[TRADUCTION]
Citation : CB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 1260
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Appelant : | C. B. |
Représentant : | J. E. |
Partie défenderesse : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (565165) datée du 23 février 2024 (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Jean Yves Bastien |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 10 juin 2024 |
Participants à l’audience : | Appelant Représentante de l’appelante |
Date de la décision : | Le 21 juin 2024 |
Numéro de dossier : | GE-24-907 |
Sur cette page
- Décision
- Aperçu
- Questions en litige
- Analyse
- Disponibilité des personnes aux études
- Pénalité
- Conclusion
Décision
Départ volontaire
[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.
[2] L’appelante n’a pas démontré qu’elle était fondée (c’est-à-dire qu’elle n’avait pas une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi (volontairement) le 26 septembre 2021, quand elle l’a fait. L’appelante n’était pas fondée à quitter son emploi parce qu’elle avait d’autres solutions raisonnables. Par conséquent, elle est exclue du bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi.
Disponibilité des personnes aux études
[3] Cette question n’est pas pertinente parce que le Tribunal a déjà conclu que l’appelante était exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté son emploi le 26 septembre 2021. L’appelante n’a jamais rempli les conditions requises pour recevoir des prestations au cours de ses études secondaires de 2021 à 2022, alors elle est demeurée exclue du bénéfice des prestations.
Pénalité
[4] Le Tribunal conclut que la Commission de l’assurance-emploi a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon équitable en évaluant la pénalité de l’appelante. La pénalité, une lettre d’avertissement, est donc maintenue.
Aperçu
Quitter volontairement son emploi
[5] L’appelante a d’abord quitté (volontairement) son emploi le 5 septembre 2021 et elle a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 7 septembre 2021. Une période de prestations a été établie au 5 septembre 2021. Elle est ensuite brièvement retournée au travail du 12 septembre 2021 au 26 septembre 2021, date à laquelle elle a démissionné de nouveau pour se concentrer sur ses études.
[6] Pour faire face à l’augmentation soudaine de demandes de prestations pendant la pandémie de COVID-19, la Commission a utilisé un système informatisé de traitement automatique des demandesNote de bas de page 1. La Commission affirme ce qui suitNote de bas de page 2 :
[traduction]
Le système de traitement automatique des demandes a automatiquement approuvé la formation [de l’appelante] du 8 septembre 2021 au 23 juin 2022. Une mesure transitoire au titre de laquelle le système de traitement automatique des demandes a automatiquement traité et autorisé toute formation à compter du 27 septembre 2020 a pris fin le 11 septembre 2021. L’objectif de cette mesure était d’éviter tout retard de versement aux parties prestataires qui déclaraient une formation. Pour les prestations régulières, les parties prestataires doivent tout de même être en mesure de prouver qu’elles sont capables de travailler et disponibles à cette fin pendant qu’elles suivent une formation non dirigée. La Commission a le pouvoir d’imposer une D3 rétroactive (inadmissibilité) si une partie prestataire n’est pas en mesure de prouver sa disponibilité, même si le système de traitement automatique des demandes a initialement autorisé la formation. Par conséquent, si une partie prestataire déclare qu’elle n’est pas disponible pendant qu’elle suit une formation non dirigée et que des prestations ont déjà été versées pour cela, l’agente ou l’agent examine la disponibilité de la partie prestataire. Lorsque l’agente ou l’agent de niveau 2 établit que la partie prestataire n’a pas prouvé sa disponibilité à compter de la date de début du cours, elle ou il impose une D3 rétroactive.
[7] Ainsi, en se fondant sur la décision « automatique » du système de traitement automatique des demandes, la Commission a établi une période de prestations débutant le 5 septembre 2021. Elle a commencé à verser des prestations régulières d’assurance-emploi à l’appelante et a continué de le faire jusqu’au 3 septembre 2022. Il n’y a probablement eu aucune intervention humaine directe lorsque la décision initiale d’approuver les prestations a été prise. Par la suite, l’appelante a reçu 47 semaines de versements sur 50 semaines d’admissibilité.
[8] Lorsque l’appelante a sélectionné les « prestations régulières » dans le formulaire de demande d’assurance-emploi le 7 septembre 2021, elle a également précisé qu’elle [traduction] « avait perdu son emploi sans y être pour quoi que ce soit et qu’elle était disponible pour travailler, mais [qu’elle ne pouvait] pas trouver un emploiNote de bas de page 3 ». Toutefois, ce n’était pas exact. Si une personne choisit de quitter un emploi, elle est responsable de sa situation de chômage. L’appelante a déclaré qu’elle avait quitté son emploi (la première fois) le 5 septembre 2021.
