[TRADUCTION]
Citation : FM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2024 TSS 1723
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi
Décision
Partie appelante : | F. M. |
Représentante ou représentant : | H. M. |
Partie intimée : | Commission de l’assurance-emploi du Canada |
Décision portée en appel : | Décision de révision (657258) rendue le 17 avril 2024 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Edward Houlihan |
Mode d’audience : | Vidéoconférence |
Date de l’audience : | Le 10 septembre 2024 |
Personnes présentes à l’audience : | Appelante Représentant de l’appelante |
Date de la décision : | Le 23 septembre 2024 |
Numéro de dossier : | GE-24-1849 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.
[2] Elle n’a pas démontré qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations. Autrement dit, elle n’a pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, on ne peut pas traiter sa demandeNote de bas de page 1 comme si elle l’avait présentée plus tôt.
Aperçu
[3] L’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi le 23 septembre 2023. Elle veut maintenant que la demande soit traitée comme si elle l’avait présentée plus tôt, soit le 22 mai 2022. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a déjà rejeté cette requête.
[4] Je dois décider si l’appelante a prouvé qu’elle avait un motif valable de retarder sa demande de prestations.
[5] Selon la Commission, l’appelante n’avait pas de motif valable parce qu’elle n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans la même situation. Elle n’a fait aucun effort pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la Loi.
[6] La Commission dit que l’appelante n’aurait pas dû présumer que son employeur s’occuperait de ses prestations d’assurance-emploi pendant son congé de maternité et son congé parental.
[7] L’appelante n’est pas d’accord.
[8] Elle dit que son employeur était le gouvernement du Canada et qu’elle travaillait et vivait à l’étranger.
[9] Elle explique qu’elle ne savait pas qu’elle devait demander des prestations d’assurance-emploi quand elle est partie en congé de maternité, puis en congé parental. Elle dit qu’en plus des prestations d’assurance-emploi, elle recevait des prestations de son employeur (suppléments).
[10] Elle affirme que, comme elle se trouvait à l’étranger, elle s’est fiée aux renseignements que lui donnait son employeur. Elle souligne qu’avoir un enfant dans un pays étranger était plus difficile. Elle ne pouvait pas voir sa famille ni ses camarades, alors il lui manquait des renseignements essentiels.
Questions que je dois examiner en premier
La Commission a fait des erreurs
[11] La première erreur est survenue après que l’appelante a demandé des prestations. Le 4 janvier 2024, la Commission lui a envoyé un avis pour lui dire qu’elle rejetait sa demande. Elle lui expliquait qu’elle n’avait accumulé aucune heure d’emploi assurable du 25 septembre 2022 au 23 septembre 2023.
[12] L’avis aurait dû indiquer que l’appelante n’avait pas démontré qu’un motif valable permettait d’avancer la date de sa demande au 22 mai 2022.
[13] La deuxième erreur s’est produite quand la Commission a rejeté la demande de révision présentée par l’appelante pour changer la date de sa demande de prestations. L’avis indique que la décision initiale, soit le rejet de sa demande, a été rendue le 20 novembre 2023. En fait, la décision initiale a été rendue le 4 janvier 2024.
[14] Selon la jurisprudence, une erreur qui ne cause aucun préjudice à l’appelante n’annule pas nécessairement la décision portée en appelNote de bas de page 2.
[15] La Commission a fait la première erreur parce qu’elle a mal compris ce que l’appelante voulait obtenir. Elle s’est ensuite penchée sur la bonne question, soit l’antidatation de la demande de prestations de l’appelante.
[16] On a informé l’appelante de la décision. Elle a donc pu en demander la révision assez rapidement.
[17] La deuxième erreur de la Commission est une erreur d’écriture. Elle a inscrit la mauvaise date au moment d’indiquer quand la décision initiale a été prise. L’appelante a tout de même pu comprendre le résultat de sa demande de révision et en faire appel dans les délais prescrits.
[18] Selon l’avocat de l’appelante, l’affaire Desrosiers ne s’applique pas dans la présente affaire. Il dit que la différence est que l’appelant dans l’affaire Desrosiers n’a pas subi de préjudice tandis que l’appelante dans la présente affaire a subi un préjudice important.
