Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : PR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 30

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : P. R.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 13 décembre 2024 (GE-24-3790)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Date de la décision : Le 15 janvier 2025
Numéro de dossier : AD-25-23

Sur cette page

Décision

[1] Je refuse de donner à P. R. la permission de faire appel de la décision de la division générale.

[2] Par conséquent, son appel n’ira pas plus loin. La décision de la division générale est maintenue telle quelle.

Aperçu

[3] P. R. est le prestataire. Après avoir perdu son emploi, il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[4] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il était exclu du bénéfice des prestations. Elle dit qu’il a perdu son emploi pour une raison qui est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 1.

[5] Il a demandé à la Commission de réviser sa décision. Selon lui, son congédiement était injustifié. La Commission n’a pas changé sa décision. Le prestataire a donc fait appel à la division générale du Tribunal.

[6] La division générale a rejeté son appel. Elle a conclu qu’il avait perdu son emploi parce qu’il n’indiquait pas le début de ses tâches au travail. Et cette raison était une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Le prestataire a admis qu’il n’indiquait pas toujours quand il commençait à travailler sur un ouvrage et que c’était parfois intentionnel. Mais même quand ce n’était pas intentionnel, il agissait avec une telle insouciance que c’était presque délibéré. Enfin, la division générale a conclu qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il pouvait perdre son emploi s’il n’indiquait pas le début de ses tâches parce que son employeur lui avait donné de nombreux avertissements.

[7] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale. Pour l’obtenir, il doit montrer que son appel a une chance raisonnable de succès. Malheureusement, il n’a pas réussi à le faire.

Questions en litige

[8] Je dois trancher deux questions :

  • Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante parce qu’elle aurait ignoré ou mal interprété un élément de preuve présenté par l’appelant, soit qu’il oublie souvent les choses?
  • Peut-on soutenir que la division générale a fait une autre erreur sur laquelle je peux me pencher?

Je refuse la permission de faire appel

[9] J’ai lu la demande de permission de faire appel présentée par le prestataireNote de bas de page 2. J’ai aussi lu la décision de la division générale. J’ai examiné les documents au dossier de la division généraleNote de bas de page 3. Et j’ai écouté l’enregistrement de l’audience.

[10] Voici pourquoi je dois refuser la permission de faire appel.

Critère à remplir pour obtenir la permission de faire appel

[11] Pour que le prestataire obtienne la permission de faire appel, son appel doit avoir une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 4. Autrement dit, le prestataire doit démontrer qu’il peut soutenir que la division générale a fait l’une des erreurs suivantes :

  • elle avait un parti pris ou sa procédure était injuste;
  • elle a commis une erreur de fait importante;
  • elle a fait une erreur de droit;
  • elle a mal utilisé son pouvoir décisionnelNote de bas de page 5.

[12] Je dois d’abord me pencher sur les moyens d’appel que le prestataire a présentés dans sa demandeNote de bas de page 6.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante

[13] Le prestataire a coché la case qui dit que la division générale a commis une erreur de fait importanteNote de bas de page 7.

[14] Il soutient que la division générale a complètement ignoré ce qu’il a dit en preuve, soit qu’il a tendance à oublier les chosesNote de bas de page 8. Il explique qu’il était [traduction] « sur les nerfs après plusieurs mois dans l’entreprise ». Il oubliait donc d’indiquer quand il commençait une tâche. En plus, il est quelqu’un qui oublie souvent; parfois, il oublie même de faire les choses les plus simples. Cela [traduction] « fait partie de moi ». Il a répété cela plusieurs fois pendant l’audience.

[15] J’ai écouté l’audience de la division générale. Le prestataire a dit durant son témoignage qu’il a tendance à oublier les chosesNote de bas de page 9. Il a aussi expliqué comment cela nuisait à l’inscription des tâches qu’il commençait. Il admet qu’il oubliait parfois de le faire. Quand il travaillait sur quelque chose, il était vraiment concentré sur ce qu’il faisait, alors il oubliait d’indiquer qu’il avait commencé un ouvrage. D’autres fois, on lui demandait d’arrêter ce qu’il faisait pour aller faire le travail des autres ou pour aller chercher le registre des ouvrages. Il oubliait alors d’indiquer qu’il avait commencé certaines choses.

[16] Il a ajouté qu’indiquer le début d’une tâche n’était pas important, du moins pas aussi important que de faire un bon travail. Il dit que son employeur savait qu’il oubliait souvent les choses, car il avait déjà travaillé pour lui par l’entremise d’une agence, mais que l’employeur l’avait quand même embauché.

