[TRADUCTION]
Citation : RH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 1625
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | R. H. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (665979) datée du 15 mai 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Linda Bell |
Mode d’audience : | En personne |
Date de l’audience : | Le 12 septembre 2024 |
Personne présente à l’audience : | Appelant |
Date de la décision : | Le 16 septembre 2024 |
Numéro de dossier : | GE-24-2250 |
Sur cette page
Décision
[1] J’accueille l’appel en partie.
[2] La Commission n’a pas tenu compte du fait que l’appelant avait démissionné en prévision de perdre son emploi. Par conséquent, l’appelant n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour une période indéterminée.
[3] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi en prévision de perdre son emploi. Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 27 mai 2022 au 6 juin 2022Note de bas de page 1.
Aperçu
[4] L’appelant travaillait comme préposé au comptoir et comme coureur pendant les séries éliminatoires de hockey de la LNH. Le 26 mai 2022, alors qu’il se rendait au travail, il a eu un accident de la route. Comme il savait que son emploi prendrait fin dans quelques semaines, soit à la fin des séries éliminatoires, il a décidé de ne pas retourner au travail.
[5] La Commission a examiné les raisons pour lesquelles l’appelant a cessé de travailler. Elle a déterminé que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification. La Commission a donc imposé un arrêt de paiement pour une période indéterminée (inadmissibilité) à compter du 22 mai 2022.
[6] L’appelant n’est pas d’accord avec la Commission. Il fait appel au Tribunal de la sécurité sociale. Il explique qu’il savait que son emploi prendrait fin à la fin des séries éliminatoires, et qu’il s’attendait à être mis à pied. De plus, il mentionne avoir subi une commotion cérébrale à la suite d’un accident de la route, ce qui l’a empêché d’utiliser des appareils électroniques. Il ajoute également qu’il avait des problèmes personnels et que son employeur ne l’a jamais appelé pour qu’il revienne travailler.
Question que je dois examiner en premier
Partie pouvant être mise en cause
[7] Parfois, le Tribunal envoie une lettre aux anciennes employeuses et anciens employeurs des parties appelantes pour leur demander si devenir une partie à l’appel les intéresse. Pour devenir une partie mise en cause, l’employeuse ou l’employeur doit avoir un intérêt direct dans l’appel. J’ai décidé de ne pas mettre l’employeur en cause dans le présent appel. En effet, rien dans le dossier n’indique que ma décision lui imposerait des obligations juridiques.
Questions en litige
[8] L’appelant a-t-il quitté son emploi volontairement en prévision de la fin de son emploi?
[9] Dans l’affirmative, était-il fondé à quitter son emploi?
[10] Dans l’affirmative, quelle est la période d’inadmissibilité?
Analyse
Départ volontaire
[11] Je conclus qu’aux fins des prestations d’assurance-emploi, l’appelant a quitté volontairement son emploi.
[12] D’après la loi, pour savoir si une partie prestataire a volontairement quitté son emploi, je dois poser la question suivante : « la partie prestataire avait-elle le choix de rester ou de partirNote de bas de page 2? »
[13] La Commission soutient que l’appelant a quitté volontairement son emploi puisque l’employeur a déclaré qu’il avait abandonné son emploi.
[14] L’appelant admet volontiers qu’il n’est jamais retourné au travail après son accident de la route. Il se rendait au travail lorsque l’accident s’est produit. Il ne se souvient pas s’il a envoyé un message texte à son employeur pour lui dire qu’il ne serait pas au travail ce jour-là. Il était nerveux, effrayé et faisait face à beaucoup de stress dans sa vie personnelle à ce moment-là. Il a dit qu’il avait eu une commotion cérébrale dans l’accident, mais qu’il n’avait pas de billet médical pour le prouver. Comme il savait que son emploi prendrait fin bientôt, soit à la fin des séries éliminatoires de la LNH, il a décidé de ne pas retourner au travail.
[15] Après avoir examiné attentivement la preuve dont je dispose, je conclus que l’appelant a quitté volontairement son emploi.
Justification
[16] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi au moment où il l’a fait.
[17] La loi prévoit qu’une personne est inadmissible au bénéfice des prestations si elle quitte son emploi dans les trois semaines précédant la fin de son emploiNote de bas de page 3. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver qu’elle était fondée à le faire.
[18] La loi explique ce que signifie « être fondé à ». Selon la loi, une personne est fondée à quitter son emploi si son départ était la seule solution raisonnable dans son cas, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 4.
[19] Il revient à l’appelant de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 5.
[20] Pour décider si l’appelant était fondé à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances présentes au moment de son départ. La loi énonce des circonstances que je dois prendre en considérationNote de bas de page 6.
[21] Une fois que j’aurai déterminé les circonstances qui s’appliquent à l’appelant, celui‑ci devra démontrer qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi à ce moment-làNote de bas de page 7.
Les circonstances présentes quand l’appelant a quitté son emploi
[22] L’appelant a déclaré qu’il a été embauché comme employé occasionnel et temporaire pour servir de l’alcool, des boissons et des collations lors des matchs éliminatoires de hockey de la LNH. Son emploi aurait pris fin le 6 juin 2022, date à laquelle l’équipe de hockey de sa ville a joué son dernier match des séries éliminatoires de la LNH pour cette saison.