[19] Il décrit le préjudice ainsi : comme on a refusé de donner des prestations d’assurance-emploi à l’appelante, son employeur récupère les suppléments qu’elle a reçus pendant son congé de maternité et son congé parental.
[20] Je ne suis pas d’accord. La question du préjudice se rapporte à la demande de prestations de l’appelante. Les erreurs d’écriture n’entraînent pas l’annulation automatique de la décision portée en appel. Il n’est pas question des répercussions subies par l’appelante quand on lui a refusé les prestations.
[21] Je juge que les erreurs de la Commission n’ont pas empêché l’appelante de suivre le processus de demande de prestations. Elle a été capable de comprendre les décisions et de faire ses démarches dans les délais.
Question en litige
[22] Peut-on traiter la demande de prestations comme si l’appelante l’avait présentée le 22 mai 2022? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande (en avancer la date).
Analyse
[23] Pour faire avancer la date d’une demande de prestations, il faut prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 3 :
- a) Un motif valable justifiait le retard durant toute la période du retard. Autrement dit, il y a une explication qui est acceptable selon la loi.
- b) À la date antérieure (c’est-à-dire la date à laquelle on veut faire avancer la demande), on remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations.
[24] Dans cette affaire-ci, les principaux arguments portent sur la question de savoir si l’appelante avait un motif valable. Je vais donc commencer par là.
[25] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, l’appelante doit prouver qu’elle a agi comme une personne prudente et raisonnable l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 4. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle s’est comportée de façon prudente et raisonnable, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait dans pareille situation.
[26] L’appelante doit démontrer qu’elle a agi ainsi pendant toute la période du retardNote de bas de page 5. Cette période s’étend de la date à laquelle elle veut faire antidater sa demande jusqu’à la date où elle a présenté sa demande. Pour l’appelante, la période du retard va donc du 22 mai 2022 au 23 septembre 2023.
[27] L’appelante doit aussi démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et ses obligations aux termes de la loiNote de bas de page 6. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle a fait de son mieux pour essayer de se renseigner dès que possible sur ses droits et ses responsabilités. Si l’appelante n’a pas fait de telles démarches, elle doit démontrer que c’est en raison de circonstances exceptionnellesNote de bas de page 7.
[28] L’appelante doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire qu’elle doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’un motif valable justifiait son retard.
[29] Selon l’appelante, un motif valable justifiait son retard. Elle affirme qu’elle ne comprenait rien à l’assurance-emploi et n’avait jamais eu affaire à l’assurance-emploi.
[30] Elle dit qu’elle recevait des suppléments pendant son congé de maternité et son congé parental. Elle ignorait qu’elle devait aussi demander des prestations d’assurance-emploi pour ces congés-là.
[31] Personne ne lui a dit qu’elle devait faire une demande. Elle pensait que son employeur s’occuperait de tout.
[32] Elle dit avoir appris qu’elle devait demander des prestations d’assurance-emploi seulement à son retour au travail, quand son employeur lui a demandé ses relevés de prestations d’assurance-emploi.
[33] L’appelante ajoute que des circonstances particulières justifiaient son retard. Elle travaillait dans un pays étranger et l’accouchement a été difficile. Elle dit qu’en tant que personnes d’un certain âge qui devenaient parents pour la première fois, son époux et elle devaient composer avec tous les problèmes liés au fait de donner naissance dans un pays étranger.
[34] Elle dit que ni sa famille, ni ses amies et amis ni ses collègues n’étaient là pour l’aider à s’informer sur les prestations d’assurance-emploi.
[35] Selon la Commission, l’appelante n’a pas démontré qu’un motif valable justifiait son retard. Elle affirme que l’appelante n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans sa situation. Elle n’a fait aucun effort pour s’informer de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi.
[36] La Commission dit que l’appelante a supposé que ses prestations d’assurance-emploi et les suppléments versés par son employeur faisaient partie du même processus et que son employeur allait s’en occuper pour elle. Pendant toute la période du retard, elle n’a rien fait pour s’assurer que c’était bien le cas.
[37] La Commission affirme que l’appelante s’est fiée à des suppositions mal fondées et qu’elle n’a pas vérifié assez rapidement les étapes à suivre pour demander des prestations.
