cette page
- Décision
- Aperçu
- Questions en litige
- Analyse
- L’appel de l’appelante est-il en retard?
- L’appelante n’a pas d’explication raisonnable
- Conclusion
Décision
[1] L’appel n’ira pas de l’avant. Je ne donne pas plus de temps à l’appelante pour faire appel. Autrement dit, je n’accepte pas l’appel tardif. La présente décision explique pourquoi.
Aperçu
[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a rendu une décision dans le cas de l’appelante. Celle-ci a demandé à la Commission de réviser sa décision.
[3] La Commission a effectué sa révision, puis elle a communiqué sa décision à l’appelante par téléphone le 28 septembre 2023. La Commission a maintenu sa décision sur la question en litige et a refusé de verser des prestations d’assurance-emploi à l’appelante.
[4] Le même jour, soit le 28 septembre 2023, la Commission a fait un suivi et a envoyé à l’appelante une lettre confirmant sa décision de révision.
[5] L’appelante n’était pas d’accord avec la décision découlant de la révision. Elle a donc envoyé un avis d’appel par courriel au Tribunal de la sécurité sociale à la fin de la semaine, le 17 novembre 2023.
[6] Il y a une date limite pour faire appel au Tribunal. Une partie appelante qui présente son appel en retard doit fournir une explication pour son retard.Note de bas de page 1 Le Tribunal accordera plus de temps pour faire appel si la partie appelante a une explication raisonnable pour son retardNote de bas de page 2.
[7] L’appelante soutient avec vigueur que son appel n’était pas en retard. C’est probablement pour cette raison qu’elle n’essaie pas d’aborder la question du « retard » même si le Tribunal lui a demandé de le faire dans trois lettres qu’il lui a envoyées.
Questions en litige
[9] Je dois trancher les deux questions suivantes :
- L’appel de l’appelante est-il en retard?
- Dans l’affirmative, a-t-elle une explication raisonnable pour son retard?
Analyse
[10] Si une partie appelante n’est pas d’accord avec la décision de révision de la Commission, elle peut faire appel au TribunalNote de bas de page 3. Elle doit cependant faire appel dans les 30 jours suivant la date où la Commission lui a fait part de sa décisionNote de bas de page 4.
L’appel de l’appelante est-il en retard?
[11] J’estime que l’appel de l’appelante est en retard.
Quand la Commission a-t-elle communiqué sa décision à l’appelante?
[12] Je juge qu’il est plus probable qu’improbable que la Commission ait communiqué sa décision à l’appelante par téléphone le matin du 28 septembre 2023.
[13] La Commission doit prouver qu’elle a informé l’appelante de sa décisionNote de bas de page 5. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle a informé l’appelante de sa décision au moment où elle affirme l’avoir fait.
[14] Il incombe à la Commission de communiquer sa décision à la partie prestataireNote de bas de page 6. Pour communiquer une décision, la Commission doit démontrer qu’elle a informé la partie prestataire du « contenu » et des « conséquences » de sa décisionNote de bas de page 7.
[15] L’appelante affirme avoir seulement reçu l’avis de décision de la Commission lorsqu’elle a reçu sa lettre par la poste le 19 octobre 2023, soit 21 jours après que la Commission lui a posté l’avis.
[16] Cependant, les dossiers montrent que la Commission a effectué sa révision et a ensuite communiqué sa décision à l’appelante par téléphone le 28 septembre 2023 à 11 h 23, heure normale de l’Atlantique. Elle l’a informée que [traduction] « sans permis de travail valide, l’inadmissibilité pour un permis de travail expiré demeure inscrite sur sa demande. La cliente a été avisée que si elle veut faire appel au Tribunal de la sécurité sociale, les instructions à ce sujet seront disponibles dans la lettre qu’elle recevra à titre d’avis de décisionNote de bas de page 8. »
[17] La Cour fédérale nous informe que [traduction] « l’exigence que la décision soit communiquée » a été jugée par la Cour d’appel fédérale comme signifiant [traduction] « une action positive […] de la part du décideur afin de communiquer ses décisions aux parties directement touchées » (Atlantic Coast Scallop Fishermen’s Association et al v Canada (Minister of Fisheries and Oceans), (1995), 189 NR 220 (FCA), à la page 222 [en anglais seulement]). La Cour d’appel fédérale a également statué que « [l]e fait d’attendre les motifs ne constitue pas une excuse acceptable pour le défaut de déposer une demande dans les délais prescrits » (Canada (Procureur général) c Trust Business Systems, 2007 CAF 89, au paragraphe 27Note de bas de page 9).
[18] Par conséquent, je conclus que la Commission a prouvé le contenu et le moment de son appel téléphonique avec l’appelante le 28 septembre 2023, car ces détails sont clairement consignés dans les documents contemporains du dossier d’appelNote de bas de page 10.