[23] Comme je l’ai mentionné plus haut, l’appelant affirme avoir été impliqué dans un accident de la route en se rendant au travail. Il ne se souvient pas s’il a envoyé un message texte à son employeur pour lui dire qu’il ne serait pas au travail ce jour-là. Il était nerveux, effrayé et faisait face à beaucoup de stress dans sa vie personnelle à ce moment-là. Il a dit qu’il avait eu une commotion cérébrale dans l’accident, mais qu’il n’avait pas de billet médical pour le prouver. Comme il savait que son emploi prendrait bientôt fin, soit à la fin des séries éliminatoires de la LNH, il a décidé de ne pas retourner au travail.
[24] La Commission soutient que l’appelant a dit qu’il ne faisait pas suffisamment de quarts de travail pour que ça vaille la peine de continuer à travailler à cet endroit. De plus, la Commission a documenté le fait que l’employeur a déclaré que l’appelant avait volontairement quitté son emploi puisqu’il avait abandonné son emploi.
[25] L’appelant conteste les documents de la Commission sur ce qui a été dit lors de leurs conversations téléphoniques. Il a déclaré que l’agent de la Commission n’arrêtait pas de parler au-dessus de lui, qu’il était impoli, qu’il ne le laissait pas s’exprimer, qu’il le rabaissait et qu’il supposait qu’il essayait de mentir. Ces conversations ressemblaient à une dispute. Il ne se sentait donc pas à l’aise de parler avec lui. À tel point qu’il a déposé une plainte sur le site Web de Service Canada sur la satisfaction des clients.
[26] L’appelant a toujours affirmé qu’il avait été embauché pour travailler seulement pendant les matchs des séries éliminatoires de la LNH. Il s’agissait d’un emploi temporaire qui prendrait fin à la fin des séries éliminatoires. Il n’a pas dit qu’il n’effectuait pas assez de quarts de travail pour que cela vaille la peine de continuer à travailler. Il a plutôt tenté d’expliquer qu’il avait été embauché pour travailler pendant la saison des séries éliminatoires de la LNH. Par conséquent, il travaillait seulement lorsqu’il y avait un match de séries éliminatoires et son emploi se terminerait à la fin de ces matchs. Cette affirmation est confirmée par son relevé d’emploi, qui montre que sa première journée de travail était le 22 avril 2022, soit pendant les séries éliminatoires de la LNHNote de bas de page 8.
[27] Je suis convaincue que l’appelant était peut-être aux prises avec du stress personnel à la maison, qui s’est aggravé lorsqu’il a été impliqué dans l’accident de la route. Il est aussi probable qu’il ait subi une commotion cérébrale pendant l’accident. De plus, le premier jour de travail inscrit sur son relevé d’emploi de montre qu’il a bien été embauché pour travailler seulement pendant la saison des séries éliminatoires de la LNH.
[28] Je suis convaincue que le cumul de ses problèmes personnels à la maison, l’accident de la route et le fait qu’il savait que son emploi allait se terminer à la fin des séries éliminatoires de la LNH a finalement mené l’appelant à quitter son emploi avant la date prévue de sa fin d’emploi. Je dois maintenant décider s’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi quand il l’a fait.
Solutions raisonnables
[29] J’estime que l’appelant avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi.
[30] Je reconnais que l’appelant avait peut-être de bonnes raisons de démissionner avant que les séries éliminatoires de la LNH prennent fin, le 6 juin 2022. Toutefois, être fondé à quitter un emploi ne signifie pas avoir une bonne raison pour le faire. La question n’est pas de savoir s’il était raisonnable pour le prestataire de quitter son emploi, mais plutôt si son départ était la seule solution raisonnable qui s’offrait à lui, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 9.
[31] Je suis d’accord avec l’observation de la Commission selon laquelle, compte tenu de l’ensemble de la preuve, l’appelant aurait pu demander un congé à son employeur pendant la période où il ne pouvait pas travailler à cause de l’accident, plutôt que de quitter son emploi. Une fois rétabli, il aurait été raisonnable pour lui de solliciter d’autres quarts de travail afin de continuer de travailler et de gagner de l’argent jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi, afin d’éviter une période de chômage.
[32] Après avoir examiné l’effet cumulatif de toutes les circonstances mentionnées ci-dessus, je conclus que l’appelant avait d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi au moment où il l’a fait. Par conséquent, l’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi chez X.
Période d’inadmissibilité
[33] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une partie prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations si elle quitte volontairement un emploi sans justification dans les trois semaines précédant la date prévue de la fin de son emploiNote de bas de page 10.
[34] Dans cette affaire, l’appelant a été embauché pour travailler pendant la saison des séries éliminatoires de la LNH. Il a commencé à travailler le 22 avril 2022 et la saison des séries éliminatoires a pris fin le 6 juin 2022. Il faisait face à beaucoup de stress à la maison et, lorsqu’il a été impliqué dans l’accident de la route, il a senti que c’était trop pour continuer à travailler à ce moment-là. Il n’est pas retourné travailler après son dernier jour de travail, le 26 mai 2022.
[35] J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que l’emploi de l’appelant aurait pris fin dans les trois semaines suivant son dernier jour de travail. Son dernier jour de travail était le 26 mai 2022, et la date du dernier match éliminatoire de leur équipe de la LNH était le 6 juin 2022. Par conséquent, l’appelant a démissionné dans les trois semaines précédant la date prévue de la fin de son emploi.
[36] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’appelant est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 27 mai 2022 au 6 juin 2022.
Conclusion
[37] L’appel est accueilli en partie.
[38] L’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification en prévision de perdre son emploi. Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 27 mai 2022 au 6 juin 2022.