[TRADUCTION]
Citation : IK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 5
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision relative à une prolongation de délai et à une permission de faire appel
Partie demanderesse : | I. K. |
Partie défenderesse : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de la division générale datée du 21 décembre 2023 (GE-23-3240) |
Membre du Tribunal : | Solange Losier |
Date de la décision : | Le 3 janvier, 2025 |
Numéro de dossier : | AD-24-868 |
Sur cette page
- Décision
- Aperçu
- Questions en litige
- La demande à la division d’appel a été déposée en retard
- Je prolonge le délai pour le dépôt de la demande
- Analyse
- Conclusion
Décision
[1] Une prolongation du délai pour présenter une demande à la division d’appel est accordée. La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.
Aperçu
[2] I. K. est le prestataire dans la présente affaire. Il a demandé des prestations d’assurance‑emploi le 18 août 2023. Il a demandé à la Commission de l’assurance‑emploi du Canada de traiter sa demande comme si elle avait été présentée le 12 mars 2023. C’est ce qu’on appelle « antidater » une demande.
[3] La Commission a refusé d’antidater la demande au 12 mars 2023, parce qu’elle a dit qu’il n’avait pas de motif valable justifiant le retard de sa demande de prestationsNote de bas page 1.
[4] La division générale a tiré la même conclusionNote de bas page 2. Elle a rejeté l’appel du prestataire parce qu’il n’avait pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande de prestations. Elle a conclu que sa situation n’était pas exceptionnelle.
[5] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel à la division d’appelNote de bas page 3. Il soutient que la division générale a commis des erreurs. Je rejette la demande de permission de faire appel parce que la demande n’a aucune chance raisonnable de succès.
Questions en litige
[6] Voici les questions à trancher dans le présent appel :
- a) La demande à la division d’appel était-elle en retard?
- b) Si oui, dois-je prolonger le délai de présentation de la demande?
- c) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur révisable?
La demande à la division d’appel a été déposée en retard
[7] Le prestataire a précisé qu’il avait reçu la décision de la division générale le 23 décembre 2023Note de bas page 4. Il s’agit de la date à laquelle la décision lui a été communiquée.
[8] Le délai pour déposer une demande à la division d’appel est de 30 jours suivant la date à laquelle la décision de la division générale lui a été communiquée par écritNote de bas page 5. Une demande ne peut pas aller de l’avant si elle a été présentée plus d’un an après la communication de la décision de la division généraleNote de bas page 6.
[9] Par conséquent, le délai de 30 jours pour présenter sa demande à la division d’appel finissait le 23 janvier 2024. Et la date limite d’un an était le 23 décembre 2024.
[10] Le Tribunal a reçu la demande du prestataire à la division d’appel par courriel le 21 décembre 2024. Il s’agit de la date à laquelle le Tribunal a accusé réception de la demandeNote de bas page 7.
[11] Je conclus que le prestataire a présenté sa demande à la division d’appel en retard. Le délai de 30 jours finissait le 23 janvier 2024, et il l’a déposée le 21 décembre 2024. Toutefois, sa demande a été présentée dans le délai d’un an.
Je prolonge le délai pour le dépôt de la demande
[12] Pour décider s’il y a lieu d’accorder une prolongation du délai, je dois vérifier si le prestataire a une explication raisonnable justifiant son retardNote de bas page 8.
[13] Le prestataire affirme que la raison du retard était qu’il était frustré, déçu et désespéré lorsqu’il a perdu son emploi.
[14] Je conclus que le prestataire a fourni une explication raisonnable pour le retard de sa demande à la division d’appel. Par conséquent, je prolonge le délai de présentation de la demande.
Analyse
[15] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel donne la permission de faire appelNote de bas page 9. Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas page 10. Cela signifie qu’il doit exister un moyen défendable qui permettrait à l’appel d’être accueilliNote de bas page 11.
[16] Je peux examiner seulement certains types d’erreurs. Je dois surtout vérifier si la division générale aurait pu commettre une ou plusieurs des erreurs pertinentes (c’est ce qu’on appelle les « moyens d’appel »)Note de bas page 12.
[17] Les motifs possibles d’appel devant la division d’appel sont que la division générale a fait l’une des actions suivantesNote de bas page 13 :
- a fondé sa décision sur une erreur de fait importante;
- a commis une erreur de droit;
- a agi au-delà de ses pouvoirs ou a refusé de les exercer;
- a agi de façon injuste.
Je ne donne pas au prestataire la permission de faire appel
Le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs
[18] Le prestataire demande la permission de faire appel pour plusieurs raisonsNote de bas page 14. J’ai résumé ses principaux arguments comme suit :
- Il fait valoir que les documents justificatifs qu’il a fournis n’ont pas été pris en considération.
- Il ne voulait pas demander de prestations d’assurance‑emploi, alors il cherchait un nouvel emploi.
- Il était frustré, déçu et désespéré lorsqu’il a perdu son emploi.
- Il travaille depuis l’âge de 18 ans et cotise en payant des impôts.
- De plus, les prestations d’assurance‑emploi visent à fournir un soutien lorsqu’un emploi est perdu.
