Assurance-emploi (AE)

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Citation : HB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 885

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : H. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (654765) datée du 30 avril 2024 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Jacques Bouchard
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 3 juillet 2024
Personnes présentes à l’audience : H. B.
Date de la décision : Le 15 Juillet 2024
Numéro de dossier : GE-24-1889

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Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. Le Tribunal est d’accord avec l’appelante sur la question du départ volontaire justifié au terme des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi), mais n’a pas prouvé sa disponibilité. Le litige concernant la disponibilité sera traité en deuxième partie, en ce qui a trait aux articles 18, 50 et 9.001 du Règlement.

[2] L’appelante a démontré qu’elle était fondée à quitter son emploi (c’est-à-dire qu’elle avait une raison acceptable selon la loi pour le faire) quand elle l’a fait. L’appelante était fondée à quitter son emploi parce que le départ était la seule solution raisonnable dans son cas. Par conséquent, l’appelante n’est pas exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi sur la question du départ volontaire.

Aperçu

[3] L’appelante a quitté son emploi le 15 février 2021 et a demandé des prestations d’assurance-emploi le 18 avril 2021 après avoir été bénéficiaire de la prestation canadienne d’urgence (PCU). La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de l’appelante pour quitter son emploi. Elle a conclu que cette dernière a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si l’appelante a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme qu’au lieu de quitter son emploi quand elle l’a fait, l’appelante aurait pu demeurer à l’emploi à temps partiel pour Lunch Lady tout en suivant une formation ou jusqu’à ce qu’elle trouve un emploi convenable.

[6] L’appelante n’est pas d’accord et affirme que les conditions de travail étaient insoutenables financièrement. Elle exprime qu’elle a dû quitter parce qu’elle avait des symptômes de COVID-19 et que l’employeur ne pouvait plus lui donner assez d’heures à cause de la pandémie et du ralentissement des activités. L’appelante explique que les heures de travail proposées par l’employeur ne couvraient pas les dépenses relatives à son emploi, tels les frais de déplacement et de garderie. L’appelante précise que l’employeur lui a signifié de demeurer à la maison étant donné la situation sanitaire. L’employeur lui a dit qu’elle serait informée lorsque les activités de l’entreprise reprendront. (GD2-15)

[7] La division générale du Tribunal comprend que l’appelante travaillait dans un secteur d’activité frappé par la pandémie. Pendant la période en litige, les règles sanitaires étaient imposées par les différents gouvernements pour atténuer les dommages causés par la pandémie COVID-19. L’appelante travaillait dans le milieu scolaire dans la préparation de repas, un milieu qui a été obligé de fermer à plusieurs reprises.

[8] L’appelante insiste en audience pour rappeler qu’elle est d’abord demeurée à la maison en retrait préventif, victime des symptômes de la COVID et qu’elle y est ensuite demeurer suivant les instructions de l’employeur, en attendant que les activités reprennent. Entre temps l’appelante s’est inscrite à une formation à temps partiel, à distance dans le domaine de la petite enfance à raison de 15 à 24 heures par semaine, tout en se disant disponible à travailler. Il est à noter que l’employeur n’a jamais été joint par la Commission pour corroborer ou infirmer la déclaration de l’appelante. Le relevé d’emploi en GD03B-21 indique que l’appelante a quitté son emploi. Le relevé d’emploi couvre la dernière période du 10 octobre 2020 au 15 février 2021.

[9] Bien que l’appelante exprime être disponible, ses déclarations électroniques amènent un nouvel éclairage alors qu’elle déclare en GD-03-B-8 et B-10 qu’elle accepterait un emploi conditionnel à terminer son cours. Elle indique que son cours terminait le 9 juillet 2021, et qu’elle investissait à peu près 2 heures par jour. Le certificat attestant sa formation démontre que l’appelante a complété une formation de 180 heures entre avril 2021 et juillet 2021. En audience, elle explique qu’il y a eu confusion puisqu’elle a toujours été disponible à retourner pour son employeur étant donné que sa formation nécessitait à peine 2 heures par jour, soit environ 15 heures par semaine jusqu’au 9 juillet 2021.

L’appelante indique qu’elle était disponible, mais que l’employeur X ne l’a pas rappelé, ce qui n’est pas nié par l’employeur au dossier.

Question en litige

[10] L’appelante est-elle exclue du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[11] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire de l’appelante. Je dois ensuite décider si elle était fondée à quitter son emploi.

Analyse

Les parties sont d’accord sur le fait que l’appelante a quitté volontairement son emploi

[12] J’accepte le fait que l’appelante a quitté volontairement son emploi. L’appelante reconnaît qu’elle a quitté son emploi le 15 février 2021. Je n’ai aucune preuve du contraire.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi

[13] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi quand elle l’a fait.

[14] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 1. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[15] La loi explique ce que veut dire « être fondée à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 2.

[16] L’appelante est responsable de prouver que son départ était fondé. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable.Note de bas de page 3

[17] Pour trancher la question, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand l’appelante a quitté son emploi. La loi énonce des circonstances que je dois prendre en considérationNote de bas de page 4.

[18] Une fois que j’aurai déterminé les circonstances qui s’appliquent à l’appelante, celle-ci devra démontrer qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi à ce moment-làNote de bas de page 5.

