Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 78

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. W.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision de la Commission de
l’assurance emploi du Canada (696110) datée du
11 octobre 2024 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Paula Turtle
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 3 décembre 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 6 janvier 2025
Numéro de dossier : GE-24-3683

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de ses demandes de prestations d’assurance-emploi. Autrement dit, il n’a pas d’explication acceptable selon la loi. Par conséquent, ses demandes ne peuvent pas être traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt.

Aperçu

[3] En général, pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, une personne doit présenter une demande pour chaque semaine où elle n’a pas travaillé et pour laquelle elle veut recevoir des prestationsNote de bas de page 1. Habituellement, la personne est tenue de produire une déclaration en ligne pour la Commission de l’assurance-emploi du Canada toutes les deux semaines. Les demandes sont assujetties à certains délaisNote de bas de page 2.

[4] Le 25 novembre 2020, l’appelant a demandé des prestations dans le cadre d’un programme de travail partagé. Il croyait avoir coché une case qui signifiait qu’il n’avait pas à faire de déclarations toutes les deux semaines. Mais c’était une erreur de sa part. Il n’a pas coché de telle case. Il devait alors produire des déclarations, mais il ne l’a pas fait. Il n’a donc pas reçu de prestations d’assurance-emploi.

[5] L’appelant a toutefois supposé qu’il recevait des prestations. Il n’a pas vérifié son compte bancaire. Il ignorait donc qu’il n’avait pas reçu de prestations.

[6] À l’été 2023, l’appelant a été hospitalisé. Comme il avait besoin d’argent, il a pigé dans ses économies. En octobre, il ne lui restait plus beaucoup d’argent. Il a vérifié son compte bancaire et a découvert qu’il n’avait pas reçu de prestations pendant sa période de prestations qui avait débuté le 7 novembre 2020.

[7] En novembre 2023, il s’est rendu à un bureau de Service Canada. Le personnel lui a dit qu’il devait faire antidater ses demandes (c’est-à-dire demander qu’elles soient traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt). Il a donc déposé une demande en ce sens. Par la suite, il n’a eu aucune nouvelle de Service Canada. Il a donc redemandé une antidatation le 4 avril 2024. Le 20 juin 2024, la Commission l’a informé qu’il n’avait pas droit aux prestations parce qu’il n’avait pas rempli de déclarations pendant sa période de prestations débutant le 8 novembre 2020.

[8] L’appelant veut que ses demandes soient traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt, soit à partir du 7 novembre 2020. Pour que ce soit possible, il doit prouver qu’il a un motif valable justifiant son retard.

[9] La Commission a décidé que l’appelant n’avait pas de motif valable et a rejeté sa demande de révision. Elle en a décidé ainsi parce qu’il a attendu plus de trois ans après le début de sa période de prestations pour vérifier s’il avait eu des versements.

[10] L’appelant n’est pas d’accord. Il dit avoir supposé qu’il recevait des prestations parce qu’il ne pensait pas devoir produire de déclarations. Il ne savait pas qu’il avait fait une erreur. Il avait ouvert un compte spécial où ses prestations seraient déposées. Il voulait épargner cet argent. Il n’a donc pas vérifié ses relevés bancaires.

Question que je dois examiner en premier

[11] L’appelant n’avait pas reçu le dossier de révision de la Commission ni celui de ses observations avant l’audience. Les deux dossiers étaient très succincts. Je les ai donc examinés avec l’appelant à l’audience. Ensuite, il voulait aller de l’avant avec l’audience.

[12] J’ai tout de même demandé au Tribunal d’envoyer les dossiers à l’appelant après l’audience. Et je lui ai donné plus de temps par la suite pour envoyer des commentaires.

[13] L’appelant n’a fourni aucun commentaire. Je rends donc ma décision en fonction de ce qui se trouve au dossier et de ce que l’appelant m’a dit à l’audience.

Question en litige

[14] L’appelant avait-il un motif valable justifiant le retard de ses demandes de prestations d’assurance-emploi?

Analyse

[15] L’appelant veut que ses demandes de prestations d’assurance-emploi soient traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt, soit à partir du 7 novembre 2020. C’est ce qu’on appelle « antidater » des demandes.

[16] Pour que ses demandes soient antidatées, l’appelant doit prouver qu’il avait un motif valable justifiant son retard durant toute la période écouléeNote de bas de page 3. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant son retard.

[17] Et pour démontrer qu’il avait un motif valable, l’appelant doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 4. Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi comme une personne raisonnable et réfléchie aurait agi dans une situation similaire.

[18] L’appelant doit aussi prouver qu’il a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et les obligations que la loi lui imposaitNote de bas de page 5. Il doit alors démontrer qu’il a fait de son mieux pour essayer de s’informer de ses droits et de ses responsabilités dès que possible. S’il ne l’a pas fait, il doit démontrer les circonstances exceptionnelles qui l’en ont empêchéNote de bas de page 6.