[38] Selon la Commission, l’appelante aurait dû savoir qu’elle devait demander des prestations d’assurance-emploi. Elle souligne que cette information était dans les courriels que son employeur lui a envoyés à compter de février 2022. L’employeur lui a demandé de fournir une preuve de son admissibilité aux prestations de Service Canada.
[39] La Commission ajoute que l’employeur a contacté l’appelante le 26 juillet 2023 pour lui demander ses relevés d’assurance-emploi. Malgré cela, l’appelante a attendu encore deux mois avant de demander des prestations.
[40] La Commission affirme que le retard découle de la négligence et de l’insouciance dont a fait preuve l’appelante. Aucun motif valable ne justifie l’entièreté de son retard.
[41] Je conclus que l’appelante n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations.
[42] L’appelante a accouché pendant qu’elle se trouvait à l’étranger pour le travail. Son bébé est né le X mai 2022. L’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi le 23 septembre 2023.
[43] L’appelante affirme que ni elle ni son époux n’avaient eu recours à l’assurance-emploi ou suivi le processus de demande de prestations auparavant. Leur erreur n’était pas délibérée.
[44] Malheureusement, les décisions de jurisprudence disent que l’ignorance de la loi, même si elle est de bonne foi, ne constitue pas un motif valable qui justifie le retardNote de bas de page 8.
[45] En plus des prestations d’assurance-emploi, l’appelante a reçu de l’argent (un supplément) de son employeur. Comme son employeur était le gouvernement du Canada, elle pensait que, dans son cas, tout cela était regroupé dans un seul processusNote de bas de page 9.
[46] Elle dit qu’elle ignorait qu’elle devait présenter une demande de prestations avant juillet 2023, quand son employeur lui a demandé ses relevés d’assurance-emploi pour les comparer aux versements du supplémentNote de bas de page 10.
[47] Elle explique qu’elle a finalement compris qu’elle devait demander des prestations, ce qu’elle a fait le 23 septembre 2023.
[48] Elle raconte que, depuis, son ministère a mis à jour les instructions qui expliquent au personnel comment demander un congé de maternité et un congé parental et qu’il y a un volet sur les demandes de prestations. Elle dit que si elle avait eu les nouvelles instructions, elle ne pense pas qu’elle serait aujourd’hui dans cette situation.
[49] Je juge que l’appelante n’a pas agi comme une personne raisonnablement prudente l’aurait fait dans la même situation.
[50] Rien ne prouve que l’employeur ou qui que ce soit d’autre a donné à l’appelante les mauvais renseignements. En fait, dans un courriel que l’employeur a envoyé à l’appelante le 25 mai 2022, il y a des instructions à suivre ainsi qu’un document à remplir et à retourner pour l’assurance-emploiNote de bas de page 11.
[51] L’employeur explique que l’appelante recevrait sa preuve d’admissibilité aux prestations de maternité et aux prestations parentales de l’assurance-emploi quand elle présenterait une demande de prestations de maternité et de prestations parentalesNote de bas de page 12.
[52] La preuve de l’appelante montre qu’elle n’a rien fait au sujet du document d’assurance-emploi mentionné à ce moment-là par l’employeur. Elle a dit qu’elle pensait qu’on lui en reparlerait quand ce serait nécessaire.
[53] L’appelante avait aussi droit à un supplément versé par son employeur pendant son congé de maternité et son congé parental. Ce dernier lui versait cet argent en complément des prestations d’assurance-emploi. C’est ce que prévoit sa convention collectiveNote de bas de page 13.
[54] Les suppléments versés par l’employeur dépendaient de la somme des prestations d’assurance-emploi qu’elle recevrait. L’employeur comblait la différence entre les prestations d’assurance-emploi et 93 % de son salaire hebdomadaireNote de bas de page 14.
[55] L’appelante n’a reçu aucune prestation d’assurance-emploi pendant son congé de maternité et son congé parental. Elle a seulement reçu les suppléments versés par son employeur.
[56] D’après la preuve de l’appelante, elle n’avait pas remarqué qu’elle ne touchait pas 93 % de sa rémunération hebdomadaire, soit la somme qu’elle avait le droit de recevoir aux termes de sa convention collective.
[57] L’appelante explique qu’elle a supposé qu’à titre d’employée du gouvernement du Canada qui travaillait à l’étranger, son employeur s’occuperait de tout ce qui touche au congé de maternité et au congé parental, y compris la demande de prestations d’assurance-emploi. Ce serait un processus uniqueNote de bas de page 15.