[9] Même si l’appelante affirme avoir quitté son emploi à deux reprises, elle a également répondu « Non » à la question « Avez-vous cessé de travailler pour un employeur pendant la période visée par la présente déclaration? » dans ses déclarations électroniques qu’elle a envoyées à la Commission aux deux semaines pour les périodes du 5 septembre 2021 au 18 septembre 2021 et du 26 septembre 2021 au 9 octobre 2021Note de bas de page 4.
[10] L’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte son emploi sans justification.
[11] La Commission peut revenir en arrière pour vérifier les demandes de prestations d’une partie prestataireNote de bas de page 5. Plus d’un an plus tard, en novembre 2022, les Services d’intégrité de la Commission ont entamé une enquête sur le dossier de l’appelante. La Commission a établi ce qui suit au sujet de l’appelanteNote de bas de page 6 :
- Elle n’a pas déclaré avoir quitté son emploi en septembre 2021 lorsqu’elle a rempli son formulaire de demande de prestations. Elle n’a pas pu expliquer cela lorsqu’elle a parlé aux enquêteurs de la CommissionNote de bas de page 7.
- Elle n’a pas déclaré son absence lorsqu’elle est allée en vacances à l’Île-du-Prince-Édouard du 6 juillet 2022 au 12 juillet 2022. L’appelante n’a pas pu fournir d’explication à ce sujetNote de bas de page 8.
- Elle a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle a choisi de quitter son emploi) en 2021 sans justification. Elle ne pouvait donc pas recevoir de prestations.
- Elle avait fait 23 fausses déclarations dans les déclarations qu’elle a faites aux deux semaines.
- Elle a reçu un trop-payé de 22 889 $
[12] Le 30 novembre 2022, la Commission a donc envoyé une lettre à l’appelante disant qu’elle avait réexaminé sa demande d’assurance-emploi. La Commission lui a ensuite dit qu’elle ne pouvait pas lui verser de prestations d’assurance-emploi à compter du 26 septembre 2021 parce qu’elle avait quitté volontairement son emploi, sans justification, au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 9.
[13] Le 3 décembre 2022, la Commission a envoyé à l’appelante un avis de dette de 22 889 $. Cela représente la somme du trop-payé que la Commission affirme que l’appelante a reçuNote de bas de page 10.
[14] La Commission a également exclu l’appelante du bénéfice des prestations parce qu’elle affirme qu’elle a quitté son emploi sans justificationNote de bas de page 11. Cela signifie qu’il faudrait que l’appelante redevienne admissible avant de pouvoir recevoir des prestations à l’avenir.
[15] Je dois décider si l’appelante a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable qui s’offrait à elle.
[16] La Commission affirme qu’au lieu de démissionner, l’appelante aurait pu parler à son employeur de la possibilité de travailler la fin de semaine, ou avoir tenté de trouver un autre emploi plus convenableNote de bas de page 12.
[17] L’appelante n’est pas d’accord et affirme qu’elle a essayé de jongler avec certaines de ses heures de cours et ses quarts de travail, mais que cela n’a pas fonctionné. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas eu le choix de quitter son emploi puisqu’elle devait conduire 45 minutes dans chaque sens et qu’elle n’était pas à l’aise de le faire, surtout en hiver, en raison de la noirceur et de la neige et la glace sur les routes.
Disponibilité des personnes aux études
[18] Si une personne est admissible aux prestations d’assurance-emploi, elle doit tout de même être disponible pour un emploi convenable. Cependant, si une personne est exclue du bénéfice des prestations, il importe peu qu’elle soit disponible pour travailler. Elle ne peut pas recevoir de prestations tant qu’elle n’a pas travaillé assez d’heures pour être admissible.
[19] Même si l’appelante a distribué son curriculum vitae et affirme qu’elle était à la recherche d’un emploi pendant ses études, elle n’a pas été capable de trouver un emploi pendant l’année scolaire. L’appelante a déclaré qu’après avoir quitté volontairement son emploi le 26 septembre 2021, elle n’a pas été capable d’accumuler les quelque 455 heures nécessaires pour remplir les conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. L’appelante est donc demeurée exclue pendant toute la période où elle a reçu des prestations.
[20] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a également décidé que l’appelante était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à compter du 26 septembre 2021, parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, une partie prestataire doit être disponible pour travailler. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’une partie prestataire doit être activement à la recherche d’un emploi.