L’appelante prétend avoir reçu la lettre de la Commission seulement beaucoup plus tard
[19] L’appelante prétend avoir reçu la lettre de la Commission contenant l’avis de décision seulement le 19 octobre 2023. C’est 21 jours après la date de la lettre.
[20] Cependant, le règlement traite du moment où une décision a été communiquée, et non du moment où une lettre est réellement arrivée ou du moment où la partie appelante s’est rendue à sa boîte aux lettres pour récupérer le courrier.
[21] Dans la présente affaire, la question de savoir quand l’appelante a reçu la lettre de la Commission n’est pas pertinente. En effet, la décision de la Commission lui avait déjà été communiquée par téléphone le 28 septembre 2023.
Quand l’appelante a-t-elle présenté son avis d’appel au Tribunal?
[22] Le vendredi 17 novembre 2023, l’appelante a envoyé son avis d’appel au Tribunal par courriel à 17 h 31. Le greffe du Tribunal était alors fermé pour la fin de semaine. Les Règles de procédure du Tribunal de la sécurité sociale prévoient qu’un document est considéré comme ayant été déposé à la date où le Tribunal le reçoitNote de bas de page 11. Le Tribunal a reçu et traité l’avis d’appel de l’appelante le 21 novembre 2023. C’est donc la date que je vais utiliser.
Combien de jours se sont écoulés entre la communication de la décision de la Commission à l’appelante et la présentation de son avis d’appel au Tribunal?
[23] Il y a 54 jours entre la date à laquelle la Commission a communiqué sa décision à l’appelante et la date à laquelle le Tribunal a reçu son avis d’appel.
[24] Même si l’appelante faisait valoir qu’il y avait des renseignements précis dont elle avait besoin dans la lettre qui ne lui ont pas été communiqués lors de l’appel téléphonique du 28 septembre 2023, cela ne l’aiderait pas. Le Tribunal accorde dix jours à Postes Canada pour livrer une lettre n’importe où au Canada. Dans ce cas, le délai en question serait donc réduit à 44 jours.
[25] Cependant, ces deux dates dépassent le délai légal de 30 jours.
[26] Je n’ai pas à me prononcer sur une date précise pour conclure que l’appel est en retard. En effet, toutes ces dates possibles sont plus de 30 jours à compter du 21 novembre 2023, date à laquelle l’appelante a fait appel au Tribunal. Aucun élément de preuve ne laisse croire qu’une date possible se situe à moins de 30 jours de cette date. Par conséquent, l’appel de l’appelante est en retard.
L’appelante n’a pas d’explication raisonnable
[27] J’estime que l’appelante n’a fourni aucune explication pour justifier son retard. En fait, même si elle a reçu trois lettres du Tribunal lui demandant de fournir une explication raisonnable pour son retard, elle n’a jamais abordé cette question.
[28] Le Tribunal a envoyé des lettres à l’appelante aux dates suivantes :
- Le 19 décembre 2023, pour lui demander [traduction] « d’expliquer pourquoi son appel est en retard (p. ex., y a-t-il une explication raisonnable pour le retardNote de bas de page 12?)
- Le 19 janvier 2024, pour lui expliquer que le Tribunal traitait toujours son avis d’appel parce qu’il semblait être plus de 30 jours après sa décision de révision. L’appelante a été dirigée vers la case du formulaire d’avis d’appel où il est écrit qu’elle doit expliquer son retardNote de bas de page 13.
- La lettre du 19 janvier 2024 disait également que puisqu’il était possible qu’elle ait mal compris la procédure, il prolongerait le délai pour qu’elle soumette une explication sur la raison pour laquelle son avis d’appel à la section de l’assurance-emploi de la division générale a été soumis après le délai de 30 jours. La lettre précisait aussi que sa date limite était reportée au 26 janvier 2024Note de bas de page 14.
- Le 6 février 2024, pour discuter du délai prévu par la loi pour faire appel au Tribunal, tel qu’il est énoncé à l’article 52(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social. L’article 52(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social a été cité, et il comprend l’expression « dans les trente jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision [l’avis de décision] ». Encore une fois, le Tribunal a attiré l’attention de l’appelante sur son obligation d’expliquer pourquoi elle a soumis son appel au Tribunal en retard. Cette lettre se terminait ainsi : [traduction] « Veuillez expliquer au Tribunal pourquoi votre avis d’appel est en retard et pourquoi votre explication est raisonnableNote de bas de page 15. »
[29] Même si l’appelante a eu plusieurs occasions d’expliquer au Tribunal pourquoi elle avait soumis son avis d’appel en retard, elle a refusé d’aborder la question. Elle a plutôt continué de contester la décision de la Commission ainsi que les calculs du Tribunal liés au délai de 30 jours.
Conclusion
[30] L’appelante n’a fourni aucune explication pour son retard. Pour cette raison, je ne peux pas lui donner plus de temps pour faire appel.
[31] Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.