[58] Mais elle n’a jamais fait de démarches pour confirmer auprès de son employeur que c’était bien le cas. Elle ne s’est pas non plus renseignée auprès de Service Canada pour connaître ses droits et ses obligations aux termes de la Loi.
[59] Les décisions de jurisprudence disent qu’on a l’obligation de vérifier assez rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la LoiNote de bas de page 16.
[60] Elles précisent aussi que le fait de se fier à des renseignements non vérifiés ou à des rumeurs non fondées ne constitue pas un motif valableNote de bas de page 17.
[61] Le 26 juillet 2023, l’employeur a demandé à l’appelante de lui fournir ses relevés d’assurance-emploiNote de bas de page 18. L’appelante a attendu deux mois, soit jusqu’au 23 septembre 2023, pour faire sa demande de prestations.
[62] Un tel comportement ressemble plus à de l’insouciance ou à de la négligence de la part de l’appelante. Cela ne démontre pas l’existence d’un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pour toute la durée du retard.
Circonstances exceptionnelles
[63] Je juge qu’aucune circonstance exceptionnelle n’a empêché l’appelante de présenter sa demande de prestations durant la période de retard de 16 mois.
[64] Selon les décisions de jurisprudence, on peut faire antidater sa demande de prestations si l’on peut expliquer qu’on n’a pas vérifié assez rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la Loi en raison de circonstances exceptionnellesNote de bas de page 19.
[65] La Cour n’a pas défini avec précision les circonstances exceptionnelles en question, mais elle a donné des indications.
[66] Une circonstance exceptionnelle serait une situation qui empêcherait une personne de demander des prestations ou qui compliquerait de façon exceptionnelle la présentation de sa demande dès le départ comparativement à plus tardNote de bas de page 20.
[67] L’appelante raconte qu’elle et son époux vivaient et travaillaient à l’étranger. Elle explique que l’accouchement a été difficile et a nécessité une chirurgie. Ce sont des parents d’un certain âge, et c’était leur premier enfant.
[68] Elle explique qu’il est particulièrement compliqué d’avoir un enfant à l’étranger et de remplir les exigences là-bas dans une langue étrangère. Il a été très difficile de déclarer la naissance de leur enfant et de lui faire faire un passeport canadien.
[69] Elle dit qu’échanger avec son employeur et suivre ses démarches étaient laborieux. Elle présente l’exemple suivant : il leur a fallu payer tous les frais médicaux, puis les réclamer à leur employeur.
[70] Elle dit que les échanges avec son propre service des ressources humaines ont été compliqués du début à la fin. Les bureaux des ressources humaines se trouvaient au Canada et, selon elle, leur personnel était peu réceptif.
[71] L’appelante précise que le décalage horaire et les mesures de sécurité au travail ont beaucoup compliqué la communication avec les Ressources humaines et, par la suite, avec Service Canada.
[72] Elle ajoute que, comme elle se trouvait à l’étranger, elle ne pouvait pas compter sur le soutien ou la présence de sa famille, de ses camarades ou de ses collègues, qui auraient pu l’aider à régler les problèmes liés aux prestations d’assurance-emploi.
[73] Selon le témoignage de l’appelante, elle était tellement occupée qu’elle n’avait pas le temps de voir à ses affaires personnelles.
[74] Je comprends qu’il y a des défis à relever quand on a un premier enfant et peut-être même davantage quand on se trouve à l’étranger.
[75] Mais aucun problème, aucune difficulté n’empêchait l’appelante de demander des prestations. Rien de semblable ne compliquait de façon exceptionnelle la présentation d’une demande de prestations dès le départ comparativement à plus tard.
[76] Même si l’appelante était à l’étranger et vivait dans un autre fuseau horaire, elle pouvait tout de même accéder au site Web de Service Canada et composer un numéro sans frais pour s’informer de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi.
[77] L’appelante affirme que ses proches n’étaient pas là pour l’aider à régler les problèmes liés aux prestations d’assurance-emploi. Ses proches auraient peut-être pu l’aider.
[78] Mais elle a quand même le devoir de s’informer au sujet de ses droits et de ses obligations et de connaître les étapes à suivre pour s’assurer de toucher des prestationsNote de bas de page 21. Elle n’a fait aucun effort pour vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la Loi.