[1] Je dois décider si l’appelante a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. La prestataire doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.
[2] La Commission affirme que l’appelante n’était pas disponible parce qu’elle était aux études à temps plein. Elle soutient également que l’appelante n’a pas réussi à réfuter la présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler, parce qu’elle n’a pas fait de démarches pour trouver un autre emploi lorsqu’elle a démissionné en septembre 2021.
[3] L’appelante n’est pas d’accord et affirme qu’elle cherchait du travail plus près de chez elle en raison de sa charge de travail à l’école et des longs trajets aggravés par les conditions de la route, surtout en hiver.
Pénalité
[21] La Commission a remis une lettre d’avertissement à l’appelante (pénalité non pécuniaire) parce qu’elle affirme qu’elle a fait de fausses déclarations concernant sa situation en omettant de divulguer son départ volontaire (démission) ainsi que ses vacances au Canada.
[22] La Loi sur l’assurance-emploi précise que la Commission a le pouvoir discrétionnaire d’imposer des pénalités. Le Tribunal peut seulement modifier la décision de la Commission d’imposer une pénalité si la Commission a agi de façon injuste (n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire).
Système de traitement automatique des demandes
[23] Même si l’appelante a dit qu’elle allait suivre une formation, le système informatisé de traitement automatique des demandes de prestations, qui était en service au moment où l’appelante a présenté sa demande initiale de prestations, a « automatiquement » approuvé la demande d’assurance-emploi (et les prestations d’assurance-emploi) de l’appelante. Cela s’est fait sans intervention humaineNote de bas de page 13. Le système a été conçu pour offrir rapidement des prestations aux personnes qui suivaient une formation. La vérification des demandes se faisait plus tard, comme ce fut le cas pour l’appelante.
[24] L’appelante fait valoir que la Commission aurait dû remarquer qu’elle avait quitté un emploi pour suivre une formation vers laquelle elle n’avait pas été dirigée, qu’elle aurait dû signaler son dossier, et qu’elle n’aurait jamais dû approuver que des prestations lui soient versées. Cependant, cette façon de voir est erronée. Il incombe à la partie prestataire de s’assurer de se conformer à la Loi sur l’assurance-emploi et de fournir des renseignements exacts. Si l’appelante avait répondu « Oui » à la question de sa déclaration bimensuelle lui demandant si elle avait récemment quitté son emploi, la Commission serait très probablement intervenue plus tôt.
[25] La Commission est libre de choisir comment elle traite les demandes. Par conséquent, le Tribunal n’a pas compétence dans la présente affaire.
Questions en litige
Départ volontaire
[26] L’appelante est-elle exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté son emploi sans justification?
[27] Pour répondre à cette question, je dois d’abord me pencher sur la question du départ de la prestataire. Je dois ensuite décider si l’appelante était fondée à quitter son emploi.
[28] Si le Tribunal conclut que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a quitté son emploi, la loi prévoit qu’avant de pouvoir recevoir des prestations d’assurance-emploi, elle doit redevenir admissible en travaillant le nombre d’heures requis par la loiNote de bas de page 14. Au moment de l’audience, ce nombre d’heures était d’environ 455.
Disponibilité des personnes aux études
[29] Si le Tribunal conclut que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi et si elle n’est pas redevenue admissible par la suite, sa disponibilité n’est pas pertinente.
[30] Si le Tribunal conclut que l’appelante n’est pas exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi, l’appelante doit démontrer qu’elle était disponible pour travailler pendant ses études.
Pénalité
[31] La décision de la Commission d’imposer une pénalité est discrétionnaire. Le Tribunal peut intervenir et modifier la pénalité seulement s’il conclut que la Commission a agi injustement. Pour en décider, le Tribunal examinera comment la Commission est arrivée à sa décision.
Analyse
Départ volontaire
Les parties conviennent que l’appelante a quitté (volontairement) son emploi
[32] L’appelante convient qu’elle a quitté son emploi à deux reprises, soit le 5 septembre 2021 et le 26 septembre 2021, pour retourner aux études et terminer sa 12e année. La Commission est d’accord. Je ne vois aucune preuve contredisant cela, alors je l’accepte comme un fait.
Ce que signifie être fondé à quitter son emploi
[33] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelante était fondée à quitter son emploi au moment où elle l’a fait.
[34] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 15. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que l’on était fondé à le faire.
