[TRADUCTION]
Citation : MK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2025 TSS 243
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel
Décision relative à une demande de
permission de faire appel
Partie demanderesse : | M. K. |
Partie défenderesse : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de la division générale datée du 24 février 2025 (GE-25-262) |
Membre du Tribunal : | Pierre Lafontaine |
Date de la décision : | Le 19 mars 2025 |
Numéro de dossier : | AD-25-158 |
Sur cette page
Décision
[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.
Aperçu
[2] La défenderesse (Commission) a conclu que la demanderesse (prestataire) était inadmissible au bénéfice des prestations régulières de l’assurance-emploi du 20 juillet au 16 août 2022 parce qu’elle se trouvait à l’étranger. La Commission a également établi que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle n’était pas disponible pour travailler depuis le 20 février 2022. La Commission a également décidé que la prestataire avait fait des déclarations fausses ou trompeuses en ne déclarant pas qu’elle était à l’étranger. Elle a donc émis un avertissement.
[3] La Commission a maintenu ses décisions initiales après révision. La prestataire a porté les décisions découlant de la révision en appel à la division générale du Tribunal.
[4] La division générale a conclu que la prestataire se trouvait à l’étranger du 20 juillet au 16 août 2022, alors qu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi. Selon la division générale, la prestataire satisfaisait à l’exemption qui permet une absence du Canada d’un maximum de sept jours pour assister à un entretien d’embauche. L’exemption s’appliquait du 4 au 10 août 2022.
[5] La division générale a conclu que la prestataire avait fait de fausses déclarations, et qu’elle les avait faites consciemment. La division générale a jugé que la Commission avait agi de façon judiciaire lorsqu’elle avait émis un avertissement.
[6] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas démontré qu’elle était disponible pour travailler au sens de la loi à compter du 15 février 2022.
[7] La prestataire cherche maintenant à obtenir la permission de porter la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. Elle soutient qu’elle ignorait que les prestations d’assurance-emploi n’étaient pas payables pendant un séjour à l’étranger. Elle n’a rien fait de façon intentionnelle. La prestataire soutient qu’elle était entièrement disponible pour le travail à partir du 15 février 2022 et qu’elle peut aussi montrer les descriptions d’emploi où elle a postulé et qui démontrent qu’elle peut travailler sans restriction de temps. Elle affirme avoir postulé à des emplois correspondant à ses compétences et à son expérience.
[8] Je dois décider si la division générale a commis une erreur susceptible de révision qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.
[9] Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.
Question en litige
[10] La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?
Analyse
[11] La loi précise les seuls moyens d’appel d’une décision de la division généraleNote de bas de page 1. Ces erreurs susceptibles de révision sont les suivantes :
- 1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon ou d’une autre.
- 2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.
- 3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
- 4. La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a rendu sa décision.
[12] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à l’examen sur le fond. Il s’agit d’une première étape que la prestataire doit franchir, mais où le critère juridique est moins exigeant que celui à remplir pour un appel sur le fond. À l’étape de la permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses arguments. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur susceptible de révision. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est possible de soutenir qu’il y a eu erreur susceptible de révision pouvant conférer à l’appel une chance de succès.
[13] Par conséquent, avant d’accorder la permission de faire appel, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés plus haut et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès.
Remarques préliminaires
[14] Il est bien établi que pour trancher la présente demande de permission de faire appel, je dois tenir compte uniquement de la preuve qui a été présentée à la division générale. Un appel devant la division d’appel n’est pas l’occasion de présenter de nouveaux éléments de preuve. Les pouvoirs de la division d’appel sont limités par la loiNote de bas de page 2.
La prestataire soulève-t-elle une erreur susceptible de révision que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?
[15] La prestataire soutient qu’elle ignorait que les prestations d’assurance-emploi n’étaient pas payables pendant un séjour à l’étranger. Elle n’a rien fait de façon intentionnelle. La prestataire soutient qu’elle était entièrement disponible pour le travail à partir du 15 février 2022 et qu’elle peut aussi montrer les descriptions d’emploi où elle a postulé et qui démontrent qu’elle peut travailler sans restriction de temps. Elle affirme avoir postulé à des emplois correspondant à ses compétences et à son expérience.
Séjour à l’étranger
[16] La loi prévoit sans ambiguïté qu’une partie prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour toute période pendant laquelle elle est à l’étrangerNote de bas de page 3, à moins de satisfaire à l’une des exceptions prévues par le Règlement sur l’assurance-emploiNote de bas de page 4.
[17] Personne ne conteste le fait que la prestataire était à l’étranger du 20 juillet au 16 août 2022.
[18] La division générale a conclu que la prestataire satisfaisait à l’exemption qui permet un séjour à l’étranger d’un maximum de sept jours pour assister à une entrevue d’emploi. Son entrevue était prévue le 5 août 2022. La division générale a appliqué l’exemption du 4 au 10 août 2022.
[19] Par conséquent, la division générale a conclu à juste titre que la prestataire n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi pour le reste de son séjour à l’étranger, soit du 20 juillet au 3 août 2022 et du 11 au 16 août 2022, parce qu’aucune autre exemption ne s’applique.