[19] L’appelant doit le prouver pour toute la période du retardNote de bas de page 7. Cette période s’étend du jour où il veut que sa demande soit antidatée au jour où il a présenté sa demande. Son retard s’étend du 7 novembre 2020 au mois de novembre 2023, lorsqu’il a demandé pour la première fois une antidatation.

[20] L’appelant affirme avoir un motif valable justifiant son retard parce qu’il ne pensait pas qu’il devait remplir des déclarations pour chaque semaine où il pouvait recevoir des prestations. Il avait aussi ouvert un compte spécial pour ses versements d’assurance-emploi et n’avait pas vérifié le solde de ce compte.

[21] La Commission affirme que l’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard parce qu’il a attendu plus de trois ans avant de vérifier s’il avait reçu des prestations d’assurance-emploi.

[22] Je considère en effet que l’appelant n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant le retard de ses demandes de prestations.

[23] L’appelant n’a pas vérifié son solde bancaire parce qu’il ne voulait pas savoir combien d’argent il avait économisé.

[24] Il a reçu des relevés mensuels du compte où il croyait que ses chèques d’assurance-emploi étaient déposés. Ces relevés lui étaient postés à son domicile. Il a choisi de ne pas les regarder. S’il y avait jeté un coup d’œil, il aurait découvert qu’il n’avait pas reçu de prestations d’assurance-emploi.

[25] L’appelant est tombé malade en juin 2023. Il s’est rendu compte en octobre 2023 qu’aucune prestation d’assurance-emploi n’avait été déposée dans son compte. Le 30 novembre 2023, il est alors allé à un bureau de Service Canada. C’est là qu’il a demandé une antidatation.

[26] Il a attendu une réponse à sa demande, mais n’a rien reçu. Il est donc retourné au bureau de Service Canada le 4 avril 2024. C’était environ quatre mois après sa demande d’antidatation.

[27] Je considère que l’appelant n’a pas fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait pour s’informer de ses droits et de ses obligations. Après avoir demandé des prestations en novembre 2020, il n’a pas vérifié s’il les recevait.

[28] Un problème peut toujours arriver dans le versement des prestations. Et il est facile pour une personne de vérifier si ses prestations sont bien versées, surtout si elle reçoit un relevé de compte chaque mois. Il n’est pas raisonnable pour une personne de supposer qu’elle reçoit ses prestations.

[29] L’appelant voulait économiser le plus possible. Ce n’était donc pas important pour lui de vérifier souvent l’argent qui s’accumulait dans son compte. Cependant, il aurait pu vérifier son relevé bancaire tout de suite après avoir demandé des prestations, lorsque les versements devaient commencer. Ainsi, comme il le souhaitait, il n’aurait pas eu à vérifier ses économies par la suite.

[30] L’appelant a découvert en octobre 2023 qu’il n’avait reçu aucune prestation. Mais il n’a pas réagi rapidement.

[31] La Commission affirme qu’il n’a pas demandé d’antidatation avant avril 2024. Cependant, j’accepte la preuve de l’appelant selon laquelle il a demandé une antidatation le 30 novembre 2023. J’estime qu’il a livré un témoignage direct. Il a présenté sa demande d’antidatation par écrit, et celle-ci est datée du 30 novembre 2023.

[32] L’appelant a tout de même attendu au 30 novembre 2023 pour aller au bureau de Service Canada. C’était plus d’un mois après avoir découvert qu’il n’avait pas reçu de prestations. Ses prestations devaient commencer trois ans avant, en novembre 2020. Il n’est pas raisonnable d’attendre un mois entier pour demander une antidatation après autant de temps.

[33] La demande d’antidatation du 30 novembre 2023 n’a pas été traitée. L’appelant a attendu plus de quatre mois, soit jusqu’au 4 avril 2024, avant de retourner à Service Canada pour savoir ce qui se passait.

[34] Il y a donc eu un autre retard, soit du 30 novembre 2023 au 4 avril 2024.

[35] Je conclus que l’appelant n’a pas vérifié si ses prestations lui étaient versées après sa demande en novembre 2020. Ainsi, il n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente aurait agi pour vérifier son droit aux prestations. Ensuite, après avoir découvert, en octobre 2023, qu’il ne recevait pas de prestations, il a attendu plus d’un mois avant de demander une antidatation. Puis il a attendu un autre quatre mois avant de faire un suivi à ce sujet. Chacune de ces périodes écoulées montre que l’appelant n’a pas vérifié rapidement son droit aux prestations.

[36] L’appelant est tombé malade à l’été 2023. Il n’est toujours pas retourné travailler. Il ne m’a pas dit que son retard avait été causé par sa maladie. Je conclus donc qu’il n’y a aucune circonstance exceptionnelle qui justifie la grande période écoulée avant sa demande d’antidatation.

Conclusion

[37] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard de ses demandes de prestations pendant toute la période écoulée. Par conséquent, ses demandes ne peuvent pas être traitées comme si elles avaient été présentées plus tôt.

[38] L’appel est rejeté.

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