[35] L’article 29 de la Loi sur l’assurance-emploi énumère 14 situations ou « circonstances » qui pourraient faire en sorte qu’une personne soit « fondée » à quitter volontairement un emploi. Cependant, les situations doivent généralement découler du travail ou de l’environnement de travail. Le désir de retourner aux études ne fait pas partie de ces circonstances. L’appelante n’a pas soutenu que l’une des situations énumérées à l’article 29 de la Loi sur l’assurance-emploi s’appliquait à elle, et je suis d’accord.
[36] La loi explique ce que signifie « être fondé à ». Une personne est fondée à quitter son emploi si son départ était la seule solution raisonnable dans son cas. Elle dit qu’il faut tenir compte de toutes les circonstancesNote de bas de page 16. De plus, la justification doit se rapporter à l’emploi lui-même, et non à la situation de la personne qui demande des prestationsNote de bas de page 17.
[37] C’est à l’appelante de prouver qu’elle était fondée à quitter volontairement son emploiNote de bas de page 18. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour décider si l’appelante était fondée à quitter son emploi, je dois examiner toutes les circonstances entourant son départ.
Orientation vers une formation ou un programme
[38] Parfois, la Commission (ou un programme qu’elle autorise) dirige une personne vers une formation, un programme ou un cours. L’une des circonstances dont je dois tenir compte est la question de savoir si la Commission a dirigé l’appelante vers son programme de 12e année.
Les parties conviennent que l’appelante n’a pas été dirigée
[39] La jurisprudence dit clairement que si une personne quitte son emploi simplement pour aller aux études sans y avoir été dirigée, elle n’est pas fondée à quitter son emploiNote de bas de page 19.
[40] Les parties s’entendent pour dire que l’appelante n’a pas été dirigée vers des études. J’accepte donc ce fait. L’école était la seule circonstance liée à la décision de démissionner de l’appelante. La jurisprudence s’applique donc à la prestataire. Cela signifie que l’appelante n’était pas fondée à quitter volontairement son emploi.
Autres solutions raisonnables
[41] Pour plus de certitude, la Commission soutient également que l’appelante n’était pas fondée à quitter son emploi en septembre 2021 parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à elle. Elle affirme que l’appelante aurait pu parler à son employeur de la possibilité de travailler la fin de semaine puisque son temps de déplacement ne serait pas affecté par son horaire de cours. La Commission fait également valoir que l’appelante aurait pu conserver son emploi jusqu’à ce qu’elle en trouve un plus près de chez elle.
[42] L’appelante a déclaré qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi à ce moment-là parce que le trajet de 45 minutes était trop long. Elle ne conduisait pas depuis longtemps et elle était anxieuse. En plus, il était difficile de conduire en hiver à cause de l’accumulation de glace et de neige sur la chaussée, et sa voiture [traduction] « n’était pas en très bon état ».
[43] Il est plus difficile d’avoir un « motif valable » que d’avoir une « raison valable ». Le fait qu’une partie prestataire ait une raison valable ou une bonne raison de quitter son emploi ne signifie pas qu’elle a un « motif valable » de [démissionnerNote de bas de page 20].
[44] Les difficultés que l’appelante a mentionnées peuvent constituer une raison valable pour avoir quitté son emploi, mais elles ne constituent pas un motif valable. Comme je l’ai mentionné plus haut, les problèmes équivalant à un motif valable doivent découler de l’emploi et non de la situation personnelle de l’appelante. Le fait que l’appelante a considéré que son trajet était trop long, qu’elle ne conduisait pas depuis longtemps et qu’elle devait conduire dans des conditions hivernales avec une voiture qui n’était pas en très bon état sont toutes des circonstances personnelles.
Conclusion
[45] Le Tribunal conclut que l’appelante a quitté (volontairement) son emploi le 26 septembre 2021 pour retourner aux études et terminer sa 12e année. Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas été dirigée vers une formation. Après avoir examiné les circonstances entourant le départ de l’appelante, le Tribunal conclut que celle-ci n’a pas prouvé qu’elle avait un motif valable de quitter son emploi pour les raisons mentionnées ci-dessus.
[46] Comme l’appelante a quitté son emploi sans justification, cela signifie qu’elle est exclue du bénéfice des prestations au titre de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi. Elle devra remplir les conditions nécessaires pour recevoir des prestations en travaillant le nombre d’heures requis par l’article 7(2) de la Loi sur l’assurance-emploi. Cela représente environ 455 heures.
Disponibilité des personnes aux études
[47] Le Tribunal a déjà conclu que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations parce qu’elle a quitté volontairement son emploi sans justification.