Les circonstances présentes quand l’appelante a quitté son emploi

[19] L’appelante affirme que des circonstances énoncées dans la loi s’appliquent à son cas. Plus précisément, il y avait eu une modification importante de ses conditions de rémunération liée à une pandémie comme mentionné plus haut, un nombre d’heures offert par l’employeur qui ne couvre pas les frais de déplacement ou de garderie. (GD3A-21)

[20] À la lumière des faits et des preuves versées au dossier, la déclaration de l’appelante est crédible. Le relevé d’emploi au dossier atteste que les heures travaillées par l’appelante fluctuaient énormément avec des périodes n’indiquant aucune rémunération. Il est plus probable qu’improbable que l’employeur a invité l’employé à demeurer à la maison jusqu’à ce que les activités reprennent. Dans un tel contexte, l’appelante était fondée d’attendre la reprise des activités. Il faut noter que l’employeur n'a pas nié cette entente. L’appelante avait une espérance raisonnable de reprendre son emploi, un emploi qu’elle exerçait depuis le 1er novembre 2019.

[21] Les circonstances qui existaient lorsque l’appelante a quitté son emploi étaient exceptionnelles, dans un contexte pandémique où il y avait plusieurs fermetures d’écoles et de nombreuses restrictions qui ont affecté un grand nombre d’entreprises, dont l’employeur de l’appelante qui était dépendant en partie, des activités scolaires.

L’appelante n’avait pas d’autre solution raisonnable

[22] Je dois maintenant examiner si le départ de l’appelante était la seule solution raisonnable à ce moment-là.

[23] L’appelante affirme que c’était le cas parce que l’employeur ne lui donnait pas assez d’heures pour couvrir ses frais de déplacement et autres dépenses connexes au maintien de son emploi.

[24] La Commission n’est pas d’accord et affirme que l’appelante aurait pu garder son emploi à temps partiel tout en suivant sa formation.

[25] Je conclus que l’appelante a agi comme toute personne raisonnable l’aurait fait dans son cas considérant le caractère exceptionnel de la période en litige, des raisons énoncées plus haut et de l’assurance donnée par l’employeur qu’elle serait rappelée aussitôt que les activités reprendraient.

[26] Toujours dans un contexte pandémique et avec une coupure extrême de ses heures de travail, l’appelante n’avait pas d’autre choix que de quitter au moment où elle l’a fait. Elle avait une assurance raisonnable d’être rappelée. Il faut préciser aussi que la formation se terminait le 9 juillet 2021 et reprenait en octobre 2021.

[27] Compte tenu des circonstances qui existaient quand l’appelante a quitté son emploi, l’appelante n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi, pour les raisons mentionnées précédemment.

[28] Par conséquent, la prestataire était fondée à quitter son emploi.

Disponibilité

[29] La Commission a imposé une inadmissibilité aux termes des articles 18 et 50 de la Loi et de l’article 9.001 du Règlement de l’assurance-emploi parce que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle suivait un cours de formation.

[30] L’appelante était inscrite à une formation au programme de Formation petite enfance et atelier d’informatique, commençant le 19 avril 2021. Sa formation était du lundi au vendredi, matin et après-midi. L’appelante déclare qu’elle n’accepterait pas un travail si ce dernier entrait en conflit avec ses études. De plus, l’appelante a indiqué qu’elle n’avait pas fait de recherche d’emploi depuis le début de sa formation (GD3B-8 à GD3B-11). En fait, l’appelante indique, ‘si un emploi à temps plein se présentait et entrait en conflit avec le programme de formation, elle choisirait la formation au lieu d’accepter l’emploi. (GD3B-23 à GD3B-27)

[31] Les preuves au dossier démontrent que sa priorité était de terminer sa formation et l’appelante n’a pas réussi à réfuter la présomption de non-disponibilité alors qu’elle suivait une formation. Les réponses de l’appelante sont sans équivoque à l’effet qu’elle n’abandonnerait pas sa formation si un emploi proposé entrait en conflit d’horaire. L’appelante en audience, n’a pas contredit ses déclarations faites à la Commission d’assurance-emploi, mais a maintenu qu’elle serait retournée travailler pour Lady Lunch si elle avait été rappelée.

[32] Considérant les faits au dossier et les déclarations de l’appelante, j’estime que l’appelante n’a pas démontré de désir de retourner au travail, d’efforts pour intégrer le marché du travail et qu’elle a établi des conditions qui limiteraient ses chances de trouver un emploi. (Faucher c Canada (PG), A56-96. Les déclarations de l’appelante sont sans équivoque à l’effet qu’elle n’était pas disponible à l’emploi pendant sa formation.

[33] Je conclus que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler pendant qu’elle suivait une formation. Il semble évident que l’appelante avait une espérance raisonnable de réintégrer son emploi le 15 février 2021, au moment où elle a quitté mais qu’à partir du 19 avril 2021, elle n’a pas prouvé sa disponibilité.

[34] Par conséquent, la Division générale du Tribunal souscrit à l’opinion de la Commission concernant l’inadmissibilité imposée aux termes des articles 18 et 50 de la Loi et de l’article 9.001 pour les raisons mentionnées plus haut.

[35] Conclusion : Bien que l’appelante fût fondée de quitter au moment où elle l’a fait, elle n’a pas prouvé sa disponibilité au sens de la Loi.

[36] L’appel est donc rejeté.

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