Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 1145

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : S. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Julie Duggan

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale
le 16 juillet, 2024 (GE-24-1647)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Mode d’audience : Par écrit
Date de la décision : Le 24 septembre, 2024
Numéro de dossier : AD-24-513

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Décision

[1] J’accueille l’appel de S. B. parce que la division générale n’a pas suivi un processus équitable.

[2] Je renvoie son dossier à la division générale pour qu’une ou un autre membre tranche la question.

Aperçu

[3] S. B. est le prestataire dans la présente affaire.

[4] Il a porté la décision de révision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal. Il a ensuite demandé que l’audience se déroule par écrit.

[5] La division générale a envoyé une lettre au prestataire pour lui dire qu’une audience par écrit ne permettrait pas une audience complète et équitable de l’appelNote de bas page 1. Elle a proposé une audience en personne. Elle lui a demandé d’aviser la division générale s’il n’était pas d’accord. Il a répondu qu’il voulait un appel par écritNote de bas page 2.

[6] La division générale a prévu une audience en personne. Le prestataire n’y a pas assisté. La division générale a quand même tenu l’audience et a rejeté l’appel du prestataire.

[7] Maintenant, je dois décider s’il était juste que la division générale aille de l’avant avec l’audience et tranche l’appel.

Question en litige

[8] La division générale a-t-elle suivi un processus injuste lorsqu’elle a modifié le mode d’audience et qu’elle a tenu l’audience sans le prestataire?

Analyse

La procédure de la division générale était injuste envers le prestataire

[9] Dans sa demande à la division d’appel, le prestataire a signalé deux erreurs. L’une des erreurs est que la division générale n’a pas respecté l’équité procéduraleNote de bas page 3.

[10] La division générale commet une erreur si elle suit un processus injusteNote de bas page 4. On appelle cela une erreur d’équité procédurale ou de justice naturelle. La question est de savoir si une personne connaissait la preuve qu’elle devait réfuter, si elle a eu l’occasion d’y répondre et si un décideur impartial a examiné sa preuve de façon complète et équitableNote de bas page 5.

[11] La loi prévoit que le Tribunal doit tenir une audience selon le mode demandé par les prestatairesNote de bas page 6. La loi prévoit des exceptions. Le Tribunal peut tenir une audience selon un mode différent lorsque le choix de la partie prestataire ne permet pas une audience complète et équitableNote de bas page 7.

[12] Les règles du Tribunal prévoient qu’il peut tenir une audience orale s’il est d’avis que la partie prestataire a reçu l’avis d’audienceNote de bas page 8. Une audience en personne est un type d’audience orale.

[13] Dans les circonstances, il était injuste que la division générale ait tenu l’audience sans le prestataire. Après avoir décidé que le prestataire avait reçu l’avis d’audience, elle avait le pouvoir discrétionnaire de tenir l’audience sans lui, mais il était injuste de le faire étant donné les circonstances.

[14] Voici ce que la division générale a écrit dans sa lettre pour expliquer pourquoi elle avait l’intention de tenir une audience en personne :

[traduction]

Après avoir examiné tous les éléments de preuve disponibles pour votre appel, je ne pense pas qu’une audience par écrit permettra une audience complète et équitable dans la présente affaire. Je reconnais les nouveaux éléments de preuve que vous avez présentés, mais j’ai encore quelques questions à vous poser sur ce qui s’est passé avant que vous arrêtiez de travailler chez Walmart. Et, à mon avis, je ne crois pas que le fait de poser ces questions par écrit permettra une audience complète puisque ce format ne permet pas facilement de poser des questions de suivi, au besoin, et pourrait donc limiter tout autre élément de preuve que vous fournirez. Par conséquent, j’envisage plutôt de tenir l’audience en personne parce que je pense qu’elle permettrait une audience complète et équitableNote de bas page 9.

[15] Le prestataire a répondu clairement à la lettre. Il voulait que l’audience se déroule par écrit.

[16] L’avis d’audience pour l’audience en personne comprenait la décision de la division générale. [traduction] « Après avoir examiné ses observations, j’ai décidé de m’écarter de la demande de l’appelant et de changer le mode d’audience pour une audience en personne parce que j’estime qu’une audience par écrit ne permettrait pas une audience complète et équitable dans la présente affaireNote de bas page 10 ».

[17] Si la division générale croyait que seule une audience en personne donnerait au prestataire une audience complète et équitable, alors je ne vois pas comment il aurait pu aller de l’avant avec l’audience en personne sans lui. En procédant à l’audience sans le prestataire, la division générale a privé le prestataire d’une occasion pleine et équitable de présenter ses arguments et de répondre à ses questions.

[18] L’obligation d’équité procédurale qu’un décideur doit à une personne est souple et variable et dépend des circonstancesNote de bas page 11. L’obligation donne à une partie la possibilité de connaître la preuve et de répondre de façon complète et équitable. Il ne s’agit pas d’une garantie absolue que la division générale devrait imposer (ou retirer) sans d’abord examiner la situation de la personne et ses attentes légitimes, les règles du Tribunal et les conséquences de la décision sur la personne.

[19] Lorsque le prestataire n’a pas assisté à l’audience en personne, la division générale aurait pu utiliser son pouvoir discrétionnaire pour modifier la date de l’audience, plutôt que d’aller de l’avant avec l’audience sans le prestataire. Elle aurait pu retourner à un mode d’audience par écrit. J’estime que l’obligation d’équité procédurale l’exigeait dans les circonstances.

[20] La division générale était préoccupée par le fait qu’une audience par écrit ne permet pas une conversation fluideNote de bas page 12. Elle voulait éviter que le format par écrit limite la preuve du prestataire. Elle devait interpréter et appliquer les règles du Tribunal pour que le processus d’appel soit aussi simple et rapide que l’équité le permettait. Elle devait aussi appliquer les règles pour que chaque partie puisse participer au processus d’appel. Il n’était pas nécessaire qu’elle fasse des allers-retours par écrit à plusieurs reprises, sur une période prolongée, pour donner au prestataire une audience par écrit complète et équitable.

[21] La Commission soutient que le prestataire connaissait la preuve à laquelle il devait répondreNote de bas page 13. Il était au courant de l’obligation de démontrer qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi et des dispositions législatives concernant le départ volontaire et la justification. La Commission soutient également qu’il a eu l’occasion de répondre aux arguments avancés contre lui et à la preuve. Il a expliqué en détail pourquoi il a démissionné et pourquoi ses déclarations ont changé au fil du temps. Il n’a pas contesté le fait que l’audience s’est déroulée sans lui. Enfin, la Commission soutient que le prestataire a demandé à un décideur impartial d’examiner sa preuve de façon complète et équitable.

[22] Je ne suis pas d’accord avec les arguments de la Commission. Mon désaccord est fondé sur la façon que la division générale a évalué l’obligation d’équité qu’elle devait au prestataire. La division générale croyait devoir poser des questions au prestataire. Elle croyait aussi que, par souci d’équité, elle devait donner au prestataire l’occasion de discuter en personne de [traduction] « ce qui s’est passé avant que vous arrêtiez de travailler chez WalmartNote de bas page 14 ». Le prestataire n’a pas eu cette chance, ni en personne ni par écrit; ce n’était pas juste pour lui.

Conclusion

[23] J’accueille l’appel du prestataire parce que la procédure de la division générale n’était pas équitable.

[24] Je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’une ou un autre membre la réexamine, sachant que le prestataire a demandé une audience par écrit.

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