[48] L’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que, dans cette situation, un prestataire demeure exclu jusqu’à ce que [traduction] « depuis qu’il a perdu ou quitté son emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 pour recevoir des prestationsNote de bas de page 21 ».
[49] Il n’y a aucune preuve à l’appui, et l’appelante est d’accord, du fait que pendant qu’elle faisait sa 12e année en 2021-2022, elle n’a pas travaillé le nombre d’heures d’emploi assurable nécessaire pour redevenir admissible aux prestations. Par conséquent, je conclus que l’appelante est demeurée exclue du bénéfice des prestations pendant qu’elle était en 12e année.
[50] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, il faut d’abord être admissible et ensuite être disponible pour travailler. Par conséquent, comme l’appelante n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi au départ, il importe peu de savoir si elle était disponible pour travailler ou non.
Pénalité
La Commission a-t-elle prouvé que l’appelante a sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs dans ses déclarations?
[51] Pour imposer une pénalité, la Commission doit prouver que l’appelante a sciemment fourni des renseignements faux ou trompeursNote de bas de page 22. La Commission doit également démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a fourni ces renseignements en sachant qu’ils étaient faux ou trompeurs.
[52] S’il ressort clairement de la preuve que les questions étaient simples et que l’appelante a répondu de façon incorrecte, je peux déduire que l’appelante savait que les renseignements étaient faux ou trompeurs. Ensuite, l’appelante doit expliquer pourquoi elle a donné des réponses incorrectes et démontrer qu’elle ne l’a pas fait sciemmentNote de bas de page 23.
[53] La Commission peut imposer une pénalité pour chaque déclaration fausse ou trompeuse faite en toute connaissance de cause par l’appelante. Je n’ai pas besoin de vérifier si l’appelante avait l’intention de léser ou de tromper la Commission pour décider si elle est passible d’une pénalitéNote de bas de page 24. Il revient à l’appelante de s’assurer que ses déclarations sont remplies de façon véridique. Cela est confirmé par l’attestation figurant sur les déclarations, qui comprend notamment que [traduction] « […] de faire de fausses déclarations en mon nom ou au nom d’autrui constitue une fraude. Je comprends également qu’il existe des pénalités si j’ai sciemment fait des déclarations fausses ou trompeusesNote de bas de page 25. »
[54] La Commission soutient que l’appelante a fourni de faux renseignements dans ses déclarations lorsqu’elle a omis de divulguer qu’elle avait quitté volontairement son emploi le 26 septembre 2021. La Commission soutient que l’appelante a rempli sa déclaration bimensuelle pour la période du 26 septembre 2021 au 9 octobre 2021 dans les délais requis pour recevoir le versement, et qu’elle a donc fourni de faux renseignements lorsqu’elle a dit qu’elle n’avait pas arrêté de travailler pendant la période visée par la déclarationNote de bas de page 26. La Commission soutient également que l’appelante a fourni de faux renseignements dans l’une de ses déclarations bimensuelles de l’été 2022 lorsqu’elle a déclaré qu’elle était prête et disposée à travailler, et capable de le faire chaque jour, du lundi au vendredi, pendant chaque semaine visée par la déclaration pour la période du 3 juillet 2022 au 16 juillet 2022.
[55] L’appelante soutient qu’elle n’a fourni aucun faux renseignement et qu’elle n’a pas sciemment fait de fausses déclarations pendant qu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi. Lors de l’audience, l’appelante a affirmé que pendant qu’elle était en vacances en juillet 2022, elle aurait pu rentrer rapidement à la maison si elle avait eu un entretien d’embauche. En effet, elle avait demandé à sa mère de surveiller les appels téléphoniques et de communiquer immédiatement avec elle si elle était convoquée à un entretien d’embauche ou si elle obtenait une offre d’emploi.
[56] Cependant, la jurisprudence a déjà établi qu’il ne suffit pas que, pendant son absence, une partie prestataire puisse être jointe par une autre personne si une possibilité d’emploi se présenteNote de bas de page 27. De plus, même si la prestataire a laissé un numéro de téléphone et une adresse où on pouvait la joindre, il était douteux qu’elle aurait pu revenir à temps si on lui avait dit qu’elle avait obtenu un emploi convenableNote de bas de page 28.