[20] Ce moyen d’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.
Pénalité
[21] La division générale a conclu que la prestataire avait fait de fausses déclarations, et qu’elle les avait faites consciemment. La division générale a conclu que la Commission avait agi de façon judiciaire lorsqu’elle avait émis un avertissement.
[22] La seule exigence posée par le législateur afin d’imposer une pénalité est celle d’avoir fait une déclaration fausse ou trompeuse sciemment, c’est-à-dire en toute connaissance de cause. L’absence d’intention de frauder n’est donc d’aucune pertinenceNote de bas de page 5.
[23] Après avoir examiné la preuve et le témoignage de la prestataire, la division générale a conclu que la prestataire avait sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses en indiquant dans ses déclarations qu’elle n’était pas à l’étranger.
[24] Il y a renversement du fardeau de la preuve à partir du moment où une partie prestataire donne une réponse inexacte à une question très simple sur une déclaration. Dans la présente affaire, la question à laquelle la prestataire devait répondre était très simple : « Étiez-vous à l’extérieur du Canada entre le lundi et le vendredi pendant la période visée par cette déclarationNote de bas de page 6? »
[25] Par conséquent, il appartenait à la prestataire d’expliquer pourquoi elle a donné des réponses inexactes. Elle devait prouver qu’elle ne savait pas que ses réponses étaient inexactes.
[26] Comme le montre la décision de la division générale, celle-ci n’a manifestement pas accordé beaucoup de valeur ou de crédibilité au récit de la prestataire selon lequel elle avait rempli ses déclarations sur son téléphone portable et croyait avoir répondu « oui » à la question. Les déclarations pour la période allant du 10 juillet 2022 au 20 août 2022 indiquent qu’elle a répondu par la négative à trois reprises. La division générale n’a pas jugé probable que ce genre d’erreur se soit produite à trois reprises. Elle a donc estimé que la prestataire avait une connaissance subjective du fait que les renseignements qu’elle fournissait étaient faux ou trompeurs.
[27] Je juge que la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision en rejetant l’explication de la prestataire et en concluant que celle-ci avait agi en toute connaissance de cause parce qu’elle savait qu’elle se trouvait à l’étranger pendant les périodes pertinentes. La décision est fondée sur la preuve et est conforme à la loi et à la jurisprudence sur la question de la pénalité.
[28] Ce moyen d’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.
Disponibilité
[29] Pour être admissible aux prestations, une partie prestataire doit prouver qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, quel que soit le jour ouvrable, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 7.
[30] On établit la disponibilité en analysant trois facteurs :
- le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert;
- l’expression de ce désir par des efforts pour trouver un emploi convenable;
- le non-établissement de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 8.
[31] De plus, la disponibilité est établie pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel la partie prestataire peut prouver qu’elle est capable de travailler et disponible à cette fin, mais incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 9.
[32] La prestataire soutient qu’elle était entièrement disponible à partir du 15 février 2022 et qu’elle peut aussi montrer les descriptions d’emploi où elle a postulé et qui démontrent qu’elle peut travailler sans restriction de temps. Elle affirme avoir postulé à des emplois correspondant à ses compétences et à son expérience.
[33] La division générale a reconnu que pour trouver des emplois à postuler, la prestataire a dû évaluer les possibilités d’emploi. La division générale a constaté que la prestataire avait fait des démarches pour trouver du travail après avoir quitté son emploi précédent. Cependant, aucune demande d’emploi n’a été présentée après la fin de l’année scolaire de ses enfants en juin, jusqu’au 11 novembre 2022. Selon la division générale, les démarches de recherche d’emploi de la prestataire ont été sporadiques. La division générale a conclu que les démarches de la prestataire n’étaient pas suffisantes pour satisfaire au deuxième facteur du critère de la décision Faucher.
[34] Pour être admissible à des prestations, une partie prestataire doit établir sa disponibilité pour travailler et, pour ce faire, elle doit se chercher activement un emploi. La partie prestataire doit établir sa disponibilité pour le travail pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations et cette disponibilité ne doit pas être indûment limitée.
[35] La preuve appuie la conclusion de la division générale selon laquelle la prestataire n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler, mais incapable de trouver un emploi convenable. Une simple déclaration de disponibilité de la part de la prestataire ne suffit pas pour lui permettre de s’acquitter du fardeau de la preuve. Devant la division générale, la prestataire ne s’est pas acquittée de la charge de la preuve qui lui incombait.
[36] Il me faut rappeler que le rôle de la division d’appel n’est pas de soupeser à nouveau la preuve et d’annuler la décision de la division générale. La division d’appel n’a pas compétence pour modifier les conclusions de fait de la division générale lorsque cette dernière ne les a pas tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 10.
[37] Je ne vois aucune erreur susceptible de révision que la division générale aurait commise. La prestataire ne satisfait pas aux critères pertinents pour établir sa disponibilité au sens de la loi.
Conclusion
[38] Après avoir examiné le dossier d’appel et la décision de la division générale ainsi que les arguments de la prestataire à l’appui de sa demande de permission de faire appel, je n’ai d’autre choix que de conclure que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.
[39] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.