[79] Pour appuyer l’appel de l’appelante, son avocat a cité une affaire jugée par le Tribunal, qui a rendu une décision que je devrais suivreNote de bas de page 22.
[80] Les décisions du Tribunal ne sont pas d’application obligatoire. En d’autres termes, je ne suis pas obligé de les suivre. Elles peuvent toutefois m’être utiles.
[81] Dans ce cas-ci, je juge que la décision est peu utile et je ne la suivrai pas.
[82] Dans cette affaire, un jeune Autochtone a voulu faire avancer la date de sa demande de prestations d’assurance-emploi d’un peu plus d’un an.
[83] Le Tribunal a conclu que le fait que l’appelant était un Autochtone qui a grandi sur une réserve, qui interagissait rarement avec les organismes gouvernementaux et qui était inquiet à l’idée d’avoir affaire à de tels organismes a engendré une situation unique qui a été jugée exceptionnelle.
[84] De telles circonstances exceptionnelles ont été considérées comme un motif valable qui justifiait le retard de la demande de prestations.
[85] Les faits du présent appel sont très différents de l’affaire portée à ma connaissance. Dans la présente affaire, l’appelante est une personne plus mature qui travaille pour le gouvernement. Rien ne démontre qu’elle était inquiète à l’idée de s’adresser à des organismes gouvernementaux.
[86] Rien ne prouve non plus que son parcours de vie constituait une situation unique qui l’empêchait de présenter sa demande de prestations à temps.
Équité de la procédure
[87] L’appelante affirme que la Commission n’a pas tenu compte de ses circonstances atténuantes et que le refus d’avancer la date de sa demande de prestations est le résultat d’une procédure inéquitableNote de bas de page 23.
[88] J’ai examiné la situation de l’appelante ci-dessus. J’ai conclu qu’aucune circonstance exceptionnelle ne justifiait le retard de sa demande.
[89] L’avocat de l’appelante affirme que les échanges de cette dernière avec la Commission démontrent un manque d’équité procédurale.
[90] Il dit qu’après que l’appelante a présenté sa demande de prestations, une personne de la Commission a dit que sa demande serait accueillie. Mais on a modifié la décision, puis on lui a fait parvenir un avis de refus.
[91] Selon l’avocat, la Commission aurait dû demander plus de renseignements s’il n’y en avait pas assez pour appuyer sa demande. Si l’appelante avait eu l’occasion d’expliquer plus en détail la situation, il croit que la décision aurait été différente.
[92] Je juge que la procédure suivie par la Commission était équitable et conforme aux exigences de la loi. Il y a eu des erreurs d’écriture, comme je l’ai mentionné plus haut, mais la Commission a suivi les bonnes étapes.
[93] L’appelante a eu l’occasion d’expliquer sa situation. Elle a pu demander une révision et expliquer pourquoi elle n’était pas d’accord avec la décision de la Commission. La Commission a communiqué avec elle et lui a donné l’occasion de clarifier sa positionNote de bas de page 24.
[94] L’appelante a eu toutes les chances d’expliquer sa situation et de convaincre la Commission.
Autres observations
[95] L’appelante explique que le refus d’avancer la date de sa demande de prestations lui a causé, à elle et à sa famille, de grosses difficultés financières. Son employeur récupère graduellement les suppléments qu’il lui a versés pendant son congé de maternité et son congé parental.
[96] Elle ajoute qu’elle a maintenant de graves problèmes de santé.
[97] Je peux compatir avec l’appelante quant aux conséquences financières de la décision de ne pas avancer la date de sa demande. Le stress causé par de graves problèmes de santé peut venir empirer une telle situation.
[98] Cependant, je ne peux pas réécrire la loi ni l’interpréter d’une manière qui est contraire à son sens ordinaireNote de bas de page 25.
[99] Il n’est pas nécessaire de vérifier si, à la date antérieure, l’appelante remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations. Sans motif valable, on ne peut pas traiter sa demande comme si elle l’avait présentée plus tôt.
Conclusion
[100] L’appelante n’a pas prouvé qu’un motif valable justifiait le retard de sa demande de prestations pendant tout le retard.
[101] L’appel est rejeté.