[57] L’appelante admet qu’elle était en vacances à l’Île-du-Prince-Édouard pendant l’une des deux semaines visées par le rapport. La Commission a discuté de cette situation avec l’appelante le 20 février 2024. Celle-ci lui a alors dit qu’elle n’aurait pas pu revenir de vacances dans un court délai pour accepter un emploi et qu’elle n’avait postulé pour aucun emploi pendant ses vacancesNote de bas de page 29. Cela signifie donc que l’appelante n’était pas [traduction] « prête et disposée à travailler, et capable de le faire ».
[58] Je préfère la preuve antérieure de la Commission où elle affirme que l’appelante lui a dit qu’elle ne pouvait pas revenir dans les 24 heures parce que les billets de traversier avaient déjà été achetés et qu’elle ne pouvait pas revenir plus tôt que [les réservations de traversierNote de bas de page 30]. Une recherche rapide sur Google révèle que la distance entre Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard) et Gander (Terre-Neuve-et-Labrador) est de 1 100 kilomètres. Compte tenu des deux traversiers concernés, une fois le voyage commencé, on estime qu’il dure 19 heures et demie. C’est donc un voyage qui prend facilement deux jours. J’estime qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante n’aurait pas été en mesure de rentrer chez elle dans les 24 heures pour accepter un emploi convenable.
[59] J’estime que la Commission a prouvé que l’appelante a sciemment fourni des renseignements faux ou trompeurs lorsqu’elle a répondu « non » aux questions lui demandant si elle avait cessé de travailler pour un employeur (départ volontaire)Note de bas de page 31, et aussi si elle était prête et disposée à travailler et capable de le faire chaque jour, du lundi au vendredi, pendant chaque semaine visée par cette déclaration, alors qu’elle était en vacances pendant une semaine au CanadaNote de bas de page 32.
L’appelante a-t-elle reçu à tort des prestations auxquelles elle n’avait pas droit?
[60] L’appelante a reçu des prestations totalisant 22 889 $Note de bas de page 33.
[61] Le Tribunal a conclu que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations parce qu’elle a quitté volontairement son emploi sans justification. Elle n’avait donc pas droit aux prestations d’assurance-emploi qu’elle a reçues.
[62] Par conséquent, je conclus que l’appelante a bel et bien reçu des prestations auxquelles elle n’avait pas droit.
La Commission a-t-elle agi de façon judiciaire (équitable) lorsqu’elle a imposé une pénalité pécuniaire?
[63] La décision de la Commission d’imposer une pénalité est discrétionnaireNote de bas de page 34. Par conséquent, elle peut imposer une pénalité à une partie prestataire si elle fait des déclarations fausses ou trompeuses.
[64] Je dois examiner comment la Commission a rendu sa décision. Je peux modifier la pénalité seulement si je juge qu’elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon équitable (judiciaire) lorsqu’elle a établi le montant de la pénalitéNote de bas de page 35.
[65] La Commission fait valoir qu’elle s’est acquittée du fardeau d’établir que l’appelante a fait une fausse déclaration lorsqu’elle a omis de déclarer qu’elle avait quitté son emploi en septembre 2021.
[66] La Commission a tenu compte de la situation de l’appelante lorsqu’elle a décidé de lui imposer une pénalité. Elle a examiné ce qui suitNote de bas de page 36 :
- la prestataire a fourni 23 faux renseignements dans ses déclarations;
- le montant net du trop-payé était de 22 889 $;
- il s’agissait d’un premier niveau de violation;
- aucune circonstance atténuante n’a été fournie.
[67] La politique de la Commission est que la pénalité maximale qu’elle impose habituellement pour une première violation est de 50 % du trop-payé. Dans le cas présent, ce serait 11 444,50 $. S’il y a des circonstances atténuantes, la Commission peut également réduire la pénalité davantage, jusqu’à concurrence de 50 % de plus. Dans ce cas, la pénalité pourrait être de 5 722,25 $.
[68] Cependant, la Commission a décidé qu’elle ne donnerait qu’un avertissement à l’appelante puisqu’elle a jugé que c’était la première fois qu’elle avait fait une déclaration inappropriée ou qu’elle avait omis de fournir des renseignements.
[69] Je conclus que la Commission a tenu compte de tous les facteurs pertinents et qu’elle n’a tenu compte d’aucun facteur non pertinent lorsqu’elle a imposé la pénalité pécuniaire. Pour ces motifs, je conclus que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon équitable (judiciaire). Ainsi, le Tribunal ne peut pas ajuster ou annuler la pénalité de l’appelante. La pénalité, une lettre d’avertissement, est donc maintenue.
Conclusion
[70] Je conclus que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi et que la pénalité non pécuniaire est maintenue.
[71] Par conséquent, l’appel est rejeté.