[17] La division générale commet une erreur de fait importante si elle fonde sa décision sur une conclusion de fait qu’elle a tirée après avoir ignoré ou mal compris des éléments de preuve pertinentsNote de bas de page 10 (autrement dit, s’il y a des éléments de preuve qui contredisent carrément ou n’appuient pas une conclusion de fait que la division générale a tirée avant de rendre sa décision).

[18] En regardant les motifs de la division générale, je vois qu’on ne peut pas soutenir qu’elle a ignoré ni mal interprété la preuve du prestataire au sujet de sa tendance à oublier les choses.

[19] La division générale a mentionné la preuve du prestataire à ce sujet (aux 2e, 6e et 11e points du paragraphe 31 et aux paragraphes 36 et 43). Elle a ensuite soupesé les éléments de preuve, y compris celui concernant les oublis du prestataire, et elle a appliqué les dispositions sur l’inconduite (paragraphes 36 à 38). Aux yeux de la division générale, le prestataire n’a pas démontré que des raisons indépendantes de sa volonté l’empêchaient d’indiquer qu’il commençait à travailler sur un ouvrage (paragraphe 40). Le fait que le prestataire savait qu’il avait tendance à oublier des choses sans toutefois faire quoi que ce soit pour remédier au problème démontrait que sa conduite était insouciante au point d’être délibérée (paragraphes 38, 43 et 44).

[20] Je tiens à souligner deux autres points concernant la loi et la façon dont la division générale a abordé la preuve.

[21] Premièrement, le prestataire a invoqué sa tendance à oublier les choses pour avancer que sa conduite n’était pas une inconduite. Il disait que le fait qu’il oubliait facilement les choses voulait dire que sa conduite n’était pas délibéréeNote de bas de page 11.

[22] Mais la Commission n’était pas obligée de prouver que la conduite du prestataire était délibérée (consciente, voulue ou intentionnelle). La loi dit qu’une conduite d’une telle insouciance qu’elle est presque délibérée peut constituer une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. La division générale a bien compris et appliqué cette disposition de la loi à la preuve, puis elle a décidé que la conduite était insouciante au point d’être délibérée (paragraphes 24, 34, 38, 56 et 66).

[23] Deuxièmement, c’est à la division générale d’évaluer la preuve et de tirer des conclusions de fait. Le prestataire n’est pas d’accord avec le degré d’importance que la division générale a accordé à ce qu’il disait sur sa tendance à oublier les choses. Mais le fait qu’il soit en désaccord ne veut pas dire que la division générale s’est trompée. Autrement dit, l’existence d’un désaccord avec la division générale n’est pas un moyen d’appel que la loi me permet de considérer. Le prestataire devait démontrer qu’elle avait ignoré ou mal compris son témoignage.

[24] La division générale n’avait pas à accepter l’argument de base du prestataire, c’est-à-dire que sa tendance à oublier les choses était si grave qu’il ne pouvait rien faire pour régler le problème. La division générale a examiné les éléments de preuve pertinents. Elle a ensuite soupesé ces éléments avant de conclure que le prestataire « avait toujours la capacité de remplir cette condition d’emploi, mais qu’il a simplement oublié de le faire ou choisi de ne pas le faire » (paragraphe 44). Je ne peux pas réévaluer la preuve dans le but d’en arriver à une conclusion différenteNote de bas de page 12.

[25] En résumé, le prestataire n’a pas démontré que la division générale a ignoré ni mal compris ce qu’il a dit sur sa tendance à oublier les choses. Elle a examiné et soupesé cette preuve, puis elle a tiré des conclusions de fait qui reposent sur les éléments de preuve pertinents. Par conséquent, on ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

Aucune autre raison ne justifierait la permission de faire appel

[26] Le prestataire n’est pas représenté. J’ai donc vérifié s’il était possible de soutenir que la division générale avait fait un autre type d’erreurNote de bas de page 13.

[27] Je n’ai rien vu qui permettrait de soutenir que la division générale a utilisé son pouvoir décisionnel de façon inappropriée. Elle a bien énoncé la question qu’elle devait trancher (paragraphe 6). Et c’est la seule question qu’elle a tranchée.

[28] On ne peut pas soutenir que la division générale a fait une erreur de droit. Elle a énoncé la loi applicable, puis elle s’en est servie pour trancher la question de l’inconduite (paragraphes 7, 23 à 27, 33 et 34). Et ses motifs détaillés sont plus que suffisants.

[29] Finalement, je me suis penché sur la décision de la division générale, son dossier et l’enregistrement de son audience. Rien ne laissait croire que sa procédure était injuste. Et rien n’indiquait que le membre de la division générale avait un parti pris.

Conclusion

[30] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a fait une erreur que la loi m’autorise à examiner. Et je n’ai repéré aucun argument défendable.

[31] Par conséquent, son appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Je ne peux donc pas lui donner la permission de faire appel de la décision de la division générale.

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