On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur révisable
[19] Le prestataire n’a pas précisé le type d’erreur que la division générale aurait commise, selon lui. Malgré cela, j’ai examiné la décision de la division générale et le dossier pour voir s’il était possible de soutenir qu’elle avait commis l’une des erreurs révisables mentionnées ci‑dessus.
[20] La division générale devait décider si le prestataire pouvait antidater sa demande de prestations d’assurance‑emploi pour la période du 12 mars 2023 au 18 août 2023Note de bas page 15. Pour ce faire, le prestataire devait démontrer qu’il avait un « motif valable » pour avoir présenté sa demande de prestations d’assurance‑emploi en retard pendant toute la période écouléeNote de bas page 16.
[21] Pour établir l’existence d’un motif valable, le prestataire doit démontrer qu’il a fait ce qu’une personne raisonnable se trouvant dans la même situation aurait fait dans des circonstances semblables pour s’assurer de ses droits et obligations aux termes de la loiNote de bas page 17. Cela comprend l’obligation de prendre des mesures raisonnablement rapides pour déterminer son admissibilité aux prestations d’assurance‑emploi.
[22] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur révisable. Par conséquent, je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel. Voici mes motifs.
[23] Premièrement, les arguments que le prestataire a présentés à la division d’appel visent à répéter les raisons pour lesquelles il avait un motif valable.
[24] La division générale est le juge des faits. Elle a examiné les raisons pour lesquelles le prestataire a tardé à demander des prestationsNote de bas page 18. Elle a conclu que ses raisons ne constituaient pas un motif valable justifiant le retardNote de bas page 19. Elle a également décidé que sa situation n’était pas exceptionnelleNote de bas page 20.
[25] La division générale a conclu qu’une personne raisonnable se trouvant dans des circonstances semblables aurait téléphoné à Service Canada pour s’informer du retard de son relevé d’emploi, d’autant plus qu’il connaissait bien les prestations d’assurance‑emploi, qu’il avait reçues dans le passéNote de bas page 21.
[26] Le prestataire a présenté 93 pages à la division généraleNote de bas page 22. Les documents comprenaient une photo de passeport, des fiches de paie et plusieurs copies de ses relevés bancaires.
[27] On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de faitNote de bas page 23. La division générale n’a ignoré aucun des documents justificatifs qu’il a fournis. Bon nombre d’entre eux n’étaient pas pertinents pour les questions qu’elle devait trancher.
[28] La division générale a remarqué qu’il a envoyé des copies de relevés bancaires pour montrer qu’il avait des problèmes financiers importantsNote de bas page 24. Même s’il a commis une erreur de bonne foi, la division générale a conclu que ce n’était pas une circonstance exceptionnelle qui l’avait empêchée de faire ce qu’il devait faire pour recevoir des prestations d’assurance‑emploi.
[29] Je reconnais que le prestataire n’est pas d’accord avec la décision de la division générale. Cependant, je ne peux pas soupeser de nouveau la preuve pour en arriver à une conclusion différente pour le prestataire. Le rôle de la division d’appel est limité, alors je ne peux pas intervenir pour soupeser de nouveau la preuve concernant l’application de principes juridiques établis aux faits de l’affaireNote de bas page 25.
[30] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droitNote de bas page 26. La division générale a correctement énoncé et appliqué le droit dans sa décisionNote de bas page 27. Elle a cerné l’article applicable de la Loi sur l’assurance‑emploi qui prévoit que pour faire antidater une demande, il faut prouver l’existence d’un motif valable justifiant le retard pendant toute la période du retard et l’admissibilité aux prestations d’assurance‑emploi à la date précédente.
[31] Le prestataire a fait référence à une affaire semblable impliquant une autre personne qui a tardé à demander des prestations où on a décidé qu’il existait un motif valable en raison des circonstances exceptionnelles.
[32] La division générale a examiné l’affaire du Tribunal présentée par le prestataireNote de bas page 28. Elle a expliqué que les faits de cette affaire étaient différents parce que cette personne avait une maladie mentale qui l’empêchait de prendre des mesures raisonnablement rapides.
[33] La division générale n’était pas obligée de suivre l’affaire du Tribunal et elle a expliqué pourquoi les faits étaient différents.
[34] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de compétenceNote de bas page 29. La division générale a seulement tranché les questions qu’elle devait trancher (antidater) et n’a pas statué sur des questions qu’elle n’avait pas l’autorité de décider.
[35] L’audience a eu lieu en personne et a duré environ 54 minutes. Le prestataire a assisté à l’audience et a témoigné. Je n’ai rien trouvé qui indique que la division générale n’a pas suivi une procédure équitable dans la présente affaire. Par conséquent, il n’y a pas non plus de cause défendable pour ce motifNote de bas page 30.
Il n’y a aucune autre raison de donner au prestataire la permission de faire appel
[36] J’ai examiné le dossier, j’ai examiné la décision portée en appel et je n’ai trouvé aucun élément de preuve clé que la division générale aurait pu ignorer ou mal interpréterNote de bas page 31.
Conclusion
[37] Une prolongation de délai est accordée. La permission de faire appel est refusée.
[38] Par conséquent, l’appel du prestataire n’ira pas de l’avant. L’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.